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Yancoba Diatarra, premier adjoint au maire de Thiès : «Thierno Alassane Sall ne sera jamais maire de Thiès !»

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Macky Sall au pouvoir, sa méthode pour conquérir Thiès qui s’apparente à celle de Wade et qui «va le perdre», l’absence du Sénégal de son leader Idrissa Seck, les départs «naturellement regrettables» de Rewmi des minis­tres Oumar Guèye et Pape Diouf, du vice-président Youssou Diagne, de la notaire Me Nafissatou Diouf, etc. Yancoba Diattara évoque toutes ces questions dans la première partie de cette interview. Le jeune maire de fait de Thiès demeure convaincu que la capitale du Rail reste une forteresse imprenable pour son parti, Rewmi. En gravissant Les Marches du Quotidien, Diattara a lâché ses certitudes et ne s’est pas embarrassé de convenances… politiques pour cracher ses vérités à ses adversaires du parti présidentiel et leur leader, le Président Macky Sall. Entretien…    

Idrissa Seck se porte-t-il bien ?

 Idrissa Seck se porte très bien ! Il se porte à merveille.
On se disait qu’il était malade…
Touchons du bois, il se porte bien. Il n’est pas alité, il n’est ni malade, ni souffrant, ni hospitalisé. Pour moi, les gens racontent des histoires. J’ai eu l’occasion de le rencontrer à Paris. On a longuement discuté, pendant deux heures. On est en communication permanente. En aucun moment, je n’ai senti une petite maladie à son niveau. Honnêtement, ça nous a tous étonnés d’entendre qu’il est malade. On échange beaucoup. Je l’ai  eu pour la dernière fois hier (L’entretien a eu lieu le 20 mars 2013). On a échangé par mail.
Est-il encore dans une logique de se représenter à la mairie de Thiès ?
Naturellement, le Rewmi se présentera à la mairie de Thiès. En tous cas, Idrissa Seck dirigera l’équipe pour la mairie. Pour le reste, on verra après la victoire. 
Est-ce que Yankhoba Diattara va prendre ses responsabilités pour diriger la mairie de Thiès à son propre nom ?
Non, on a toujours agi dans le cadre de groupe, de notre parti. Je n’ai jamais essayé de briguer quoi que ce soit à titre personnel. Je fais partie d’un parti politique, d’une coalition et même d’une génération. On a toujours essayé d’évoluer en groupe et ça nous a toujours servi. Ceci a beaucoup aidé Idrissa Seck dans son parcours. Donc, nous allons aller ensemble avec le parti et avec toutes les forces politiques qui se sont signalées à Thiès et au niveau national.
 Ce qui est constant c’est que Idrissa Seck a dit qu’il ne va plus se représenter à la mairie de Thiès. Est-ce que vous êtes la personne la mieux indiquée au sein de votre parti, pour briguer les suffrages aux prochaines Locales ?
Peut-être en termes d’expérience et de parcours ! Mais le parti est le plus important. Essayons d’avoir une liste assez représentative des forces politiques et des forces vives de Thiès. On doit gagner d’abord et après on verra en fonction des profils qui se dégageront, celui qui est le plus apte à diriger. Mon bilan et mon parcours à la municipalité me placent à la tête du peloton, aussi bien au niveau de mon parti qu’au niveau de la ville. Je n’ai pas de fixation par rapport à la municipalité. 
A Thiès, nous avons cinq postes en compétition : la ville et les communes et le poste de Conseil départemental. On ne peut diriger qu’une Collectivité locale. Donc, il y a de la place pour beaucoup de personnes.
Rewmi ira-t-il aux élections sous sa propre bannière ou en coalition à Thiès ?
J’ai l’habitude de dire qu’aucun parti politique ne peut prétendre nous battre à Thiès. Rewmi y reste le parti le plus représentatif du fait d’une adhésion affective à Idrissa Seck. Les liens entre Idrissa Seck et les Thiessois dépassent le cadre de la politique
Depuis 2000, Idrissa a su s’imposer comme le fils du terroir qui a su profiter de sa position pour redonner aux Thiessois leur dignité qui était bafouée par les différents régimes qui se sont succédé, notamment sous Abdou Diouf. Avec lui, les Thiessois se sont sentis revalorisés dans leur chair et dans leur être. Idrissa Seck a apporté une contribution significative au quotidien des Thiessois. La redéfinition de la carte  de la ville et les aménagements urbains qui ont été réalisés, concourent à faire de Idrissa Seck le fils du terroir adoré, apprécié et admiré par ses concitoyens. 
Nous avons tous souvenance des brimades du régime de Abdou Diouf, qui nous qualifiait de jeunesse malsaine du fait d’une combativité et d’un engagement des jeunes de Thiès à l’endroit de Abdoulaye Wade et de lutte contre les injustices. Tout cela nous a mis dans une posture de victimes et Idrissa Seck a su donner aux Thiessois leur dignité.
Rewmi se prépare à aller seul aux élections au cas où on n’aurait pas d’entente. Toutes les coalitions sont, aujourd’hui, en discussion.
Même à Thiès ?
