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Ven, Nov
vendredi, 03 janvier 2014 00:00

Attentat de Kidal : Le récit de la mort des deux jambaar

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Le récit de l’attentat à la voiture piégée de Kidal du 13 décembre dernier et qui a coûté la vie à deux militaires sénégalais n’avait pas jusque-là été ébauché que dans ses grandes lignes. Le Procès verbal de mise en bière consécutif à une enquête dirigée par l’adjudant Moustapha Seck, chef de Détachement prévôtal Def Sen 1/Misma et Officier de police judiciaire militaire et deux de ses collègues est revenu sur les pénibles circonstances du décès des deux Sénégalais dans l’enfer de Kidal.

L’austérité du rapport militaire n’a pas suffi à atténuer la virulence de la tragédie qui a coûté la vie à deux militaires sénégalais à Kidal. Elle en conserve toujours ce côté sordide. Pis encore, la précision et la concision du rapport militaire qui relate les faits en rajoute une surdose d’horreur. Cette aube fatidique levait ses rideaux pour un court mais indiciblement douloureux épisode où le caporal-chef Ousmane Fall et le soldat de première classe Cheikh Sarr ont joué malgré eux leur dernier rôle. Le procès verbal N°3 daté du 14 décembre 2013 relate les circonstances du décès des militaires sous les lunettes des témoins : «Le 14 décembre 2013, aux environs de 6 heures 30 minutes, un véhicule de type 4X4 bourré d’explosifs et conduit par un kamikaze fonce à vive allure vers la porte d’entrée de la Banque malienne de solidarité où un groupe de militaires sénégalais du Senbat 1 de la Minusma assure la sécurité depuis plus d’un mois avec un détachement des Forces armées maliennes. A peine entré à l’intérieur de la banque, une forte détonation a été entendue dans toute la ville. Les véhicules militaires sénégalais (Caspire N°410058 et Land Cruiser N°410025) plus un véhicule 4X4 des Forces armées maliennes trouvés sur place ont été complètement calcinés sous l’effet du souffle de l’explosion.» Les conséquences sont terribles : «Une partie du bâtiment servant d’abris aux militaires sénégalais et maliens s’est effondrée. Le corps de la victime Ousmane Fall ainsi que les blessés ont été retirés des décombres et acheminés à l’infirmerie du corps du Senbat 1 de la Minusma.» Le drame vient de se jouer. 

