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Livre - «Dans les mines d'or du Sénégal oriental: la fin de l'orpaillage?», 198 pages - chronique de la disparition «inéluctable» d’une civilisation millénaire…

CULTURE
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«Dans les mines d’or du Sénégal oriental: La fin de l’orpaillage?», c’est le titre du nouvel ouvrage du sociologue Kaly Niang, publié par l’Harmattan (juin 2014). Il ressort de cette étude de terrain que l’Etat du Sénégal n’a pas encore pris conscience de l’importance de l’orpaillage pour les populations de Kédougou. Pis, à défaut d’une politique minière cohérente et rationnelle, l’on s’achemine inéluctablement vers la fin des orpailleurs estimés à plus de 50.000 personnes recensées sur les différents sites dans la région. Pourtant, l’orpaillage est un rempart essentiel contre la pauvreté, qui affecte 80% des ménages et 89% des individus, et peut occasionner une amélioration durable de la qualité de vie. Pourvu que la priorité maximale soit accordée à la satisfaction des besoins élémentaires des orpailleurs.

 

 

Dépossédée par la grande industrie minière et exclue des chaînes de transformation et d’échange, l’exploitation traditionnelle de l’or (ou orpaillage) vit aujourd’hui, au Sénégal, les derniers jours d’une pratique ancestrale, vieille de plusieurs siècles. Avec des machines concasseurs-broyeurs, l’orpaillage perd son caractère traditionnel et sacré, pour devenir une banale activité à haute intensité de main-d’œuvre, qui comporte d’énormes inconvénients pour la santé humaine et l’environnement. Dès lors s’achemine-t-on vers la disparition d’une civilisation millénaire porteuse de sens, caractérisée par une économie de subsistance.
 
Kaly Niang, Docteur en sociologie et spécialiste en développement durable, pose le débat dans son nouvel ouvrage intitulé «Dans les mines d’or du Sénégal oriental: La fin de l’orpaillage?». Ce livre de 198 pages publié chez l’Harmattan (juin 2014) se veut un éclairage sociologique sur une pratique séculaire, qui existe toujours dans l’univers mental des orpailleurs, malgré les difficultés et les contraintes techniques et environnementales. Le livre se décline en deux parties: la première, qui traite des «Aspects traditionnels de l’orpaillage: analyse d’une pratique séculaire», comprend trois chapitres alors que la seconde revient sur «L’orpaillage aujourd’hui: entre tradition et changements», à travers cinq chapitres, le tout bouclé par une conclusion générale.
 
D’emblée, à travers la photo de couverture, l’auteur plonge le lecteur dans l’univers des dioura, le quotidien des diouratigui venant de divers horizons  et de la sous région et établis dans différents placers de cette région très pauvre du Sénégal, mais qui regorge de potentialités économiques énormes. L’étude, dresse une cartographie de différents sites d’orpaillage (‘’dioura’’), des activités qui s’y déroulent, de l’organisation des communautés, du temps de travail, etc. C’est une sorte de miroir que le «sociologue-diouratigui», pardon l’auteur, promène dans des «dioura» avec, à l’appui, des témoignages, des images et illustrations prises sur place et reflétant la réalité sur une pratique séculaire menacée. 
 
L’orpaillage est plus important que l’agriculture…
 
Activité complémentaire ou de «passe-temps» à l’époque coloniale, l’orpaillage est devenu aujourd’hui plus que jamais l’une des activités les plus importantes de Kédougou, et a tendance à surclasser l’agriculture, tributaire de la pluviométrie. En atteste, la production annuelle qui s’élève à plus de 500 Kg d’or, la moyenne étant 165 grammes par orpailleur. Selon certaines estimations, l’orpaillage mobilise près de 4 milliards de F Cfa sans contrôle rigoureux de l’Etat. Ces données chiffrées corroborent une irrationalité sur le plan économique, car, là, on peut effectivement produire annuellement jusqu’à ? milliard de nos francs. Et, paradoxalement, la région est la plus pauvre du Sénégal, note l’ouvrage.
 
Et, sur la base de cette grille d’analyse, il ressort qu’un orpailleur peut gagner en moyenne jusqu’à 500.000 F Cfa, donc le double du revenu d’un cultivateur moyen produisant une tonne d’arachide par exemple. Suffisant pour que certains orpailleurs pensent même que l’orpaillage est plus important que l’agriculture dans la zone. D’où la nécessité de développer cette pratique, en la rationalisant davantage, c’est-à-dire en essayant d’adapter les moyens à mettre en œuvre, par rapport aux fins escomptées, conseille l’auteur. Cette alternative peut à long terme réduire les conséquences de certaines manifestations concrètes de la pauvreté à savoir la «malnutrition», la «mauvaise santé», «l’insuffisance d’éducation scolaire», le «logement de mauvaise qualité».
 
Le Sénégal n’est pas conscient de l’importance de l’orpaillage 
 
Seulement, déplore-t-il dans l’ouvrage, «l’Etat du Sénégal n’a pas encore pris conscience de l’importance de l’orpaillage pour les populations». Aujourd’hui, aucune forme de soutien n’est réservée à ses adeptes, ni l’Etat encore moins les collectivités locales ne s’intéressent aux orpailleurs ou à l’orpaillage. Sur les différents sites d’étude, le constat est que les orpailleurs sont laissés à eux-mêmes. S’agit-il d’un manque de responsabilité et/ou de rationalité des  populations? En attendant des solutions durables, la question reste entière. 
 
