Nelson Mandela, héros la lutte contre le régime raciste d'apartheid et premier président noir de l'Afrique du Sud démocratique, est mort jeudi à l'âge de 95 ans, a annoncé le chef de l'Etat Jacob Zuma à la télévision.
"L'ex-président Nelson Mandela nous a quittés (...) il est maintenant en paix. La Nation a perdu son fils le plus illustre", a déclaré le président Zuma lors d'une intervention en direct peu après 21h30 Gmt.
"Il s'est éteint en paix (...). Notre peuple perd un père", a-t-il ajouté avant d'annoncer que les drapeaux seraient mis en berne à partir de vendredi et jusqu'aux funérailles d'Etat dont il n'a pas annoncé la date.
"Exprimons la profonde gratitude pour une vie vécue au service des gens de ce pays et de la cause de l'humanité", a-t-il enchaîné. "C'est un moment de profond chagrin (...) Nous t'aimerons toujours Madiba".
"Comportons nous avec la dignité et le respect que Madiba personnifiait", a ajouté M. Zuma, qui a utilisé le nom de clan du héros de la lutte contre l'apartheid, un nom utilisé familièrement par tous les Sud-Africains pour désigner leur idole.
"Une grande lumière s'est éteinte", a réagi le Premier ministre britannique David Cameron, alors que le président américain Barack Obama devait s'exprimer vers 22H30 Gmt.
Nelson Mandela, qui fut le premier président noir de son pays de 1994 à 1998, a été hospitalisé du 8 juin au 1er septembre pour une rechute d'une infection pulmonaire et probablement d'autres complications.
Il avait ensuite été ramené chez lui, dans sa maison de Johannesburg qui avait été équipée comme un hôpital. Leader du combat des Noirs contre la ségrégation de l'apartheid, Nelson Mandela a passé 27 ans de sa vie en détention. Libéré en 1990, le plus célèbre prisonnier politique du monde devint quatre ans plus tard le premier président noir démocratiquement élu de son pays (1994-1999).
Il s'était retiré dès la fin de son mandat, pour se consacrer à la protection de l'enfance et à la lutte contre le sida, fléau de l'Afrique du Sud.
Le "long chemin vers la liberté" (titre d'une autobiographie parue en 1994) de Nelson Rolihlahla Mandela a commencé le 18 juillet 1918 dans le hameau de Mvezo, dans le bantoustan du Transkeï (aujourd'hui province de l'Eastern Cape, sud-est) où il naît au clan royal des Thembu, de l'ethnie xhosa.
"J'ai lutté contre la domination blanche et j'ai lutté contre la domination noire", avait-il dit pour résumer son long combat pour la liberté: "Mon idéal le plus cher a été celui d'une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie avec des chances égales. J'espère vivre assez longtemps pour l'atteindre. Mais si cela est nécessaire, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir".
Du bagne de Robben Island, au large du Cap, où il passera 18 ans, des prisons de Pollsmoor et de Victor Verster, Mandela inspire la révolte des townships (1976). C'est également en prison qu'il reçoit les approches secrètes du gouvernement blanc, prémices à des négociations avec l'Anc.
Libéré le 11 février 1990, le détenu 46664 (numéro qui symbolisera sa grande campagne contre le sida) réapparaît face aux caméras du monde au côté de sa deuxième épouse Winnie, dont il se séparera deux ans plus tard. Triomphalement élu à l'issue des élections du 27 avril 1994, il affiche dès son discours d'investiture la mission qui allait guider sa présidence. Convaincu que la société sud-africaine continuerait d'oeuvrer à faire du pays un "miracle", il avait promis: "Lorsque j'entrerai dans l'éternité, j'aurai le sourire aux lèvres".
