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Jeu, Nov
dimanche, 16 février 2014 00:00

Sénégal : Réformes institutionnelles, la République de Weimar et les Limites de Mbow

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Lui-même atteint par la limite d'âge, Amadou Moctar Mbow a présenté le 13 février dernier un avant-projet sommaire frappé de beaucoup d'insuffisances morales, portant toutes sur des limitations : la République qu'il a imaginée pour la réforme des institutions au Sénégal est pire que celle de Weimar et les limites imposées par le nonagénaire dénient tout pouvoir au peuple souverain. Après 17 mois de "concertations" short-listées autour de la réforme des institutions du Sénégal, la commission Mbow a présenté son rapport au président de la République Macky Sall le 11 février dernier. L'avant-projet sommaire (Aps) ainsi produit s'est voulu une synthèse des conclusions des  assises nationales (Premier juin 2008 au 24 mai 2009) et du programme "Yonnu yokkute" du candidat Macky Sall à la présidentielle de 2012, autant dire de profession de foi de candidats non encore élus et de l'élu qui a rejeté son programme ; il est en conséquence peu probable qu'il soit suivi d'un avant-projet détaillé (Apd) et du projet lui-même.

 
A la pratique en effet, les assisards ont été rejetés et battus (Niass et Tanor ont reçu 25% du scrutin de février 2012) et Macky Sall (26%) s'est rendu compte, à la pratique, qu'il fallait évoluer dans sa compréhension de la chose politique une fois au pouvoir puisque le projet de conquête du pouvoir n'est pas forcément un programme de gouvernement ; le projet synthétique  "Sénégal émergent" lui paraît plus d'actualité qu'un programme qui a pris de l'eau de toutes parts, pour être compété par la haute réflexion au sein d'une administration républicaine qui a produit la Stratégie de croissance accélérée, qui a prolongé et amélioré le programme de réduction de la pauvreté réinitialisé Stratégie nationale pour le  Développement économique du Sénégal, etc.
 
C'est ainsi qu'il faut comprendre le décalage entre la position de Mbow et la réaction virulente de la classe politique devant ce qu'il lui semble être sorti de l'esprit éthéré et lénifié de pseudo-intellectuels très loin de la réalité socio-politique du Sénégal.
Pour Mbow & Cie en effet, il s'agit principalement, pour une meilleure gouvernance vertueuse,  de la suppression  du cumul du mandat de député et celui de maire, et la création de la Cour constitutionnelle en lieu et place du Conseil constitutionnel, du mandat du président fixé à cinq ans et renouvelable une seule fois, du mandat du président de l'Assemblée nationale dont la durée ne peut excéder cinq ans, avec un oubli de taille pour le reste du bureau élu en même temps que le patron du perchoir, etc...
 
Les propositions de la Commission nationale de Réforme des Institutions ont en effet accouché de la République de Weimar : une instabilité institutionnelle sortie d'un enfer pavé de bonnes intentions qui se substitue à la volonté populaire et veut régenter une République où les acteurs ont la vie courte. Les limites morales imposées aux mandats électifs sont dans les faits une dictature de mal pensants qui décident de la vie et de la mort des élus qui ne doivent plus vivre au-delà de dix ou quinze ans. Sauf à consacrer le triomphe de Poutine et de Medvedev, c'est-à-dire ramener le Sénégal aux pires dictatures d'il y a un siècle.
L'élu obligé de se faire hara kiri est ainsi dépouillé de ses prérogatives : il doit se résoudre à avouer le cadavre qu'il garde dans son armoire, comme si la politique se faisait avec des enfants de chœur : nulle part, de la France royaliste, donc inégalitaire, à l'Amérique puritaine, les candidats n'ont accepté de se présenter nus en descendant de la branche qui les a supporté jusqu'au pouvoir ; par leur rigorisme jésuite et leur angélisme rose-bonbon des bâtisseurs de cathédrales, Amadou Moctar Mbow & Cie se lancent dans un véritable hold-up dans la république de Banana, l'ancien chef d'État zimbabwéen qui siégeait au stade, à suivre des matches de foot à l'infini. 
 

Ainsi, à force de vouloir imposer des gardes-fou pour améliorer le renouvellement d'une classe politique aujourd'hui grabataire, Mbow & C° ont montré des limites méthodologiques, cognitives, heuristiques et politiques qui ramènent le Sénégal en-deçà des Assises.

Pathé MBODJE, M. Sc, Journaliste, sociologue
 

 

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Lu 28354 fois Dernière modification le dimanche, 16 février 2014 21:01

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