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Sam, Nov

Cochins, brahma, orpington… l’esprit malin d’un jeune pikinois pour les poules rares

PIKINE
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  Au cœur d’un système d’élevage bien sophistiqué, Saliou Seck, l’enfant de Pikine devenu éleveur de poulet de race sait de quoi il parle. Il aime ce métier. C’est sa passion. Du rêve, il est passé à la réalité. A sa réalité. Avec lui, l’appellation enfant de la banlieue ne veut rien dire, s’il ne lui permet pas mettre en valeur cet esprit malin qui a façonné la vie des sociétés humaines depuis la nuit des temps. De son petit enclos de Pikine, à l’intérieur de son stand à la dernière Fiara où il a exposé ses races de poulets, d’oies et de cailles en tout genre, il a pu exposer même aux enfants qui s’arrêtaient un moment pour regarder ses poules de races, la qualité de sa production. Connaisseur, Saliou, scrute l’horizon avec beaucoup d’autres questions cependant liées au développement d’un métier qu’il avait choisi par défaut au départ et qui est entrain de lui offrir un réel bonheur.  

 

Jeune, un brin presque naïf, la vie de cet homme se confond avec une obsession : la poule de race. Quand il vous parle de l’univers exotique et surprenant des poulets et coqs de races dans le monde, il est comme aux anges. Tout le mérite du garçon qui n’a jusqu’ici compté que sur l’appui de quelques particuliers, est là. Il est aussi à méditer pour nombre de jeunes sénégalais. 

 

 
 
Depuis 1997, date à laquelle il s’est lancé dans cette découverte de la vie des animaux de la basse cour, le jeune Saliou a beaucoup cheminé et appris. Aujourd’hui, c’est comme s’il récitait un cours en parlant de ses poulets de race. Des couleurs standards à la préservation des races, l’adolescent devenu adulte par la force des choses, la trentaine, étale ses  connaissances sur l’univers du poulailler de race ici au Sénégal. Etablies à Pikine où il a pris le risque d’établir et de tenir sa petite basse cour, déambulent aujourd’hui, des espèces rares de poulets inconnus des Sénégalais. 
 
 Parti de rien, le jeune Saliou est aujourd’hui un aguerri dans la profession qu’il exerce par défaut et qui est devenu une source de richesse pour lui. Des petits lapins du début au poulet brahma avec lesquels, il apprendra à s’adonner à ce travail méticuleux d’aujourd’hui, le jeune garçon aura fait du chemin. Une véritable odyssée scientifique pour la recherche de la qualité des races au cours de laquelle, il apprendra et continue à apprendre énormément de petites choses, jusqu’à surprendre les spécialistes avec lesquels, il travaille dans l’amélioration de la qualité de la race et de la santé des poulets d’ornement. 
 
L’enfant qui a été à la bonne école des vieux exploitants traditionnels, à ses débuts, apprendra très vite les rudiments du métier. Il a beaucoup marché, écouté et vérifié. C’est lui qui le dit. «L’élevage c’est comme quelque chose dont le virus m’a été transmis dès le berceau. Déjà, à l’école primaire, je m’intéressais beaucoup à la garde des oiseaux que je capturais. J’aimais aller à la rencontre d’éleveurs que je ne connaissais pas. J’ai eu comme une illumination pour ce métier. Plus qu’un métier d’ailleurs, c’était pour moi, une forme d’expression de mon intelligence que je ne tenais à mettre en valeur et prouver surtout que je pouvais réussir la prouesse d’être un jour, un éleveur », souligne le garçon. 
 
Une narration de sa vie sous la forme d’un récit poignant et plein d’émotion et de vérité pour ce garçon. Homme du monde, il s’intéresse désormais à tout ce qui fait de mieux dans le domaine de l’exploitation et de la conservation des belles races de poulets, d’oies et de pigeons rares. 
 
Entre 1000 et 2000 poussins vendus l’année, les cochins, orpington, Brahma, ou le coucou de renne n’ont aucun secret pour cet homme qui a fait de l’élevage, un choix de vie et un vrai métier pour son âge. Voilà qui en dit sur son cheminement qui est peut être celui de nombre de jeunes sénégalais en quête d’avenir, mais qui n’a pas été du tout simple. « Je n’avais vraiment personne, explique le jeune homme, pour m’aider. J’avais mon père pour qui je constituais un grand espoir pour le faire, mais il est parti trop tôt. Aucun de ses amis n’est revenu à la  maison après sa mort pour s’enquérir de ma vie. Je tiens à le dire parce que c’est la vérité. Je ne connais qu’une personne dans l’entourage de mon père qui est venu me voir. C’est grâce à lui que j’ai pu faire mes études et avoir les diplômes que j’ai aujourd’hui…Il s’appelle Maguette Wade… » 
 