(AFP)MACKY SALL: « UNE DES PLUS GRANDES FIGURES DE L’AFRIQUE CONTEMPORAINE »
« Nous venons de perdre un géant, une des plus grandes figures de l’Afrique contemporaine. Aucun homme de notre temps ne s’est autant donné pour la cause de son peuple, de l'Afrique, pour le bien de l'humanité entière. Nelson Mandela nous a enseigné le courage, la résistance, le pardon. Il a révélé en nous ce qu'un humain pouvait avoir de meilleur. Nous l’admirions comme un héros des temps modernes et admirions sa sagesse qui sera éternelle. Mandela s’en est allé, mais son oeuvre gigantesque restera une des plus achevées jamais produite par un homme ».
ABDOU LATIF COULIBALY EXPRIME LA TRISTESSE DU SÉNÉGAL
Le gouvernement sénégalais a exprimé sa tristesse suite au décès de l'ancien président sud-africain Nelson Mandela, décédé jeudi à l'âge de 95 ans, a indiqué son porte-parole, Abdou Latif Coulibaly. "Mandela bénéficiait d'une reconnaissance dans son pays et dans le monde entier. Pour l'estime que nous lui portions, nous faisons part de notre tristesse", a-t-il dit, dans un entretien en wolof, sur la radio privée RFM.
"Nous allons exprimer notre tristesse suite à cette douleur que nous partageons avec le monde entier. Pour l'attitude que nous aurons, nous allons la donner dans les prochains jours", a-t-il ajouté. "Le Sénégal ne sera pas en reste pour rendre un hommage mérité à Mandela et à sa gloire", a poursuivi le porte-parole du gouvernement.
(APS)MANDELA, CE HÉROS ÉTERNEL
Nelson Rolihlahla Mandela, né le 18 juillet 1918, est décédé hier, jeudi 5 décembre 2013, à l’âge de 95 ans. Il est sans doute l’une des figures politiques les plus marquantes de l’histoire de l’Humanité. Avec sa mort, disparaît une icone de la résistance à l’oppression, un symbole de la lutte contre le racisme, l’injustice et toutes les formes d’inégalités sociales. Celui que ses compatriotes appelaient respectueusement et affectueusement Madiba fut un « freedom fighter », un combattant de la liberté qui, durant toute son existence, s’était illustré dans la défense des droits des Sud-africains noirs et de tous les opprimés de la terre.
Son parti, l’African national congress (Anc), fondé en 1912 à Bloemfontein, avait comme combat principal la défense des intérêts de la majorité noire contre la domination de la minorité blanche en Afrique du Sud. Il se dressa contre le régime d’apartheid institué en 1948 après la victoire du Parti National afrikaner. Les résistances de Mandela et de ses camarades ne tardèrent pas à se manifester. Sept ans plus tard, en juin 1955, l’Anc et des militants anti-apartheid (parmi lesquels des Blancs révolutionnaires) organisèrent le Congrès du peuple qui permit d’élaborer une Charte dite de la liberté dans laquelle ils résumèrent l’ensemble des revendications de ceux qu’on appelait, à l’époque, les gens de couleur. Leur cri de ralliement : l'égalité des droits pour tous, quelle que soit la couleur de la peau et les origines sociales.
Au début de ce long combat vers la liberté, ce ne fut pas facile. Il fallait faire face à une armada militaire qui n’hésitait pas à réprimer dans le sang toute tentative de résistance. On se rappelle les massacres de Sharpeville (le 21 mars 1960) qui avaient fait 69 morts et de Soweto (le 16 juin 1976) dont le bilan fut lourd avec plus de 500 cadavres abandonnés sur le macadam dont ceux de nombreux étudiants et élèves noirs parmi lesquels Hector Pietersen, à peine âgé de 12 ans. L’une des photos de cette tuerie avait d’ailleurs fait le tour du monde. On y voit le jeune élève, mort, porté par l’un de ses camarades du nom de Mbuyisa Makhubo.
