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Visite guidée à la prison de Rebeuss avec l’ex-détenu, Issa Dieng* : Ici, la vie est répugnante

Côte d’Ivoire

L’OBS – Etre prisonnier, c’est déjà être prévenu à la barre du tribunal de la rue avant de comparaître devant une quelconque juridiction pénale. Jugé et condamné par la société, le prisonnier perd une bonne partie de sa dignité avant de voir son sort tranché. Et dans le trou noir de la prison où le détenu élit, sans choix possible, domicile, sa dignité n’est plus que miette. Sa vie devient répugnante. Une visite guidée avec l’ex-détenu, Issa Dieng, permet de découvrir les faces immondes de la prison de Rebeuss.      

 

Sa voix est rauque, son regard voilé noir et ses traits tirés. Issa Dieng a une forte carapace et résiste à tous les coups. Ancien détenu de la Maison d’arrêt de Rebeuss, l’homme qui a fait la prison à plusieurs reprises pour des affaires sur le foncier pourrait écrire un livre sur ce trou noir où il a habité. Sa dernière détention date de quelques mois. Après cela, Issa a voulu partager ce qu’il a vécu en prison. Il a voulu confier les secrets de cette détestable prison. Avec une visite guidée, il a, derrière le micro, levé le voile des non-dits de la prison. Il dit tout…

 

 

Des conditions inhumaines. «Mon dernier séjour carcéral a duré sept (7) mois. La vie à Rebeuss est inhumaine. Aucun homme ne mérite de vivre dans de telles conditions. Moi, j’étais à la chambre une (1) qui fait partie des plus confortables de la prison. Dans cette chambre, il y a plus de cent (100) personnes. On retrouve même des vieux de 60 ans, voire 70 ans. Vous imaginez un peu le décor ? Des vieux de cet âge qui passent la nuit par terre. C’est triste. Des fois, la chambre est tellement pleine que des détenus passent la nuit devant la porte des toilettes et il arrive que la devanture soit tout mouillée, mais les détenus n’ont pas d’autres choix que de supporter l’humidité de la dalle. Ce sont des conditions inhumaines qui ne sont pas dignes d’un être humain. Je vais vous dire une chose, les détenus des chambres 3, 4, 6, 9 restent des mois sans se coucher. Ils passent la nuit assis. C’est incroyable, mais vrai. Assis, dos à dos, ils restent comme ça jusqu’au petit matin. Sans dormir ! La preuve, au réveil, c’est dans la cour de la prison que les détenus des chambres 3 et 4 se couchent pour dormir.

Faire tout dans une chambre. Chaque matin, en allant dans la cour, on les trouvait là-bas. Nous avions un élan de sympathie et de pitié pour eux et nous en arrivions à oublier notre situation. A chaque fois, on se demandait si le Président, les autorités du gouvernement et les députés étaient au courant de cette situation. Je ne pense vraiment pas qu’ils soient au courant. Sont-ils au courant que dans les chambres, on fait tous nos besoins ? Et si je vous dis tout, c’est vraiment tout. Dans la chambre, il y a les toilettes. Il nous arrive de prier au moment où un détenu fait ses besoins et vous devinerez que c’est en direct que l’on entend comment il se soulage. Ce sont des moments où on ne veut qu’une chose : vomir. La chambre a une odeur répugnante. Une odeur insupportable qui, en temps normal, aurait provoqué une nausée. Le pire, c’est lorsqu’il y a une coupure d’eau. Après avoir fait caca, les détenus laissent leurs chiottes comme ça, car ils n’ont pas d’eau à verser dans le trou. Là, l’odeur est épouvantable. La faute, je ne l’impute pas aux gardes pénitentiaires. Les gardes font tout leur possible, mais ils sont en nombre réduit et ne peuvent pas surveiller les détenus qui sont à Rebeuss.

«Toute l’horreur se passe la nuit. C’est comme dans le film «Kounta Kinté»

Le paquetage, aux chambres 1, 3, 4… Les chambres 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 ne sont surveillées que par un seul garde. La seule chance des gardes est que le Sénégalais, quand il est dans ce genre de pétrin, se rapproche de Dieu et croit en la volonté divine. J’ai été aux chambres 1, 2, 3 et 4. A la chambre 1, on retrouve toutes sortes de détenus. Des gens sont là-bas pour vol, viol, escroquerie, meurtre… On retrouve du tout. C’est un vrai melting-pot. Il y a même des fous à la chambre 1. Il y en avait un qui, chaque nuit, était armée d’une lame et menaçait de lacérer tout prisonnier qui risquait de dormir. Il était en prison pour avoir tué un homme. Et c’est après son incarcération qu’il a pété les plombs. Aux chambres 3 et 4, on nous paquetait comme des sardines. Je vais vous expliquer comment ça se passe. On prend un détenu, on le couche sur le côté en le collant au mur. Un autre suit en sens inverse, la jambe croisée à celle de l’autre. C’est horrible ! Moi, j’ai vu des gens superposés. Et des fois, au moment du paquetage, on entendait certains crier : «Oh mon Dieu, tu me fais mal, tu me casses le bras.» Et je pense que les autorités et Ong devraient passer la nuit pour voir comment vivent les détenus. A 10 heures, tout le monde se couche. Ils doivent, à cette heure, venir pour avoir une idée de ce que je vous dis. Toute l’horreur se passe la nuit. C’est comme dans le film «Kounta Kinté». Quand je voyais comment on se couchait dans les chambres 3 et 4, je pensais automatiquement à ce film et à nos ancêtres.

