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dimanche, 27 avril 2014 00:00

Merry Bey, écrivain sénégalo-vietnamien : «J’ai une affection pour Wade le Machiavel»

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Elle est passionnée par le monde de la communication en général, elle est animatrice télévision et présentatrice de l’émission Hi ! Tech qui passe sur la 2Stv. Merry Bey, championne du monde (2006) de vovinam viet vo dao, un art martial vietnamien, après avoir été sacrée championne d’Afrique, a sorti un recueil de poèmes intitulé Le train de la vie. Une œuvre qui se présente comme un mixage entre la poésie classique et le slam. Elle l’a présenté hier au Café Presse à Dakar. Mais avant de rendre officielle sa publication, le jeune auteur a volontiers accepté de se confier au journal Le Quotidien. Sans tabou.

Quelle philosophie incarne l’émission Hi ! Tech que vous animez ?

Hi !Tech est une émission qui parle des technologies d’ici et d’ailleurs. L’innovation est que nous rapportons tout ce qui se fait dans le domaine de la technologie ici à Dakar parce que cela n’a pas beaucoup été mis en exergue. Donc aujourd’hui, nous avons donné une occasion à tous ces férus de la technologie de montrer ce qu’ils savent faire sur le plan national. Nous avons aussi constaté que l’Etat cherche à se moderniser en utilisant des moyens de la technologie mis à leur disposition et nous avons jugé bon de les accompagner. Dans l’émission, nous avons une rubrique de la semaine qui consiste à poser une question que se pose l’utilisateur lambda, qu’il soit profane ou dans le domaine et après, nous terminons avec les actualités internationales. Donc, on essaie de faire quelque chose d’assez général tout en ciblant des particularités. 

Cela fait combien de temps que vous faites cette émission ? Y a-t-il des retours ?
Cela fait un an puisqu’entre-temps, nous le faisions sur la Tfm, mais nous avons marqué une pause et là, nous reprenons. Bien sûr qu’il y a des retours parce que lorsque nous avons marqué la pause, plein de passionnés nous avaient interpellée et nous constatons qu’aujourd’hui, cela attire de plus en plus l’attention. Cela fait du bien de savoir que les téléspectateurs suivent cette émission. 

Parlez-nous à présent  du recueil de poèmes intitulé Le train de la vie que vous avez sorti tout récemment… 
Ce recueil, c’est un rêve d’enfant qui se réalise parce depuis que j’étais petite, j’étais passionnée par le monde de la littérature et de l’écriture. J’écris depuis que j’avais huit ans. Donc ce recueil, c’est un pan de ma vie, de la vie de mes proches et de mes amis qui m’entourent. J’ai tenu à le publier parce que c’est ma façon de leur rendre hommage. Toutes ces personnes ont fait entrer du bonheur dans ma vie et c’est ma manière de les remercier.  J’ai choisi un titre métaphorique parce que pour moi, la vie est un train et dans ce train, on a des compartiments que sont les wagons. Alors, chaque wagon a sa particularité. C’est l’image que j’ai transportée dans cet ouvrage. Alors, dans ce train, nous trouverons neuf wagons et pour chaque wagon, nous trouverons un titre. Donc, ce sont des sentiments, des émotions que les gens ont eu à ressentir, à vivre que j’ai transcrits.
 
Avec cette peinture de la vie qui est un train, vous donnez l’impression d’être un fan de l’artiste Grand Corps Malade…
Paradoxalement, je n’écoute pas Grand Corps Malade. Je suis restée classique parce que ceux qui m’ont donné l’inspiration d’écrire, c’est Baudelaire, Racine, Victor Hugo, Léopold Sédar Senghor, etc. Après, j’ai décidé de ne pas suivre la poésie classique et il est important de dire que je ne suis pas poète. Je suis écrivain parce qu’en dehors de la poésie, je fais des nouvelles, des romans, des essais politiques. 

