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Ma vie… Safiatou Ndiaye, 64 ans : «Spoliée de ma maison, on m’a conseillé d’en finir avec la vie»
L’OBS – Elle ne recule devant rien. Après s’être battue trois ans pour se libérer des serres infernales du système banquier, Safiatou Ndiaye, 64 ans, a finalement été expulsée de sa maison. Sans domicile fixe, elle a décidé de repousser la sombre idée d’en finir avec la vie, pour se battre. A nouveau. Mais cette fois, en prenant à témoin le peuple sénégalais face à l’injustice faite à une vieille dame. Récit.
«Mon histoire tient dans la tragédie de ma condition féminine. Mon seul tort, est d’avoir fait confiance à une bande de banquiers. Autrefois, j’étais commerçante d’huile de palme. Un business florissant qui m’a menée pendant 30 ans dans tous les Etats du pays de l’Oncle Sam. Quand il fut temps de prendre ma retraite, j’avais assez d’argent pour me payer au moins un terrain que je dénichais à Hann Mariste II. C’était les années 2000 et à l’époque, personne ne voulait ou n’habitait cette zone. Je me suis payé les services du directeur adjoint de la Sicap pour dessiner les plans d’une maison qui, j’imaginais, abriterait définitivement mes vieux jours. Je m’étais bien fourvoyée ! Avec mes économies, j’ai bâti le rez-de-chaussée et trois appartements à louer au dessus. Seulement, le plan comportait quatre appartements et je n’avais plus les moyens de construire le dernier. Je suis tombée malade et devant l’impossibilité de pouvoir me soigner correctement, j’ai décidé de contracter un prêt à la banque. J’avais alors un compte à la Cbao Attijariwafa Bank qui a, avec enthousiasme, consenti à me prêter la somme de 14 700 000 millions FCFA. En garantie, j’ai affecté à la banque une hypothèque sur ma maison, un immeuble bâti R+2 dont la valeur a été fixée, selon un expert, à un peu plus de 103 millions. Mais ce n’est pas là que le bat blesse. Je me suis rendu compte bien après que j’avais signé un prêt à un taux quasi usurier de 17 % remboursable sur 12 mois selon une périodicité mensuelle. Je venais déjà de verser près de 3 millions à la banque. Bien sûr, je suis retournée voir mon banquier et celui-ci m’a assurée, devant responsables, que je pouvais effectivement différer le remboursement. Ce fut une erreur fatale. La banque a considéré ce différemment comme des arriérés et ses responsables se sont dépêchés de réaliser l’hypothèque inscrite sur mon immeuble, sans que je n’en sache jamais rien. J’ai vu débarquer, un beau jour, un énergumène qui m’a appris que ma maison appartenait maintenant à son patron et que dorénavant, mes locataires devaient lui verser les loyers. Le pire est que les locataires ont joué le jeu sans que je n’y puisse rien. Je suis une vieille dame sans le moindre secours. J’ai crié partout cette injustice, défoncé toutes les portes des droits de l’Homme, cela n’a pas empêché la banque de me spolier de mon bien le plus précieux.»
Coup fourré. «Le scandale est que la Cbao a, dan un premier temps, soumis ma maison aux enchères, avec une mise de 5 millions, pour un bien qui vaut 100 millions. Ils l’ont finalement adjugée au patron d’une société au prix de 25 millions. Arrive ici le rocambolesque, puisque la même banque a repris en garantie l’immeuble pour allouer un prêt de 266 millions à son nouvel acquéreur. J’ai aussitôt su que j’étais victime d’un coup monté par une bande d’hommes peu scrupuleux devant une vieille dame à moitié malade. Je me suis alors rappelé les paroles du mandataire de l’acquéreur qui, un jour, en venant me signifier que je devais quitter les lieux, m’a conseillé d’en finir avec la vie au point où j’en étais. Après avoir plusieurs fois songé au suicide, j’ai décidé de me battre avec toute l’énergie qu’il me reste. Cela fait trois ans que je résiste à tous les huissiers qu’ils m’ont envoyés pour me mettre dehors. Mais il y a quelques semaines, j’ai été prise de court par un huissier et une vingtaine d’hommes qui, profitant de ma fragilité, m’ont chassée par la force de chez moi. Tout Mariste a assisté, impuissant, au spectacle de cette bande de brutes qui ont balancé mes affaires dehors, dans la rue. Aujourd’hui, je suis sans domicile fixe. J’élis domicile ça et là, au gré de la bonté des gens, que je remercie au passage. Je ne raconte pas mon histoire pour attirer des dons. Tout au plus, voudrais-je vos prières. Si je ne suis pas encore folle de dépit, c’est parce que j’espère encore qu’on me rendra justice. J’ai porté plainte et je prends à témoin le monde entier, toute la société sénégalaise, de ce qu’une bande de banquiers malveillants ont osé faire à une vieille dame, honnête citoyen, qui a travaillé toute sa vie pour s’offrir son havre de paix.»
Recueillis par AICHA FALL THIAM