DOCUMENT - Affaire de la drogue dans la police : Keïta reprend la parole
Écrit par SENETOILE NEWS
Le Commissaire Keita, l’homme qui a permis de dévoiler les implications des forces de l’ordre, en particulier de la Police, reprend ici la parole, dans un document qu’il a tenu à apporter au journal Le Quotidien en mains propres. Ce n’est pas un homme amer ou aigri qui parle ; au contraire, il ressort des échanges que le personnage, qui a, presque d’un coup de dé, mis en balance sa carrière, sa vie et l’existence même de personnes qui lui sont proches, a une très haute idée de sa mission et de ses devoirs envers son pays. C’est cette haute idée qui l’a conduit a informer ses supérieurs des soupçons qui pesaient sur un collègue, dont il dit qu’il était le plus proche de ses confidents.
Pour lui, la hiérarchie, en particulier le ministre de l’Intérieur Pathé Seck, n’a pas voulu prendre la mesure des enjeux, et n’a pas su poser les actes qui l’auront grandi dans ses fonctions. Et si aujourd’hui il reprend la parole, c’est que la bête immonde, la corruption engendrée par la drogue, n’a pas encore fini de faire des ravages dans les milieux officiels, et le devoir de dénonciation est encore là. Exclusivité.
Je me suis opposé au coup de force du Général Seck*
Je rends grâce à Dieu et je remercie mes parents, mes amis et tous les Sénégalais qui m’ont soutenu durant cette épreuve. Et je me réjouis de voir qu’ils continuent de le faire en n’ayant jamais douté de ma bonne foi. Leur attitude est d’ailleurs ce qui m’a convaincu de la justesse de la décision que j’ai eu à prendre il y’a quelques mois de cela, et dont la conséquence est cette affaire de trafic de drogue à la Police qui a déjà fait couler beaucoup d’encre.
Qu’il me soit ensuite permis de déplorer ici et sans attendre, le traitement inqualifiable dont le dossier y afférent a été l’objet à plus d’un point de vue, le désordre et l’amalgame ayant été convoqués à dessein, dans le but de camoufler les torts et les responsabilités de quelques protagonistes, qui n’ont malheureusement pas su nous épargner de dommages divers en manquant de réagir promptement et comme il fallait le faire.
L’exercice des missions régaliennes, surtout celles relevant du domaine de la défense et de la sécurité, nécessite un sens élevé du devoir et de la responsabilité, du courage et de la mesure. C’est ce que les meilleurs d’entre ceux qui en assurent les charges, ont le bonheur d’avoir compris très tôt.
Ceci étant, je voudrais d’entrée, souligner l’importance de cette affaire en notant qu’elle restera pendant longtemps un bon prétexte pour aborder la question des vertus et des valeurs qu’il est devenu urgent de restaurer. Elle restera aussi pour rappeler que l’intérêt national devra continuer d’être placé au-dessus des intérêts de chacun d’entre nous pour pousser au changement de comportement tous les affairistes tapis à l’intérieur de vos administrations.
C’est par respect pour tous les compatriotes que préoccupe la question du trafic des produits rangés dans la catégorie des drogues que j’ai décidé de rompre le silence dans lequel je m’étais enfermé volontairement pour éviter d’en rajouter à la confusion voulue et entretenue par ceux qui avaient intérêt à ce que prospère l’argument selon lequel un commissaire de police avait gratuitement accusé un de ses collègues de collusion avec des narcotrafiquants.
Cette version devait par ailleurs, très rapidement servir de motif à quelques snipers qui se sont empressés de balancer des projectiles en direction du présumé fauteur de troubles, sans se soucier du respect dû à l’autre et sans protéger leurs arrières. Ils ont eu la désagréable surprise de se voir contrer par une multitude de réactions, dont la pertinence n’a pas manqué de gêner certaines autorités. Ce fut alors l’amorce du long processus de sabordage de la gestion de l’affaire. Enfin, voilà que récemment le commissaire Abdoulaye Niang a été déclaré hors de cause par les conclusions de l’instruction judiciaire.
Dès lors, tout serait fini et bien fini aujourd’hui, si cette version des faits était la bonne et que l’affaire de trafic de drogues à la Police devait définitivement se réduire à quelques actes de malveillance commis par un officier en fomentant toute une histoire de détournement de drogues saisies et placées sous scellés. Tout n’est pas fini bien sûr, parce qu’il s’est agi plutôt de tout autre chose et d’une toute autre affaire dont le sérieux et la gravité découlent naturellement du fait qu’elle est bel et bien relative à l’implication de quelques fonctionnaires de police dans des activités de trafic illicite des stupéfiants.