Quels sont les thèmes que vous abordez dans Le  train de la vie ?
Il y a la mort, la tristesse, l’amour. Il y a une partie religion parce que c’est un pan qui est assez important dans ma vie et il y a les pensées. J’ai commencé par la mort. J’ai adopté la technique d’une pyramide inversée. Pour tout humain, la vie commence par la naissance, mais j’aimerais commencer un cycle de vie par la mort parce que c’est le début et la fin de tout pour moi. C’est une manière à moi de la (la mort, Ndlr) faire mienne. C’est vrai que l’on n’est pas habitué à ces genres de démarche, mais j’ai préféré commencer par-là. 

Est-ce qu’il vous est une fois arrivé de penser à votre propre mort ?
Bien sûr ! Mes amis m’ont fait aussi la remarque parce que je parle très souvent de la mort. Il m’arrive souvent même de théâtraliser ou de scénariser cela, mais c’est juste pour me moquer ou pour enlever mon sentiment de peur. 

Quel message phare désireriez-vous faire passer en publiant cet ouvrage ?
A travers Le train de la vie, j’aimerais montrer aux lecteurs que ce n’est pas parce qu’on a 15 ans, 20 ans qu’on ne peut pas atteindre une certaine maturité. La première fois que j’ai donné un poème à mes parents, cela s’appelle Le choix à faire, j’avais 12 ans. Mon père a dit que c’est bien, mais que c’est de qui ? Il n’avait pas réalisé que sa petite fille de 12 ans avait acquis une certaine maturité d’esprit pour pouvoir écrire ces choses et c’est aussi un moyen de dire à mes consœurs et congénères de toujours croire en leurs rêves. Il ne faut jamais laisser les autres te dissuader par rapport à ton rêve. Si moi-même j’avais écouté certaines personnes, aujourd’hui, ce recueil ne sortirait pas.  

Pourquoi avoir opté pour la poésie au lieu de faire du roman ?
J’ai actuellement six romans à mon actif que je n’ai pas encore édités. J’ai une nouvelle aussi. J’ai choisi la poésie parce que c’est un art qui est en train de mourir et je l’ai jumelé avec le slam. Vous découvrirez lors de la lecture que je joue sur la sonorité. Je ne respecte pas forcément les règles classiques de la poésie. Je préfère les rimes croisées, embrassées. Je prends par exemple un son en «eur» ou en «ens» et je fais une poésie dessus. Cela s’appelle du slam. Ce que je voudrais faire, c’est de mélanger les deux genres (poésie et slam, Ndlr), de sorte que les anciens qui demeurent dans la poésie classique et nous les jeunes qui migrons vers le slam soient en accord et en phase. Aujourd’hui, j’apporte un certain mixage à la poésie.

Pourquoi avez-vous choisi une maison d’édition extérieure pour la publication de votre livre ?
J’avais fait des démarches pour éditer mes publications dans une maison d’édition locale, mais j’ai constaté que c’est un peu difficile pour se faire éditer au Sénégal. Au début de mes publications, j’étais étudiante et je n’avais pas forcément les moyens. Et selon ce qu’on m’avait dit, l’auteur se charge lui-même de la communication et des autres charges afférentes. En ce moment, j’avais besoin d’une maison qui puisse me supporter. C’est dans ces conditions que je me suis tournée vers Phoenix International et dans le cadre du lancement officiel de cet ouvrage, ce sont eux qui s’occupent des autres charges.
 
Auriez-vous d’autres passions dans la vie en dehors de l’animation et de l’écriture ?
Je suis dans le monde de la communication, je conseille et j’ai ma propre agence de communication spécialisée dans la communication d’images. En dehors de cela, je suis passionnée des arts martiaux (karaté), de la danse qui est un moyen pour moi de me libérer du stress.   

Rêveriez-vous d’une carrière d’animatrice à la télévision ?
Je suis rentrée dans l’animation par pure passion. Depuis l’enfance, j’ai toujours voulu faire de l’animation. De la même manière que j’ai toujours voulu écrire, faire ressortir un message et par la grâce de Dieu, je l’ai fait. Si on me propose une autre émission sérieuse, cela m’irait aussi, mais l’animation n’est pas forcément ma finalité. Mon ambition, c’est de rester dans mon propre business, que ce soit dans le business de l’écriture, de la communication, je préfère évoluer dans ce monde. 

