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L’affaire de Lead Africa, accusé d’enfreindre la Loi sur les financements d’ONG au bénéfice de "Y en a marre" , par le par Ministère de l’Intérieur du Sénégal , a donné l’occasion à nombre d’organisations de la Société civile du pays, à se mettre en rang de bataille pour défendre sa cause.
Curieusement, cette mobilisation se présente comme une Défense de "Y en a marre", comme si le Ministère de l’Intérieur l’avait accusé d’un manquement quelconque à la Loi, et lui avait infligé une sanction administrative.
Ainsi, l’on assiste à une dérive spectaculaire dans notre Société civile, qui, de « Défenseurs des Droits Humains » s’est transformée subitement en « Défenseurs des Droits leurs Bailleurs de Fonds » !
Ce dont elles ont peur, c'est ce qui est arrivé à Lead Africa, n'arrive à leurs propres Bailleurs!
Mieux, elle veut se donner une « fonction de Médiation » entre l’Etat et leurs Bailleurs de Fonds, pour soustraire Lead Africa des rigueurs de la Loi !
Et elle menace même « d’aller à la vitesse supérieure », si jamais elle n’obtient pas gain de cause auprès de l’Etat !
Comment en est- on arrivé là au Sénégal ?
Il n’est de secret pour personne, que Lead Africa, comme organisation étrangère, a des moyens suffisants pour se doter des meilleurs avocats du Sénégal, d’Afrique et du Monde, pour faire prévaloir ses Droits, si l’ Arrêté du Ministère de l’Intérieur lèse ses Droits reconnus par l’ Etat du Sénégal.
Accusé d’avoir violé la loi fixant les modalités d'intervention des ONG au Sénégal, notamment le décret 2015-45 du 4 février 2015, par l'octroi d'un financement à "Y en a marre", sans que le mouvement soit reconnu comme une « association d'Utilité publique », il lui est loisible de se défendre au-prés de la Cours Suprême, en attaquant l’Arrêté du Ministère de l’Intérieur portant retrait de son agrément, pour abus de pouvoir.
C'est comme cela que les choses devraient se passer dans un Etat de Droit, que reconnaissent au Sénégal, toutes ces Organisations internationales de Défense des Droits Humains accréditées dans notre pays.
Le cas échéant, un large soutien de Lead Africa de la part des organisations de Défense des Droits Humains et de l’Etat de Droit, serait compréhensible, puisque conforme à leur mission.
De même si Y en a marre avait été sanctionné administrativement pour avoir reçu un financement que l’Etat juge « illicite » l’on aurait aussi compris la solidarité corporatiste des organisations de la Société civile, mais pas sa « médiation » au-prés de l’Etat,
En effet, quand il s’agit de « financement illicite », de « détournement de deniers publics », ou de « corruption », les Défenseurs de l’Etat de Droit devraient se mobiliser pour que le Droit soit dit, et non se « transformer en médiateur », pour obtenir clémence pour le présumé délinquant.
Ce serait se transformer en « Défenseur de l’Etat de Non Droit », en contradiction avec leur mission proclamée.
Il est inacceptable d’être, à la fois, pour "l’Etat de Droit » tant qu’il s’applique aux autres, et être contre " l’Etat de Droit", dès qu’il doit s’appliquer à soi-même, ou à ses amis politiques !
C’est ce double langage qui s’est peu à peu enraciné dans les organisations de la Société civile de Défense des Droit s Humains
Ce double langage est le fruit d’un conflit d’intérêts notable chez les dirigeants des Organisations de Défense des Droits Humains, sensés non rémunérés, dont certains continuent d’exercer en même temps, une " fonction rémunérée" de Défense du particulier au prés des Tribunaux..
Ils devraient choisir entre être " Membre du Barreau", et " Dirigeant d'Organisation de Défense des Droits Humains", pour mettre fin à la confusion des genres, pour plus de lisibilité de leur statut.
Ce conflit d’intérêts a transformé ces organisations de Défense des Droits Humains, en moyens complémentaires de « gagne- pain », enlevant, de plus en plus, leur crédibilité aux yeux de l’opinion.
D’organisations caritatives et de bénévoles, elles se transforment ainsi en « succursales » rémunérés d’ONG étrangers qui vivent d’une partie de l’Aide publique au Développement que les Bailleurs de Fonds ont décidé de faire transiter à travers eux, au prétexte de leurs actions estampillées « d’Utilité publique » dans les pays en développement; ce qui confère à leurs Etats -Bailleurs , le pouvoir de contrôle sur leurs finances..
