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Ven, Nov

FOOT: ANALPHABETE A SON ARRIVEE AU CENTRE DE FORMATION ET BACHELIER NEUF ANS APRES- D’Al-Azhar à Diambars, Abdou Mbacké Thiam raconte son incroyable histoire

INTERVIEWS -PERSONNALITÉS
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INSTITUT DIAMBAR

L’OBS- Il était arrivé à Diambars en 2005 sans savoir lire ni écrire le français. Neuf ans plus tard, Abdou Mbacké Thiam (22 ans) a obtenu le Baccalauréat et rêve maintenant de s’imposer sur le terrain. Il se raconte.

Jusqu’à son arrivée au centre fondé en 2003 par Saër Seck, Bernad Lama et Jimmy Adjovi-Boco, il était à Al-Azhar de Guédiawaye (institut islamique fondé par le marabout mouride feu Sérigne Mourtada Mbacké, Ndlr).

 

 Pas au même niveau que les autres pensionnaires donc, mais encore plus dévoué en classe. Il n’est pas le plus connu à Diambars, mais il n’en est pas moins l’un des plus doués. Abdou Mbacké Thiam se distingue par son intelligence et sa volonté de réussir. Pendant 4 ans, en F1 et F2, classes préparatoires pour les pensionnaires qui n’ont jamais fait l’école, il traverse les classes à la vitesse de la lumière avant de s’offrir le bac (Série L) cette année. «J’ai sauté pour aller directement en classe de 5e avec Aly Souleymane Ly (un enfant talibé, arrivé à Diambars sans avoir jamais fréquenté l’école), dit-il. Beaucoup de personnes ne croyaient pas en nous, mais notre volonté était très forte.» En classes de Seconde, Première et Terminale, il a toujours été «1er ou 2e de la classe» (voir L’Obs du jeudi 7 août).

 

 

«Rester dans le milieu du football»

Le diplôme de baccalauréat en poche, Abdou Mbacké Thiam n’a «pas encore» choisi sa voie. «Peut-être que je ferai des études qui me permettront de rester dans le milieu du football.» Sa seule certitude est sa volonté de prouver sur le terrain. Gravement blessé en 2010 lors d’un match de Ligue 2 face à l’ETICS, et souvent écarté de la feuille de match par Boubacar Gadiaga, il veut désormais se faire une place au sein de l’effectif de Diambars. Et même s’il n’a pas encore fait un choix pour ses études supérieures, il n’entend pas abdiquer. «Avec tout ce que j’ai fait jusque-là, il est hors de question d’arrêter. Je n’ai pas encore décidé, mais je vais parler avec mon père et mon président Saër Seck pour prendre la bonne décision.» Issu de la même promotion que Joseph Romeric Lopy (Sochaux, France) et Abdou Karim Camara (Molde, Norvège), il rêve aussi de quitter le centre et rejoindre un club professionnel européen.

Né avec l’amour du ballon rond dans le sang, il a commencé à taper dans le cuir à l’école de football Lamine Bathily, dans le quartier de Golf Nord 1. «Mon grand frère n’était pas un joueur de football, mais il m’emmenait tout le temps au stade avec lui et m’imposait aussi à regarder les matches (à la télé), confie-t-il. Et je passais tout mon temps à jouer au football dans le quartier où j’étais très remarqué grâce à mon talent.» Avec un talent inné, il réussit d’abord au test départemental de détection organisé par Diambars au stade Ndiarem de Guédiawaye. Après cette première étape, il passe avec brio les tests régionaux, nationaux et la phase finale au stade Léopold Sédar Senghor. «C’est Tonton Fodé Wade (un ancien dirigeant de Diambars décédé et dont le stade porte son nom) qui a appelé mon grand frère et mon coach à l’école de football pour les informer», se rappelle-t-il.

«Pas le courage de le dire à mon père…»

Sauf que cette nouvelle risquait de ne pas faire plaisir à tout le monde, surtout au chef de famille. «Nous n’avions pas le courage de le dire à mon père parce qu’il ne voulait pas qu’on joue football, se rappelle ce joueur capable d’évoluer comme milieu offensif ou en deuxième attaquant. Concernant cette volonté de son géniteur, il explique: «Il ma donné le nom de son marabout (Sérigne Abdou Mbacké «Borom Dër bi») et tout ce qu’il voulait, c’était que je maîtrise le Coran», d’où son séjour à Al-Azhar où il a passé «4 à 5 ans». Pour pratiquer sa passion et contourner le vœu de son père sans risquer de recevoir un dîner de cravaches le soir, Abdou Mbacké avait une stratégie mûrement réfléchie. «Je connaissais l’heure à laquelle il descendait du boulot, dit-il, et je rentrais à la maison avant qu’il n’arrive. Je cachais aussi mes équipements de peur qu’il ne les trouve.» Et pendant la période des tests, il lui fallait «inventer» une bonne histoire pour y aller. «J’ai fait les tests à son insu. Je me réveillais à 6h du matin et lui disais que nous avions des travaux à faire à Al-Azhar. Et comme il voulait tellement que j’apprenne le Coran et l’arabe, il me laissait y aller. Seuls ma mère et mon grand frère étaient au courant.»

A l’annonce de son admission à Diambars, ils n’avaient plus le choix. C’est finalement son grand frère Fallou qui a convaincu son père. Abdou raconte : «Il est allé le voir le même jour et lui a expliqué le projet Diambars et mon ambition dans le football, car il savait que je jouais bien.» Leur surprise fut grande quand il a appris la nouvelle. «Il était content et est allé en discuter avec Serigne Mame Mor Mbacké (Ibn Serigne Mourtada Mbacké) et Serigne Khadim Lo (Ibn Serigne Moustapha Lo) pour avoir leurs avis, confie Abdou. Il a aussi reçu les conseils de beaucoup de gens comme son ami, tonton El Hadj Mbaye.» Il poursuit : «Après mon entrée à Diambars, mon papa est devenu une autre personne. Il m’encourageait et est devenu un fan de football.»

«J’écris l’arabe et lis le Coran mieux que le français»

Aujourd’hui, Abdou Mbacké Thiam mesure sa chance d’être à Diambars et ne regrette guère la volonté de son père de l’inscrire à Al-Azhar plutôt que dans une école française. Même si je ne maîtrise pas tout le Coran, je sais pratiquer ma religion comme il se doit, assure-t-il. J’écris aussi l’arabe et lis le Saint Coran mieux que le français. Je remercie aussi Diambars et ses membres fondateurs parce qu’il ne faut pas oublier que cet institut nous a permis d’avoir la chance de pratiquer le football et d’aller à l’école.» A travers sa réussite, le slogan de Diambars: «Faire du foot passion un moteur pour l’éducation», trouve toute sa signification.

OUSMANE DIOP

 

source: http://www.gfm.sn/foot-analphabete-a-son-arrivee-au-centre-de-formation-et-bachelier-neuf-ans-apres-dal-azhar-a-diambars-abdou-mbacke-thiam-raconte-son-incroyable-histoire/