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Suivant le nouveau cadre harmonisé des finances publiques en vigueur, les ministres des Finances des pays de l'Uemoa ne seront plus, à compter de 2017, les seuls ordonnateurs des dépenses dans cet espace économique communautaire. Cette "révolution" qui vise l'efficacité suscite toutefois des interrogations, notamment sur la transparence des opérations qui seront effectuées. Pour y voir plus clair, Sud Quotidien, s'est entretenu avec le Pr Abdoulaye Sakho de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Agrégé en droit, spécialiste du droit économique et Directeur de l'Ecole Doctorale Sciences Juridiques, Politiques, Economiques et de Gestion (ED-JPEG), il est un des rédacteurs du cadre conceptuel des marchés publics du Sénégal (exercice CPAR avec la Banque Mondiale). S'il salue cette volonté de redonner confiance à l'homme, le Pr Sakho n'a pas manqué de dégager des pistes devant mettre l'Afrique sur les rampes de l'émergence tout en militant pour le développement de la recherche et l'innovation.
A compter de 2017, le ministre des Finances des pays de l'Uemoa ne sera plus le seul ordonnateur des dépenses. Bien qu'elle vise l’efficacité une telle directive est-elle pour autant un gage de transparence ?
A la différence de la gestion privée qui met plus l'accent sur le profit, les finances publiques sont au contraire beaucoup plus mues par des considérations d’intérêt général. Voilà les grands clivages dans ces deux modes de gestion et que l’on retrouve dans tous les domaines. On constate cependant depuis quelques années, que cette différenciation entre public et privé a tendance à s’estomper, à un point tel que personnellement, je suis en train de me poser la question de savoir si les deux ne sont pas en train de se rejoindre.
A quel niveau ?
Si je prends la gestion privée, depuis quelques années, on parle de gouvernement d’entreprises, «corporate governance» en anglais, qui appelle à la mise en place de valeurs éthiques dans la gestion privée. Il ne s’agit plus de dire simplement : «ça m’appartient, j’en fais ce que je veux». On vous demande désormais de prendre en compte, ce qu’il y a autour de vous, à savoir les droits des autres, les droits des citoyens, les droits de l’environnement... C’est ce que l’on retrouve dans la théorie de l’entreprise avec le concept de gouvernement d’entreprise. On y fait appel à des concepts tels que l’égalité des actionnaires, la transparence dans la gestion, l’équité dans la répartition des richesses. Ce sont des choses qui sont proches de l’intérêt général.
Parallèlement, quand je prends en compte la gestion publique, je me rends compte aussi, c’est le sens de votre question, que depuis quelques années, on met en exergue des considérations liées à l’efficacité. Or, qui dit efficacité pense à performance, et qui dit performance s’approche du profit. Il ne s’agit plus seulement de satisfaire l’intérêt général pour l’intérêt général, mais de satisfaire l’intérêt général au mieux, dans l’intérêt de tout le monde. Donc, il faut être efficace et performant. Ça rejoint dans un certain sens, les préoccupations du privé.
Les modes de gestion du privé et du public sont en train de se rejoindre. D’où la pertinence de votre question.
Le fait que le ministre des finances ne soit plus le seul ordonnateur des dépenses, ça traduit, l’esprit de cette efficacité qui ne provient pas du Sénégal (comme territoire fermé), mais du mimétisme juridique (la France a fait exactement la même chose il y a quelques années en matière de finances publiques) et de nos engagements internationaux. C'est-à-dire de l’espace UEMOA qui a décidé de créer un cadre harmonisé de gestion des finances publiques et d'y inclure des normes relatives à ces questions dont vous parlez. Notamment, de faire gérer le budget de l’Etat comme un programme et non pas comme des chapitres budgétaires tout simplement. Il y a des changements de concepts relativement compliqués à développer ici. C’est technique. Ceci dit ! Est-ce que ce sera performant ? Est-ce que ça ne pose pas des questions de transparence ?
C’est aussi le sens de ma question ?
Il peut paraitre paradoxal qu’au moment où le Sénégal a un gouvernement qui met en avant la gestion vertueuse, la transparence, etc., que l’on dise qu’on va enlever des mains du ministre de l’Economie et des Finances, la gestion budgétaire et qu'on va la confier à des ministres. Est-ce que ce n’est pas multiplier les foyers de tension ou les foyers de non transparence ? C’est un peu ça, le sens de votre question.
