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Jeu, Nov

L’annulation de la sanction des élèves maîtres fraudeurs est un acte, sans précédent, très grave.

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Acte en droite ligne contre le culte de l’excellence.

Le Sénégal est-il devenu le pays où la tricherie est encouragée ? Ne nous plaignons pas déjà du constat de la perte considérable de nos valeurs  les plus sures qui étaient sacralisées dans notre société ? Ne sommes-nous pas en train de déplorer et regretter en ce moment, combien sont absentes aujourd’hui dans la société sénégalaise les valeurs essentielles pour toute société humaine, telles que : la vertu, l’éthique, la probité, le civisme, le respect des règles communes et lois établies pour tous, la justice sociale, etc. ? 

 

Ne sommes-nous pas en train de dénoncer et de fustiger à longueur d’années, des vices tels que : l’impunité, la corruption, le vol, la fraude, l’immoralité, et toutes les malversations, etc., qui règnent dans notre pays et gagnent chaque jour de l’ampleur ? Ce, sur quoi, certains d’entre nous, sans scrupule, profitent ou se fondent pour commettre délibérément, comme dans le cas présent, n’importe quel délit gravissime, sans être inquiété ou courir aucun risque, parce qu’ils ont des bras longs  et sont politiquement ou religieusement assurés, couverts et protégés. Il est réellement à se demander, si au Sénégal, nous ne sommes pas dans une jungle où la loi du plus fort est toujours la meilleure, et non dans une République organisée où  l’équité est un principe directeur sacré et où, tous les citoyens sont égaux devant la loi et doivent être tous mis sur le même pied?

 

 

Voici incontestablement, un acte grave qui constitue une preuve manifeste de légèreté, de manque d’autorité de l’Etat ou d’excès de pouvoir de la justice, dans le cas d’espèce. En principe, l’Etat devrait, dans ce cas précis, prendre la plénitude de toutes ses responsabilités, en sévissant avec fermeté contre les fraudeurs, pour dissuader des tentatives semblables ultérieurement, et non de fléchir sous les pressions ou chantages de qui que se soit. Ici comme ailleurs, maintenant comme demain, c’est seule la loi, qui doit toujours prévaloir en toutes circonstances, dans l’intérêt supérieur du pays et d’une éducation de qualité de nos enfants, par un corps d’enseignants de qualité, composé d’un personnel intègre, honnête et sans reproche. Duquel, doivent être absolument exclues, toutes les brebis galeuses. Ces brebis, qui doivent être par ailleurs déclarées inaptes à servir, non seulement  dans l’école de la République, mais dans toute l’administration publique, parce que ce sont des anti-modèles pour notre société. En un mot, pour l’Etat, c’est toujours l’intérêt général qui doit primer sur tout.

Une jurisprudence universelle existe pourtant en la matière.

Pourtant, l’exclusion des 690 fraudeurs va de soi jusqu’à la preuve du contraire, car c’est ainsi que cela passe dans tous les Etats de Droit reconnus comme tels, où l’équité est un principe immuable dans la gouvernance publique. Mais, des cas similaires ont existé dans le monde, nous en avons tous eu connaissance ou appris maintes fois, et à chaque fois, la règle est générale et constante, c’est l’exclusion ipso facto. Voici quelques cas connus, par exemple : Un champion donné d’un titre, un médaillé donné d’une compétition nationale ou internationale pris en flagrant délit de tricherie, de fraude, de dopage, un prix littéraire usurpé, etc., s’il est établi que la faute  est bien avérée, même si c’est quelque temps après, le faux bénéficiaire du titre ou de la médaille est automatiquement déchu du trophée sans ménagement, et il est même de surcroit sanctionné en plus, par une suspension de participation à toute compétition ultérieure pour un certain nombre d’années donné. Et, nous sommes dans le cas présent, exactement dans la même situation, avec ces tricheurs qui ont usurpé la place d’honnêtes citoyens, qui ont eux, concouru avec leurs propres moyens et connaissances.

