Pour une première, le passage du Pm Mahammad Dionne et son gouvernement devant l’Assemblée nationale, aux fins de matérialiser le dialogue politique sous label Macky Sall, est bien parti pour ne point rester dans les mémoires des citoyens, au vue de la copie qui a été rendue hier, jeudi, devant la douzième législature. Non pas, toutefois, dans l’ordre du symbole, puisque l’initiative est tout à fait inédite dans les annales parlementaires sénégalaises, comme s’est plu à le rappeler Moustapha Niasse, le président de l’Assemblée nationale.
Seulement, en termes de format et de réponses de fond sur les grandes questions de l’heure, la sortie de l’attelage gouvernemental devant les «élus du peuple» a donné une impression d’inachevé et de raccourci, pour ne pas dire de rendez-vous tronqué. En somme, un mini oral sans pigment ni sel n’ayant pas renforcé les grandes « convictions » du citoyen lambda, relativement aux politiques publiques déclinées par le nouveau pouvoir pour redresser la marche d’un pays en mal de repères.
En cent vingt-deux minutes millimétrées par Moustapha Niasse, le Pm et son gouvernement se sont évertués, au forceps, à donner réponses aux interpellations des parlementaires. Toutes les cinq minutes, un ministre de la République a dû s’expliquer sur une question clé de l’actualité politique ou sociale relevant de son département : crise universitaire, polémique sur la modernisation des daaras, différend autour de l’emprunt obligataire de la ville de Dakar, situation problématique des aéroports du Sénégal…
Seulement, là où le bât blesse, c’est que le temps imparti était si court que certains ministres ont été pris…de court. A l’image du ministre de l’Economie Amadou Bâ qui a été stoppé en plein exposé par Moustapha Niasse, alors qu’il s’expliquait sur les connexions financières d’un sujet qui ne cesse d’alimenter les suspicions. En l’occurrence, l’emprunt obligataire de la ville de Dakar qui a été bloqué par l’Etat du Sénégal et, à propos duquel les commentaires vont bon train. Surtout, au niveau de ceux qui y voient une manœuvre « politicienne » du nouveau pouvoir pour mettre des bâtons dans les roues de Khalifa Sall, le maire de Dakar, en perspective de…2017.
La même mésaventure a également endigué Maïmouna Ndoye Seck, le ministre de l’Energie lancé en pleine séance d’explications sur l’affaire Africa Energy. Une affaire qui avait créé grand bruit depuis que des informations circulaient en faisant état là d’un marché de gré à gré de 300 milliards de FCfa. Incapables de calibrer leur réponse dans le timing des cinq minutes dégagées par l’Assemblée nationale et surveillées comme du lait sur le feu par Moustapha Niasse, ces ministres ont dû regagner le box gouvernemental sans aller au bout de leurs …plaidoiries.
Demandez à Pape Abdoulaye Seck, le ministre de l’Agriculture sur la Sunéor ! Suffisant pour contraindre le chef du gouvernement à revenir, en fin de plénière, sur certains points, notamment l’affaire Africa Energy pour réfuter fermement tout gré à gré dans cette initiative de construction d’une centrale de 300 Mégawatts à Mboro, dans la région de Thiès. Voire la suspension de l’emprunt obligataire de la mairie de Dakar estimé à 20 milliards de Fcfa, en déclarant qu’elle n’est pas « politique », mais plutôt d’ordre technique.
Sans débat, embrigadé dans un format où le temps de parole a été restrictif, le mini oral du Pm Dionne et de son équipe devant l’Assemblée nationale a laissé, à dire vrai, les Sénégalais sur leur faim. Des Sénégalais qui attendaient des réponses de fond sur les questions majeures qui font leur quotidien. En lieu et place d’un dialogue structurel entre le gouvernement et l’Assemblée nationale (pouvoir et opposition) qui laisse libre champ au débat contradictoire, on a assisté vraisemblablement à un exercice à l’issue duquel les citoyens n’ont nullement été mieux informés qu’ils ne l’étaient avant le passage de Dionne et cie devant la douzième législature. Plaidoyer pour un autre rendez-vous plus structuré et plus…citoyen, dans un mois !