L’animation ne permet-elle pas de s’épanouir selon vous ?
Pas du tout. Il suffit de trouver sa voie. D’aucuns ont trouvé leur voie dans le domaine de l’animation et qui sont vraiment épanouis. Peut-être qu’après Hi ! Tech, on me proposera une autre émission qui ne me permettra plus de m’épanouir. Mais aujourd’hui, cela n’est pas ma finalité. Toutefois, l’animation permet de travailler en équipe, de rencontrer des personnalités merveilleuses, ce qui n’est pas le cas partout. 

Dans la vie, quelle est la personne à qui vous aimeriez vous identifier ?
(Rires) ? Je me trouve assez complexe pour m’identifier à quelqu’un d’autre, je reste moi-même. Par contre, on va dire que je ressemble beaucoup à mon père. 

Auriez-vous des idoles ?
Idole ? C’est trop poussé. Mais il y a des  personnes que je respecte compte tenu de ce qu’ils ont accompli ou pour leur abnégation. Par exemple, Baudelaire, Racine, Victor Hugo, Léopold Sédar Senghor, Abdoulaye Wade qui, malgré tout ce qui s’est dit sur lui, m’a beaucoup marquée. J’ai d’ailleurs une affection de petite fille à grand papa pour lui. 

Faites-vous allusion à Wade le politique ou l’intellectuel ?
Je dirai plutôt Wade le Machiavel (rires).

Etes-vous féministe ?
Mon entourage le pense, mais je ne le suis pas. Toutefois, je suis pour le respect de la femme. Je n’aime pas qu’on prenne la femme comme celle qui doit être à la maison, à la cuisine ou qu’on dise qu’une femme ne doit pas avoir de grandes ambitions. C’est une remarque sexiste qui peut me mettre dans tous mes états. Bref, pour moi, l’homme et la femme sont les mêmes. 

C’est qui l’homme idéal dans la vie pour Merry ?
(Rires). Merry a appris au fil du temps que l’homme idéal n’existe pas, mais l’homme idéal de Merry sera à l’image de son papa, c’est-à-dire un homme plein de caractères, aimant et fier de montrer son amour envers sa femme et sa famille. Un prototype que je ne trouve pas encore.
 
Quel regard portez-vous sur la polygamie ?
C’est un sujet sur lequel je ne débats jamais (rires), puisque je suis tout à fait contre la polygamie. Je suis issue d’une famille monogame avec un père qui est fier de dire qu’il est monogame. Certes, la société sénégalaise est formatée et cette habitude (la polygamie, Ndlr) se transmet de famille en famille. L’homme de manière générale est par nature polygame, mais il revient à la femme de le recadrer si possible. Je prie pour que je ne sois pas amoureuse d’un homme polygame ou vice versa (rires).

De quoi avez-vous plus peur dans la vie ?
J’ai peur de perdre deux êtres qui me sont les plus chers : ce sont mes parents. Je ne peux jamais imaginer que… non ! 

Comment se fait-il que vous parler souvent de la mort et que vous en ayez encore peur ?
C’est cette dualité qui me caractérise. Je suis un oui et un non. Je n’ai pas peur de ma mort, mais j’ai peur pour la mort de ceux que j’aime. S’il a un choix à faire, je préfère mourir sans réfléchir à la place de mes proches. Mais de grâce, que la mort laisse mes parents avec moi. 

Quel genre de musique écoutez-vous souvent ?
J’écoute du ragga, reggae, dance hall, bref, les musiques qui font bouger. 

Votre plat préféré ?
C’est un plat vietnamien qui s’appelle Kasen salad. En ce qui concerne les plats sénégalais, j’adore le Yassa poulet. 

 Par Gilles Arsène TCHEDJI | Lequotidien

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