L’impunité et la corruption, au Sénégal, ont de beaux jours devant elles avec cet acte.

Comment, au moment où le Sénégal est pointé du doigt pour son niveau très élevé de la corruption dans tous les domaines, quand, même la justice n’est pas épargnée par ce fléau, la Cour Suprême a pu, comme un couperet, prendre un tel arrêt  d’annulation de la récente décision du ministre de l’éducation nationale, qui a sanctionné à juste titre des fraudeurs ? Alors que ce dernier confirme qu’il dispose parfaitement des  preuves matérielles irréfutables attestant, que les mis en cause ont bel et bien triché  au concours d’entrée. Alors qu’on devrait plutôt appuyer cette mesure  salutaire du ministre d’avoir empêché que de mauvaises graines soient injectées dans notre système éducatif, qui est déjà mal en point, pour la qualité douteuse de certains  de ses enseignants, à qui l’on reprocherait une insuffisance de formation  pédagogique ou formation au rabais, avant leur entrée en service, non, c’est le ministre qui est sanctionné et jeté en pâture. C’est inacceptable ! Mais, sur quoi alors la Cour Suprême s’est fondée  pour motiver son arrêt ?  Y a-t-il réellement fraude ou achat de place pour les 690 élèves concernés ? Mais la messe est bien dite, dès lors que l’avocat des fraudeurs dit ceci : « On ne dit pas qu’il n’y a pas de fraude, mais la procédure utilisée par le ministère ne respectait pas l’orthodoxie dans ce domaine[1] ». Donc la faute, incontestablement, est bien avérée. Par conséquent, nécessairement, il doit y avoir alors en toute logique et immanquablement  une sanction. Ensuite, comment  l’argument ci-après, évoqué toujours par l’avocat des fraudeurs peut-il sérieusement être suffisant comme argument massue, pour casser une décision aussi motivée du ministre : « les conclusions de la décision de la Cour ont relevé que le ministre de l’Education est allé trop vite en besogne. Il n’était pas suffisamment entouré de garanties judiciaires pour prendre cette décision[2] » Hé alors ! Si, c’est la procédure qui est mise en cause ici, c’est  alors, elle seule qu’il faudrait simplement reprendre avec le respect des normes, mais non, une annulation de la sanction qui est parfaitement fondée. Et plus grave et scandaleux, l’on exige même l’intégration des fraudeurs reconnus comme tels ! Mais dans quelle République sommes-nous ? Car, un tel cas ne peut  avoir lieu dans aucun Etat de Droit qui se respecte, à fortiori y trouver justification.

Voici encore, un cas typique de fraude qui est en train d’être légalisée, au vu et au su de tout le monde, et qui va prendre, malheureusement, le dessus avec l’aide ou plutôt la complicité de la justice, sur le droit des autres, au détriment d’honnêtes citoyens, sans défense ou au bras courts. Avec ce cas d’école, je fais partie de ceux qui pensent profondément que notre justice est corrompue, qu’elle fonctionne à deux vitesses et, malheureusement, elle se tropicalise en reculant dangereusement vers les bas-fonds.