Or, cette activité constitue un «rempart essentiel contre la pauvreté rurale et la précarité» car pouvant occasionner une amélioration durable de la qualité de vie. L’orpaillage permet notamment de limiter l’exode rural en maintenant une activité dans cette zone considérée comme un «bout du monde» et favorise l’émergence «d’îlot de prospérité dans un océan de pauvreté». Toutefois, il faut au préalable accorder la priorité maximale à la satisfaction des besoins élémentaires des orpailleurs, pour leur permettre au moins de survivre. Et, l’état de pauvreté des populations est une donnée à prendre en compte dans les stratégies de leur implication en matière de gestion des ressources naturelles et l’environnement. Aussi, selon Khaly Niang, l’action pour être efficace doit s’attaquer de front aux multiples facettes de la problématique et s’inscrire dans la durée. Le caractère participatif, intégré, global et durable de tout projet d’appui à l’orpaillage est primordial… 
 
Jeter les bases pour des échanges entre les acteurs
 
Justement à ce propos, le sociologue spécialisé en développement durable prévient que cet ouvrage ne prétend pas apporter les réponses à toutes les questions sur l’exploitation minière au Sénégal, mais il jette les bases pour des échanges entre les acteurs que sont l’Etat, les compagnies minières et les communautés. Convaincu, qu’il est, qu’il n’y a pas de raison que les communautés soient toujours les grands perdants, surtout que la récente relance du secteur minier a abouti à la découverte de nouveaux gisements d’or, dont l’exploitation est pour bientôt. 
Ces gisements viendront compléter le projet d’exploitation de l’or de Sabodala (SMC) nécessitant un investissement de 98 millions  de dollars et produisant 150.000 onces d’or (4,65 tonnes), selon la compagnie Mineral Deposit Limited (MDL), qui a démarré sa production au deuxième semestre de l’année 2007. Dans sa phase opératoire, la gestion du projet reviendra à MDL à travers la société d’exploitation Sabodala Operating Company S.A, qui sera créée à cet effet. L’Etat du Sénégal détiendra 10% d’actions gratuites dans la société d’exploitation.
 
Oui à la petite mine et non aux solutions «clés en main»
 
En attendant, pour un développement économique régional, l’émergence de la petite mine semble, pour certains orpailleurs, une alternative souhaitable pour tenter de combler les multiples carences du secteur artisanal et ainsi limiter ses impacts négatifs. «Le développement de la petite mine ne saurait-il pas être un rempart contre la pauvreté, la précarité et le chômage des jeunes ? Cette petite entreprise plus souple et adaptable ne devrait-elle pas permettre de multiplier les opportunités économiques et de valoriser au mieux la productivité de l’or dans la zone de Kédougou?», s’interroge-t-il. 
 
Et de relever que l’expérience a montré que des approches trop «clés en main» et sectorielles sont vouées à l’échec. Mieux, les besoins et les demandes, très spécifiques suivant les contextes, doivent être formulés par les orpailleurs eux-mêmes, après concertation étroites avec les principaux acteurs institutionnels et économiques locaux. L’action pour être efficace doit s’attaquer de front aux multiples facettes de la problématique et s’inscrire dans la durée. Dans cette approche sociologique du développement local, le caractère participatif, intégré, global et durable de tout projet d’appui à l’orpaillage est primordial. 
 
A défaut d’une politique minière cohérente et rationnelle…
 
Car, prévient Khaly Niang, «à défaut d’une politique minière cohérente et rationnelle, nous assisterons inéluctablement à la fin des orpailleurs dans la région de Kédougou et la disparition d’une civilisation millénaire porteuse de sens, caractérisée par une économie de subsistance». La menace est d’autant plus d’actualité que les orpailleurs traditionnels sont progressivement remplacés par des exploitants miniers qui organisent leur production selon un ordre capitaliste et cannibale qui bouleverse toute la structure de l’orpaillage traditionnel devenue aujourd’hui anomique.
Toutefois, reconnaît-il, cette activité n’est pas sans générer des problèmes sociaux et environnementaux.

En effet, l’exploitation minière contribue au déboisement et à la dégradation des sols, à la pollution de l’air par la poussière, la perte de biodiversité, la détérioration du paysage, etc. Ce sont souvent  d’énormes inconvénients de l’orpaillage notamment sur la santé humaine, l’environnement et les ressources naturelles que les pouvoirs publics impliqués dans la problématique du développement et de la protection de l’environnement ont longtemps mis en avant pour décrier l’exploitation minière artisanale qui se pratique sur une centaine de sites, procurant ainsi des revenus à des milliers de personnes vivant principalement en milieu rural. Pourtant, à l’origine, l’orpaillage n’était pas une activité à forte nuisance sur l’environnement. Et, au regard des nombreux interdits et mythes, n’importe qui ne pouvait pas être orpailleur.
 
source:http://www.sudonline.sn/chronique-de-la-disparition-ineluctable-d-une-civilisation-millenaire_a_20783.html