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Mar, Nov

Santé, Le canada tue ses malades en silence. Comment un pays peut-il laisser dériver son système de santé à un tel point ?

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 santé

 

Cet article est écrit par un malade dans son lit d'hôpital afin d'alerter l'opinion publique et de se faire aider.

 

MISE à JOUR  du dimanche 20 MAI 2012 :  Nous avons le regret et  la tristesse  de vous apprendre le décès de notre brave compatriote  Mr Aliou DIOP ,à la suite d'une maladie extrêmement brutale, dècès survenu au canada dans la nuit du samedi 19 mai 2012 au dimanche 20 MAI 2012. Pour le rapatriement de son corps au Sénégal, les amis de Mr Aliou DIOP sollicitent votre générosité afin de couvrir rapidement les frais du voyage et permettre à sa famille d'organiser dignement ses obsèques .

            Chambre 719A, Hôpital Général Juif, un des meilleurs hôpitaux de la ville de Montréal. Aliou Diop, 37 ans, espère toujours que l’on veuille bien s’occuper de lui. Il a été diagnostiqué d’un cancer du foie il y a maintenant une semaine. Son histoire est banale et pourtant, elle reflète les tristes errements d’un système de santé qui a semble-t-il oublié son objectif premier, la raison même de son existence : sauver des vies. 

De quoi parle-t-on ici? D’un système qui a laissé l’objectif de rentabilité l’emporter sur la vie humaine. D’un système qui, par suite, ne permet pas à tous ses citoyens d’accéder ni à la même qualité de soins ni à la même attention du corps médical. 

Ce système de santé par sa gestion erratique s’empêche également lui-même de pratiquer une médecine efficace et appropriée. Les délais sont de plus en plus longs, si longs que cela en devient indécent, si longs que le diagnostique arrive souvent trop tard. Les hôpitaux publiques sont de plus en plus bondés, si bondés que les médecins ne peuvent accorder plus de quelques minutes par patient, si bondés que les patients en sont parfois à se demander si on s’occupe réellement d’eux en tant qu’être humain ou simplement en tant que numéro de chambre correspondant à un cas pathologique.

Aliou se plaint de douleurs abdominales dès le début du mois de mars. Il ne veut pas aller consulter car il ne peut se permettre de payer une consultation privée et les délais d’attente dans le service public ne sont pas compatibles avec son emploi du temps. Le 13 mars, il se rend tout même à la clinique médicale Métro-Médic (Côte-des-Neiges) qui lui délivrera, après un rendez-vous qui ne durera pas plus de 10 minutes, une ordonnance pour une échographie abdominale. Aliou devra se rendre au Jean Coutu pour obtenir des antidouleurs… Le lendemain, il se rend à l’Hôpital Général Juif pour faire une demande de rendez-vous pour l’échographie. Rendez-vous lui sera donné pour le mois de…septembre.

             Le 8 avril alors qu’il attend patiemment l’arrivée du mois de septembre, les douleurs se font trop pressantes, au point qu’il ne peut plus se déplacer, il est alors emmené en ambulance aux urgences de l’Hôpital Général Juif. Il y restera une nuit, ressortira le lendemain après avoir fait une batterie d’analyses dont les résultats lui seront communiqués dans un délai d’environ deux semaines. Il n’a avec lui qu’une ordonnance pour des antidouleurs et le numéro de téléphone de la secrétaire qui est censée lui communiquer les résultats. Les antidouleurs, si pris tel qu’énoncé dans l’ordonnance, ne lui dureront qu’une semaine et demie maximum. Le 18 avril, il appelle la secrétaire pour obtenir ses résultats car il est immobilisé au lit et pense devoir être hospitalisé de nouveau. Celle-ci lui annonce que les résultats ont été envoyés directement au service des urgences à l’hôpital qui le contactera au besoin, l’hôpital n’a jamais appelé. S’il veut les récupérer lui-même cela prendra trois semaines supplémentaires. Insistant pour obtenir ses résultats, il arrivera finalement à obtenir un rendez-vous pour venir les chercher le 27 avril. Il n’ira jamais les chercher non plus car le 25 avril il se rend de nouveau aux urgences où il est admis (après avoir rempli tous les formulaires) et où il attendra pendant quatre heures avant de s’effondrer au milieu de la salle d’attente. C’est alors qu’il sera emmené à l’étage des urgences où on lui donnera un lit.