Tous ceux qui protègent et soutiennent ces fraudeurs ou tricheurs et cet acte, quels qu’ils soient par ailleurs, ne sont rien d’autres que leurs semblables. Il n’y a aucun doute, que de tels gens ne militent point en faveur d’une éducation de qualité pour nos enfants et  dans l’école de la République. Cette école, où justement, seuls étudient, les enfants de la République dont les parents sont démunis, donc, le plus grand nombre des enfants du pays. Une école de la République complètement délaissée aujourd’hui, qui, non seulement, elle manque de tout, mais, qui plus est, on affecte entre autres, des maîtres tricheurs qui ont triché pour le devenir. Mais, pensez-vous sérieusement, que de tels enseignants vont apprendre à nos enfants, autre chose que, ce qu’ils savent faire, à savoir la tricherie ? Détrompons-nous et cessons quand même d’être des naïfs, au Sénégal.  On ne peut pas recruter des élèves fraudeurs, pour vouloir en faire demain, des maîtres d’excellence ou des ressources humaines de qualité, c’est  de la pure utopie. Et, dans leur carrière professionnelle, ils useront des mêmes vices pour progresser en grade. Comme le dit si bien l’adage : «  l’habitude est une seconde nature » Un délinquant à qui profite un vice, il ne l’abandonnera jamais, et à chaque fois que le besoin se fera sentir, il retournera à ses anciennes amours, c’est cela la triste vérité. Malheureusement, dans le cas qui nous préoccupe, la Cour Suprême, au lieu de sanctionner sévèrement les fautifs pour que cela leur serve de leçon et les contraigne à s’amender, elle les a confortés gravement dans leur déviance, en leur donnant faussement raison. Ainsi, les voici qui jubilent et pavoisent devant les Sénégalais, alors qu’ils devaient moralement se cacher ou mourir de honte.

Les défenseurs et militants de l’école publique, c’est-à-dire celle de la République, n’ont pas le droit de laisser saboter celle-ci, par des gens irresponsables qui ne pensent qu’à leurs intérêts personnels et cupides. C’est pourquoi cette affaire doit être celle de tous les citoyens républicains, car elle risque de se perpétuer si on n’y prend garde. Ces gens, au lieu d’avoir honte de leur geste dégradant et socialement immoral, non, ils ont même eu l’outrecuidance de demander la tête du ministre de l’éducation, alors que, c’est de leurs têtes dont il est réellement question. Franchement, le ridicule ne tue plus au Sénégal, depuis que le droit y est dit n’importe comment, pour ne pas dire à l’envers !

Dans une pareille situation où la confusion est totale, il est indispensable, pour que nul n’en ignore, d’éclairer la lanterne des Sénégalais. En quoi faisant ? En produisant des preuves palpables étalées  au vu et au su de tout le monde par toutes les parties concernées. Il est trop facile, pour une affaire aussi grave, qui concerne l’avenir et l’éducation de nos enfants, que la Cour Suprême puisse laver à grande eau des fraudeurs pris la main dans le sac, par une annulation d’autorité  purement et simplement d’une faute avérée,  au nom de je ne sais quelle raison bizarre, sans en donner la preuve matérielle. Ceci, n’est ni plus ni moins, que de l’excès de pouvoir.

 Il faudrait nécessairement que le ministre de l’éducation interjette appel. Et que le gouvernement en commençant par le chef de l’Etat prend au sérieux cette affaire extrêmement grave, qui pourrait avoir des répercussions ultérieures très graves sur tous les examens et concours à venir, et devenir demain, un cas de jurisprudence. Ainsi, le tricheur qui passerait à travers les mailles du filet, déclaré admis, ne pourra plus être exclu ou radié.

C’est une grave responsabilité d’admettre des élèves maîtres tricheurs dans le corps des enseignants de notre système éducatif, qui a si besoin d’être assaini. Ceux qui évoquent la révélation tardive de la tricherie pour laisser passer la faute, sont de même acabit que les tricheurs. On peut se demander d’ailleurs s’ils n’ont usé de la même méthode pour entrer aussi dans l’enseignement ? En tout cas, ceux qui se ressemblent s’assemblent, dit l’adage.

A l’attention du président de la République, nous rappelons ces recommandations significatives et combien importantes à retenir : « Il n’est jamais trop tard pour bien faire ». Par ailleurs, comme on le dit si justement : «  l’erreur est humaine, mais  persister dans l’erreur par arrogance, c’est diabolique »

Mandiaye Gaye

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[1] Sudquotidien du 24 Septembre 2015

[2] idem