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L’OBS – El Hadji Omar Cissé tué sauvagement. Sa famille l’attendait pour un repas …au poulet qu’il avait promis.
C’était un dimanche. Au moment où de vieux sportifs appelés «vétérans» s’échinent sur un terrain de football sablonneux, une bande de jeunes se regroupe au tour d’un baby-foot. Si pour les vieux, la balle va rouler sans enjeu, du côté des jeunes, on ne touche au baby-foot qu’après avoir parié de l’argent. Ce jeu appelé «Pel-Pel», assimilé au poker, fait fureur chez les jeunes en banlieue. I
l finit très souvent par une bagarre au couteau, comme ce fut le cas ce dimanche 08 février 2015 au marché «Boubess» où El Hadji Omar cissé, un jeune d’une trentaine d’années, a succombé, après avoir reçu deux coups de couteau. Hier lundi 9 février 2015, vingt quatre heures après le drame, L’Obs a rendu visite à la famille du défunt avant de faire un tour sur la scène du crime.
LA MORT : Dimanche 08 février 2015. El Hadji Omar Cissé (30 ans) qui s’est attardé sur son lit est subitement tiré de son sommeil par les sonneries incessantes d’un téléphone posé quelque part dans la chambre. C’est celui de son jeune frère, Mor. Quelque peu énervé, il boude un peu, saute du lit, se dirige vite vers la salle de bain, d’où il ressort quelques minutes plus tard pour enfiler vite ses habits et prendre des nouvelles de sa vieille mère, Coumba Diop, malade, couchée dans la même chambre. Nous sommes à Bagdad, dans le département de Guédiawaye, au quartier Hamdallahi 2 où la promiscuité règne dans les maisons. Récemment, El Hadji Omar Cissé était un tailleur doué. Une profession qu’il a dû abandonner du fait d’une hémorroïde qui le faisait souffrir terriblement. Depuis, il est resté aux côtés de sa maman, une veuve sexagénaire qui pour se consoler de la disparition de son époux, il y a une dizaine d’années, a fait de son fils aîné El Hadj Oumar Cissé son «ami et confident». Carrure d’athlète, il sert quelques blagues à sa sœur Dado Cissé et promet de revenir lui remettre de l’argent, «ça va être du riz au poulet au déjeuner, pour ce dimanche». Il était huit heures lorsque ce jeune homme, l’air insouciant, sort de la maison familiale et se dirige vers le marché «Boubess» où des individus de son âge agglutinés autour d’un baby-foot jouent au poker. La plupart de ces individus ont des couteaux dissimulés sous les habits. Qu’importe pour El Hadji Omar Cissé. C’est ici qu’il compte gagner assez d’argent pour tenir sa parole ; le repas au poulet qu’il a promis à sa famille, il ne veut pas y revenir. Hélas, il n’y aura point de repas. En effet, trois quarts d’heure après son arrivée, le bonhomme gît au sol dans une mare de sang. La mise au poker a tourné à la bagarre. Sur sa cuisse droite, une plaie béante et profonde qui témoigne de la violence des deux coups de couteau qu’il a reçus sur cette même partie de son corps. Debout, surplombant le corps d’El Hadji Omar Cissé, Papa Sow plus connu sous le sobriquet de Kaïré, auteur des deux coups de couteau, n’affiche aucun remord, ce qui choque les passants au point qu’ils décident de le lyncher. Sans succès. Lorsque les secours s’organisent, El Hadji Omar Cissé évacué à bord d’une charrette est déjà agonisant. Au centre de santé «Roi Baudouin» de Guédiawaye, le médecin-chef paie de sa poche pour secourir le garçon démuni. Hélas, cela n’a pas suffit pour poser les points de suture. A l’hôpital de Pikine où il est acheminé en urgence, El Hadji Cissé tente en vain de s’agripper à la vie, malgré un souffle saccadé. L’ange de la mort rôde et finit par le vaincre. Il était onze heures, ce dimanche, lorsque son frère, à son chevet, constate qu’El Hadji Omar a succombé.
LE CHOC : Hier lundi, à la maison mortuaire, c’était encore le choc pour la famille à l’exception de la mère du défunt. Une dame pudique qui préfère parler de sa douleur que de s’effondrer en larmes devant ses voisins venus lui présenter leurs condoléances. «Malgré son âge, il vivait dans une même chambre avec moi, il passait le plus clair de son temps à mes côtés et prenait soin de moi. Quand on m’a annoncé ce qui est arrivé, je suis allée, malgré ma maladie, voir mon fils là où il était couché dans une mare de sang, j’étais inquiète pour la suite. A l’annonce de sa mort, je n’ai pas pleuré devant les gens, mais ce matin du lundi à l’aube, seule, j’ai beaucoup pleuré. J’ai perdu un fils, un ami, un confident, c’est lui qui m’aidait à descendre du lit le matin et à m’asseoir pour ensuite me masser les pieds», témoigne Coumba Diop, la mère du défunt.
L’OMERTA : Au marché «Boubess», sur la scène du crime, des traces de sang sont encore visibles sur le sol. «Il y en avait beaucoup», lâche l’une des rares personnes qui a osé parler à mots couverts. Ici, celui qui déballe devant la presse est très vite «fusillé» du regard. C’est l’omerta imposée par ces visages hideux dans ce milieu de trafic en tout genre. Tous font profil bas. Seul au milieu de la scène du crime, trône le baby-foot maudit par la mère du défunt qui invite la police à ne plus tolérer ces objets devenus des machines à sous autour desquelles rôde l’ange de la mort.
ALASSANE HANNE