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A l’instar des Etats-Unis d’Amérique, du Maroc, du Soudan, de l’Egypte, du Koweït, du Qatar, des Emirats Arabes Unis et de la Jordanie, le Sénégal a décidé d’envoyer un contingent de 2 000 soldats en Arabie Saoudite pour une mission de sécurisation de ce pays qui est engagé dans une guerre régionale contre des rebelles «Houtis», en prise avec le gouvernement légitime du Yémen.
Les soldats sénégalais ne prendront pas part aux combats sur le sol yéménite, mais constitueront une base arrière chargée de participer à la défense du territoire saoudien en cas d‘incursion de forces hostiles. C’est dire que l’engagement des «diambars» serait assez bien calculé pour leur éviter d’être exposés et surtout de limiter les risques d’éventuelles pertes. Pour autant, le risque zéro n’existe pas dans un conflit du genre, surtout dans une région en proie à des tensions militaires exacerbées par l’intervention du royaume wahhabite pour sauver un régime yéménite qui constituerait le dernier verrou contre une emprise de groupes armés soutenus par l’Iran, dont les visées sur les lieux saints de l’islam sont un secret de polichinelle.
L’objectif final de la croisade engagée par l’Iran n’est pas le Yémen encore moins sa capitale Sanaa, mais plutôt l’Arabie Saoudite. Le nouveau roi saoudien Salman ne s’y trompe pas et appelle tous ses amis à joindre leurs efforts dans la lutte contre les «Houtis» qui pourraient, en cas de victoire et de mainmise dans la péninsule arabique, faire une jonction avec les redoutables islamistes de «Daesh» qui cherchent à installer un Emirat terroriste aux visées et aux méthodes des plus rétrogrades dans une zone dont les frontières vont au delà de la Syrie et de l’Irak.
Cet engagement de troupes du Sénégal suscite de nombreuses questions comme l’avait d’ailleurs été l’envoi, en 1990-1991, de 495 soldats pour participer à la Guerre du golfe, suite à l’invasion du Koweït par des troupes expansionnistes de Saddam Hussein. Dans cette guerre, on se rappelle que le Sénégal avait payé un lourd tribut avec 8 soldats blessés par l’explosion d’un missile sol-sol irakien, mais surtout 92 soldats tués dans accident d’un avion C130 de l’Armée saoudienne qui les transportait pour un pèlerinage aux lieux saints de l’islam en préparation de leur retour au Sénégal. Dans ce nouvel engagement militaire, les autorités sénégalaises et saoudiennes ont cherché à contenir les risques, mais on ne saurait être surpris que des militaires sénégalais arrivent à être comptés parmi les victimes.
Seulement, l’enjeu d’une guerre aussi lointaine du point de vue géographique en vaudrait-il la chandelle ? La réponse est affirmative. Le premier intérêt est diplomatique. Dans cette importante partie du monde, le Sénégal a choisi son camp, celui de ses amis traditionnels qui ne lui ont jamais fait défaut chaque fois qu‘il a eu besoin d’assistance. Avec un tel engagement, le Sénégal devrait renforcer davantage sa coopération avec l’Arabie Saoudite, le Koweït et les autres Emirats arabes du Golfe.
Le Sénégal a donc tout intérêt à prêter main forte à des régimes alliés pour leur permettre de rester en place, surtout qu’il a une claire conscience que les régimes d’obédience islamiste d’inspiration iranienne lui seront fatalement hostiles. Qui ne se souvient pas que l’Iran ait eu à poser des actes hostiles au Sénégal en armant lourdement le régime de Yahya Jammeh ? Un armement manifestement dirigé contre le Sénégal. C’était un casus belli.
Par ce moyen, les troupes sénégalaises auront également une bonne opportunité pour obtenir des équipements militaires et autres moyens logistiques, mais aussi de s’exercer sur un théâtre d’opérations dans le cadre d’une guerre dont les méthodes leur sont jusqu’ici inconnues. Leur engagement en Arabie Saoudite les préparerait à faire face à des menaces similaires provenant de groupes comme Boko Haram ou Al Qaida qui s’incrustent de plus en plus dans la région de l’Afrique de l’Ouest. La menace pèse fortement sur le Sénégal comme sur d’autres pays qui ont décidé de joindre leurs efforts pour endiguer l’avancée des hordes terroristes.
C’est dans cette même optique que le Sénégal avait décidé de s’engager contre les islamistes au Mali. C’est dans cette même logique que des pays comme le Tchad, le Niger et le Cameroun se sont engagés pour lutter contre Boko Haram, une guerre dans laquelle ces pays perdent déjà de nombreux soldats. Il s’avère urgent d’engager ainsi une coalition internationale pour éviter la jonction, qui se profile, de groupes islamistes de tous acabits que sont Al Qaïda au Maghreb, Boko Haram en Afrique de l’Ouest, les Shebabs dans la Corne de l’Afrique et les éléments de Daesh en Syrie, en Irak, les combattants d’Al Qaïda au Yémen ou ailleurs dans le monde arabe ou en Afghanistan. Chaque pays est donc appelé à fournir sa contribution et il est heureux que le Sénégal ne soit pas en reste.
Il n‘en demeure pas moins que l’on pourrait craindre qu’un tel engagement du Sénégal pourrait exposer ce pays et cristalliser une certaine rancœur qui pourrait pousser des groupes terroristes à s’en prendre à notre pays. Mais force est de dire que le Sénégal n’aurait pas besoin de tenter le diable, car il est déjà dans la ligne de mire des terroristes islamistes. Le Sénégal se sait exposé depuis que nombre de ses ressortissants sont en formation dans les camps de jihadistes. En effet, la logique des terroristes islamistes est toujours de chercher à frapper d’abord dans leur propre pays, une fois revenus de leur instruction en terrorisme.
Il s’y ajoute que depuis longtemps, les services spécialisés ont alerté le Sénégal sur de réelles menaces terroristes. Il est établi que de nombreux terroristes qui quittent l’Europe, notamment la France, passent par le Sénégal avant de rallier certains camps d’entraînements terroristes en Syrie, en Irak ou en Afghanistan. La France a demandé au Sénégal de surveiller davantage l’axe Paris-Dakar-Istanbul.
source:http://www.leral.net/Une-guerre-lointaine-et-si-proche-Par-Madiambal-Diagne_a143508.html