Le combat de Mandela vers la liberté fut long et éprouvant. L’Anc fut interdit en 1960 par le régime qui avait fait de l’apartheid (la séparation des races) son programme politique et social. Pendant des décennies, Nelson Mandela, Albert Luthuli, Walter Sisulu, Oliver Tambo, Govan Mbeki (père de Thabo Mbeki, le deuxième président noir d’Afrique du Sud après Mandela) et les combattants du « Umkhonto we Sizwe » (la branche armée du parti) risquaient leur vie pour faire face aux oppresseurs. Il y eut de nombreuses arrestations parmi les membres de l’Anc. Ainsi, 156 militants furent jetés en prison en 1956 avant d’être libérés en 1961.
Deux ans plus tard, en 1963, Mandela fut arrêté et condamné à la prison à perpétuité « pour haute trahison » en même temps que Walter Sisulu et d’autres dirigeants de l’Anc. Pendant 26 ans, Mandela fut maintenu en détention, principalement dans la prison de Robben Island, au large de la ville du Cap. Il ne fut libéré qu’en février 1990 après une longue détention qui lui permit de se forger une image d’icône et un mental de leader charismatique.
L’Anc ne fut reconnue que le 2 février 1990, soit un an avant la fin officielle de l'apartheid en juin 1991. C’était la fin d’une période sombre faite d’injustice, de violences raciales… et le début d’une nouvelle ère que Mandela lui-même inaugura en lançant le beau slogan de « nation arc-en-ciel » et en instaurant la fameuse « Commission vérité et réconciliation » présidée par son compagnon de lutte Mgr Desmond Tutu. L’objectif était de cicatriser les blessures, d’effacer les traumatismes en donnant aux victimes de l’apartheid et à leurs bourreaux l’occasion de se parler en public, de pardonner pour les premières et de présenter des excuses pour les seconds.
Ce fut comme un immense divan de psychanalyste sur lequel défilèrent des centaines de personnes pour déverser leur trop plein de rancœur et de regrets. Un exutoire qui permit à tout un peuple de vaincre les démons de la division et de dominer leur désir de vengeance. Il fallait être, comme Mandela, psychologiquement fort et humainement généreux pour surmonter cette épreuve, fermer la parenthèse du racisme, de l’oppression, de l’injustice et s’engager dans une nouvelle dynamique politique. La consécration du combat politique de Nelson Mandela fut son élection à une écrasante majorité, en 1994, comme le premier président noir d’Afrique du Sud. Cette victoire était comme un hymne à la persévérance et inspira d’autres dirigeants politiques à travers le monde qui, à force d’abnégation, de lutte et de privations, parvinrent eux aussi à accéder au pouvoir.
L’ancien président sud-africain était apparu très affaibli ces derniers mois. Pendant longtemps, les médias et l’opinion publique guettaient la moindre information sur son état de santé. On le savait malade, très malade même, affaibli et ployant sous le poids de l’âge et des séquelles de ses longues années de détention, mais on avait toujours une lueur d’espoir, comme si on pensait qu’il était devenu immortel. Il est certes parti, mais Madiba restera à jamais gravé dans la mémoire collective de l’Humanité comme une icone inoubliable, un héros éternel…
Par Modou Mamoune FAYE
UN LONG CHEMIN VERS LA LIBERTÉ
Pour en arriver à une Afrique du Sud post apartheid, le chemin fut long et semé d’embûches. Retour sur le processus qui a conduit à la libération de Nelson Mandela.
« Toute ma vie je me suis consacré à la lutte pour le peuple africain. J'ai combattu contre la domination blanche et j'ai combattu contre la domination noire. J'ai chéri l'idéal d'une société libre et démocratique dans laquelle toutes les personnes vivraient ensemble en harmonie et avec les mêmes opportunités. C'est un idéal pour lequel j'espère vivre et agir. Mais, si besoin est, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir ». Cet idéal a mis du temps à se concrétiser : 27 ans. Le processus fut long pour accou- cher de la nation arc-en-ciel. Des conditions de détention très dures à la prison dans l'île de Robben Island, le régime de l’Apartheid assouplit sa position sous l’effet conjugué de la pression internationale et d’un contexte intérieur difficile.
