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Jeu, Nov

Á quand la réconciliation entre la justice sénégalaise et ses justiciables ?

JUSTICE
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La justice définie, comme norme distinguant le Bien du Mal désigne à la fois trois choses :

- l'organe ou l’autorité chargé en société de faire respecter les lois, alliant l'institution judiciaire à la répression (elle condamne les coupables et innocente les accusés, récompense les bons et punit les mauvais)

- l'ensemble des mécanismes  institutionnels permettant un ordre juste ou plus juste

 

- l'institution étatique qui se réclame de la justice comme d'une valeur universelle, chargée d'appliquer le droit positif.

Partant de cette définition, nous pouvons en déduire comme en démocratie, que la justice est faite pour le peuple, par le peuple et devrait venir du peuple (par son pouvoir judicaire qui le représente).                                                                   

Pourquoi toutes les décisions de notre conseil constitutionnel restent impopulaires ? Les décisions sont elles rendues au profit de l’exécutif ou pour le peuple ? Une décision rendue pour le peuple et contestée par ce dernier est elle toujours juste ? Ou le peuple refuse t-il d’accepter la vérité ou encore la mascarade d’une décision dictée par l’exécutif ?

A cause de ces décisions de justice considérées comme injustes par la plupart des citoyens depuis un certain temps, nous pouvons dire que la justice sénégalaise est malade non du fait des lois et normes établis mais plutôt du fait de son indépendance et de sa mission dévoyée dans la pratique.

La plupart des citoyens disent haut et fort qu’ils ne font plus confiance à la justice car la plupart des décisions majeures dans certains cas, sont  planifiées et connues avant même les jugements.                             

Cela nous pousse à se poser la question suivante : Peut-on avoir du respect pour une justice «injuste » ?

Devenue injuste, la justice n'est en effet plus une protection mais une arme d'oppression des individus. La justice est donc possiblement injuste, si on entend par là qu'elle est parfois injuste légitimement.  Le paradoxe de départ est levé quand on distingue dans l'injustice une valeur morale absente dans la simple justice légale. Ce qui caractérise une telle injustice, ce n'est pas seulement une défaillance humaine ou l'irrespect des lois du droit positif mais une action rationnelle et réfléchie qui s'inscrit en faux contre les valeurs communautaires partagées par tous les sénégalais.

Il faut le reconnaitre notre justice a connu bien des malaises au Sénégal ces derniers temps et nous avons plusieurs exemples pour illustrer cela :                                                                                      - le débat stérile sur le caractère suspensif ou non du rabat d’arrêt avec le cas Khalifa Sall, qui a fait couler beaucoup d’encre;                                                                                                                              - un magistrat qui démissionne pour cause de disfonctionnement du pouvoir judiciaire ;                       - un magistrat demi de ses fonctions en pleine audience pour ses convictions ;                                                                         - un magistrat qui s’est dédit  par rapport au même fait jugé il y a quelques années ;                      - un manque d’indépendance institutionnelle de la justice avec le non respect de l’inamovibilité  des magistrats du siège et de la durée de l’intérim; avec un Conseil constitutionnel, en tant qu’organe majeure de la justice qui se déclare le plus souvent incompétent pour trancher des litiges dont il est le seul à pouvoir gérer au nom du peuple et pour le peuple.                                  - quand des ministres de la république donnent la décision avant même que le conseil constitutionnel n’examine la question…

Alors nous assistons là à une justice qui est loin d’être au dessus de la mêlé et cela ne peut garantir la démocratie, les libertés et la paix que nous voulons tous.                                                                                                                     Il faut le dire la justice, gardienne de l'ordre et de la paix, a aussi un sens social et moral (social : du fait d'un idéal égalitaire pour contrer les inégalités manifestes et moral : du fait d'être conforme à ce que la raison prescrit). C'est d'ailleurs la base de la justice que de retranscrire dans la loi le respect de la loi morale (Le respect de l’esprit de la loi est plus important que le respect de la loi à la lettre). Mais la double signification morale/politique de la justice rend en définitive l'interprétation de cette notion ambiguë. Car tout sépare une justice théorique prise comme idéal moral indépendant des valeurs d'une société donnée et une justice légale dont l'application relève de jugements humains par définition perfectibles (et qui donc peuvent être injustes).                                                                                                                                           Il  faut donc distinguer la  justice religieuse, pragmatique (les lois socio-politiques) et la justice morale (visant conformité au bien). Dans tous les cas, la justice vise un ordre juste, à réduire les injustices ou inégalités sociales. Si chaque sénégalais en tant que conscience morale, éprouve un sentiment de justice, la norme de ce jugement en quête d'idéal renvoie à une subjectivité qu'il faut interroger.                                                                                                                                   Si les limites de la  justice la font tendre vers ce mal qu'est l'injustice, comment penser une justice strictement juste ?  La justice est-elle faillible ? Dans quelle mesure la justice peut-elle échapper, dans son application, à l'injustice qui menace son idéal abstrait et utopique de justice absolue, independante? 

