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Jeu, Nov

DAKAR – RUE SANDINIERY Vers une «pénurie» de produits made in Guinée

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ébolaL’OBS- Célèbre par le commerce des fruits et légumes qui s’y effectue, la rue Sandiniéry, au cœur de Dakar, à quelques pas du marché Sandaga, est aujourd’hui en perte de vitesse. Depuis la fermeture de la frontière du Sénégal avec la République de Guinée Conakry, la rue Sandiniéry a perdu son visage habituel. Elle était le point de débarquement de centaines de véhicules qui déversaient à longueur de journée des produits venant de la Guinée. Difficile de s’y frayer un chemin à certaines heures de la journée. L’affluence était toujours à son comble.

 

Commerçants, clients, piétons et badauds se disputaient la chaussée. Elle était devenue un important point de ravitaillement en fruits et légumes pour le marché sénégalais. Pommes, oranges, mangues, bananes, ananas ornaient le décor, selon la période. Un commerce florissant contrôlé par une forte communauté guinéenne. Mais aujourd’hui, la rue Sandinièry a perdu son image d’antan depuis la fermeture de la frontière avec la Guinée Conakry. La rue est quasi déserte. En cette fin de matinée, sous un soleil de plomb, deux conteneurs stationnés de par et d’autre de la rue attendent d’être déchargés. L’affluence n’est plus des grands jours, l’ambiance est morose, la méfiance est le sentiment le mieux partagé. Ebola est passé par là. La soixantaine révolue, teint basané, barbe poivrée, fondu dans un caftan bleu, Madiou Bâ commerçant de fruits et légumes à la rue Sandinièry depuis 1961, trouvé devant son magasin, se désole de tout le tintamarre prêté à la maladie hémorragique à virus Ebola. «Tous mes enfants sont nés au Sénégal et depuis mon arrivée, je vends des fruits et légumes. Une activité qu’il connaît très bien pour l’avoir pratiquée pendant plus d’un demi siècle», narre-t-il, le cœur meurtri par la stigmatisation dont son peuple est victime. «Au début de l’épidémie et lorsque le Sénégal a enregistré son premier cas importé, on nous a traités de tous les noms d’oiseaux. Nous avons de très bons rapports avec les Sénégalais, mais ces qualificatifs n’ont pas plu à nos concitoyens se trouvant au pays», se désole-t-il. 

«On importait jusqu’à 300 tonnes par mois» 

Echarpe autour du cou, stylo et bloc-notes entre les mains, le vieux Bâ répertorie les ventes de la mi-journée. D’après lui, les Guinéens sont plus actifs dans la vente des fruits et légumes, mais fait-il constater, une partie de ces produits vient de la Guinée et que la majorité est importée du Maroc, de l’Afrique du Sud, de la Côte d’Ivoire ou de la France. «Selon les périodes, les pommes, les oranges et mandarines viennent de l’Afrique du Sud ou du Maroc, le raisin de la France et une partie de la banane de Côte d’Ivoire. Cependant, les ananas, les avocats, l’huile de palme, le gingembre, la gomme arabique et autres venaient de la Guinée», détaille-t-il. «Avant la fermeture de la frontière, ce sont des centaines de camions qui débarquaient ici. Et pendant certaines périodes, on dépassait même les 300 tonnes par mois pour les produits venant de la Guinée, mais avec la fermeture de la frontière, aucun produit ne nous vient maintenant de ce pays. Donc depuis un certain temps, je n’ai plus d’ananas, ni d’avocats, encore moins de gomme arabique dans mon magasin et on tend vers une pénurie pour ces produits», renseigne Madiou Bâ. 

Abondant dans le même sens que son compatriote Madiou Bâ, El Hadji Toumani Barry qui tient à quelques pas de son compatriote son magasin ne fait pas la fine bouche même s’il est trop méfiant par rapport au sujet. Pour ce dernier qui a élu domicile au Sénégal depuis 1955, la fermeture a impacté négativement sur les flux des échanges entre les deux Etats. Et d’après lui, si la mesure de fermeture persiste, le marché risque de connaître une pénurie pour certains produits venant spécialement de la Guinée. «Déjà, nous sommes en rupture de stock pour beaucoup de produits venant de la Guinée et si cette fermeture perdure encore, il y aura une pénurie pour tout ce qui est ananas, avocats, gomme arabique, gingembre et autres», laisse entendre El Hadji Toumani Barry, la mine triste. Pour ces ressortissants guinéens de la première heure, le Sénégal et la Guinée sont unis par l’histoire, donc «il faut que les autorités des deux Etats revoient les mesures prises et jouent la carte du bon voisinage en mettant les mesures nécessaires pour un contrôle sanitaire strict au niveau des frontières», préconisent-ils. 

EL HADJI FALLOU FAYE

source: obs

 

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