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DJIBO LEYTI KA, SECRETAIRE GENERAL DE L’UNION POUR LE RENOUVEAU DEMOCRATIQUE - «Pour l’intérêt du Sénégal, je rêve de voir Macky Sall et Wade ensemble»

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DJIBO LEYTI KA, SECRETAIRE GENERAL DE L’UNION POUR LE RENOUVEAU DEMOCRATIQUE - «Pour l’intérêt du Sénégal, je rêve de voir Macky Sall et Wade ensemble»

L'OBS - C’est à cœur ouvert que Djibo Leyti Kâ s’est ouvert à L’Observateur. Des changements internes en cours au sein de l’Union pour le renouveau démocratique(Urd) en passant par des questions relatives aux Locales et à la présidentielle à venir, à son avenir politique, entre autres, le Secrétaire général de l’Urd s’explique sans réserve. Pour l’intérêt du Sénégal, Djibo Kâ est prêt à donner le feu vert à l’Urd pour travailler aux côtés de Macky Sall, si tel était le désir du chef de l’Etat. Dans cet entretien, il est largement revenu sur la nécessité des retrouvailles immédiates entre Macky Sall et Wade.

Pourquoi avez-vous décidé d’opérer aujourd’hui des changements internes à l’Union pour le renouveau démocratique (Urd) ?

Le parti a maintenant 17 ans. C’est vrai que 17 ans dans la vie d’un homme, c’est peu, mais pour un parti politique, c’est important. Il faut tenir compte des mutations structurelles et conjoncturelles selon les contextes historiques. Le Sénégal de 1997(date de naissance de l’Urd) n’est pas le Sénégal de 2014. C’est fini ce qui se faisait à l’époque. Maintenant, ce sont les citoyens qui sont souverains. Il y a beaucoup d’offres politiques. Et c’est la meilleure offre qui passera. C’est pourquoi je me dis qu’on doit s’adapter au contexte historique mondial et local surtout. Moi, je suis un réformateur. Nous voulons rénover profondément et pas de façon artificielle. C’est le congrès prévu en fin décembre prochain qui va en décider. Moi, je suis là comme serviteur.

Qu’est-ce qui va changer concrètement dans le parti ?

Nous voulons avoir des structures légères, simples, permettant une mobilisation rapide à chaque fois que de besoin. J’ai proposé que soient supprimés l’Union des cellules, la Fédération urbaine, la Convention régionale, le Comité directeur. Et que soit créée la Conférence  des responsables des fédérations départementales. Nous voulons fixer désormais la Cellule de base à 25 membres. Nous avons proposé que la Direction politique exécutive (Dpe) du parti soit remplacée par le Bureau exécutif national (Ben). Dans le même temps, il est proposé qu’il soit créé un poste de président du parti, à la place du secrétaire général. Le président du parti sera la personne morale de l’Urd, qui l’engage partout dans la vie civile, selon les règles définies par le congrès et précisées par le règlement intérieur.

Pourquoi remplacer le poste de secrétaire général du parti par celui de président ?

Il est bon de changer. Le poste de secrétaire général est trop directif. Mais le poste de président couvre tout le monde.

Etes-vous dans les dispositions de quitter la tête de l’Urd ?

Je ne quitterai jamais en catimini la tête de l’Urd. Je ne peux pas abandonner mon bateau ainsi, comme un capitaine qui fuit la mer là où il y a des vagues. Ça serait une trahison. Je ne trahirai jamais mon parti. Il n’est pas question que je quitte maintenant la direction de mon parti. Je ne dirai pas que durant toute ma vie, je serai à la tête de l’Urd. Je ne suis pas comme quelqu’un (Ndlr : Moustapha Niasse) qui a dit que tant qu’il lui restera un souffle de vie, il sera à la tête de son parti. Ce n’est pas ma conception. Ce qui serait un échec de ma part, c’est de partir sans avoir préparé ma relève. Si je pars, on va déstabiliser l’Urd. Je ne suis pas fou. Je suis encore là.

Jusqu’à quand ?

Pendant un certain temps au moins. Même si je décède, je souhaite que l’Urd continue de vivre sans moi. C’est ça mon souhait le plus fort. 

Comment avez-vous apprécié la décision de Moustapha Niasse de ne présenter aucun candidat de l’Alliance des forces de progrès(Afp) face au Président Macky Sall à la présidentielle de 2017. Car, cette décision a suscité beaucoup de débats et d’aucuns y voient un acte égoïste de la part M. Niasse ?

