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Mame Less Camara, Président du Tribunal des Pairs- « Le tribunal des pairs n’est pas une instance des vertueux face aux ripoux… »

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Mame Less Camara

iGFM- (Dakar) IGFM vous propose l’intégralité du discours du doyen Mame Less Camara élu président du Tribunal des pairs.

« Chers consœurs et confrères

Les Journalistes et Techniciens de la Communication sociale ici présents s’honorent qu’il ait plu à votre Excellence, de rehausser de votre distinguée présence, la cérémonie d’installation du Tribunal des Pairs, instance dont les membres ont été choisis par le Directoire du Conseil pour l’Observation des Règles d’Ethique et de Déontologie dans les Médias. J’ai nommé le CORED. Votre disponibilité, Monsieur le Président de la République ne nous va pas seulement au cœur.

 

 Elle interpelle notre conscience et nous place un peu plus devant nos responsabilités. Nous ne pourrons plus reculer, après que la plus haute Institution du pays que vous incarnez aura accepté d’être un témoin privilégié de notre engagement à réconcilier la profession de journaliste avec son public. Un public diversifié dans ses attentes, pluriel dans ses convictions, un public citoyen que les avancées démocratique dans notre pays ont rendu plus exigeant parce que pleinement conscient de son droit à  une information dépouillée des préoccupations affairistes et de la soumission aux groupes de pression, de quelque nature et de quelque bord qu’ils puissent être.

 

 

Ainsi, cette cérémonie est à la fois l’aboutissement d’un processus et le point de départ – espérons-nous – d’une nouvelle étape dans la marche des médias au Sénégal. Avec le Tribunal qui vient d’être installé par le Président Bacary Domingo Mané, devrait s’ouvrir une nouvelle page dans la régulation du travail des journalistes, non pas par les Pouvoirs publics ou une quelconque autre autorité, mais exclusivement par les professionnels du secteur eux-mêmes. Le projet d’autorégulation, en tant que mécanisme et volonté de mettre de l’ordre dans le travail des médias ne date pas d’aujourd’hui. Et nous parlons d’aboutissement d’un processus déjà vieux de 16 ans. C’est en 1998 en effet, qu’était porté pour la première fois, sur les fonts baptismaux, un organe chargé de veiller au respect par tous les acteurs, des Règles d’Ethique et de Déontologie qui fondent la profession de Journaliste et de Technicien de la Communication sociale. Le CRED alors pensé par le Syndicat des Professionnels de l’Information et de la Communication du Sénégal (Synpics) avait balisé la voie avec les forces et faiblesses inhérentes à ses statuts et le contexte de sa création. C’est ici le lieu de saluer le travail de nos devanciers dans la mission d’autorégulation. Le CRED était une équipe engagée sous la présidence de Kader DIOP encore et heureusement toujours avec nous. A ses côtés,  Mbaye Sidy Mbaye, Mansour Sow, Mamadou Amath feus Oumar Diagne et Amadou Dieng, entre autres membres aussi professionnels que respectés, auxquels s’étaient jointes d’éminentes personnalités de la société civile et de la Magistrature. Que ces dernières trouvent ici l’expression de notre reconnaissance pour leurs apport et éclairages. D’autres acteurs non médiatiques sont encore avec nous. Il s’agit de l’Organisation Nationale des Droits de l’Homme (ONDH) et du Forum Civil. Leur apport et éclairages constituent pour nous les meilleures balises pour nous éviter des erreurs, qu’en d’autres circonstances nous aurions pu commettre dans l’élaboration des Statuts et Règlements de l’Organe. Merci Président Djibril Abdoul Aziz Badiane, merci à vous Matar Sall.

Lorsque la première équipe du CORED élue en mai 2009 avait commencé à donner des signes de faiblesses qui auraient pu enlever toute crédibilité au mécanisme,  malgré les efforts personnels de notre confrère Souleymane Niang ici présent,  l’infatigable militante de la cause des médias, es qualités  Secrétaire général du Synpics, a mis sur la balance tout son engagement et sa force de persuasion, pour obtenir la relance du Conseil. C’est le résultat de ce double engagement qui nous vaut la cérémonie de ce jour. Chère consœur Mme Diatou Cissé Badiane, nous savons votre santé en ce moment, pas au mieux. La profession, par ma voix, vous souhaite un prompt rétablissement et vous attend sur le terrain de l’autorégulation, après que vous avez porté avec succès le combat du Syndicat pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des Journalistes et Techniciens de la Communication Sociale du Sénégal.

