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Sam, Déc

Pourquoi l’OIT détruit-elle ce que l’OMS essaye de construire ?

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Pour  lutter contre le travail des enfants,  l’Organisation Internationale du Travail (OIT) a reçu des fonds de l’industrie du tabac. Elle a perçu, dans un passé récent, dans le cadre du partenariat public-privé avec l'industrie du tabac, 15 millions de dollars de la société Japan Tobacco International et de groupes liés à quelques-uns des plus grands fabricants de tabac pour « des partenariats de bienfaisance » destinés à réduire le travail des enfants dans les champs de tabac.

 

Fondée en 1919, sous l’égide du Traité de Versailles, qui a mis fin à la première guerre mondiale, l’OIT est l’unique agence 'tripartite' de l'ONU, regroupant des représentants des gouvernements, employeurs et travailleurs. Elle compte  187  Etats membres dont l’objectif vise  à établir des normes internationales, élaborer des politiques et concevoir des programmes visant à promouvoir le travail décent pour tous les hommes et femmes dans le monde.

En octobre 2017, plus de 150 organisations à travers le monde ont demandé à l’Organisation Internationale du travail (OIT) a renoncé au fonds provenant de l’industrie du tabac et de couper tous les liens avec cette industrie sur la base de la politique type des Nations unies et de l’article 5.3 de  la Convention cadre de l’OMS pour la Lutte Antitabac qui interdit l’ingérence de l’industrie du tabac dans la définition des politiques publiques de santé.

La Convention Cadre est le premier traité négocié sous les auspices de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Fondé sur des données factuelles, ce traité réaffirme le droit de tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible. Elle  a été élaborée à la suite d’un constat : la mondialisation de l’épidémie de tabagisme dont la propagation est facilitée par la libéralisation des échanges commerciaux et les investissements étrangers directs.  

Adoptée à Genève le 21 mai 2003, elle est entrée en vigueur le 27 février 2005, 90 jours après adhésion, ratification, acceptation ou approbation par 40 états.  Le Sénégal a ratifié la CCLAT le 14 Décembre 2004. Les dispositions essentielles qu’elle comporte  ont été transposées dans notre positif interne en 2014, à travers l’adoption de la loi 2014-14 du 28 Mars 2014 relative à la fabrication, au conditionnement, à l’étiquetage, à la vente et à l’usage du Tabac.

Pour se défendre de fonds reçu de l’industrie du tabac, l’OIT dit utiliser cet argent pour améliorer les conditions de travail des enfants. Cependant, la situation inchangée des conditions de travail des enfants dans le secteur du tabac malgré l’argent encaissé de l’industrie du tabac, doit amener l’OIT reconsidérer sa position. Cet argument qu’elle chante comme un refrain pour se donner une bonne conscience entre non seulement en contradiction avec les valeurs et principes du système des Nations Unies mais pose un problème de singularité situationnelle voulue  dont on ignore les veritables raisons profondes inavouées.

Paradoxalement, au moment où l’OIT se délecte d’encaisser l’argent de l’industrie du tabac en foulant aux pieds delibérement la politique type de l’ECOSOC  relative aux interactions avec l’industrie du tabac, l’AIEA,  le PNUD, ’l’UNESCO et l’OMS pourtant des organismes du système des Nations Unies la mettent en application.

L’article 5.3 de la Convention Cadre de l’OMS pour la Lutte Antitabac (CCLAT) interdit aux pays Parties membres à la Convention de se laisser influencer par l’industrie du tabac au moment de définir les politiques publiques de santé. Toutefois, en tant qu’industrie légalement installée, les interactions avec l’industrie du tabac sont autorisées dans un cadre bien défini. Ces interactions avec l’industrie du tabac, doivent non seulement être transparentes mais être documentées.

En effet, la mise en application de la politique type du système des Nations Unies par l’OIT, ne peut empêcher l’interaction de celle-ci avec l’industrie du tabac. Car cette interaction est légitime du fait, d’une part, que c’est la constitution de l’OIT qui l’exige et d’autre part, que c’est conforme à la politique type des Nations Unies lorsque le dialogue est non financier et au régime tripartite de l’OIT.

Par ailleurs, le système des Nations Unies doivent à travailler davantage à préserver sa cohérence, et sa réputation dans le cadre de la promotion du développement qui ne rime pas avec les interactions interdites avec l’industrie du tabac.