A présent que la poussière est retombée, je viens livrer la version de l’histoire qui permettra à chacun de savoir ce qui se passait à l’Ocrtis et de comprendre pourquoi je me suis opposé au «coup de force» du Général Seck.
C’est en remplacement du Commissaire de Police divisionnaire de Classe Exceptionnelle Abdoulaye Niang que j’ai été nommé Directeur de l’Office Central pour la Répression du Trafic Illicite des Stupéfiants au mois de Décembre 2012. En m’installant dans ces fonctions, j’étais loin de pouvoir imaginer que j’allais devoir faire face à la situation la plus cocasse de ma carrière. Je venais de sortir de huit années d’enfermement dans le rôle de conseiller à la Direction Générale de la Police Nationale et rien de ce que je faisais jusqu’alors ne pouvait me permettre de mesurer le niveau de délabrement des mœurs sur le terrain et particulièrement au sein du plus grand service de lutte contre le trafic des stupéfiants de notre pays.
Les trafiquants mettent en cause le Commissaire Niang
La situation était en effet caractérisée par un niveau très élevé de corruption et par des formes diverses de compromission des personnels dans la distribution des drogues. Cette situation, qui n’était pas nouvelle, avait été soigneusement entretenue des années durant par des fonctionnaires de différentes catégories et à tous les niveaux du service. Evitant de modifier le contexte dans lequel s’étaient déroulés les faits, je me étais abstenu de toucher au personnel que j’avais trouvé sur place, contrairement à une certaine tradition qui veut que l’arrivée d’un nouveau chef de service soit toujours suivie par des départs et des arrivées. C’est ainsi que j’ai pu découvrir qu’effectivement, la seule préoccupation des fonctionnaires de cette spécialité était d’amasser de l’argent, soit en protégeant les petits et grands réseaux de narco trafiquants établis à Dakar et dans d’autres localités du pays, soit en escortant des livraisons de drogues et en remettant en circulation des saisies de ces produits.
N’ayant pas fait le projet de me livrer à des pratiques de cette nature, j’étais en train de m’appliquer à remettre de l’ordre dans mes idées quand s’est manifesté sans avertir, le premier narco trafiquant qui a eu à me proposer de lui livrer les saisies de cocaïne. Celui-ci, en présentant son offre de collaboration, me siffla que, pendant plus de dix ans mon prédécesseur lui avait servi de fournisseur en puisant dans les stocks de scellés dont je venais d’hériter de la garde.
Après Austin, ce fut au tour d’un autre narco trafiquant, nigérian comme lui, de m’appeler sur le numéro du téléphone portatif de service pour me faire la même offre, en se présentant sous le prénom d’Akim. J’ai pu savoir plus tard qu’il s’agissait d’un individu qui venait d’être élargi de prison en Italie. Akim était marié à une Sénégalaise.
Pap Latyr est un trafiquant de chanvre indien habitant à Guédiawaye. Lui aussi m’a tenu le même discours que les deux Nigérians, toujours en précisant comme chacun d’eux, qu’il a eu à «travailler» dans les mêmes conditions avec le Commissaire Niang.
La situation devenant de jour en jour plus complexe et les fonctionnaires tenant manifestement à préserver leurs privilèges, j’ai décidé de m’en ouvrir à mes chefs. Cependant, il me fallait trouver le moyen de contourner le Directeur Général de la Police, en l’occurrence Monsieur Codé Mbengue, parce qu’il m’était aussi parvenu que ce dernier recevait du Commissaire Niang des parts d’argent provenant du commerce de la drogue. C’est pour cette raison que je suis d’allé directement m’en ouvrir au Ministre de l’Intérieur d’alors, le Général Pathé Seck.
Je me suis donc fait recevoir par cette autorité qui, après avoir attentivement suivi l’exposé de mon compte-rendu, m’a ordonné de poursuivre les investigations pour éclairer d’avantage le sujet. Il m’a ensuite mis en rapport avec le colonel Diouf, un officier de Gendarmerie à la retraite qu’il avait instruit de suivre l’évolution de l’enquête.