Je n’aimerais pas commenter cette décision. Moustapha Niasse est mon frère. Je ne commente pas ce qu’il a dit ni ce qu’a dit son parti.

Comment appréciez-vous la sortie de Moustapha Cissé Lô, qui exige des alliés du parti au pouvoir (Apr), notamment les leaders de «Benno Bokk Yaakaar» (Bby) une allégeance à Macky Sall en direction de 2017 ou quitter la mouvance présidentielle ?

Moustapha Cissé Lô l’a dit ? Là non plus je n’ai pas de commentaire.

Est-ce que cette sortie de M. Lô est normale dans un pays qui se dit démocratique comme le Sénégal ?

Je ne sais pas. Mais en tout cas, c’est très curieux. Sans commentaire, j’attends d’y voir plus clair. Ça m’aurait étonné qu’il l’ait dit, connaissant Moustapha Cissé Lô comme un homme très courageux. Je connais bien son père. Il était tout petit quand son père était l’ami d’Abdou Diouf. J’ai beaucoup de considération pour Cissé Lô. Il n’a peur de rien à part Dieu. Mais je ne fais pas de commentaire là-dessus. Je ne suis pas membre de «Benno Bokk Yaakaar». Il faut aller voir avec les gens de «Benno». Des gens comme Ibrahima Sène ou mon grand-frère Amath Dansokho, qu’on n’entend plus.

Pourquoi voulez-vous entendre Amath Dansokho ?

C’est marrant. Il s’est tu et je n’en connais pas les raisons. Il est silencieux depuis quelque temps.

Vous trouvez son silence  inquiétant?

Je ne sais même pas. Mais, en tout cas, ça m’étonne. Bref, ce n’est pas mon problème. Mais c’est un problème du pays. Des gens qui parlaient beaucoup, se taisent d’un coup, c’est un problème. 

Comment appréciez-vous la vision de Macky Sall en matière de gouvernance politique et économique ?

Ce qui m’étonne c’est le fait que l’on soit là à pinailler sur les documents. Il y a trop de documents de politique économique, notamment la Stratégie nationale de développement économique et social (Sndes), la Stratégie de croissance accélérée (Sca), le Programme triennal d’investissements publics (Ptip) et le Plan Sénégal émergent (Pse). Je me demande lequel de ces documents a été utilisé au Groupe consultatif de Paris. C’est très confus dans la tête des Sénégalais. C’est pourquoi il faut que le gouvernement (le ministre Amadou Ba) vienne à l’Assemblée nationale pour s’expliquer. Il faut que les Sénégalais sachent clairement ce qui s’est passé à Paris. Ce n’est pas la peine de leur balancer des chiffres absolus. Les bailleurs ne vont jamais donner de l’argent au Sénégal pour nos beaux yeux.

Vous ne croyez pas aux chances de réussite du Pse ?

Si, j’y crois beaucoup. Mais à condition que l’on sache de quoi il tourne. Ils (Macky et ses ministres) ont intérêt à parler aux Sénégalais. Pourquoi se cachent-ils? C’est suspect. Après le retour de Macky Sall de Paris, le ministre des Finances devait se présenter à l’Assemblée nationale pour dire aux Sénégalais : voilà ce qui s’est passé au Groupe consultatif. C’est l’intérêt du gouvernement et de tous.

En Casamance où il a effectué un séjour de trois jours, le président Sall a pris des engagements fermes d’accélérer le processus de développement du Sud du pays à travers des pôles de développement. Comment appréciez-vous cette initiative ?

23 milliards FCfa pour la Casamance, c’est peu. A l’époque, Abdoul Mbaye, ancien Premier ministre de Macky Sall parlait de 45 milliards FCfa lors du Conseil présidentiel décentralisé de Ziguinchor. Le Président Sall vient d’annoncer 23 milliards FCfa. Je crois que c’est ce dernier chiffre qui est valable. Mais si le Président fait ce qu’il dit, ce serait formidable pour la Casamance, qui est une des régions les plus riches du pays. Le problème fondamental reste la paix dans cette région. Mais je pense qu’aujourd’hui chaque partie (gouvernement et Mfdc) est consciente de cela. 

Pensez-vous que le chef de l’Etat, Macky Sall, est aujourd’hui sur la bonne voie pour arriver à une paix en Casamance ?