Dans cette Fiara 2015 dans l’antre de laquelle, il expose fièrement ses petits animaux, Saliou, malgré les apparences, ressemble bien à un garçon heureux du sort qui est le sien aujourd’hui. Ce milieu de la volaille, il en a fait son monde.  Alors explique le jeune garçon ; « Je n’ai pas arrêté de faire des dépôts de dossiers pour retourner à mon premier métier de transitaire, mais on ne me promettait rien ; même si j’ai eu une bonne connaissance des questions de transit et de déclarant en douanes… » 
 
Celui qui a joué avec ce métier jusqu’à y voir un avenir n’a  jamais accepté d’être un enfant résigné comme il arrive souvent. Tout ce que j’ai réalisé dans ma vie, je le dois à cette profession d’éleveur, confesse Saliou Seck, fier de ses réalisations avant d’ajouter, « Quand je revenais à Pikine auprès de ma mère, il n’y avait dans la concession que deux chambres. Aujourd’hui, c’est une maison, comme il en existe partout ici que j’ai reconstruit grâce à mes avoir avec tout le confort intérieur qu’il faut. Mon grand bonheur est aussi d’avoir sorti ma chère mère de la précarité. Je vous rappelle que je suis fils unique. Je paie son eau, l’électricité et lui permet de se nourrir convenablement… » 
 
Une obsession pour les races d’exception
 
Croire en soi et se battre autour de ses objectifs, voilà bien un exemple de réussite qui ne peut laisser indifférent.  Les races de volailles qu’on voit autour de lui montre bien que la passion est devenue une réalité. 
 
Avec un grand professionnalisme, il explique à tous les curieux qui veulent bien l’écouter la qualité des races de poulets qu’il élève. A la recherche des races d’exception, il a dans son enclos, des cochins, dont la cailloutée qu’il revendique être seul à posséder, la race pure. « J’ai ici des races de valeur dont certaines sont devenues très rares parce que pas facile à trouver sur le marché sénégalais. Je ne cherche d’ailleurs dans ce métier, que ce qui est rare. Je ne suis pas dans la manie des sénégalais à ne reproduire que ce que l’autre fait. Moi, je tiens à marquer ma différence. Ce que vous voyez ici, poursuit Saliou Seck, ce sont des cochins cailloutées, vous avez aussi la Cochin fauve, la Cochin blanche et noire, aussi la Cochin pourpre. »
 
 A propos de la Brahma, l’éleveur dit en connaître un bout depuis son introduction ici au Sénégal. Elle fait partie d’une des cinq premières espèces introduite au Sénégal. Mais, progressivement, on a estimé que cette espèce est aujourd’hui devenue ordinaire parce que possédée par nombre d’éleveurs.  Or, je pense que ceux le disent se trompent. Elevée depuis une vingtaine d’années, cette race est exceptionnelle et n’a pas arrêté de nous surprendre nous qui connaissons ce marché. Il s’agit de la Brahma herminée noire et de la Brahma herminée bleue ; deux espèces exotiques mais pure sang. Chez les Orpingtons, ajoute Saliou Seck, sur 100 éleveurs présents ici au Sénégal, seuls peut–être deux vont la posséder. Nous avons la poule Orpington argentée à liséré, l’Orpington dorée à liséré. Tu peux trouver toutes les autres races d’Orpington chez les éleveurs comme la fauve, le noire, la pourpre. Mais, moi, j’ai préféré choisir les deux premières espèces à savoir l’orpington argentée et la dorée à liseré. » 
 
A l’heure du poulet aux hormones, Saliou Seck revendique fièrement la conservation des races d’origines dans sa petite ferme. «  Toutes les personnes qui passent chez moi pour m’acheter des œufs ou des poussins, sont aussi avertis. Et je leur dis, souvent, si vous avez un seul petit soupçon de combinaison de races, ramenez-les moi. Tout est dans la manière dont les box sont organisés dans ce poulailler, avec des séparations nettes qui ne permettent pas des reproductions entre coq et poule de race différente », souligne le jeune garçon.
 
OBSTINATION ET PROFESSIONNALISME : Les clés d’une belle réussite
 
Un véritable don sans doute pour le jeune garçon d’hier sans moyen, aujourd’hui devenu un homme. De Dakar à Thiès jusqu’à Saint-Louis, en passant par Diourbel et ailleurs dans le Sénégal, la passionné du poulet de race a fini par se convaincre qu’il se devait de bonifier ses connaissances par ses rencontres aussi.  Il a noué des contacts avec tout le secteur. Et il connaît autant dans les races qu’on y élève, mais aussi leurs qualités. Il n’hésite pas à s’attarder également sur quelques-uns de problèmes qui sont liés à la réussite ou non de ce type d’élevage. 
 
Des pigeons aux oies en passant par les poules, différentes méthodes d’élevage sont exploitées dans le pays par Saliou Seck et quelques personnes de son âge ou un peu plus âgées qui s’y sont mis grâce à l’encadrement et les conseils de professionnels ; mais encore, grâce à Internet et les réseaux sociaux qui permettent aux uns et aux autres de découvrir des espèces jusqu’ici inconnus ou jamais tentées dans le pays. Pour dire qu’il s’agit bien d’un monde d’expériences qui dépasse tout le savoir jusqu’ici développé sur les poulaillers ordinaires avec les poulets de chair.  
 