Après la présentation de ce rapport verbal à l’autorité ministérielle, j’ai fait suivre dès le 18 Février 2013, un compte rendu écrit en même temps que j’entreprenais de mettre en forme un dossier de procédure judiciaire, en dressant procès-verbal de tous les actes que je posais. Aussi, je m‘étais appliqué à échanger avec le colonel Diouf, qui en informant régulièrement le Ministre de l’Intérieur de l’évolution de l’enquête, lui avait expliqué comment il en était ressorti que toute la combine tournait autour de la fameuse cérémonie d’incinération des drogues saisies, le 26 juin de chaque année. En effet il est apparu très tôt que la manœuvre consistait à incinérer de fausses boulettes de cocaïne en lieu et place de celles que les narco trafiquants récupéraient et revendaient.
L’arrestation d’Austin devait alors intervenir avant le jour de la cérémonie d’incinération, parce qu’au-delà, le semblant de connivence qui permettait de le mener en bateau ne pouvait plus tenir et qu’il fallait aussi se donner les moyens de le confondre. En attendant, retenons que le trafiquant en cause sera jugé par une des Assises prochaines.
Ainsi donc, dès après le 18 février 2013 on pouvait retenir de l’affaire en question qu’elle a débuté dans le courant du mois de décembre 2012 à la suite de révélations qui ont porté sur des relations compromettantes entre le premier Directeur de l’Ocrtis et plusieurs narco trafiquants. Et du mois de février 2013 au mois de mai de la même année, il est évident que le Ministre de l’Intérieur avait largement le temps de réagir pour s’empêcher de proposer la candidature du Commissaire Niang au poste de Directeur Général de la Police ou pour le faire après avoir évacué tout risque de se retrouver en faute.
C’est d’autant plus évident que ce Ministre de l’Intérieur savait pertinemment que seule ma qualité de Directeur de l’Ocrtis intéressait les narco trafiquants, parce qu’ils avaient besoin de ma complicité pour continuer (selon eux) de s’approvisionner à partir des saisies de drogue dont j’étais devenu le gardien, sans aucune exigence de forme. Il savait aussi que je n’aurais pas reçu d’Austin, Akim et Pap Latyr, des informations mettant en cause le Commissaire Niang si je n’avais pas été à ce poste.
Le Colonel Diouf décidera peut-être un jour d’éclairer ses compatriotes sur le rôle qu’il a eu à jouer dans cette affaire et particulièrement, auprès du Ministre de l’Intérieur qu’il était chargé de représenter et d’informer. En attendant, je rappelle ici qu’il savait bien que le dénouement de toute l’affaire devait passer par l’arrestation d’Austin avant le 26 Juin 2013 et qu’il en avait fait part à l’Autorité.
Ceci étant, il apparait clairement que dans tous les cas, le Commissaire Niang allait au moins, devoir expliquer à la justice pourquoi Austin a déclaré à plusieurs reprises qu’il lui revendait de la drogue provenant des saisies opérées par l’Ocrtis. C’est donc en envisageant cette éventualité que j’ai eu aussi à ouvrir une enquête judicaire en même temps que je portais l’affaire au niveau le plus haut de l’administration policière.
Le ministre de l’Intérieur a manqué de vigilance
Sur le plan administratif justement, il est certain qu’une telle affaire devait faire l’objet d’un traitement diligent pour apporter le meilleur éclairage possible sur les faits et pour situer les responsabilités de tous ceux qu’elle a concerné. Elle devait aussi être l’occasion de contrôler l’organisation et le fonctionnement des services chargés de lutter contre le trafic des stupéfiants, en vue d’y apporter des changements qui permettraient d’en améliorer les performances.
Il est constant que le Ministre de l’Intérieur de l’époque a manqué de vigilance en ne considérant qu’il lui fallait immédiatement réagir à la suite du compte-rendu portant sur l’implication d’un officier supérieur de la Police dans une affaire de trafic de drogue. Il a failli en n’ayant pas tenu compte du caractère extrêmement sensible de cette affaire.
Les officiers et plus généralement les cadres, sont les piliers des administrations publiques. C’est pour cette raison qu’une attention toute particulière doit être portée sur les situations qui les concernent pour protéger le service public contre les risques de détournement d’objectifs, de malversations et de collusions dangereuses surtout quand il s’agit de sujets portant sur la défense nationale en particulier, et sur la sécurité des personnes et de leurs biens.
Il est important de souligner qu’à ce niveau de responsabilité gouvernementale, l’autorité est tenue d’intervenir à chaque fois qu’elle est interpellée par des cas de dysfonctionnements graves liés au comportement des fonctionnaires de son département. L’occasion de cette affaire permettait au moins au Ministre de l’Intérieur de s’assurer du bon fonctionnement de certains services. Sur ce plan d’ailleurs, le Général Pathé Seck n’avait plus rien à apprendre de qui que ce soit, et il pouvait éviter de s’enfermer dans une situation gênante.