Dans ce dossier de la Casamance, Macky Sall est parfaitement sur la bonne voie. Qu’il n’écoute personne que son cœur et sa conscience. Mais il faut noter qu’il y a trop d’intermédiaires entre lui et les rebelles. Des intermédiaires qui vivent de cette crise casamançaise et ils ne veulent pas que le conflit s’achève. Macky Sall doit tout faire pour qu’il y ait un seul intermédiaire pour la Casamance. Il doit aussi faire attention à la Gambie et à la Guinée-Bissau. A l’époque, j’avais proposé qu’il y ait un traité de coopération entre ces deux pays et le Sénégal. Et que chaque année, les trois chefs d’Etat se réunissent à travers un Sommet. Ce qui contribuerait à rassurer, en termes de sécurité, les trois peuples. On ne m’avait pas écouté à l’époque. J’aimerais bien que Macky Sall m’entende. Il ne faut pas trop internationaliser le dossier casamançais. Il faut le bloquer là où il est maintenant.

Vous avez travaillé avec tous les chefs d’Etat du Sénégal, de Senghor en passant par Abdou Diouf et Abdoulaye Wade. Est-ce que vous diriez oui si le Président Macky Sall vous demandait de venir l’accompagner ?

C’est une question difficile. Mais en tant que patriote ayant un parti politique, j’ai ma voie. Ma priorité, c’est d’abord le Sénégal, ensuite, mon parti. Si Macky Sall me demande de l’accompagner, l’Urd est prête à travailler avec lui. Pourquoi pas ? Mais ce n’est pas mon choix. Mon choix, c’est de rebâtir mon parti. Mais comme j’ai des jeunes qui veulent travailler dans l’Etat. On va voir.

Si tel était le cas, est-ce que vous poseriez des conditions au président pour que l’Urd soit à ses côtés?

Vous êtes en train d’émettre des hypothèses. Le Sénégalais n’aime pas des hypothèses. Supposons que Macky Sall demande à Djibo Kâ de venir travailler avec lui, Djibo Kâ en personne ne viendrait pas. Quelqu’un d’autre de l’Urd viendrait à ma place. Dans tous les cas, ce n’est pas mon choix. Mon choix c’est d’abord de refaire le parti, pour sillonner le pays plus tard.

Vous avez donc des ambitions présidentielles ?

Bien sûr. J’ai des ambitions pour le pays. Un homme normal doit avoir des ambitions. Sinon, ce n’est pas la peine de créer un parti pour la galerie, pour embêter les gens.

On s’achemine vers les élections locales. L’Urd ira-t-elle seule à ces joutes ou en coalition ?

On se prépare activement pour ces Locales. On a déjà réussi à mettre en place des coalitions locales dans deux à trois zones. C’est à la base de décider. Quelles que soient les alliances, je suis partant.

Avez-vous toujours gardé le contact avec le Président Wade ?

Bien sûr. Wade est entre Dubaï, Paris et l’Afrique. Il bouge beaucoup. Wade est increvable. Il est tenace, coriace et très lucide. Il a beaucoup d’idées dans sa tête tous les jours. Vous savez ; Wade est un homme très généreux de cœur.

Vous pensez que le Président Wade serait d’un apport important pour le régime en place ?

Je pense que ce serait une bonne chose que Macky Sall et Wade se parlent. Ils ne sont pas des ennemis. C’est Wade qui a formé Macky Sall et lui a mis le pied à l’étrier.  Wade était tellement fier quand Macky Sall a été élu Président. Il nous a dit à son dernier Conseil des ministres : il faut l’aider. Je rêve de voir Macky Sall et Wade ensemble,  en tant que père et fils, en tant que Président et ancien Président. Comme c’était le cas entre Senghor et Diouf et entre Wade et Diouf. Je prie Dieu pour qu’ils se parlent et s’entendent, pour l’intérêt du Sénégal et de l’Afrique. Il faut faire baisser la tension actuelle.

Avec l’arrestation de Karim Wade, est-ce que ces rapprochements sont possibles ?

Avec la volonté divine, tout est possible. Les cœurs vont se parler et chacun d’eux doit mettre de l’eau dans son vin, pour l’intérêt du pays. La deuxième alternance était bien partie, avec le coup de fil de Wade à Macky Sall. Ça nous a beaucoup soulagés. Mais beaucoup de «Seytani» (mauvais esprits) sont passés par-là. Je pense que Macky Sall doit dépasser cette situation, pour l’intérêt du Sénégal. Notre pays a un rôle à jouer dans le monde entier, à condition qu’il soit uni.

MATHIEU BACALY

source: http://www.gfm.sn/actualites/item/12519-djibo-leyti-ka-secretaire-general-de-lunion-pour-le-renouveau-democratique-pour-linter%C3%AAt-du-senegal-je-r%C3%AAve-de-voir-macky-sall-et-wade-ensemble.html