L’appel à plus de professionnalisme, voilà une chose à laquelle tient le jeune Seck.  Parce qu’à l’en croire, « quand vous entrez dans un monde comme çà, il faut y aller avec plus de finesse et savoir ce que vous voulez réellement faire.  Même si je ne vous cache que tous les éleveurs de volaille qui travaillent au Sénégal ont comme principal souci, la santé de leur race de poulet et de coq. En observant bien, ces races de poules nous avons décidées d’élever avec tous les risques, la vérité est que souvent ceux qui entrent dans la production cette année, vous risquez de ne pas les retrouver sur le marché l’année suivante », regrette Saliou Seck. 
 
Avec un taux de mortalité très élevé dans la volaille de races, les risques sont grands. Au Sénégal, précise l’éleveur, « les poulets les plus connus sont les pondeuses et les poulets de chair ;  mais à mon avis, la prophylaxie ne peut pas être la même que pour les poules de races. On n’a pas de connaissance sur la prophylaxie des poulets d’ornement. Et là, nous sommes contraints de travailler avec les mêmes remèdes que pour les pondeuses alors que les problèmes de santé ne sont pas les mêmes. » «Depuis que je me suis lancé dans cette profession, j’ai enregistré beaucoup de mortalité, chez mes poulets, ajoute M. Seck. Mais, quand j’amène un cas chez le Veto pour une autopsie, on ne me dit jamais exactement, ce qui est arrivé à la poule. C’est un vrai problème. »Contre les maladies virales comme la Gumboro (1), les éleveurs déclarent aujourd’hui leur impuissance faute d’accès au vaccin si l’infection est prouvée. Ce qui lui fait dire « Nos maigres connaissance en matière de santé animale, explique encore le  jeune passionné de volaille, nous enseigne que cette maladie virale du poulet, dès qu’il touche le poulailler, il décime tout le cheptel parce qu’il ne peut guéri que par un vaccin. Mais, il faudrait que nos partenaires du secteur de la médecine vétérinaire, nous accompagnent dans les efforts que nous faisons pour mieux connaître notre secteur... » Les poulets d’ornement coûtent chères entre 50.000 et 100.000 Fcfa la paire, sinon même plus pour certaines espèces ; et l’investissement est énorme puis risqué. «  Saliou Seck est nul doute un précurseur dans le domaine. Et selon lui, « Ces poulets de race, devraient être connus par un nombre important de Sénégalais. C’est une nécessité. Le coût énorme de la vente tant des poussins, des œufs comme des poulets est une chose que moi, je déplore. Ces prix devraient pouvoir baisser pour que tous ceux qui le veulent puissent disposer des ces races de poulets. Mais, ce n’est pas possible en l’état actuel des choses », regrette l’éleveur avant d’ajouter. « Ces deux dernières années, j’ai produit entre 1000 et 2000 poussins que j’ai vendus à des éleveurs que je connais bien. Mais, au bout de six à huit, quand je les appelle, tous me disent avoir perdu tous les poussins. » Aujourd’hui un poussin Orphington est vendu 7500 FCFA alors que la race Cochin est échangée 10.000 Fcfa. Pour les espèces plus grandes (Cochin, Orpington,) tout dépend, selon Saliou Seck, des couleurs et de la taille et le prix varie de 50.000 à 75 voire 100.000 FCFA. 
 
Oies de race, pigeons de race, même des perruches et des moutons, sont encore dans la panoplie de ce garçon abordable. Ce jeune qui n’a pas pu encore décrocher un job permanent dans le domaine où il a été formé, a refusé de perdre du temps. Interpellant les autorités, à commencer par le président de la république sur la chereté des vaccins contre les maladies du poulailler et du bétail en général, son unique combat est qu’on puisse revoir ces prix par une subvention. Saliou Seck fait aussi un appel à tous les jeunes qui seraient intéressés par les questions d’élevage surtout pour les poulets d’ornement. « Ce n’est pas sorcier, selon lui, et tout ne dépend que de la passion et de l’envie qu’on a de s’investir intelligemment dans cette profession. »  
 
Notes
1- découverte à Gumboro, une petite commune du Delaware en 1962, la maladie de Gumboro ou bursite infectieuse est d’origine virale contagieuse aviaire. Elle touche les oiseaux sur l'ensemble de la planète. Elle peut prendre trois formes, une forme aiguë, une forme subclinique et une forme immunodépressive. Fatale à la poule domestique, elle peut tuer 50 % des effectifs d'un poulailler en deux ou trois jours mais ne dure pas plus de 8 jours pour les rescapés.
 
SOURCE: http://www.sudonline.sn/l-esprit-malin-d-un-jeune-pikinois-pour-les-poules-rares_a_24143.html