            Deux jours plus tard (le jour où il devait aller chercher ses résultats) il est déplacé au septième étage dans une chambre avec trois autres patients. Le docteur qui passera le voir lui diagnostiquera une infection du foie. Il recevra des antidouleurs et des antibiotiques. Mais le 2 mai, on le déplace à nouveau, dans une chambre double cette fois et c’est à ce moment que les docteurs lui annonceront pour la première fois qu’il est atteint d’un cancer du foie à un stade avancé ainsi que d’une hépatite B. Il a fallu un mois et douze jours pour qu’il obtienne finalement un diagnostic de la part du système médical québécois.

 

            Si seulement l’histoire s’arrêtait là et qu’il était pris en charge à hauteur de l’urgence de son cas, il y aurait moins à dire. Malheureusement l’histoire ne s’arrête pas là. Les médecins ne font pas plus attention à son cas, encore moins à l’humain. Ils sont incapables de lui donner un diagnostic fiable, un jour son cancer est avancé à 11%, le lendemain à 20% et le surlendemain à 80%, tout cela sans examen complémentaire entre chaque diagnostic.  Peut-on imaginer plus destructeur pour le moral que de ne savoir l’avancement réel de sa maladie. Comment garder espoir lorsque les médecins qui passent vous voir sont différent chaque jour, tellement qu’on a du mal à comprendre lequel est celui qui nous suit.

L’Hôpital Général Juif est un hôpital comme nombre de bons hôpitaux où sont formés les futurs docteurs. Les équipes médicales effectuent des rotations tous les mois et Aliou a eu le malheur d’arriver en fin de mois. Ce qui signifie qu’après avoir été ‘diagnostiqué’ l’équipe médicale a changé et devait tout apprendre de la part des docteurs ‘Seniors’ qui sont en charge des dossiers pour tout le 7ème étage.

            Lorsque l’on sait que le temps est un élément si important pour la réussite d’un traitement du cancer, il n’est pas permis ni de se tromper, ni de passer une semaine à réaliser un diagnostic fiable et encore moins de perdre du temps à réexpliquer à chaque équipe les problèmes de chaque patient. Enfin, s’entendre dire « On ne pourra pas commencer de traitement aujourd’hui car nous sommes vendredi et nous ne travaillons pas le week-end » est du plus bel effet sur le moral d’une personne qui sait qu’elle a un cancer du foie à un stade avancé et pour laquelle chaque jour compte. Et ceci n’est qu’un aspect de l’environnement dans lequel sont plongés les malades. Sa chambre ne possède même pas de placard pour ranger ses affaires, le système de communication entre les membres du corps médical est un système de hauts parleurs présents dans toutes les chambres et fonctionnant en permanence y compris la nuit, les malades sont sans cesse dérangés par les communications du staff médical car tout le monde entend chaque communication, un peu comme les appels dans les centres commerciaux. Au cours de sa prise en charge, Aliou s’est vu promettre à plusieurs reprises une chimiothérapie pour ensuite se voir dire que finalement ça ne sera pas possible, qu’il fallait refaire les mêmes examens qu’à son entrée pour voir ce qui était possible.