Exactement.
C’est légitime de poser une telle question. Mais, je crois que le paradoxe, tel que j’en ai parlé tout à l’heure, n’est en réalité, qu’apparent. Parce que derrière cette mesure, il y a, et c’est peut-être, philosophique, la confiance en l’homme qui revient. C’est vrai, qu’avec ce que nous avons vécu (sous les régimes des partis uniques et sous le régime de Wade, Ndlr), des questions pouvaient être posées. Elles se sont mêmes posées, en un point tel que certaines personnes en rigolant disaient : «moi, si on me nomme à un poste de responsabilités, je ne vais pas y aller». Parce que dès votre nomination, vous êtes un suspect en puissance. Les gens se posent des questions de savoir : est ce qu’il va gérer comme il faut ? Est-ce qu’il va bien gérer ? Est-ce qu’il ne va pas détourner ?
Finalement, on se pose la question de savoir si l’homme qu’on a nommé va avoir toute la latitude et la sérénité pour pouvoir gérer en toute quiétude, tellement, on a un peu peur, avec tout ce qui s’est passé.
C’est pourquoi, ce genre de mesures peut redonner confiance en l’homme. C’est Senghor qui disait que «l’homme est au début à la fin du développement» ou «au début et à la fin de tout».
Je ne pense pas que ceux qui sont à des postes de responsabilité soient des incapables ou des « pourris » Je ne suis pas sûr qu’ils n’aient pas toutes les capacités pour gérer. Il faut juste leur faire confiance et leur permettre de rendre compte. C’est ce qui explique ce cadre harmonisé des finances publiques. Les programmes peuvent être gérés par un ministre ou par une autre personnalité, responsable d’un programme. On peut dire que les ministères sont des programmes et le budget adéquat doit leur être alloué. Alors qu’avant, avec les « chapitres budgétaires », un chapitre ne pouvait pas aller dans un autre chapitre. Il y avait des cas dans lesquels, on rendait même de l’argent alors que le projet n’est pas achevé et que les préoccupations ne sont pas finies. Le programme, c’est pour régler des préoccupations de politiques publiques. La loi d’orientation sur les lois de finances va nous apprendre à raisonner sur les budgets publics en termes d’actions pour la réalisation de projets et non pas pour la fourniture ordinaire de moyens.
Si par exemple, on alloue un budget dans un programme de politique sociale comme celui de la bourse familiale, pour les plus démunis avec une ligne pour le personnel et une ligne pour les prestations ; à supposer que la ligne pour le personnel, ne soit pas totalement épuisée, il y aurait peut-être possibilité de prendre le reliquat et de le mettre dans la ligne pour les prestations. C’est ça l’idée de fongibilité du budget. Il faut se donner les moyens de réaliser les objectifs des projets.
Ne pourrait-on pas aussi parler dans ce cas de détournement d’objectifs ?
Oui, si on veut. Dans l’ancienne nomenclature, on parlera de détournement d’objectifs parce qu’on fonctionnait selon le concept de chapitre budgétaire. Mais, là, on ne parle plus de détournement d’objectif, parce que l’objectif, ce n’est plus du tout le service, ou les moyens pour le service mais plutôt la politique publique. Dans ce sens-là, l’idée de détournement d’objectif n’existera plus.
Quid des dépassements budgétaires que nous avons connus sous l’ancien régime ? N'y aurait-il pas de risque de retomber dans les mêmes travers ?
Oui, il se pourrait qu’il puisse y avoir ce genre de dépassement. Mais attention, le ministre des finances garde quand même le pouvoir de régulation. Il peut intervenir pour corriger les déséquilibres. Le nouveau cadre harmonisé du budget consacre le pouvoir de régulation.
Le gouvernement actuel étant composé de partis aux ambitions politiques différentes, ne risque-t-on pas de fragiliser certains départements tenus par des alliés à défaut de les confiner à des taches insignifiantes ?
Je fais confiance aux hommes politiques et je fais confiance à ceux pour qui ont recueilli majoritairement le suffrage des sénégalais. De ce point de vue-là, je ne me fais aucun souci. Je crois que celui à qui on a confié les destinées du pays fera en sorte que l’intérêt général soit respecté et non l’intérêt d’un parti.