Pourtant, les premiers contacts entre le lea- der de l’ANC et le pouvoir de Pretoria datent du début de l’année 1976. Cette année, Jimmy Kruger, le ministre des prisons, rend visite à Nelson Mandela et lui propose une libération à condition qu’il se fixe au Transkei alors dirigé par son neveu Kaiser Matanzima. Il décline l’offre.
Mais les émeutes du 16 juin 1976 à Soweto, la mort de Steve Biko, fondateur du Mouve- ment conscience noire, en septembre 1977 et la résolution 417 du conseil de sécurité « condamnant vigoureusement le régime raciste sud-africain » et demandant la libération de « toutes les personnes emprisonnées au titre de lois arbitraires sur la sûreté de l'État (...) et pour leur opposition à l'apar- theid », suivie en novembre de la même année de la résolution 418 imposant un embargo sur les ventes d’armes à l’Afrique du Sud, vont pousser les autorités sud-africaines à assouplir le régime carcéral de Nelson Mandela et de ses codétenus politiques. En 1979, il revoit Winnie épousée en secondes noces. Trois ans plus tard, c’est-à-dire en mars 1982, Nelson Mandela est transféré avec les principaux responsables de l’ANC à la prison de Pollsmoor dans la banlieue du Cap. Le ministre sud-africain de la justice de l’époque avait expliqué ce transfert par le souci d’établir un « contact discret » entre ces responsables et le gouvernement sud-africain. En fait, ce changement dans la position du gouvernement sud-africain était lié au contexte. Le MK, la branche militaire de l’ANC avait repris les opérations de guérilla qui avaient fait de nombreuses victimes civiles, notamment des blancs. En réaction, les escadrons de la mort traquent jusqu’en Europe les opposants au gouvernement de l’apartheid. C’est dans ce climat de violence que le président Pieter Willem Botha offre, en février 1985, contre l’avis de ses ministres, la liberté conditionnelle à Nelson Mandela, en échange du renoncement à la lutte armée. Madiba rejette l’offre à nouveau. Dans un communiqué rendu public par sa fille, il expose ses raisons. Mais cette phrase a plus retenu l’attention : « Quelle liberté m'est offerte alors que l'organisation du peuple demeure interdite ? Seuls les hommes libres peuvent négocier. Un prisonnier ne peut pas faire de contrat ».
La même anneée, Perter W. Botha fait un autre geste. Il abolit les lois sur les laissez-passer et les mariages mixtes. Nelson Mandela qui continue à réclamer l’égalité entre blancs et noirs considère ces actes timides. Pourtant, la première rencontre officielle entre Nelson Mandela et le gouvernement sud-africain a lieu en novembre 1985. Le ministre de la justice d’alors se rend au chevet de Mandela opéré de la prostate, à l’hôpital Volks au Cap. Ainsi, de 1985 à 1989, les deux parties se rencontrent. Cela a permis de jeter les bases de futures négociations. D’ailleurs les conditions de détentions se sont considérablement améliorées. En 1986, la dernière prison de Nelson Mandela est une villa avec piscine. Le 7 décembre 1988, il est placé en résidence surveillée.
