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Intervenant dans la rédaction de la quatrième édition du White Paper de Jumia.cm sur le mobile au Cameroun, le directeur générale de SAC International (Strategy & Analytics Consulting) a profité pour s’exprimer non seulement sur sa vision mais également sur la situation de ce secteur au Cameroun. “Il y a eu d’énormes avancées ces dernières années sur tous les plans notamment la contribution au PIB du Pays. Il y a eu également des obstacles qui nous ont empêché d’être plus loin” c’est dans ces mots que s’est exprimé cet expert de l’intelligence économique).
Dans cet entretien long de plusieurs lignes, ce directeur qu’il convient d’appeler expert du digital revient sur les moments forts du secteur mobile en 2017.
Quel a été le rôle du Mobile au Cameroun en 2017? Mieux encore, que retenons-nous de ce secteur au cours de l’année écoulée?
Cela dépend de l’angle ou de la position que l’on occupe, selon que l’on est consommateur, opérateur ou autorité de régulation.
En tant que consommateur, je retiendrai le dilemme perceptuel devant lequel je me trouve vis-à-vis des opérateurs entre d’un côté la satisfaction de voir proliférer de nombreux usages du téléphone mobile rendus possibles par l’internet, et de l’autre côté la déception de constater qu’au-delà des beaux discours, l’expérience-client reste une chimère au vu de la qualité déplorable du réseau et des problèmes récurrents de facturation.
Si je me mets dans la position des opérateurs de téléphonie mobile, 2017 est l’année où ils ont le plus été confrontés au paradoxe « invest more, earn less ». Les exigences liées au boom de la consommation de data (Internet) a nécessité de nombreux investissements supplémentaires de la part des opérateurs (le ratio CAPEX/Sales au Cameroun est ainsi passé de 15% en 2013 à 24% en 2016), mais leurs marges ont continué de s’effriter (l’EBITDA Margin médian passant de 34% à 30% pendant la même période). Cependant, un opérateur qui aurait opté pour une réduction de ses investissements aurait tout simplement été condamné à la disparition à moyen terme.
Enfin si l’on considère l’optique des autorités en charge des télécoms (MINPOSTEL et ART), 2017 aura été l’année où certaines des mesures prises (identification des numéros, portabilité des nombres, assainissement du fichier des licences, etc) dénotent de la véritable prise de conscience de l’impact que ces autorités peuvent avoir sur les tendances du marché ainsi que sur les performances commerciales et financières des opérateurs.
Qu'est-ce que la révolution du mobile implique pour vous en tant que expert?
La révolution du mobile revêt à mon sens une implication intrinsèque et une autre plus extrinsèque.
L’implication intrinsèque de la révolution du mobile a été relevée il y a quelques années déjà, lorsque l’utilisation des téléphones mobiles est passée « mainstream » au Cameroun ; le taux de pénétration « apparent » du mobile (nombre de SIMs/population totale) passant en quelques années d’à peine 30% (2008) à plus de 80% (2016). Le mobile est alors la matérialisation de l’un des droits fondamentaux de tout être humain ; celui de communiquer avec autrui. Vue sous cet angle, la révolution du mobile implique que ce produit/service soit considéré comme un bien de consommation courante qui concerne aussi bien le chef d’entreprise que le jeune citadin ou la grand-mère au village ; avec ce que cela implique en matière de champs concurrentiel (la structure du panier de la ménagère et les autres biens de consommation courante), de mix de communication (entre la communication de masse et celle plus adaptée à chaque micro-segment), de circuit de distribution (meilleure capillarité et maillage optimal du territoire).