Cette nouvelle directive ne tranche-t-elle pas d’avec les organes de contrôle tels l’ARMP et la DCMP ?
Pas du tout ! Au contraire ! Tous les organes et toutes les institutions de contrôle, vont continuer à mener leur rôle. Aussi bien la Cour des comptes qui a un rôle central que le Parlement qui va continuer à jouer son rôle et même un peu plus qu’actuellement. Dans l’exécution budgétaire, il y aura des moments forts qui seront ceux du Parlement. Sans occulter les contrôles de l’exécution de la dépense. Quand on prend le budget, il y a les recettes et les dépenses. Le contrôle des dépenses passera aussi par le biais du système de marchés publics et d’autres types de contrôle qui viendront s’y greffer. D’ailleurs, le gouvernement actuel devra se rapprocher de l’ARMP et ne pas la considérer comme un « empêcheur de tourner en rond ».
A ce propos, ce que j’ai noté personnellement, c’est qu’il faudrait que l’Afrique réfléchisse beaucoup plus, pour que nous-mêmes tentions d’inventer notre mode de gestion de nos économies, de nos différentes institutions. Si on ne le fait pas, on va passer notre temps à copier. Or, cette méthode peut ne pas être très conforme avec les besoins de nos populations, avec les besoins de nos Etats.
Je ne critique pas ce nouveau cadre harmonisé, mais je me dis peut-être qu’il y a quelque chose d’autre à inventer et je fais confiance aux hommes et aux femmes qui sont en Afrique.
Vous pensez donc que le président de la République a raison de dire qu’il n’accepterait pas que des procédures l’empêchent de faire des résultats ? C’est une façon de valider les gré à gré non?
(Il hésite). C’est un Chef d’Etat qui est venu au pouvoir par des élections. Au plan politique, il a peut-être u discours qui lui est propre. Mais du point de vue purement technique, il faut comprendre quand il dit qu’il n’acceptera pas que des procédures l’empêchent de faire des résultats. Je le vois comme une boutade d’un président qui a fait des promesses et qui veut des résultats. Mais, en réalité, dans un pays, quel que soit votre niveau de responsabilité, vous êtes tenu de respecter la loi et les normes du pays. Si vous estimez que ce sont des obstacles, il y a des voies et moyens pour les changer.
En revanche, cette boutade du président de la République est susceptible d’interprétation pour un chercheur. Et je crois qu’il faut même l’interpréter.
Dans ce cas, comment l’interpréteriez-vous ?
Ça prouve qu’il y a, en un moment donné, une sorte de hiatus entre le droit et ce qui doit être. Ce que le droit dit, c’est ce qui est. Il dit, il faut ceci ou cela. Mais, si vous estimez que le droit est un obstacle à ce que vous pensez pouvoir faire, vous pouvez changer le droit. Pour le changer, il faut argumenter. Et l’argument que je crois qu’ils auraient pu avoir, c’est de se dire : «il y a des secteurs vitaux pour l’économie de mon pays, pour mes populations, sur lesquels, il faut que je fasse des réalisations, je prends en charge moi, président de la République, élu au suffrage universel, certains secteurs pour dire, voilà ce qui doit se faire».
Pour parler de manière beaucoup plus concrète, on peut tenir le raisonnement aussi bien pour la protection sociale et la solidarité que pour les infrastructures.
Si je prends les infrastructures, je suis de ceux qui croient que c’est fondamental pour le développement de nos pays africains. C’est plus que nécessaire. Mais les infrastructures, ce sont des constructions. Ce sont des chantiers. Ce sont des biens « infrastructurels »que vous allez livrer à l’Etat. Or, quand vous devez livrer des biens à l’Etat, il y a dans le droit, une procédure que l’on appelle la procédure de passation de marchés publics. Elle vous demande de faire appel à concurrence. Elle vous demande de faire de la publicité. Or, les biens de l’infrastructure que l’on veut livrer à l’Etat sont relativement, à mon avis, différents des biens qu’on livre par le biais des marchés publics. Ce n’est pas la même chose.
Quelle est la différence ?
La différence pour moi, c’est que le cadre de la livraison des projets d’infrastructures relèverait plutôt de la réalisation de projets ou pour parler plus largement, du droit de l’investissement. En revanche, pour les marchés publics, c’est plutôt la fourniture ordinaire de moyens, la livraison de biens de consommation courante à l’Etat. Exemple des tables-bancs, des bâtiments pour faire des classes, des feuilles de papier. Je comprends tout cela.