Le Commissaire de Police Abdoulaye Niang était en cause dans une importante affaire de trafic de stupéfiants et ce seul motif était suffisant pour écarter d’office sa candidature au poste de Directeur Général de la Police Nationale. En tant que Directeur national et responsable de l’enquête relative à cette affaire, mon devoir était d’attirer l’attention de l’autorité sur cette situation. Je l’ai fait parce qu’en plus, le Ministre et moi nous trouvions ensemble autour de ce dossier et que j’avais constaté qu’il avait manqué d’en tenir compte, volontairement ou involontairement.
C’est pour cette même raison d’ailleurs, que j’aurais eu tort de m’en tenir au fait accompli et d’éviter de contrarier le Ministre de l’Intérieur. Il y avait aussi que je ne pouvais pas placer le besoin de sauvegarder mes privilèges au-dessus des intérêts et du prestige du pays pour ne réagir devant le risque de voir s’installer à la tête de la Police, un fonctionnaire dont la moralité était au moins l’objet de vérifications officielles.
Autrement dit, au moment de la promotion du Commissaire Niang, l’enquête n’était pas encore clôturée et la question n’était d’ailleurs pas de savoir s’il était coupable ou innocent, comme dans le cadre d’un procès pénal. En effet, en bonne administration, le simple doute permettait d’écarter sa candidature. Et ce doute tenait au fait que l’intéressé était effectivement concerné par une affaire de trafic de drogues, pour avoir été cité par trois malfaiteurs qui ont tous déclaré avoir «fait des affaires» avec lui. Autrement dit, pour des vérifications relatives au choix d’un directeur national, le doute ou son contraire, les mœurs et la moralité constituent le résultat dont disposera toujours l’autorité exerçant le pouvoir de nomination, pour éclairer sa décision.
L’intérêt du Sénégal avant son propre confort
L’intérêt d’une telle disposition réside dans le fait qu’elle permet de protéger l’exercice des hautes responsabilités dans les administrations publiques et de les faire confier à des fonctionnaires intègres et de bonnes mœurs. N’a-t-on pas eu d’ailleurs à écarter un autre candidat à cette promotion pour des considérations du même ordre ?
D’ailleurs, c’est chacun de nous qui a le devoir de s’opposer à tout ce qui risque de salir la réputation de notre pays. Tous, homme, femme, entrepreneur ou fonctionnaire, cadre, officier, autorité administrative ou politique, nous devons au Sénégal de préserver son image de souillures et c’est ce que j’ai fait, en n’ignorant pas que j’allais inévitablement m’exposer à de violentes représailles, parce que l’autorité ministérielle n’était visiblement pas du même avis que moi. Le Sénégal étant notre bien commun le plus précieux, j’aurais eu tort de lui refuser le sacrifice de ma situation de fonctionnaire.
En inventant la version selon laquelle il n’était question que de rivalités entre des chefs de la police, de la jalousie mesquine de quelqu’un qui n’a pas pu supporter la promotion d’un de ses pairs, le Ministre de l’intérieur ne faisait que défendre ses intérêts personnels. C’est pour cette raison qu’en le suivant, nous aurions contribué à jeter le discrédit sur la Police et de fait, confirmé le jugement qui voudrait qu’elle soit cette institution dont les cadres s’entredéchirent continuellement. La Police est une force dont le seul tort est d’avoir tout le temps été traité en parent pauvre. Et malgré cela, elle s’est toujours acquittée honorablement de ses missions en s’appuyant sur des cadres compétents et des personnels dévoués à la tâche.
La Direction Générale de la Police Nationale est un niveau de responsabilité de la plus grande importance, parce que sa mission est relative à la défense et à la sureté nationale, à la sécurité et à la protection des personnes et de leurs biens. Dès lors, le choix pour lui d’un directeur, doit être sécurisé par un processus rigoureusement élaboré et comprenant le recours obligatoire à une enquête de moralité.
