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Dans cet entretien qu’il nous a accordés en marge du symposium sur le radicalisme organisé à Tivaouane à l’occasion du Gamou 2015, Abdoul Hamid Sy, Al Amine, coordonateur de la cellule de communication Zawiya Tidiane, dénonce la «falsification idéologique véhiculée par le fondamentalisme incarné par certains groupes et, qui transforment le message authentique de l’Islam ». Pour lui, il est alors important de «restaurer, le message authentique de l’islam à travers nos grands maîtres »
Vous venez de clôturer un symposium sur la montée du radicalisme islamique, quelle analyse faites-vous de cette situation ?
Le thème que nous avons choisis de traiter dans le symposium nous a été édicté par l’actualité brûlante. Tout le monde connait les relents que justement la violence liée au radicalisme islamiste a créés à travers les médias. Compte tenu de ce phénomène qui interpellent notre conscience musulmane, il nous est apparu opportun de convoquer l’intelligentsia musulmane sénégalaise autour de cette problématique qui nous cause énormément de turbulence. L’humanité toute entière connait l’ampleur du désastre lié au terrorisme islamique avec les actions de Daesch, Boko Haram, aqmi ou des Shebab… c’est un phénomène qui interpelle tous les musulmans. Il est important que nous nous dressions face à ce problème.
Parce que évidemment, il y a une falsification idéologique véhiculée par le fondamentalisme incarné par certains groupes et, qui transforment le message authentique de l’Islam. Il était important que nous qui sommes en tout cas partisans Tassaouf islamique, le soufisme islamique, que nous élevions la voix pour faire la différence, mais aussi restaurer, le message authentique de l’islam à travers nos grands maîtres. Ici au Sénégal nous avons la chance d’avoir un Islam bâti sur des principes de paix, de tolérance, de respect de l’autre, de cohabitation pacifique entre les communautés. De la même façon que le Prophète Mohammed (psl) lorsqu’il s’est installé à Médine avait en tout cas bâti une Cité-Etat dans laquelle cohabitaient musulmans, juifs et chrétien, de la même façon, notre maître Seydi Elhadji Malick Sy avait posé les bases d’une cité idéale où les différences se gommeraient, les communautés se côtoieraient et fraterniseraient entre elles.
C’est cette idéale qu’il s’est évertué à mettre en place. On rapporte d’ailleurs comment les gens cohabitaient ensemble au moment où El Hadji Malick s’installait à Tivaouane en 1902. Il avait l’habitude de dire : «je veux bâtir une cité idéale dans laquelle tout le monde, même le non musulman, rouverait sa place. La seule personne que j’exclus de cette idée est celle qui n’est pas éprise de paix ». Ceci pour montrer que le principe de la culture de la paix est quelque chose de très ancrée dans notre tradition islamique et de notre tradition africaine. Pour nous l’idée était de montrer tous les aspects de cette ouverture à travers les enseignements de nos maitres. Et, à ce niveau Elhadji Malick Sy a donné l’exemple dans son combat pour la propagation où, il a su transformer les consciences sans violence ni usage d’armes et c’est cela le génie du modèle d’enseignement et de propagation de l’islam véhiculé par Elhadji Malick Sy. Il a su faire face aux colons et aux forces traditionnelles païennes.
Face à la montée du radicalisme, quelle solution choisir : la confrontation ou l’éducation ?
Assurément sur l’éducation, c’est d’ailleurs cela la pertinence même de la thématique. La formulation du thème du symposium fait un clin d’œil au modèle d’éducation mis en place. Parce que nous avons parlé du thème «Face au radicalisme : Quelle réponse pour l’école de Tivaouane ? ». Parce que pour nous l’accent doit être mis sur la formation, l’éveil des consciences pour leur faire comprendre ce qu’est le véritable islam, l’Islam authentique, professé par Prophète Mouhammed (psl), cet islam promu par les héritiers du Prophète et parmi eux, El hadji Malick. Cette Islam qu’il a su véritablement enseigner, il a fondé des écoles et des mosquées. Et comme, j’ai entendu le dire par quelqu’un lorsque les gens sèment des bombes, Elhadji Malick Sy avait semé des mosquées et des écoles partout et à travers sa politique de décentralisation. Partout où, il avait installé un mouqqadam qu’il avait former, celui-ci avait la responsabilité d’organiser la communauté musulmane autour d’une mosquée, autour d’une école. C’était là sa stratégie payante qu’il nous faut perpétuer et promouvoir auprès de nos élites et des générations tardives.
Est-ce à dire que ce modèle sénégalais de formation islamique est exportable ?
Parfaitement, le modèle Sénégalais est à tout point de vue original et basé sur l’islam original. Ce qui nous vaut cette paix et cette stabilité sociale que nous avons actuellement. Cela a été possible parce que l’Islam a su tellement transformer les consciences que finalement tout ce qui a pu déstabiliser les pays qui sont autour de nous ne nous ont pas trop ébranlés. Et je crois qu’il faut insister sur l’originalité de ce modèle de l’Islam sénégalais, l’expliquer davantage, le renforcer pour qu’il soit un rempart par rapport au fondamentalisme. C’est un Islam qui a déjà donné ses résultats, en termes de paix civile et de stabilité. Il est donc bon de le présenter au plan mondial comme référence.
Que vous inspire le débat autour de l’interdiction du port de la bourqa ?
Pour moi, le problème ne se situe pas au niveau du port vestimentaire, même s’il est important, compte tenu du contexte et des exigences sécuritaires qu’un certain nombre de mesures soient prises. A mon avis, il est de la responsabilité de l’Etat d’assurer la sécurité nationale. Mais il n’en demeure pas moins que pour moi ce n’est pas l’interdiction qui importe. En fait, la bourqa n’est pas le problème, c’est plutôt la question des consciences qu’il faut armer afin qu’elles puissent distinguer le vrai du faux. Pour moi, c’est cela l’essentiel. Maintenant, je dois admettre que ce n’est pas une mesure excessive que les forces chargées de la sécurité nationale prennent des dispositions par rapport au code vestimentaire utilisé terroristes, même si moi je relativise. Car quand j’ai vu les attaques au niveau du Bataclan et du Stade de France, ceux qui les ont perpétré n’étaient pas en burqa ni n’avaient des barbes pendantes comme on a entendu les témoins les décrire. Le mal est ailleurs parce que il n’y a pas d’arrière fond idéologique par rapport aux idées véhiculées par ces mouvements là. Pour moi, ces gens ne sont pas des tenants d’un islam rigoriste. Ce sont plutôt des encagoulés politiques qui ont trouvé dans l’Islam un terreau fertile pour faire valoir leurs idées et procéder à une manipulation d’un autre âge. Dans l’histoire de l’Islam le phénomène que nous connaissons n’a pas son pareil. On a eu quelque chose qui lui était similaire avec l’avènement de la Secte des Assassins, mais sans que ce soit comparable. Parce que le niveau de manipulation aujourd’hui est sans commune mesure, là les motivations sont beaucoup plus funestes, plus subtiles, l’Islam est juste pour eux un prétexte pour faire prospérer des idées politiques.
SOURCE:http://www.sudonline.sn/-il-y-a-une-falsification-ideologique-vehiculee-par-le-fondamentalisme_a_27706.html