Le tabagisme rend malade et tue non seulement celui qui en use mais celui qui est exposée à la fumée de tabac. Il rend pauvre et malade en provoquant des absentéismes au travail. En outre, le tabagisme saigne les économies nationales et détruit l’environnement. Des conséquences, à l’antipode des objectifs du développement durable, qui risquent d’être des utopies sans un capital humain sain et sauf protégé des maladies invalidantes et mortelles provoquées par la consommation du tabac et l’exposition à la fumée de tabac. La santé est le socle de tout développement. Justement, il ne peut en être autrement tant que l’humanité n’aura pas vaincu la maladie et la mort.

Ainsi, du fait des conséquences néfastes du tabagisme sur la santé, l’économie et l’environnement, l’industrie du tabac a été retirée de la liste socialement responsable du Pacte mondial des Nations Unies. Mais le hic dans cette affaire, c’est le fait que parmi tous les organismes de l’ONU, l’Organisation Internationale du Travail (OIT) est le seul organisme à  recevoir  de l’argent de l’industrie du tabac sous un prétexte noble : améliorer les conditions de travail des enfants dans les champs de tabac.  Ce qui est contradictoire et inadmissible en tant que membre de l’Equipe spéciale interrogations pour la prévention et la maitrise des maladies non transmissibles (UNIATF) et membre observateur de la Convention Cadre de l’OMS pour la Lutte Antitabac (CCLAT).

 

 

L’Equipe spéciale interrogations pour la prévention et la maitrise des maladies non transmissibles (UNIATF) a été mise en place par la résolution 2013/ 12 de l’ECOSOC. La mise en application de la CCLAT est prioritaire pour l’UNIATF dont l’objectif est de mobiliser l’ensemble des organises du système des Nations Unies pour mettre en œuvre le programme de lutte contre les maladies non transmissibles.

Bref ! L’OIT est membre  l’UNIATF dont le but faut-il le rappeler, vise  à faire face à la prise en charge des maladies non transmissibles dont la propagation va crescendo dans le monde sous l’influence de plusieurs facteurs dont la culture du tabac, la consommation du tabac et l’exposition à la fumée de tabac.

Décidément, sur les 181 pays Parties membres à la Convention-Cadre de l’OMS pour la Lutte Antitabac (CCLAT), force est de constater que seuls 13 des 187 pays Parties membres à l’Organisation Internationale du Travail (OIT) ne sont pas juridiquement liés au traité c’est-à-dire ne sont pas Parties membres à la Convention Cadre précitée.

Si l’Organisation Internationale du Travail (OIT) est statutairement responsable en premier lieu de la lutte contre le travail des enfants, l’OMS en ce qui la concerne a pour but est d’améliorer les perspectives d’avenir et la santé future pour toutes les populations du monde. Elle combat à la fois contre les maladies infectieuses et les maladies non transmissibles. Elle s’assure de la sécurité sanitaire de l’air que les personnes respirent, des aliments qu’elles consomment, de l’eau qu’elles boivent, ainsi que des médicaments et des vaccins dont elles ont besoin.

Spécifiquement au domaine de la lutte contre le tabagisme, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) à travers le traité de la Convention Cadre pour la Lutte Antitabac protège les générations présentes et futures des effets sanitaires, sociaux, environnementaux et économiques dévastateurs de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée de tabac (articles 17 et 18 de la CCLAT).

En novembre 2017, dans un communiqué publié à Genève, l'Organisation Internationale du Travail (0IT) annonce, " le Conseil d'administration a décidé que l'OIT ne doit pas accepter de nouveaux financements de la part de l'industrie du tabac et que les partenariats public-privé avec l'industrie du tabac ne seront pas prolongés au-delà de leur date d'expiration "

L’intention est claire. Mais le monde attend de l’OIT un acte concret de renoncement aux fonds de l’industrie du tabac. L’enfer est pavé de bonnes intentons. Le Conseil d’administration de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) est en réunion du 08 au 22 Mars 2018, à Genève. On sera désagréablement surpris, si, au sortir de cette réunion, elle continue de recevoir les fonds de l’industrie du tabac sauf si elle est sans conscience et sans éthique.

Par Baba Gallé DIALLO

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