Le Ministre de l’Intérieur a commis une faute grave en ne tenant pas compte de l’implication du commissaire Niang dans une affaire de trafic de drogues et il devait très vite le reconnaitre, au lieu d’emprunter la voie de la manipulation des opinions et de la tricherie pour sauver son poste. En procédant de la sorte il a malheureusement ouvert la brèche dans laquelle se sont vite engouffrés tous ceux qui ont eu à tremper dans des affaires d’argent liées au trafic des stupéfiants et qui craignaient d’être rattrapés par leur passé. C’est ainsi que pour ne pas être découverte, la mauvaise graine s’est empressée de soulever la poussière pour détourner l’attention de toute la presse vers des querelles et des rivalités qui n’ont jamais existé.
Niang invité à faire preuve de hauteur
Le Sénégal est notre bien commun le plus précieux et nous devons défendre à tout prix ses intérêts en protégeant ses institutions contre tous ceux dont l’unique projet est d’en confisquer les moyens et de s’assurer des privilèges. C’est pour cette raison qu’en découvrant brutalement que le Général Seck n’était pas différents de ceux-là, je n’ai pas hésité un seul instant à l’affronter.
Le Commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle Abdoulaye Niang a été blanchi par le Juge d’instruction. C’est tant mieux pour lui et pour sa famille, le Commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle Cheikhna Keita n’ayant jamais été son adversaire et encore moins son ennemi. J’affirme ici que nos relations ont toujours été des meilleures et j’invite mon collègue à faire preuve de hauteur en confirmant ce propos et en reconnaissant que ce qui nous oppose ne tient qu’au malheureux hasard qui m’a fait devenir après lui, Directeur de l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants, me plaçant ainsi en situation d’apprécier de questions relatives à son passage à la tête de cette institution. En me trouvant face à des informations compromettantes le concernant, je n’ai fait que me conformer aux exigences de ma mission.
J’ai donc rendu compte à l’autorité des informations que je détenais parce qu’il fallait le plus normalement du monde le faire. Et je n’ai rapporté que ce qui devait l’être, comme l’aurait fait n’importe quel autre fonctionnaire.
Des centaines d’individus sont dans les prisons à cause de leur implication dans des affaires souvent moins graves que celle dont il est ici question, et personne n’a jamais reproché aux policiers et aux gendarmes de ce pays de les avoir arrêtés et déférés. Si, parmi eux se trouvent des fonctionnaires de Police qui ont effectivement eu à tremper dans des affaires de drogue, mon avis est qu’ils doivent rendre compte de leurs fautes. Cet avis est aussi celui de tous les compatriotes qui croient que personne ne saurait être mis à l’abri de poursuites en raison de son appartenance à un groupe, de son rang social, de ses relations, de ses fonctions ou de son grade. Ceci devrait être valable aussi bien pour moi que pour Abdoulaye Niang ou quelqu’un d’autre.
Nous sommes tous égaux devant la loi. Ce principe depuis longtemps consacré, aurait été d’un intérêt beaucoup plus grand si au-delà de sa simple discussion, il était appliqué partout et en toute circonstance, pour éviter aux plus faibles d’entre nous d’être jetés en pâture rien que pour créditer un semblant d’impartialité entretenu par des hommes et des femmes qui n’ont de considérations véritables que pour leurs seules personnes. Tout ira mieux demain, quand nous parviendrons à vaincre l’injustice sous toutes ses formes, la prédation des biens publics et la corruption.
Parlons justement de la corruption comme pour coller à l’actualité d’une certaine propagande déclenchée et entretenue sous nos cieux depuis un certain aller-retour, Dakar Paris, Paris Dakar dont on se serait passé si son seul mérite devait être de nous faire découvrir brusquement qu’il nous faudra désormais combattre toutes les formes de tricherie et toutes les pratiques sombres qui gangrènent notre administration publique. Il est certain que l’affaire du trafic de drogue à la Police et avant elle, bien d’autres affaires, aurait constitué un meilleur prétexte pour s’attaquer à ce phénomène au lieu d’aller puiser ailleurs la raison d’ouvrir un nouveau front, en recourant à l’usage de slogans dont les effets ne dépasseront jamais les performances d’une mauvaise publicité de produits cosmétiques.
Le Sénégal est notre bien commun le plus précieux. Nous nous devons de nous respecter mutuellement pour mieux le servir et de nous battre ensemble pour vaincre tous les maux qui entravent son développement harmonieux.
Cheikhna Ch. Saadbou KEITA
Ancien Directeur de l’OCRTIS
Les intertitres sont de la Rédaction
SOURCE: http://www.lequotidien.sn/index.php/la-une2/6779-document-affaire-de-la-drogue-dans-la-police--keita-reprend-la-parole
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