Malgré cet assouplissement, la pression nationale et internationale ne faiblit pas. Au plan international, Nelson Mandela reçoit le prix Ludovic Trarieux dont il est le premier lauréat pour son engagement en faveur des droits de l’homme. En juin 1988, le concert hommage de ses 70 ans à Wembley, regardé par plusieurs centaines de millions de personnes à travers le monde, accentue la pression sur le pouvoir de Pretoria. Au plan national, la violence fait rage. « Face au spectre d’une Afrique du Sud coupée en deux camps hostiles se massacrant mutuellement », comme il le dit, Nelson Mandela écrit, en 1989, à Pieter Botha pour lui faire part de son désir de négociations entre le gouvernement et l'ANC. Les deux hommes se rencontrent le 5 juillet 1989 dans la résidence de Botha. Mais l’arrivée de Frederik de Klerk va accé- lérer les choses. Le nouveau président sud- africain libère, le 15 octobre 1989, sept dirigeants de l’ANC, dont Walter Sisulu. Nelson Mandela dira de Klerk qu'il est « le plus sérieux et le plus honnête des leaders blancs » avec qui il a pu négocier. En fé- vrier 1990, De Klerk, au cours d'un dis- cours prononcé au parlement, annonce la libération de Nelson Mandela.
Mamadou Guèye
APARTHEID, SOWETO, LIBERATION DE MANDELA... LE COMBAT DES MUSICIENS AFRICAINS
« Apartheid is Nazism », « Asimbonanga », « Nelson Mandela », « Soweto » ... Ils sont nombreux, ces tubes d’artistes africains chantés pour dénoncer le système ségrégationniste alors en place en Afrique du Sud et l’emprisonnement des leaders de l’Anc, dont le plus célèbre était Nelson Mandela. « Vers les années 1980, je me suis intéressé à l'Apartheid et j'ai écrit une chanson pour Nelson Mandela. Elle a permis à de nombreux analphabètes de connaître l'Apartheid. J'ai été poussé à m'engager beaucoup plus pour les droits de l'Homme. J'ai participé à la grande tournée Amnesty international avec Sting, Tracy Chapman, etc. Cela a ouvert quelque chose en moi et je me suis rendu compte que, hormis ma musique, je pouvais aller plus loin en défendant les causes humanitaires, les droits de l'Homme, la justice, etc. », ainsi parlait Youssou Ndour dans une des ses nombreuses interviews accordées à la presse. En 1985, la star de la musique sénégalaise, pour participer à la lutte contre l'Apartheid, avait organisé, au stade Demba Diop de Dakar, un concert pour la libération du leader de l’Anc, incarcéré en Afrique du sud depuis 1964. Youssou Ndour mettra, en 1986, sur le marché international un disque de 8 titres baptisé « Nelson Mandela », avec un morceau éponyme dédié au héros de la lutte anti-apartheid.
En 1986, Oumar Pène, lead-vocal du Super Diamono, et autre ténor de la musique sénégalaise, séduit les mélomanes avec le titre « Soweto », un tube très jazzy, en souvenir des soulèvements sanglants survenus le 16 juin 1976 dans ce célèbre township de Johannesburg. Un morceau resté mythique dans le répertoire d’Omar Pène et du Super Diamono qui l’ont remixé en acoustique dans l’album « Miyamba » sorti au début des années 2000 à Paris.
« Mama africa », une vie de lutte
En 1988, le groupe sénégalais Xalam II, qui en 1975, avait déjà effectué une tournée africaine avec Myriam Makeba et Hugh Masekela, participe, à Paris, à la « Nuit anti-apartheid », en hommage à Nelson Mandela sur le Champs de Mars devant près de 25.000 personnes. Auparavant, Xalam II avait sorti, en 1986, son titre « Apartheid ». On apprend par la plume de Jenny Cathcart, que Hugh Masekela invita le Xalam à se produire à Monrovia, au Liberia, lors d’un festival destiné à récolter des fonds pour le Congrès national africain. Les musiciens sénégalais du Xalam débarquèrent alors dans la capitale libérienne avec une nouvelle chanson, « Apartheid ». Fela était là, ainsi que Myriam Makeba et son mari Stokely Carmichael, qui, après le concert, ramenèrent en limousine les garçons du Xalam à la maison, lit-on dans le texte de Cathcart. Myriam Makeba ! Toute une vie consacrée à dénoncer l’ignominie qu’est le système ségrégationniste de l’Apartheid mis en place dans son pays.