Ce qui nous réunit aujourd’hui est l’aboutissement d’un processus, avons-nous dit, en ayant à l’esprit ces années passées par des professionnels du secteur, à élaborer des stratégies, pour que jamais la presse ne manque à l’appel du peuple aspirant à plus de démocratie dans le respect de son droit à une information juste, équilibrée, porteuse de valeurs et dépouillée de l’affairisme politique, économique ou religieux. Le respect des Règles d’Ethique et de Déontologie dans le monde de la Communication est devenu une demande sociale. Les acteurs du secteur n’y peuvent se soustraire plus longtemps, au risque de condamner – et  durablement- une activité professionnelle dont l’affaiblissement entraînerait la fin du projet démocratique et ne serait pas sans conséquences sur les espoirs du peuple en une correcte  gouvernance des affaires de la Cité. La fonction de veille et d’alerte, la mission de relèvement de la conscience citoyenne, la protection des Droits de chacun dans une nation ayant confiance en elle-même, appellent l’implication de femmes et d’hommes suffisamment imbus des valeurs de la démocratie et capables de décoder les messages venant du peuple citoyen. Ces qualités doivent être partagées par tous les professionnels de l’Information, sans considération de la génération à laquelle ils appartiennent. Devons-nous rappeler qu’il n’y a pas d’âge du Journaliste pour les bonnes ou les mauvaises pratiques ? Il ne peut y avoir de conflit de générations dans l’exercice du métier d’informer. Il n y a qu’un Code de déontologie pour engager les professionnels de tous les pays du modèle démocratique, d’une part, des référentiels  éthiques déclinés à l’échelle de chaque peuple comme celui du Sénégal un et indivisible, d’autre part.

La cérémonie à laquelle, Excellences, Mesdames et Messieurs, vous nous avez fait l’honneur de donner plus de solennité, se veut le début d’une nouvelle approche  dans l’organisation du travail des médias au Sénégal. Elle veut ouvrir une nouvelle page dans la pratique du journalisme dans notre pays. Cette page s’écrira sur le tempo de l’Indépendance et de la rigueur, du respect de la personne humaine, du renforcement de la stabilité nationale sans préjudice de l’esprit critique des journalistes.  Au cœur de tout cela, restera le citoyen, à la fois cible et inspirateur, parce que désormais mieux armé pour faire face à tous les défis du quotidien en matière d’expression des opinions.

Mesdames et Messieurs, chères consœurs, chers confrères, nous voici face à un nouveau tournant dans l’exercice de notre métier. Nous avons en partage, le désir et la volonté d’Indépendance et de rigueur dans le traitement de l’information adossé au respect des différences et des diversités dans notre pays. Indépendance et rigueur loin des coteries dont la protection des intérêts exclusifs porterait atteinte aux efforts de développement du Sénégal. Indépendance et rigueur face à tout groupe de pression. Indépendance et rigueur sans parti-pris de nature à porter atteinte au droit à la différence. Indépendance et rigueur sans agression aucune contre les fondements de l’unité nationale. Indépendance et rigueur dans la responsabilité.

Voila le type de presse dont nous avons en partage le rêve d’avènement. Voila l’image que tous les professionnels voudraient donner d’eux-mêmes chaque fois qu’on parle des journalistes. Reconnaissons-le, il n’en est pas toujours ainsi. Les causes du mal ne sont pas ailleurs que dans nos propres rangs. La faiblesse des moyens des médias y est certes pour quelque chose. L’envahissement du secteur par des personnes poursuivant des objectifs inavoués y est pour beaucoup.

C’est à ces facteurs limitatifs de nos performances et attentatoires à la crédibilité de notre profession, que tous les acteurs ambitionnent de s’attaquer à travers le Conseil pour l’Observation des Règles d’Ethique et de Déontologie. Le CORED a déjà un allié dont il peut compter sur le vécu et l’expérience des obstacles dans la conduite des missions d’observation des pratiques des médias. Je veux nommer le Conseil National pour la Régulation de l’Audiovisuel. Le Président Babacar Touré, journaliste émérite, acteur dévoué et respecté, s’est personnellement impliqué dans la préparation de la présente cérémonie d’installation du Tribunal des Pairs. Qu’il en soit remercié. Il n’ignore rien de ce  que le Sénégal tout entier gagnerait dans une étroite collaboration entre le CNRA, Régulateur institutionnel public et l’organe d’autorégulation créé par les Journalistes et les Techniciens de la Communication et managé par des professionnels ayant mandat de toute la Corporation.