Mais, quand vous voulez faire des projets d’infrastructures, tels un aéroport, des ponts, des autoroutes, je ne suis pas sûr que l’on soit dans ça.
D’autant plus que ceux qui vont vous financer pour réaliser ces projets, ce sont souvent des gens, qui viennent, non pas en cocontractant de l’administration, pour faire un marché public mais en investisseurs. Or, un investisseur, dans les pays en développement comme les nôtres, qu’est ce qui l’accueille ? C’est le code des investissements et non le code des marchés publics.
L’Apix. L’Agence pour la promotion des grands travaux et des investissements.
Exactement ! Quand, ils sont dans ce cadre-là, on leur fait toute sorte de faveurs. On leur déroule même le tapis rouge (rires) en leur disant venez : «vous n’allez pas payer d’impôts. Vous n’allez pas faire ceci ou cela… »
Maintenant, ils viennent pour monter un pont et on leur dit non : «il faut passer par l’appel à concurrence». Désolé mais si vous faites cela, l’investisseur va aller chez le voisin. Or, le voisin, c’est qui ? Par exemple, on est dans le même espace mais on est en concurrence économique plus ou moins avec la Côte d’Ivoire. Alassane Ouattara a très bien compris. Il s’est fait voter une loi d’habilitation pour les infrastructures, par son Parlement. Aujourd’hui, il est le seul, pratiquement seul à décider. Je crois qu’il est mesuré. Quelqu’un qu’on a élu au suffrage universel, c’est quelqu’un qui va être relativement mesuré. Il ne va pas faire de la dictature. La Côte d’Ivoire est en grands chantiers. Peut-être qu’il a bénéficié de la situation de guerre de laquelle il est sorti. Mais, je crois que le Sénégal devrait aller dans ce sens.
Nous sommes au Sénégal quand même. On ne peut pas se permettre de gouverner par ordonnance?
Pourquoi ? On est qui nous autres sénégalais qui nous croyons toujours meilleurs que les autres ? On l’a déjà fait ! Abdou Diouf a gouverné par ordonnances. Il y a eu des périodes d’ordonnance au Sénégal. Et l’ordonnance, les députés vous autorisent pour une période de temps déterminée, supposons pour six mois. Vous décidez en matière fiscale ou en matière sociale ou alors dans le secteur des infrastructures. C’est dire juste que c’est une technique constitutionnelle pour mener à bien vos projets liées aux politiques publiques.
Il est vrai maintenant quand vous venez au pouvoir porté par des gens comme nous, de la société civile, où l’on parle de transparence, de bonne gouvernance, etc., il y a de très fortes chances que vous hésitiez. Mais, il y a des moments où il faut décider.
A vous entendre, on a comme l’impression que la transparence devient un fardeau pour les gouvernants ?
Telle qu’elle se décline aujourd’hui, elle pourrait l'être. Vous savez, à chaque période correspond sa forme de transparence telle que les populations la souhaite. Regardez comment le fameux secret bancaire a évolué.
La transparence n’est pas indivisible. Il y a des moments où on dit sur tel aspect, voilà ce qu’il faut. Il y a aussi des moments, pour des besoins d’intérêt général, de l’efficacité, de performance, il ne faut pas que l’on sacrifie la population, sur l’autel de cette transparence.
C’est quoi, la transparence ? Je prends le code des marchés publics. A la limite, j’ai rédigé le cadre conceptuel des marchés publics. Je fais partie des gens qui ont rédigé l’étude qui a mis en place le cadre conceptuel des marchés publics.
Le code dit qu’avant que l’administration fasse une transaction avec quelqu’un, elle doit au préalable informer. Il faut donc faire de la publicité. En plus de l’information, on demande de mettre en concurrence les gens qui sont capables de le faire. C’est ça l’idée de la transparence. Une fois que vous avez fait tout cela, vous allez ensuite choisir en toute transparence dans une commission indépendante. Le but, c’est qu’on vous livre le bien au mieux des intérêts de tous et pas seulement de l’Etat.
