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Malgré l’adoption d’un code électoral consensuel au Sénégal en 1992 à la suite d’un long bras de fer entre le pouvoir et l’opposition, le problème du mandat présidentiel est toujours d’actualité.
Aujourd’hui, après le long et harassant procès de l’ancien ministre Karim Wade, dont le père voulait s’offrir un troisième mandat, c’est maintenant la réduction ou non du mandat du président Macky Sall qui alimente le débat politique, voire politicien du Sénégal. Ce débat stérile pourrait avoir un impact négatif sur la vie économique du pays dans la mesure où les investisseurs qui financent une bonne partie du plan Sénégal émergent (PSE) n’aiment pas s’aventurer dans les pays ou règne l’incertitude; car personne ne peut dire quelle est la date exacte de la prochaine présidentielle au Sénégal. Le président Macky Sall aurait dû régler les problèmes institutionnels au début de son mandat.
Ce qui est inquiétant, c’est le fait que l’initiative de l’agitation vient des plus proches collaborateurs du président Sall qui demandent tout simplement à leur leader de renier sa parole, revenant ainsi sur sa promesse de réduire son mandat de sept à cinq ans. Or, cette promesse qui avait été faite pendant la campagne présidentielle de 2012, entre les deux tours n’était qu’un point, certes important, des conclusions des Assisses Nationales qu’il avait promis d’appliquer, une fois élu. Les Sénégalais ont voté pour lui car il devait donner des gages, étant donné qu’il fut pendant neuf ans l’un des plus fidèles serviteurs de l’ex président Abdoulaye Wade rejeté par les populations à cause de sa mal gouvernance et son intention de transmettre le pouvoir à son fils, aujourd’hui en prison. Les partisans qui l’incitent à se dédire ne mesurent pas la gravité de leur acte.
La contestation ne date pas d’aujourd’hui. Maitre Alioune Badara Cissé son ex ministre des Affaires étrangères a été le premier à déclarer : « Le mandat de sept ans du président Macky Sall est celui du peuple. Il a été bien élu pour sept ans[1] ». D’autres, comme Moustapha Cissé Lô lui avaient emboité le pas. Mais aujourd’hui c’est un autre membre de son gouvernement, de surcroit son porte parole qui déclare, au cours d’un meeting tenu à Fatick, son fief politique et royaume d’enfance. « À part la valeur démocratique en termes de symbolisme, je ne vois pas ce que la réduction du mandat peut apporter au Sénégal et aux sénégalais [2]». On est sidéré devant une telle déclaration qui met en doute le leadership du Président vis-à-vis de ses collaborateurs qui prennent le contre pied de sa position sur cette question, plusieurs fois réaffirmée, même à l’étranger. En fait, il y a dans la classe politique sénégalaise des hommes qui ne soucient que de leurs intérêts personnels. Les problèmes de morale, d’éthique, et d’honneur n’ont aucune importance pour eux. Ceux qui, dans le camp du président, tiennent de tels propos, ne pensent en réalité qu’aux deux années qu’ils pourraient perdre en cas de défaite de leur leader si la présidentielle a lieu en 2017. Ils n’ont confiance, ni en eux, ni surtout en leur candidat, pour remporter cette compétition en 2017.
D’aucuns pensent d’ailleurs que le Président Sall pourrait être à la base de l’agitation de ses partisans si on lie leur comportement à la déclaration qu’il a faite au cours de la conférence de presse tenue à Kaffrine à la fin de sa tournée où il déclarait : « les gens de mon camp sont libres d’avoir une opinion. Moi j’ai ma volonté, mais il faut que je respecte celles de mes partisans[3] ». Pourtant selon le QUOTIDIEN, il a déclaré au cours son échange avec le journal : « Je ne renie pas ma parole. Tout membre du parti qui s’opposerait à la ligne indiquée s’exposerait à des sanctions[4] ». Ces deux déclarations faites à quelques jours d’intervalle sont contradictoires. A quel Macky faut-il se fier ?
Heureusement pour lui que tous ce qui l’entourent ne pensent pas comme les contestataires. Abou Abel Thiam un de ses compagnons de lutte s’est prononcé en déclarant : « Théoriser le reniement de la parole donnée, c’est fragiliser le président Sall, l’exposer à des attaques qui vont polluer son bilan[5]». Et Samba Diouldé Thiam[6], un de ses alliés a produit lui aussi un texte très lucide dans lequel il fustige ceux qui veulent entraîner le président à commettre un parjure politique comme son prédécesseur Abdoulaye Wade.
