YEKINI, UN LUTTEUR IMPOPULAIRE : «Je suis un des rares à remplir…»

«Je ne suis pas d’accord qu’on dise que Yékini ne fait pas courir les sponsors. Mon éducation m’interdit d’avoir un certain comportement. Dans le cadre du sport, si je dois affronter un adversaire, j’essaie de le déstabiliser en toute sportivité. Dans le respect, je fais en sorte que tout le monde s’intéresse à l’événement. Si je ne m’abuse, le stade Demba Diop n’a fait guichet fermé qu’une seule fois : c’était lors de mon combat contre Bombordier. Modou Lô contre un adversaire, dont j’ai oublié le nom, l’a aussi réussi. On ne peut pas douter de ma popularité. Le documentaire «Intérieur sport» (fait sur lui par Canal+), le livre «Lutteur sénégalais» et la bande dessinée «Yékini, roi des arènes», apparue en février 2014, l’attestent.

LES MAUX DE LA LUTTE :

«Méchanceté, hypocrisie, jalousie et clanisme»

«Le combat qui vaille actuellement, c’est comment faire pour redorer le blason de la lutte avec frappe. Les amateurs ne vont plus au stade. La lutte est en train de perdre sa vitesse de croisière. Pourquoi la lutte n’attire plus ? La méchanceté, l’hypocrisie et la jalousie gangrènent la lutte. Le clanisme est en train de tuer la lutte. Aujourd’hui, chaque promoteur travaille avec un lutteur qu’il favorise. Je ne peux pas être dans ces histoires de clanisme, parce que j’ai des principes.

A la plage au petit matin, vous n’y trouverez que des lutteurs. Parfois j’ai le cœur meurtri quand je vois tous ces jeunes lutteurs s’entraîner alors que la lutte va vers une crise. Il faut faire quelque chose. Personnellement, je n’ai plus rien à prouver. J’ai fait 22 ans de carrière. Je ne peux plus gagner ce que je n’ai pas gagné jusque-là. Si on ne chante pas mes louages aujourd’hui, on le fera quand je ne serai plus de ce bas monde.»

LA PRESSE : 

«Certains reporters parlent de moi malgré eux»

«J’ai un palmarès qu’aucun lutteur n’a. Malheureusement au Sénégal, on n’en parle pas. Ce sont des étrangers, les médias européens qui sont venus parler de moi. Au Sénégal, on préfère attendre que je passe de vie à trépas pour en parler. Parfois, certains reporters de lutte parlent de moi malgré eux. C’est dommage. Mais ce n’est pas grave. Il faut que toutes les composantes de la lutte revoient leurs comportements.»

LE CNG :

«Il faut revoir le fonctionnement de ce comité»

«Le combat Modou Lô-Eumeu Sène a duré, en termes de préparation. Je me demande même si les deux lutteurs vont s’en sortir financièrement. Malheureusement, après le spectaculaire combat que Modou Lô et Eumeu Sène nous ont servi, on (le Cng) se permet de leur prendre leur argent (une partie des reliquats). Il fallait pardonner les sanctions, parce que les deux lutteurs n’ont pas triché. Il faut revoir le fonctionnement de ce comité.»

LA TRAHISON :

«Seuls les mauvais perdants l’évoquent»

«Je n’ai jamais dit que j’ai été trahi. J’ai été terrassé par Balla Gaye 2, un grand champion. Après ma chute, les gens ont voulu polémiquer. La thèse de la trahison a été agitée. Je suis monté au créneau pour dire : arrêtez ! La seule personne qui m’a terrassé, c’est mon adversaire. Après, je suis resté dans mon coin pour me soigner. Après guérison, j’ai fait une conférence de presse pour dire ce qui s’est passé et pourquoi le grand silence. Personne ne m’a jamais entendu dire que j’ai été trahi. Si un lutteur doit chercher un traître après chaque défaite, il vaut mieux arrêter la lutte. La lutte et le mystique vont de paire. Le mystique est moins grave en lutte avec frappe. Dans les tournois de lutte simple, il arrive qu’on soit atteint mystiquement jusqu’à perdre l’usage de ses bras. Et pourtant, on fait tout pour remporter le tournoi. Seuls les mauvais perdants évoquent la trahison pour se justifier.»

COMBAT CONTRE EUMEU SENE :

«Je n’ai rien reçu de Gaston»

«Après ma défaite, je ne pouvais pas revenir dans l’immédiat. Je me soignais. Pour le moment, je n’ai pas encore de combat. Je n’ai reçu aucun franc de Gaston Mbengue pour un combat contre Eumeu Sène. On a juste eu un accord de principe. Si j’avais gagné mon combat contre Balla Gaye 2, j’allais mettre fin à ma carrière. Si je suis revenu, c’est pour sortir par la grande porte. Je veux gagner avant de raccrocher. Je veux un combat choc pour mon retour. J’aime les défis.»

LE CACHET :

«Je ne toucherai plus des cachets minables»

«On parle de marasme financier dans la lutte. J’ai rampé pour arriver à ce niveau. Je ne toucherai plus des cachets minables. Au début de ma carrière, je marchais du matin au soir pour gagner 6 000 FCfa. Si je dois toucher des cachets de 40 millions, il vaut mieux laisser ça aux jeunes.»

LA RELATION AVEC MODOU LO : 

«Je ne connais pas sa maison»

«Ma relation avec Modou Lô est née d’une émission où j’étais l’invité de Bécaye Mbaye. Je l’avais une fois trouvé en regroupement en Equipe nationale. Il était encore gamin. J’ai automatiquement senti que c’est un lutteur. J’avais même demandé qui est ce jeune ? On m’a dit que c’est le lutteur des Parcelles Assainies. Je l’ai revu lors de son combat contre Papa Sow. Alors, dans l’émission, Bécaye Mbaye énumérait la nouvelle génération qui monte en puissance. Bécaye avait omis le nom de Modou Lô. J’ai alors dit à Bécaye Mbaye qu’il faut ajouter le nom de Modou Lô et de Tapha Tine. Quand Modou Lô m’a entendu dire du bien de lui, ça l’a marqué. Il (Modou Lô) a tout fait pour avoir le numéro de téléphone d’un de mes proches pour pouvoir me joindre. J’étais très content. Nous avons beaucoup discuté. Malgré toute cette affection, Modou Lô ne connaît pas chez moi, et moi non plus. J’ai été très touché d’entendre Modou Lô dire qu’il ne veut pas m’affronter, mais plutôt écouter mes conseils. Voilà l’histoire de ma relation avec Modou Lô. J’ai connu Eumeu Sène avant Modou Lô. Eumeu sène et moi, nous partagions la même chambre en Equipe nationale. Mais aujourd’hui, nous n’avons pas cette relation.»

ANECDOTE

«Mon fils et Messi»

«Les lutteurs ne doivent pas être chassés des établissements. Nous ne faisons que nous entraîner et rien d’autre. Et encore nous nous entraînons après que les élèves sont descendus. Les élèves ne suivent-ils pas la Ligue des Champions ? J’ai une anecdote. Un jour, j’ai appelé mon fils au téléphone pour lui parler, parce que j’avais sa nostalgie. Il était tellement concentré sur son match de football qu’il m’a dit : «Papa attend un peu, c’est Messi qui joue.» C’est encore plus grave.»

source: http://www.gfm.sn/actualites/item/11735-yekini-du--grand-rendez-vous--la-mechancete-lhypocrisie-la-jalousie-et-le-clanisme-gangrenent-la-lutte.html