Ainsi le grand penseur Pascal dénonce en ce sens dans « Les Pensées » l'origine mystifiante de la justice qui dérive d'un fait transformé en droit et lui fait dire ceci: «La justice sans la force est impuissante, la force sans justice est tyrannique ». Ce n'est donc pas la décision de justice qui est injuste mais sa conséquence dans la sphère individuelle et collective.

Mais en réalité si cela ne va pas au niveau de la justice ce sont les citoyens qui en souffrent le plus. C’est devenu un cri de cœur pour l’UMS (Union des Magistrats du Sénégal)  comme pour les justiciables : la justice sénégalaise a besoin « d’indépendance ».                                                        La transparence d’une élection quelconque est aussi importante mais encore plus dans le cadre de la magistrature suprême. C’est pourquoi il est vraiment salutaire de constater qu’une coalition de plusieurs organisations de la société civile qui s’activent pour la plupart dans le domaine des droits de l’homme,  puissent demander aux candidats officiels à la présidentielle de décliner leur programme en ce qui concerne les réformes du  pouvoir judiciaire ; mais encore plus de les engager à signer sans réserve, une charte juridique qui garantisse l’application des ces réformes une fois au pouvoir.                                                                                                                          A mon avis cette charte devrait prendre en considération les réformes suivantes :

  • la réorganisation des institutions judiciaires avec une Cour Constitutionnelle, un Conseil d´Etat, une Cour de Cassation, une Cour des Comptes et des Cours et Tribunaux ;
  • en lieu et place du Conseil Constitutionnel, la création d’une Cour Constitutionnelle, gardienne de la Constitution. Ses compétences, sa composition et le mode de désignation de ses membres seront révisés ; elle est chargée de veiller au respect de tous les droits constitutionnels et son Président est élu par ses pairs ;
  • la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, affranchie de la tutelle ou de l’influence du Pouvoir exécutif, avec une composition élargie et une augmentation du nombre de membres élus à côté des représentants du Président de la République, du Gouvernement et de l’Assemblée nationale. Il est présidé par le Président de la Cour Constitutionnelle et chargé de la gestion des carrières des magistrats du Siège comme du Parquet ;
  • la réforme du Parquet pour le soustraire de la tutelle du ministère chargé de la justice afin de garantir son indépendance et lui permettre de mener sa mission en dehors de toute injonction du Pouvoir exécutif ;
  • Un juge des libertés pour éviter les abus de détentions arbitraires ou à soubassement politiques ;
  • Permettre aux citoyens d’avoir désormais le droit d’initier un référendum après pétition, hors révision constitutionnelle, sur les questions d’intérêt national (sur l’indépendance de la justice, sur la gestion du pétrole et autres ressources naturelles…).

Le Sénégal ne peut pas être membre du conseil des Nations Unies pour les droits de l’homme et permettre à certains juges de ternir notre image et notre crédibilité sur le plan sous régional et international à cause du clientélisme, du laxisme, du non-respect de la parole donnée, de la trahison, du mensonge et du népotisme au détriment de l’éthique, de la dignité, de l’honneur, de la probité morale et du professionnalisme.                                                                           

A mon avis une grande occasion s’offre à notre justice avec ces élections présidentielles pour enfin se réconcilier à jamais avec ses justiciables. A l’image de la justice kenyane, nos magistrats et sages devraient s’inspirer aussi des vaillants patriotes de notre histoire judicaire :   

Keba Mbaye, Isaac Foster, Basile Senghor, Bassirou Diouf, Babacar Seye…etc en disant la vérité rien que la vérité lors de la proclamation des résultats des élections présidentielles du

24 Février 2019.

Oui le combat de l’indépendance de la justice est loin d’être le combat d’une corporation ou de l’UMS (Union des Magistrats du Sénégal) mais plutôt le combat des justiciables que nous sommes. Par ailleurs au delà de la justice nous devons tous veiller sur le respect de la neutralité, de l’apolitisme et de l’impartialité de l’administration placée à la disposition des trois pouvoirs, et qui devrait également contribuer à la transparence des prochaines élections.

 

DENIS NDOUR,                                                                                                                               Human Rights specialist                                                                                                                           LSDH                                                                                                                             Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.