Un de mes articles publié dans le journal Wal Fadjri, il y a un an s’intitulait : ‘’Le président Macky Sall va-t-il adopter la même posture que son prédécesseur Abdoulaye Wade ? Je constate, malheureusement, que la rupture qu’attendait le peuple sénégalais tarde à se réaliser, surtout sur le plan des valeurs. Le Président Sall qui avait condamné la transhumance avant la présidentielle de 2012 à Walf TV en ces termes : « On ne peut pas continuer à faire la transhumance telle qu’elle se pratique aujourd’hui, parce qu’il faut mettre de l’éthique dans tout cela. Il faut que les gens reviennent aux valeurs ». Or, le président Sall toujours à Kaffrine, lors de sa conférence de presse, a fait l’apologie de cette transhumance en disant : « Comment voulez-vous maintenir votre majorité, si vous ne pêchez pas dans le camp adverse. C’est un jeu de vases communicants qui est tout à fait normal en politique.».
L’obsession pour un second mandat de l’actuel président, propre à tous les régimes présidentiels, en particulier ceux d’Afrique où le pouvoir est un véritable lieu de jouissance, m’avait amené à proposer un mandat unique pour le président de la république à défaut d’un régime parlementaire plus démocratique et plus équilibré au niveau des trois pouvoirs que sont : le parlement, le gouvernement et le judicaire ; car dans un tel régime qui fait aujourd’hui les meilleurs résultats, selon les statistiques de la Banque Mondiale et du FMI le Président de la République joue un rôle d’arbitre entre les institutions.
Ce mandat unique pourrait durer sept ou même six ans comme au Mexique et aux Philippines. Il faut souligner qu’un mandat de sept ans équivaut à deux mandats présidentiels aux Etats-Unis, au Nigeria et au Ghana moins un an. L’avantage d’un tel système est que le président élu va pouvoir travailler sereinement, sans subir des pressions de toutes sortes comme ce qui se passe en ce moment au Sénégal et ailleurs. Et en sept ans, on doit pouvoir réaliser de grands projets avant de laisser la place à un autre ; Le développement étant un processus qui ne peut reposer seulement sur les épaules fragiles d’une seule personne, quel que soit son génie. Des dirigeants politiques et des membres de la société civile à travers les médias se sont prononcés positivement sur la proposition.
L’article m’avait été inspiré par la déclaration qui a eu lieu aux Etats-Unis en septembre 2012 par le président Macky Sall nouvellement élu en mars de la même année, faite devant ses militants. Alors qu’il n’avait pas encore bouclé un semestre de gouvernance, il déclara : « Ce septennat est révolu c’est le temps des rois et des empereurs. Dans une démocratie le mandat doit être réduit. J’espère qu’au terme de ce quinquennat, les Sénégalais me feront à nouveau confiance pour présider aux destinées de notre pays ». C’est ce jour là où le président Macky Sall a débuté sa campagne électorale pour un second mandat. Toutes ses tournés qualifiés d’économique et les nombreux voyages à l’extérieure – bientôt il va battre le record de ses prédécesseurs pour les voyages qui coûtent cher à l’Etat – sont en grande partie une campagne électorale déguisée.
En réalité, un Président de la République du Sénégal surtout depuis la gouvernance de l’ex-président Abdoulaye Wade se comporte comme un roi ou empereur. Il peut se réveiller le matin, prendre son avion et aller où il veut dans le monde sans en informer une quelconque institution. Il peut seul prendre la décision d’engager l’armée nationale dans une guerre qui ne concerne pas son pays ; effacer les milliards d’impôts d’une société ou d’un individu ; accorder des avantages financiers à qui il veut ; s’octroyer une dizaine de milliards qui ne peuvent faire l’objet d’aucun contrôle. Tout cela sous prétexte qu’il est élu par le peuple. Comme si les députés au nombre de plus de cent ne sont pas eux aussi élus par le même suffrage universel. C’est une des raisons pour lesquelles notre pays accédera difficilement à l’émergence.
Abdoul Aziz Diagne, membre des assises nationales, du M23 et de la Confédération Démocratique pour le Socialisme.
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