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Qu’il nous soit permis de commencer par un bref rappel, qui devrait nous permettre de nous rendre compte que la controverse actuelle sur les questions de la réduction de la durée du mandat présidentiel est en réalité un faux débat.
Les Assises nationales avaient conclu à la nécessité d’entreprendre des réformes institutionnelles propres à consolider notre jeune démocratie et avaient élaboré dans ce sens une «Charte de la gouvernance démocratique», endossée entre les deux tours de la dernière élection présidentielle par notre actuel Chef de l’Etat, alors candidat.
C’est dans ce contexte qu’il avait pris l’engagement de s’appliquer le quinquennat proposé par les conclusions des Assises, dès son premier mandat, s’il était élu. Les réformes institutionnelles à envisager ont ainsi fait l’objet d’un avant-projet de Constitution, élaboré par la Commission Nationale des Réformes Institutionnelles (CNRI) mise en place par le Chef de l’Etat au lendemain de son élection et les conclusions et propositions de cette commission lui ont été officiellement et solennellement transmises.
En sus de la proposition de ramener la durée du mandat présidentiel, dont celui en cours, à cinq ans - question venant de connaître son épilogue avec la décision du Chef de l’Etat de la soumettre au référendum - les principales autres propositions de la CNRI portent sur les points suivants : l’âge requis pour pouvoir être candidat à l’élection présidentielle ; l’impossibilité pour le Président de la République d’exercer une fonction dirigeante dans un parti politique ; le choix pour un parlement monocaméral ; la déchéance du mandat d’un Député en cas de démission du parti l’ayant investi ; les incompatibilités de la fonction ministérielle ou du mandat de député avec celui de président de conseil d’une collectivité locale ; la création d’une Cour Constitutionnelle en lieu et place de l’actuel Conseil Constitutionnel ; et la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, consacrant définitivement la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire et faisant présider ce Conseil par le Président de la future Cour Constitutionnelle.
Pourquoi donc ces propositions de la CNRI ne devraient-elles pas pouvoir être discutées, en même temps que celle sur le mandat présidentiel et validées, en tout ou partie, sur une base consensuelle, par des représentants et/ou experts de la CNRI, des partis politiques, de la société civile, des institutions de la République et des universités, avant la consultation populaire prévue ? Certes, la confirmation par le Président de la République de son engagement de réduire son actuel mandat à cinq ans, au lieu de sept, ne revêt pas un caractère urgent, l’échéance se situant dans un délai de plus de deux ans. Mais l’examen dans les meilleurs délais de cette question, ainsi que des autres propositions de la CNRI, aurait cependant l’avantage de clarifier les choses, d’autant que son conseiller juridique avait publiquement affirmé que « le Chef de l’Etat ne voulait pas faire procéder à des retouches successives de la Constitution » et qu’il fallait attendre les conclusions de la CNRI «pour procéder à une réforme globale qui se fera en une seule fois et qui inclura cette question de la durée du mandat »...
Au demeurant, même s’il s’agissait d’un engagement électoral du candidat présidentiel d’alors, cet engagement était en droite ligne des orientations des Assises nationales, puis de la proposition de la CNRI à ce sujet. Il n’a pas donc pas besoin d’être validé ou matérialisé à travers un référendum spécifique ou distinct et devrait s’insérer dans le bloc de réformes à soumettre au peuple, d’autant que, du reste, le coût du référendum serait identique, qu’il porte sur une seule question ou sur une question englobant un ensemble de propositions. Si référendum il doit y avoir, la question à poser devrait porter, à notre sens, sur les propositions de la CNRI, étant entendu que sur cette question du mandat, il suffirait tout simplement, lors des « retouches » ou de la « réforme globale », de modifier la disposition constitutionnelle actuelle relative au septennat (l’article 26) et de préciser, à la faveur des dispositions transitoires, que le quinquennat s’applique au mandat en cours.
Cette démarche permettrait d’éviter à la fois le syndrome du « wax waxett », avec d’éventuels troubles à l’ordre public que cela risquerait d’engendrer et les inconvénients politiques liés à une improbable démission au bout des cinq ans. Dans le contexte actuel où les spéculations vont bon train, le fait d’entreprendre rapidement la réforme constitutionnelle attendue assurerait les conditions d’une certaine stabilité politico-sociale et permettrait aux gouvernants et à la classe politique dans son ensemble de se mettre, enfin, « au travail », en se concentrant sur les moyens d’alléger les souffrances des Sénégalais, plutôt que de s’enliser dans un débat politicien perpétuel et de continuer à entretenir un climat délétère.