La chanteuse sud africaine, vedette internationale dès les années 1950, a dénoncé tout le long de sa riche carrière vécue pour l’essentiel en exil, ce régime de l'Apartheid. Partout, en Afrique, en Europe et aux Etats-Unis, Miriam Makeba, ne cessera de prononcer des discours anti-apartheid et d’appeler au boycott de son pays avec son système ségrégationniste. Disparue en 2008, à l’âge de 76 ans, Makeba, chantre de la tolérance et de la paix, a incarné des rôles dans des films anti-apartheid, mais également a toujours appelé au pardon. « Il faut nous laisser grandir. Les Noirs et les Blancs doivent apprendre à se connaître, à vivre ensemble. », disait celle qui est surnommée la « Mama Africa ».
Un autre artiste et chanteur sud africain, non moins célèbre et également pourfendeur du système Apartheid, c’est Johnny Clegg dit le Zulu Blanc. Il est l’auteur, en 1985, avec son groupe Savuka, de l’album « Third world child », un succès mondial avec le titre « Asimbonanga », un hymne dédié au célèbre prisonnier politique qu’est Nelson Mandela, alors détenu au large du Cap, à Robben Island.
Plus tard, au Sénégal, d’autres artistes chanteurs se sont distingués en évoquant dans leurs textes la situation vécue par les Noirs dans cette partie australe du continent africain. C’est l’exemple de la jeune Coumba Gawlo Seck qui, en 1986, à l’âge de 14 ans, est sacrée « Voix d’Or » à la suite d’un concours de chant qu’elle gagne avec le titre « Soweto », dédié à la lutte anti-apartheid et composé par son père. Ismaël Lô et Thione Ballago Seck ont également écrit des textes de chansons au courant des années 1980 pour demander « A quand la fin de l’Apartheid ? ».
En évoquant cet engagement des musiciens sénégalais, on ne peut oublier que le thème a aussi mobilisé des chanteurs africains comme le reg- gaeman ivoirien Alpha Blondy qui fustigeait les conditions de ce régime de ségrégation raciale dans le titre « Apartheid is Nazism ».
Et tant d’autres artistes du continent ont donné de la voix jusqu’à la chute du système ségrégationniste et la libération, le 11 février 1990, de Nelson Mandela. Une icône mondiale d’une Afrique du Sud multiraciale et re- devable à bien des égards au reste du continent qui a fait sien le combat des libertés et de la démocratie mené depuis 1912 par l’Anc et ses dirigeants...
Omar diouf
WINNIE MANDELA, L'ÉGÉRIE DE LA LUTTE CONTRE L'APARTHEID
Un caractère mi-ange mi-démon résume la trajectoire de la deuxième épouse de Nelson Mandela. Egérie de la lutte antiapartheid, condamnée pour fraude, vols, enlèvement…, Winnie Mandela est un personnage à facettes multiples.
Une femme complexe, Winnie Mandela l’est sans conteste. Surnommée la « mère de la nation », au regard de son héroïsme pour la résistance des Noirs en Afrique du Sud, sa trajectoire glissera vers une pente moins flatteuse avec erreurs et revers à la pelle. En 1996, elle divorce avec son époux, Nelson Mandela, après 38 ans de mariage. Nomzamo Winifred Zanyiwe Madikizela à l’état civil, Winnie Mandela est native du village de Bizana, dans le Cap-Oriental. Après sa rencontre avec Nelson Mandela, leader de l'Anc, elle devient son épouse. Très vite, elle apparaît comme l’icône de la lutte antiapartheid durant les longues années de prison de son mari (août 1962-février 1990). Winnie était aux premières heures et en première ligne dans la lutte. Alors que son époux venait d’être condamné à perpétuité, elle avait lancé cette phrase : « Je ne perdrai jamais espoir, mon peuple ne perdra jamais espoir ». Seule, pendant vingt-sept ans, Winnie a élevé leurs deux filles et bravé l'apartheid.
