Verdict du Tribunal arbitral de Paris sur les mines de la Falémé : L'Etat gagne son bras de fer contre Mittal
Écrit par SENETOILE NEWSC’était le combat du pot de fer contre le pot de terre. Mais pour une fois, l’issue n’a pas été celle imaginée par beaucoup. Le gouvernement sénégalais a obtenu victoire contre l’industriel Lakshmi Mittal, dans le conflit qui les opposait sur l’exploitation des mines de fer de la Falémé.
Les avocats de Lakshmi Mittal ne doivent pas en revenir. La procédure d’arbitrage engagée contre Arcelor Mittal devant le Tribunal arbitral de Paris par le Sénégal vient d’aboutir, et pour la première fois depuis très longtemps sans doute, c’est David qui vient de gagner.
La Cour arbitrale de Paris a décidé le 3 septembre dernier, de casser le contrat qui liait le Sénégal à Arcelor Mittal. Dorénavant, le gouvernement sénégalais a le loisir de négocier avec n’importe quel investisseur qu’il lui plaira, sur la possibilité et les conditions pour exploiter les mines de fer de la Falémé, au sud-est du pays. Cela, en attendant que soit fixé le montant des dommages et intérêts qui lui seront accordés, eu égard au préjudice subi dans l’histoire.
Il faut se souvenir que c’est en 2007 que le gouvernement du Sénégal a contracté avec Mittal qui, à l’époque, n’avait pas encore racheté Arcelor. Emballés par les études archéologiques indiquant les réserves minières du Sénégal, en particulier celles en fer, les envoyés de l’industriel indien ont promis d’investir un minimum de 2 millions de dollars pour la réalisation d’un projet intégré, qui ferait qu’il serait possible d’extraire le fer du site d’exploitation, de le transporter par chemin de fer jusqu’au port minéralier à construire à Bargny, d’où il sera pris en charge par des bateaux. C’est la grande ambition de ce projet intégré qui justifiait les 2 millions de dollars. Mittal allait réhabiliter et construire le chemin de fer, permettant de relier le pays d’un bout à l’autre, et construire enfin le fameux port en eaux profondes de Bargny. C’est cette vision qui a convaincu les autorités sénégalaises, en tête desquelles le Président Abdoulaye Wade, et les a poussés à rompre unilatéralement le contrat qui liait le pays au partenaire préalablement retenu, le Sud Africain Kumba resources.
Kumba resources attaque, Mittal détale
Bien entendu, ce dernier ne l’a pas entendu de cette oreille, et il s’est empressé de porter plainte contre le Sénégal, auprès du Tribunal arbitral de Paris. Après plusieurs péripéties, le Sénégal a été condamné. Le Tribunal n’a pas suivi Kumba resources dans sa demande de 120 millions de dollars de dommages et intérêts, mais il lui a néanmoins accordé 75 millions, l’équivalent en Cfa de 37,5 milliards de francs. Ce montant devrait être payé en cinq annuités. Le Sénégal a déjà acquitté deux annuités, et il lui en reste trois.
Toutefois, prenant prétexte de la crise économique mondiale, Mittal annonce en juin 2009 aux autorités sénégalaises qu’il suspend son projet en ce qui concerne le Sénégal. Le pays, handicapé par l’affaire Kumba resources, se trouvait perdant sur tous les tableaux. Plusieurs négociations n’ont pas fait revenir le sidérurgiste à des meilleurs sentiments. Après avoir invoqué la crise économique, Mittal a après cela prétendu que la qualité du minerai sénégalais n’était pas aussi bonne pour justifier les dépenses prévues dans le contrat. Ce faisant, l’industriel reniait les études de ses propres experts, et les engagements sur la base desquels il avait librement signé son contrat au départ. Par conséquent, la solution qui restait au Sénégal était le recours à l’arbitrage international. Il s’est tourné donc là où Kumba resources l’avait attrait, au Tribunal arbitral de Paris.
Demande reconventionnelle
Le ministre Aly Ngouille Ndiaye, à qui ce dossier tenait à cœur, a raconté qu’à plusieurs reprises, des délégations d’Arcelor Mittal ont tenu à le rencontrer, en marge de l’arbitrage, dans l’espoir de le faire changer d’avis. Ces gens ont même proposé, à la place du projet intégré qui avait emporté l’adhésion de la partie sénégalaise, une autre formule dite Dso ou Direct shipping ore, qui consisterait à extraire le minerai de fer et le faire transporter tel quel, sans aucune autre valeur ajoutée. «Bien entendu, souligne Aly Ngouille Ndiaye, je n’ai même pas référé au Premier ministre ; j’ai carrément refusé».
Non contents de ce camouflet, les conseils de Mittal ont introduit une demande reconventionnelle auprès du Tribunal de Paris, pour contraindre le Sénégal à accepter de négocier ce point-là. Mais même sur cela, le sidérurgiste a subi un gros échec.
En plus de se voir libéré des contraintes imposées par le contrat non exécuté par son ancien partenaire, la fierté du gouvernement sénégalais réside surtout dans le fait que c’est la première fois qu’un pays du Sud remporte une victoire aussi nette au Tribunal arbitral de Paris, surtout face à une entreprise de la taille d’Arcelor Mittal. On sait que cette instance dite indépendante, ayant ses locaux au siège de la Banque mondiale à Paris, a toujours eu tendance à favoriser le Capital et les investisseurs, souvent même contre les intérêts des peuples. Le Sénégal fera donc sans doute jurisprudence.
Depuis longtemps, le grand magnat de l’acier, habitué à ce que les dirigeants des grandes puissances mondiales lui fassent des courbettes et se soumettent à ses désirs, imposait sa volonté à quasiment la planète tout entière. En cette période de récession, peu nombreux sont les financiers qui ont les moyens d’investir de grandes sommes dans l’exploitation minière. Toutes les raisons valables qui lui faisaient croire qu’il n’avait rien à redouter de la part d’un Pays pauvre très endetté (Ppte) comme le Sénégal.
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source:http://www.lequotidien.sn/index.php/la-une2/6106-verdict-du-tribunal-arbitral-de-paris-sur-les-mines-de-la-faleme--letat-gagne-son-bras-de-fer-contre-mittal
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