Même si vous prenez le code des marchés publics, vous vous rendrez compte qu’il a évolué. Au début, c’était le principe de l’adjudication. On prenait systématiquement le moins disant. Mais, ce n’est pas sûr que le moins disant soit le plus efficace pour l’administration. La preuve, tous les ans, pour le même produit, vous pouvez lancer le même marché. Parce que le produit qu’on vous a livré, il était moins cher, mais il était mauvais. Et tous les ans, vous faites le même marché. Or, si vous aviez pris le mieux disant, il n’y aurait pas de problèmes. Mais, on vous dira que vous avez triché parce que vous avez pris le mieux disant, alors qu’il y avait un autre moins cher. Or, il ne s’agit pas seulement d’être moins cher, mais il faut aussi être efficace et performant.
De ce point de vue-là, je crois qu’il y a en Afrique des choses sur lesquelles, il faut qu’on réfléchisse.
Par exemple mon impression est que nos partenaires au développement financent plus des études que les investissements dont nos pays ont besoin pour décoller. Mieux, ces études sont réalisées généralement par des experts qui ne maitrisent pas beaucoup le contexte de nos pays. Reportez-vous au rapport du bureau d’évaluation du FMI de 2011 et vous verrez ce qu’en disent ces évaluateurs. En tout état de cause, on sent que c’est une question d’actualité.
Autre exemple, la question de l’accueil des investisseurs venus des pays BRICS (NDLR : Brésil, Russie, Inde, Chine, South Africa) nous amène à réfléchir au regard du cadre juridique des politiques publiques.
J’ai comme l’impression que par certaines normes on essaie de nous dissuader de diversifier notre cadre de coopération. On nous empêche donc de capter les offres d’investissement venant des BRICS et de certains pays arabes. C’est en ce sens que je perçois tout le débat sur les « offres spontanées » dans les relations entre l’Etat et les investisseurs dans les projets d’infrastructures.
Le droit du partenariat public privé ne peut pas faire l’économie de ce débat. A mon avis, il faut appréhender le droit public d’aujourd’hui, et particulièrement le partenariat public-privé, au travers d’une idée de projet. Il faut le soumettre à une approche fonctionnelle. Cette approche est l’une des seules qui peut nous autoriser à observer le « droit administratif », cauchemar des étudiants de deuxième année de droit, depuis l’entreprise créatrice de richesses dans la société et, non pas à partir de cette vision bien jacobine et napoléonienne du droit administratif appréhendée à partir de l’Etat.
Tout çà n’est pas encore très clair dans ma tête de chercheur. Mais, je me dis, et j’en suis persuadé, qu’il est temps qu’on réfléchisse sérieusement par rapport à beaucoup de choses qu’on a prises dehors.
Ce copier-coller freine donc le développement de l’Afrique ?
Ça nous freine énormément. Je vous assure. Quand on veut mettre en place quelque chose, on vous dit, il faut mettre en place un benchmark, c'est-à-dire, voir partout dans le monde, les meilleures pratiques. Le « benchmarking » est le plus mauvais cadeau qui est offert à nos pays car il nous fait croire que tout a déjà été fait et qu’il faut juste voyager par l’esprit ou physiquement pour aller chercher ce dont le pays a besoin. Mais, pourquoi nous n’inventons pas, alors que notre pays, le Sénégal est réputé pour être un lieu de création d’idées?
Ce que nous allons voir ailleurs a été certainement inventé pour les besoins d’une société donnée. Il faut donc qu’on invente et qu’on arrête d’aller chercher ce qui a été déjà fait et qui n’est pas forcément bon pour notre société.
Si, vous êtes jeune et que vous voulez monter quelque chose de tout neuf, on vous dit : «non, il est jeune, il n’a pas d’expérience». Or, c’est peut-être ça qui peut vous aider. Il y a des continents qui se sont développés avec des jeunes inexpérimentés certes, mais brillants. La Silicon Valley (Etats-Unis), s’est développée avec des jeunes qui ont monté leurs produits avec l’appui du capital risque. Bill Gate (fondateur de Microsoft) et autres quand, ils montaient leurs projets, ils étaient tous jeunes. Ils sortaient à peine de l’Université. C’est ça qui peut nous aider. L’invention, l’activité inventive, c’est aussi faire un peu confiance à l’Université et aux chercheurs.
SOURCE:http://www.sudonline.sn/les-africains-doivent-inventer-le-mode-de-gestion-de-leurs-economies_a_19340.html