Dans ces conditions, il faudrait d’ores et déjà se convaincre de la nécessité d’inscrire rapidement à l’agenda, l’organisation de cet indispensable débat politico-technique préalable à la consultation, qui aurait un double objet, celui de permettre :
- d'une part, de finaliser l'avant-projet de la CNRI en procédant à sa relecture et, notamment, en faisant le tri des dispositions de nature véritablement constitutionnelle, de celles pouvant, à notre sens, faire l'objet de textes législatifs ( lois organiques, lois d'ordre public, ou autres), telles que celles relatives à : la réforme de l'Inspection Générale d'Etat ; l'éclatement de la Cour Suprême en différentes juridictions suprêmes spécialisées ; la limitation du nombre de ministères ; la procédure de mise en concurrence lors des recrutements à certains postes de direction ; la garde à vue ; la gestion du patrimoine foncier et des ressources naturelles, etc. ;
- et, d'autre part, de s'entendre sur le contenu et le format de la question référendaire et, à cet égard, une question simple, alternative et au besoin à plusieurs composantes, devrait, en tout état de cause, l'emporter sur une question « à choix multiples », dont le recensement et l'exploitation des suffrages exprimés risquerait d'être fastidieux, voire ingérable et, en effet, coûteux.
Une telle approche inclusive, à travers la mise en place d’un comité assez restreint et suffisamment représentatif, présidé par le Président de la CNRI, permettrait d’obtenir un consensus, pour ne pas dire un « momentum », sur une plateforme de réformes assez significatives et d’assurer ainsi au référendum, à travers une vision partagée, sinon par tous du moins par une large majorité, toutes les chances de voir le «oui» l’emporter. Les termes de référence d’un tel comité, qui serait constitué par le Président de la République, ainsi que le chronogramme des actions à mener d’ici ce référendum, devraient, à cet égard, être élaborés dans les meilleurs délais. Le reste ne serait alors qu’une simple affaire de communication et de publicité.
Sur un autre plan, bien que la suggestion suivante participe des réformes institutionnelles, plutôt que constitutionnelles stricto sensu et qu’elle ait, elle aussi, plutôt sa place dans le dispositif législatif, il serait néanmoins opportun de se pencher, dans le cadre de l’objectif de moralisation de la vie publique, sur la question de notre presse nationale. En effet, pour justifiée que puisse être la dépénalisation des délits de presse que les professionnels appellent de leurs vœux, elle risque d’engendrer des effets pervers, voire contreproductifs, si certaines conditions préalables n’étaient réunies. Il serait bénéfique à notre démocratie que les médias misent, au préalable, sur le développement des capacités professionnelles et déontologiques de leurs membres, pour mettre fin aux amalgames, ainsi qu’à la recherche systématique des « scoops » et du sensationnel, au détriment de l’objectivité et de la rigueur. Ayant, de plus, un rôle éducatif important à jouer compte tenu d’une certaine perte des valeurs dans notre société, notamment au sein de la jeunesse, ils devraient, en outre, prendre le parti d’éviter d’assurer une publicité à des références individuelles n’ayant rien à voir avec les modèles de réussite sociale et les sources d’inspiration dont le pays a besoin. Sans doute, faudrait-il aussi se préoccuper de réguler les publications des sites web, ainsi que les échanges interactifs entre internautes, de plus en plus nombreux, en élargissant notamment à la presse en ligne le champ d’application de la législation en vigueur sur la presse écrite, principalement en ce qui concerne le droit de réponse et la responsabilité civile.
Pour finir, c’est le lieu de souligner que les réformes institutionnelles envisagées conditionnent le succès du PSE - l’actuel référentiel du programme gouvernemental - en ce qu’elles doivent définir un nouveau cadre de référence et de nouvelles modalités de fonctionnement et d’intervention de l’Etat, propres à consolider l’Etat de droit, à assurer la paix et la stabilité sociales et à faciliter la réalisation des objectifs de développement économique du pays. Cela constitue ainsi un défi supplémentaire pour nos gouvernants.
Par Mohamed SALL SAO,
Expert international en gouvernance administrative et politique
Ancien Conseiller au B.O.M. de la Présidence de la République
Ancien fonctionnaire des Nations Unies
source :http://www.sudonline.sn/quelles-questions-soumettre-au-referendum-_a_20325.html