A l’époque, elle est assignée à résidence et n'est autorisée à rencontrer son mari que deux fois par an, tous les 6 mois, à la prison de Robben Island. Au milieu des années 80, le discours de Winnie se radicalise avec cette phrase choc : « Avec nos boîtes d'allumettes et nos pneus enflammés, nous libérerons ce pays ».
Sa réputation sera entachée lorsque son garde du corps et ancien amant, Jerry Richardson, l'accuse de lui avoir ordonné de tuer un jeune activiste de 14 ans de l'Anc, Stompie Seipei Moketsi, en janvier 1989, qu'elle accuse d'espionnage au profit du gouvernement blanc. Et c'est au bras de son mari enfin libre qu'elle semble regagner sa légitimité, mais celui-ci prend assez rapidement ses distances avec son épouse. En 1991, il la soutient encore quand la justice sud-africaine la condamne pour enlèvement et complicité dans le meurtre de Moketsi. Sa sentence de six ans de prison pour enlèvement est réduite à une amende en appel. Plus tard, devant la Commission de la vérité et de la réconciliation, ses anciens complices affirment qu'elle avait été l'organisatrice de l'enlèvement et avait aussi participé directement au meurtre de Moketsi, battu à mort. Ce sera la goutte de trop. Son époux divorce avec elle en 1996. Winnie prend alors le surnom de Madikizela-Mandela. De 1993 à 1997, elle préside la ligue des femmes de l'Anc.
En décembre 1997, elle renonce à sa candidature à la vice-présidence de l'Anc après de nouvelles révélations sur son implication dans le meurtre de Stompie Seipei Moketsi devant la Commission Vérité et Réconciliation de l'archevêque Desmond Tutu.
Avec une liberté de ton et d’esprit, Winnie Madikizela-Mandela décrie en mars 2010 la politique menée par son ex époux. Elle lui reproche d'avoir accepté de partager le prix Nobel de la paix avec Frederik de Klerk et l'accuse « d'avoir laissé tomber les Noirs et d'avoir favorisé l'économie blanche ». Sur la même ligne, elle critique Nelson Mandela d'être devenu « une fondation privée » après avoir quitté la présidence. Winnie pousse le bouchon plus loin. Elle s’en est prise à la Commission de la vérité et de la réconciliation qui avait estimé en 1997 qu'elle avait « commis des violations grossières des droits de l'Homme ».
Erreurs et revers multipliés pour Winnie. Ses premiers déboires apparaissent en 1991. Un an après la libération de Nelson Mandela, le régime de l’apartheid l’a traduite en justice pour le meurtre présumé du jeune Stompie Seipei, membre d’un club de football qu’elle avait monté à Soweto. Condamnée à la prison, elle avait ensuite fait appel et écopé d’une amende. Des révélations sur sa liaison avec l’un de ses gardes du corps avaient alors ébranlé sa relation avec Nelson Mandela. Deux ans avant leur divorce, en 1996, Winnie avait été écartée des cérémonies d’investiture de Nelson Mandela, élu président en avril 1994.
Un an plus tard, elle avait été limogée du poste de second rang qui lui avait été réservé au sein du gouvernement, en tant que vice-ministre des Arts et de la Culture. Elle avait été à nouveau écartée du leadership, en 1997, avant un congrès de l’Anc marqué par son retrait de la course au poste de secrétaire général du parti. Winnie est restée très populaire et a incarné l'égérie de la lutte contre l'apartheid. Elle devient le porte-voix des pauvres et des déçus de l'Anc. La disgrâce se poursuit jusqu’en 2003, période à laquelle la « Mère de la nation » est condamnée à cinq ans pour vol et fraude.
E. Massiga FAYELa suite du dossier dans notre édition de demain
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