Le kamikaze a foncé sur eux à 6 heures du matin
Peu après l’explosion, le médecin-capitaine du Senbat 1 Youssouph Tine, ayant reçu les deux victimes militaires, confirme le décès du Caporal-chef Ousmane Fall et du Soldat de 1ère classe Cheikh Sarr, trente minutes après son arrivée suite aux blessures dues à l’explosion. A l’enquête,  quelques heures après l’attentat, il confirme avec les détails techniques : «Le caporal-chef Ous­ma­ne Fall est décédé sur les lieux suite à des traumatismes crâniens et du bassin. Concernant Cheikh Sarr, son décès a été constaté 30 minutes après son évacuation au Level 1. D’ailleurs, à son arrivée, il était déjà dans le coma et il a fallu trente minutes de réanimation avant qu’il ne décède des suites d’un traumatisme crânien ouvert.» Sur ce, il précise que les certificats de genre de mort ne pourront être délivrés qu’à l’issue de l’autopsie qui se fera à Bamako. 
L’adjudant Moustapha Seck, chef de Détachement prévôtal Def Sen 1/Misma et officier de police judiciaire militaire chargé de mener l’enquête, était au moment de l’attentat sous sa tente au cantonnement Senbat 1 de la Minusma au Camp 2 à Kidal. Il raconte : «Nous avons entendu une forte détonation venant du Centre-ville. Renseignements pris, il s’agit d’un attentat à la voiture piégée commis contre les militaires sénégalais (Comoto) de la Minusma de service à la Banque malienne de solidarité (Bms). Nantis de cette information, nous nous sommes transportés sur les lieux au niveau de la banque.» 
Pragmatique, il s’attèle aussitôt aux constatations et mesures conservatoires que requiert ce genre de situation. Il se rappelle : «A notre arrivée, nous avons trouvé quatre véhicules dont un Caspire, un véhicule 4X4 Land Cruiser appartenant au contingent sénégalais et un véhicule 4X4 des Forces armées maliennes et celui du kamikaze complètement calcinés. Tandis que le bâtiment servant de banque et logement pour les militaires s’est effondré sous l’effet du souffle. Plusieurs blessés militaires étaient ensevelis sous les décombres. Les débris du véhicule pick-up 4X4 du kamikaze étaient projetés un peu partout sur une distance d’une dizaine de mètres.» Ces déclarations que corroborent les photos prises après l’attentat renseignent sur la violence de l’explosion. 
 Le souffle surpuissant des explosifs a littéralement pulvérisé tout ce qui était dans les environs immédiats du lieu du sinistre. Le mur de l’école en face de la banque s’est affaissé à cause de la déflagration, les portes des boutiques du marché distantes d’une cinquantaine de mètres ont été arrachées. Le bilan humain n’a pas manqué de s’alourdir et l’officier de police constate : «A l’issue des opérations sur place, sept blessés dont un dans un état très grave du côté sénégalais et un mort ont été dénombrés. Cependant, le cas du soldat de 1ère classe Cheikh Sarr était plus critique. Il est finalement décédé à l’infirmerie du Senbat 1 de la Minusma, une heure après. Pour la partie malienne, deux blessés graves plus le kamikaze tué.» Les dispositions pratiques et urgentes ont obligé les militaires à retirer les corps des décombres pour les transporter à bord des ambulances. Les blessés ont alors été acheminés d’urgence à l’infirmerie du Corps où le médecin-capitaine Youssouph Tine leur apprend brièvement que les deux militaires sont décédés suite à leurs blessures. 

Dans leurs affaires un exemplaire du Saint Coran, un livre de Hugo…
L’officier informe sa hiérarchie par un message clair N°004/To du 14 décembre 2013 et rend compte au colonel commandant le Senbat 1 Minusma et au colonel commandant de la Légion hors rang à Dakar. 
En attendant, leurs collègues procèdent à l’inventaire de leurs effets. Leurs bagages militaires se résument à peu près à ceci : «Deux ceinturons Tap, une tenue camouflée militaire complet, un brelage à sangle, deux vestes militaires, un paquet de pansement, une ceinture militaire, une paire de Ranger noire, une paire de Ranger (désert), deux sacs à dos, une cartouche, deux parkas, un masque de protection, un chapeau de brousse, un jeu de gamelles, une paire de chaussures, un fusil M16, un chargeur garni de munitions 5,56mm, un béret et une cravate Nations-Unies.» 
Pour Cheikh Sarr, l’attirail militaire se rapproche de celui de son compagnon d’infortune. Dans leurs effets civils, le rapport relève entre autres objets un livre de Victor Hugo, un chéquier de la Banque de l’Habitat (Bhs), un jeu de scrabble, deux livres coraniques pour Ousmane Fall et des blousons, un portable de marque Lg E375 et un maillot sport Jambaar pour Cheikh Sarr. Tous ces effets ont été remis contre décharge au capitaine Maguette Sène, commandant de la Compagnie motorisée du Senbat 1 de la Minusma à Kidal.  Reconnais­sante, la Nation leur a rendu un digne hommage présidé par le chef de l’Etat. 
Pour les soldats restés au front, ce coup dur n’est pas pour entamer leur sacerdoce. Khalifa Niang, adjudant-chef de section de la 3ème compagnie motorisée poursuit : «Les sept autres blessés ont été évacués vers Bamako, mais le cas de Meïssa Kassé reste préoccupant.» Son requiem est sobre : «Ils étaient de très bons militaires. Je souhaite que la terre leur soit légère.»
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source: http://www.lequotidien.sn/index.php/la-une2/6435-attentat-de-kidal--le-recit-de-la-mort-des-deux-jambaar

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