            Deux semaines après son entrée donc, retour à la case départ. Le problème dans tout ça est que l’hypothèse avait été émise au début de partir pour la France où le système de santé est un peu plus égalitaire et en tout cas moins engorgé. Il y avait 3 lits d’hôpitaux pour 1000 habitants en 2011 au Canada, le double en France. Mais devant l’insistance de l’équipe médicale à ne pas le laisser partir, il a finalement décidé de leur faire confiance et de rester. Résultat il a déjà perdu deux semaines pendant lesquelles il aurait pu recevoir un traitement adéquat en France ou ailleurs. Mardi 8 mai, à la suggestion d’un ami d’Aliou qui s’était uniquement renseigné sur Google, le médecin sénior va décider de traiter l’ascite qui est un symptôme fréquent accompagnant le cancer du foie. Rien n’avait été fait jusque-là alors que le ventre avait triplé de volume. Lorsque l’on en arrive à ce point, on se demande vraiment à quoi sert le système médical.

 

            Cette histoire est purement factuelle, il s’agit de faits qui se sont déroulés sur les trois dernières semaines et la suite en est encore inconnue. Pourtant, Aliou ne perd pas espoir et continue de se battre contre la maladie dans un système médical qui ne joue pas en sa faveur. Il est très probable que peu de personnes soient sincèrement touchées par une telle histoire, ne serait-ce que parce qu’il est difficile de mettre des mots sur la souffrance, l’angoisse, la déception, les pleurs d’un malade qui attend d’être sauvé ainsi que  ceux de ses proches. Pourtant chacun aura un jour besoin de ce système médical, pour être guéri, sauvé, ou soulagé, lui ou une personne qui lui est chère. Et il est important d’agir au plus vite et de demander au gouvernement d’agir au plus vite pour que ces histoires ne soient plus que des lointains souvenirs pour tout le monde. Laisser le système médical Québécois dériver plus avant dans sa dégénérescence est un acte criminel car cela signifie laisser les citoyens seuls face à la maladie et certains y perdront la vie.

            Il n’y a pas de responsable unique, nous sommes tous responsables. Les gouvernements provinciaux et fédéraux ne réagissent pas ou interviennent  mal face au déclin de leur système de santé. Les dépenses de santé du pays dépassent les 4 500 CAD par habitant en 2012, elles ont été multipliées par deux en dix ans. Pourtant le nombre de lits d’hôpitaux et le nombre de médecins pour 1000 habitants sont tous deux en forte diminution. En 1970, il y avait au Canada, 7 lits pour 1000 habitants, aujourd’hui nous sommes à 3 lits pour 1000 habitants. Depuis 2002, le nombre de médecins pour 1000 habitants est quant à lui passé de 2.10 à 1.77 et continue de diminuer. Comment expliquer une telle baisse alors que les fonds investis ont augmentés ? L’espérance de vie au Canada a commencé à décroître en 2006, même si elle reste élevée, peu de pays développés connaissent cette tendance, dans tous les autres pays développés l’espérance de vie continue de croître de quelques mois chaque année.

            Le système médical est lui aussi responsable d’avoir abandonné ses malades à la merci de la course au profit. Alors que les serments qui sont prononcés aussi bien par les médecins Canadiens que par les médecins Québécois énoncent clairement que chaque médecin devra remplir ses devoirs de médecins envers tous ses patients avec conscience, loyauté et intégrité qu’ils devront se souvenir qu’un patient est avant tout un être humain qui souffre et pas seulement un cas pathologique; cet engagement humain se trouve de plus en plus souvent violé et l’absence de réaction face à une telle dérive est une faute grave qui a un coût en vies humaines.

            Enfin les citoyens Canadiens et Québécois sont responsables de par leur inaction. L’accès aux soins de santé de qualité de manière égale et indifférenciée est un droit et devrait être une des exigences non négociables de chacun d'entre nous, pas seulement lorsque le besoin se fait sentir mais aussi par solidarité envers ceux qui en ont besoin. Ne pas réagir face aux excès engendrés  par l'emprise des idéologies libérales  dans tous les secteurs de l'économie, revient à accepter ce système injuste, criminel et incompétent qui décide  qui a le droit de vivre  plus longtemps qu'un autre sur des critères de coût -avantage ou de sélection -exclusion.  Le canada tue ses malades en silence et personne ne dit rien!

 Mr Aliou DIOP ( sur son lit d'hôpital ) 

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