L’implication extrinsèque est plus récente et permet d’alimenter la révolution numérique. Sa principale caractéristique est que le mobile est devenu un élément qui s’intègre dans la stratégie des autres secteurs d’activités. C’est ainsi par exemple que les supports mobiles (smartphones, tablettes, etc) sont devenus quasi incontournables (ou tout au moins très pratiques) lorsqu’il s’agit de s’informer, de se divertir (Nexttel TV), de procéder à des transactions monétaires (Orange Money et Mobile Money), d’acquérir certains produits tangibles (Jumia), d’avoir accès à certains services bancaires ou administratifs (Internet mobile, règlement des frais universitaires), etc. Et dans cette optique, les opérateurs de téléphonie mobile disposent de bases de données dont l’exploitation (data mining et « or transparent ») peut s’avérer très judicieuse pour les autres secteurs d’activité à travers la « monétisation de la data ».
Le Cameroun peut-il négliger le smartphone aujourd’hui?
Bien que le taux de pénétration des smartphones ne soit pas aussi élevé que dans les pays plus développés, ce secteur possède tout de même l’une des croissances les plus fortes au Cameroun (à deux chiffres en tout cas).
Cela tient à mon sens à l’usage multiforme du smartphone et à son caractère indispensable ; certains individus peuvent se permettent de sortir le matin sans leur carte nationale d’identité, mais pas sans leur smartphone.
Cela a été rendu possible par la synchronisation des efforts des offreurs (opérateurs de téléphonie mobile, vendeurs de téléphones, concepteurs d’applications) avec les facteurs psychologiques et comportementaux des acheteurs. On peut citer à titre d’illustration:
- La démocratisation/baisse rapide des prix des smartphones couplée à l’existence d’un marché de l’occasion;
- Le développement de la communication et des divertissements par les réseaux sociaux (notamment Facebook, Twitter, Whattsapp, Instagram) ;
- La prolifération d’applications qui s’adaptent aux besoins de chacun (que ce soit sur le plan privé ou professionnel) ;
- Le rôle d’«ordinateur de poche» que semble jouer le smartphone chez certains usagers;
- Les offres attractives des opérateurs de téléphonie mobile (qui ont constaté que la baisse du chiffre d’affaires de la « voix » observée depuis 2015 ne pourra être compensée que par l’explosion du chiffre d’affaires de la « data ») ;
- Le phénomène d’imitation inhérent à la société camerounaise du fait de l’influence de la diaspora, des médias occidentaux, des réseaux sociaux, etc.
Comment envisager l’avenir du Cameroun pour les prochaines années?
Mes souhaits vont dans le sens d’un trade off entre les intérêts des consommateurs, ceux des opérateurs et ceux de l’Etat.
Pour le bien des consommateurs, j’espère que la baisse des prix (appels et data) va se poursuivre essentiellement en direction des consommateurs à faibles revenus, ensuite que les offres des opérateurs permettront de mieux satisfaire les besoins et la curiosité du consommateur camerounais afin que celui-ci se sente mieux accompagné (simplification et anticipation des besoins) et mieux considéré (inbound marketing), et enfin que l’expérience-client ira enfin au-delà des beaux discours.
L’une des priorités des opérateurs sera sans doute de continuer d’étendre leur sphère de présence sectorielle (déplacements à l’intérieur de la chaîne de valeur et en direction des secteurs adjacents comme cela s’est observé dans le cas des services financiers digitaux) afin de relancer la croissance de leur chiffre d’affaires organique après la phase de ralentissement constatée depuis 2015. Ceci nécessite néanmoins une parfaite connaissance/anticipation des besoins des consommateurs (business analytics), des choix judicieux en termes de partenariats, ainsi que d’importants efforts de transformation culturelle et d’adaptation-métier.
J’espère enfin que l’Etat pourra mieux jouer son double rôle de régulation pour assurer une saine concurrence dans le marché, et de taxation « juste » afin de pouvoir renflouer ses caisses sans pénaliser outre mesure les opérateurs. Ceci nécessite cependant une parfaite lecture stratégique du compte d’exploitation et du business model de ces acteurs (ce qui ne semble pas être le cas actuellement).
Simon Mbelek <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>