Ce statut leur confère, dans nos pays, des privilèges fiscaux importants qui contribuent à leur assurer un grand train de vie, mais, leur donne aussi, des devoirs de respect de la législation et des règlements des pays d’accueil.
Le problème, au Sénégal, c’est que nos ONG, qui sont, le plus souvent, des « succursales » de ces organisations étrangères, ne sollicitent pas le « Statut d’Utilité publique », que leurs actions locales impliquent pourtant, et ceci, pour éviter le contrôle de l’Etat sur leurs finances.
Ce vide juridique a été comblé par le décret 2015-45 du 4 février 2015, qui soumet le bénéfice d'un financement extérieur des ONG locaux, à l’obtention du « Statut d’Utilité publique ».
Ce décret est d’autant plus opportun, qu’il est intervenu dans un contexte de lutte hardie contre le « Blanchiment d’argent sale », le « Financement du Terrorisme », la « Pression de Lobyes Gay » sur nos Etats sous couvert de « Défense des Droits Humains », et la « Corruption ».
Dans ce contexte, autant, l’assainissement, la moralisation et la lutte contre le pouvoir d’argent dans la vie politique et syndicale, sont nécessaires, autant, ils le sont dans la vie des ONG, surtout lorsqu’ils sont des « succursales » d’organisations étrangères.
Notre pays, avec ses nouveaux bijoux en pétrole et gaz, et ses valeurs de tolérance qui ont cimenté la convivialité de ses citoyens, doit être impérativement défendu pour y enraciner l’Etat de Droit, à la rigueur duquel, aucun gouvernement, ni aucun citoyen, ne devrait échapper.
Cependant, « l’Utilité publique » des organisations de la Société civile est indéniable, et devrait leur être reconnue à leur demande, de par leurs « fonctions de veille, d’alerte, et de plaidoyer » qui sont nécessaires pour la vitalité de notre "République démocratique" en transition vers une « République démocratique citoyenne ».
Elles participent efficacement à la prise en charge des préoccupations des populations dans tous les domaines, notamment dans l’Agriculture, dans l’Education, dans la Santé, dans l’exercice de leurs droits et devoirs citoyens, et dans la promotion de l’Etat de Droit.
Leurs actions sont aussi indispensables dans la promotion de la « participation citoyenne » dans la définition des politiques publiques locales et nationales, et du « contrôle citoyen « sur leurs Elus et les Grands Commis de l’Etat, pour mieux lutter contre les prévarications des deniers publics, et la corruption.
C’est pour cela, qu’elles ont obtenu le droit d’être associé à travers des concertations, dans l’élaboration des programmes de politique publique, pour permettre au gouvernement de prendre en compte leurs propositions pertinentes, dans ses projets de lois, de programmes, à soumettre à l’approbation de l’Assemblée nationale.
Mais, ce Droit d’être associé à ces concertations, ne donne pas à la Société civile, un "pouvoir de Censure », ou « d’amendement " des projets de loi ou de Programme du gouvernement.
Ces pouvoirs ne sont reconnus qu’à l’Assemblée nationale, auprès de laquelle, la Société civile a le droit de faire des plaidoyers à propos de ses propositions pertinentes, pour une meilleure appréciation des projets de loi ou de programme que le gouvernement lui soumet.
Cette prétention d’avoir le « Droit de censure » ou « d’amendements » des projets de politique publique, est aussi une dérive qui discrédite les organisations de la Société civile au prés de l’opinion, qui ne lui reconnaît aucune fonction de "contre-pouvoir", mais uniquement de "plaidoyer" au prés des pouvoirs publics, d’alerte au près des populations, et de veille sur les intérêts du peuple, et les droits des citoyens.
C'est donc pour pallier ces dérives préjudiciables à ces fonctions dévolues aux organisations de la Société civile, que l'organisation des "Assises de la Société civile" s'impose, pour l'assainissement et la moralisation de ce milieu.
Les forces républicaines et démocratiques dans les Partis politiques, se sont battus dans les années 90 et 90, pour l'émergence de la Société civile comme facteur d'approfondissement de la Démocratie républicaine.
Il faudrait donc que celles-ci qui œuvrent dans cette Société civile, créent le conditions leur permettant, de concert avec les organisations syndicales et paysannes, d'apporter leurs contributions irremplaçables dans la transition de notre "République démocratique", vers une " République démocratique et citoyenne" dans un "Etat de Droit renforcé" qui est l'objet de la lutte des Forces républicaines et démocratiques dans les Partis politiques.
Ibrahima SENE PIT/SENEGAL
Fait à Dakar le 23 Novembre 2018