Riz au «ketiakh», un pain de 2 centimètres pour le petit-déj’. Le manger ? Vous voulez vraiment savoir la vérité ? «Lolou dou lékeu ! (On ne peut pas appeler ça un repas).» Le riz parfois n’est pas bien cuit, il n’y a ni poisson ni viande. Rien ! Juste du riz servi comme ça. Sans mets, rien. Il y a juste du «Ketiakh (poisson fumé)». Le détenu n’a droit qu’à une seule tasse de riz. Une petite tasse de «Diagan (repas servi dans l’Armée)». Et vous n’allez pas le croire, si je vous dis que c’est dans ces petites tasses qui coûtent 5 ou 10 FCfa qu’on nous sert le repas. Je vais vous dire une chose, j’ai pris le soin de mesurer le pain servi au petit-déjeuner. Tenez-vous bien, car vous n’allez pas en revenir. Il est juste de… 2 centimètres. Ce pain, on nous le sert avec du kinkéliba qui, pour moi, est autre que du Kinkéliba. Je suis lébou et je connais bien le kinkéliba. Des fois, il nous donne du lait. Le dîner, c’est autre chose. C’est du riz bouilli, du couscous dans lequel on voit des v…, des ins… Du n’importe quoi ! La prison n’est pas pour quelqu’un qui n’a pas les moyens. Si tu n’as pas des parents qui t’apportent à manger ou un ami détenu qui reçoit régulièrement ses repas, tu risques de mourir.

«Les gardes sont mal payés et vivent dans une parfaite insécurité»

Relation garde-détenu les gardiens de prison sont en danger… Les gardes pénitentiaires sont à féliciter. Je vais vous dire une chose, si j’avais vu un acte commis par eux, je l’aurai dit. A Rebeuss, les gardes sont vraiment gentils. Ils travaillent dans des conditions incroyables, mais ils se débrouillent pour assurer. Et je pense que les autorités devraient aussi améliorer leurs conditions de vie. Dans une prison comme Rebeuss, le personnel aurait dû avoir un réfectoire, mais c’est juste une dame qui leur prépare à manger. Chaque matin, elle vient à la prison, prépare le repas des gardes. Parfois, ils mangent en groupe, parfois séparés. C’est la même chose pour le dîner. Et s’ils ne cotisent pas, ils ne mangent pas. Et je pense que les gardes devraient avoir les mêmes faveurs que les autres corps comme la police et la gendarmerie. Les privilèges, ils n’en ont pas. Les gardes sont pauvres. A partir du 5 de chaque mois, ils sont complètement fauchés et tirent le diable par la queue. Ils ont des salaires de misère alors qu’ils ont un métier plus que difficile et contraignant. Je dirai même le plus difficile de tous les corps de métiers. Ils sont mal payés et vivent dans une parfaite insécurité.

Morts dans les prisons. J’étais en prison quand le jeune Pape Maleyni Sané est décédé, mais je ne peux pas en dire plus, car on n’était pas dans la même chambre. C’est à la mort du détenu Alassane Sané que j’ai assisté. Il est mort alors qu’il était pensionnaire de la chambre une (1) et c’était de façon naturelle. Ce jour-là, on était dans la cour. Il a demandé à celui qui sert le repas de lui donner son bol de riz. C’est en tendant le bras pour récupérer son repas qu’il est tombé. Et ceux qui étaient là-bas peuvent en témoigner. Beaucoup de gens meurent en prison, car les conditions de vie sont, je vous le redis, inhumaines. Vous imaginez le paquetage, la sueur, les respirations entremêlées, les corps collés… Le seul fait de vivre ça durant des mois ou des années peut tuer la personne.

«Père, si tu pars aux toilettes, il ne faut pas mettre la totale, il faut juste sortir la moitié et garder l’autre moitié»

Homosexualité, le bain d’une minute. C’est vrai que l’on vit en groupe, mais le phénomène d’homosexualité, je ne peux en témoigner. A ceux qui disent que les détenus sont souvent victimes de sodomie de la part d’autres détenus, je dis non. Ils racontent des histoires. En tout cas, je n’ai jamais vu ça. Je n’ai aucun intérêt à mentir et si je l’avais vu, je l’aurai dit. Mais ce que j’ai vécu je vais vous le dire. Mon bain le plus rapide, je l’ai pris en prison. Le garçon qui était à la porte m’a dit : mon père, je te donne une (1) minute, si tu la dépasses, je te sors des toilettes. Je me suis écrié : une minute ! Il m’a répondu : une minute. Je suis entré, je me suis versé de l’eau et suis ressorti. Je lui ai dit : «Boy, j’ai fini.» Il m’a répondu : «Toi, tu pourras vivre ici.» C’est mon bain le plus rapide. C’est comme ça que ça se passe, sinon, ils vont te sortir sans état d’âme. A Rebeuss, c’est le surnombre. Si tu tardes à sortir, il t’éjecte et te jette dehors. Et les garçons oublient même la différence d’âge et te disent : «Père, si tu pars aux toilettes, il ne faut pas mettre la totale, il faut juste sortir la moitié et garder l’autre moitié, car les autres attendent…»

T. MARIE LOUISE NDIAYE       

       Issa Dieng* est un nom d’emprunt

Source: http://www.gfm.sn/visite-guidee-a-la-prison-de-rebeuss-avec-lex-detenu-issa-dieng-ici-la-vie-est-repugnante/

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