Et voici le Tribunal des Pairs, des Journalistes d’expérience, bénéficiant de la confiance du Directoire du CORED. Des Journalistes dont l’indépendance d’esprit et la liberté de critique ne font l’ombre d’un doute, le tout adossé à l’exigence de respect par tous, des Règles qui s’imposent dans l’exercice du métier que nous avons en partage.

M. le Président de la République, M. le Président de l’Assemblée nationale, Mme la Présidente du Conseil Economique Social et Environnemental, Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants d’Institutions Internationales, chers invités, Mesdames et Messieurs qui nous avez fait l’honneur de répondre à notre invitation, les femmes et les hommes de métier qui prennent officiellement fonctions aujourd’hui, n’ignorent rien de ce qui les attend. Soyons clair : le Tribunal des Pairs n’est pas une instance des vertueux face aux ripoux que seraient tous les autres. Ses membres ont juste l’avantage d’avoir réussi un parcours respectable, d’avoir pour la plupart, blanchi sur le terrain de la collecte et du traitement de l’information, d’avoir généralement échappé à la tentation du gain facile qui, trop souvent, amène à confondre journalisme et affairisme au détriment du droit du public à une information juste, équilibré, utile, porteuse de valeurs de démocratie et respectueuse des intérêts de la collectivité nationale.  Les membres de ce Tribunal sont conscients de la difficulté qu’il y a à juger le travail de gens que nous créditons du même rêve de qualité que nous, a priori, individuellement aussi attachés que tout le monde à ce qui fait la grandeur de la profession qui constitue notre gagne-pain. Ces Pairs ont l’avantage de connaître le secteur, en connaissent les acteurs, sont observateurs des pratiques, ont parfois souffert des critiques venant de partout lorsqu’à un moment ou à un autre, quelque dérive a été relevée et de l’entêtement constaté chez des fautifs récidivistes.  Aussi, le CORED aura-t-il besoin de l’appui et de la compréhension de tous. Du Premier des Sénégalais, au citoyen lambda consommateur passif de produits à lui destinés, mais qui parfois peut se retrouver désarmé face à la puissance dévastatrice de quelques phrases le concernant, sorties de la bouche de journalistes ou imprimées sur un support de large diffusion. Le Droit de réponse est certes consacré. Le Droit à l’image ne peut souffrir des erreurs et/ou turpitudes de journaliste ou technicien ayant manqué de vigilance, si ce n’est que le fautif a été mu par des intérêts aux antipodes de l’Ethique qui fonde la profession. Le citoyen doit pouvoir compter sur une autorité pour laver son honneur et restaurer sa dignité chaque fois que ces fondements de sa personnalité sont bafoués.

Attraire un Journaliste devant la Justice pour obtenir réparation est un droit inaliénable. S’adresser au CORED est une garantie que l’auteur de l’agression par voie de presse ne pourra même pas invoquer une atteinte à la liberté d’informer. Jugé par ses Pairs et dénoncé publiquement par ses confrères et consœurs, jusque dans l’organe diffuseur des éléments constitutifs du délit, le fautif n’aura pas d’autre choix que de s’amender ou risquer de devoir, en cas de sanction extrême, s’éloigner du travail des journalistes.

Mais convenons-en aussi. Des médias et des journalistes s’illustrent parfois dans des attitudes et pratiques qui honorent toute la profession et rassurent la collectivité nationale. Le CORED sera forcément attentif à ces exemples de bonnes pratiques pour les ériger en modèles à imiter, les circonstances y appelant. Sanctionner négativement ou porter en triomphe quand c’est nécessaire, le Tribunal des Pairs ne regardera pas que des manquements. Le CORED en a l’ambition et agira pour l’avènement d’une profession réconciliée avec elle-même, réconciliée avec le citoyen. Il œuvrera à la promotion d’une Presse plus proche du peuple, respectueuse des Institutions sans jamais faire obstacle à la liberté d’informer et à l’indépendance éditoriale des médias. Avec la formation permanente inscrite à son agenda pour le renforcement des capacités dans les médias, avec la co-régulation qu’il appelle de tous ses vœux aux côtés du CNRA, le Conseil pour l’Observation des Règles d’Ethique et de Déontologie attend des Pouvoirs Publics les moyens institutionnels pour crédibiliser ses actes en leur donnant une incontestable autorité. Ces moyens sont inscrits dans le Projet de Code de la Presse ».

Mame Less Camara

 

Merci de votre attention

source: http://www.gfm.sn/mame-less-camara-president-du-tribunal-des-pairs-le-tribunal-des-pairs-nest-pas-une-instance-des-vertueux-face-aux-ripoux/