Même à Thiès, nous nous préparons. Comme l’a dit Idrissa, nous, nous sommes sur des principes. Idrissa avait dit, avant même qu’on ne sorte de la coalition Benno Bokk Yakaar, que Rewmi se prépare à aller seul aux élections, mais au cas où on ne s’entendrait pas avec, notamment, les gens de Benno bokk yaakaar. 
Aujourd’hui, nous sommes sortis et depuis lors, aussi, il y a beaucoup de partis qui ont pris contact avec nous, aussi bien au niveau local que national. Les discussions sont très avancées et nous espérons, si les élections sont maintenues naturellement, pouvoir dévoiler peut-être un programme.
C’est le cas déjà à Dagana où Rewmi compte y aller avec Oumar Sarr et le Pds.
Oui, à Dagana, je peux dire que c’est conclu. J’ai moi-même l’honneur d’avoir été associé à ces discussions-là au niveau départemental et Rewmi ira aux élections avec le Pds. Il y a également d’autres partis qui ont rejoint cette coalition-là. 
Au niveau d’autres départements, les responsables sont en train de discuter et ont reçu carte blanche de la direction du parti pour continuer avec les réalités locales. Nous n’avons d’orientation précise pour leur demander de s’allier avec tel ou tel parti. Mais, en tous cas, ce qui est commun, c’est que nous allons nous préparer au cas où. Par exemple, il n’y aurait pas d’entente ou de concordance, au niveau de certains départements, à aller seul. C’est pourquoi nous travaillons aussi à avoir une coalition nationale que Rewmi va plus ou moins piloter.
Est-il envisageable, pour certaines localités, de vous présenter avec l’Apr ou avec Benno bokk yaakaar ?
Peut-être avec Benno bokk yaakaar parce que cette coalition ne se limite pas seulement à l’Apr, même si c’est ce parti qui est aujourd’hui au pouvoir. Il y a des localités naturellement où l’Apr risque d’être mise en minorité, du fait d’une boulimie qui se développe et de l’oubli de la coalition à la veille du deuxième tour. Vous avez suivi ce qui s’est passé aujourd’hui à Guéoul, dans le département de Kébémer, où des jeunes disent : «Oui, tout sauf le Parti socialiste qui étouffe !» Ce sont des comportements qui se déroulent de plus en plus avec l’Apr et les autres alliés ne l’accepteront pas. C’est pourquoi c’est un risque.
A Thiès, n’avez-vous pas de crainte par rapport à l’environnement politique ? Parce qu’on voit que Thiès est très convoitée par les forces politiques locales et nationales.
Thiès a toujours été convoitée par les forces politiques, en particulier celles au pouvoir. Malheureusement, elles s’y prennent mal parce qu’elles pensent que, pour des villes comme Thiès, où les leaders -comme tous les leaders locaux sont les fils du terroir- à la différence de Idrissa Seck ou de Macky Sall, qui a eu un parcours politique particulier du fait d’un incident politique jusqu’à être adopté ou recueilli, ou être adopté à nouveau, par les fils du terroir, il faut une autre approche. Pas seulement sur le plan politique, non : Wade a testé et il a échoué. Il a échoué à Thiès, il a échoué à Fatick. 
Tu le fais dans d’autres localités avec des leaders comme Oumar Sarr, tu échoues, parce que la réalité locale est tout autre. Il faut l’aborder sous un autre angle. 
Macky Sall, à Thiès, il commet les mêmes erreurs que Wade. Or, les Thiessois auront souvenance de tout le bien que Idrissa a pu produire quand il était là. Au lieu de venir le concurrencer sur ce terrain-là, essayez de montrer l’apport, l’espérance ou l’espoir que vous pouvez apporter, vous l’attaquez sur un terrain où il a déjà la dame et le pion. L’approche n’est pas bonne.
Idrissa Seck, c’est un épouvantail sur l’échiquier politique à Thiès. Une fois que Idrissa ne sera pas candidat à sa succession à la mairie de Thiès, est-ce que, aujourd’hui, vous n’êtes pas fragilisé par cette position ? Est-ce que vous avez potentiellement un leader capable de représenter l’électorat de Idrissa Seck à Thiès ?
L’électorat de Idrissa Seck est principalement porté par le parti. Comme je l’ai dit tantôt, ce n’est pas être candidat, il ne faut pas individualiser les choses. Mais régler les choses de manière structurelle. Nous, on est en train d’organiser les choses pour que notre parti de Rewmi qui est le parti majoritaire à Thiès, le demeure et le reste. 
Que Idrissa soit candidat ou non, qu’il soit investi ou non, qu’il soit Président ou non, qu’on puisse rester et demeurer le parti le plus fort et le parti majoritaire. Et, avec ça, naturellement, on est sûrs de gagner les Locales. Maintenant, dire qui est celui qui aura la mairie, ça sera une question qui sera réglée au niveau interne. Nous n’avons pas encore de leadership, de leader qui se dégage naturellement, en-dehors peut-être de quelques responsables aujourd’hui.
Dont vous ?
Dont moi ? Mais du fait de mon jeune âge, c’est un handicap. Mais l’expérience que j’ai acquise, avec Idrissa, pendant 5 ans à la mairie, 10 ans de conseiller municipal et, un peu, un parcours politique, permettent d’espérer.
Vous vous voyez maire ?
Non, je l’exerce depuis 5 ans !
Non, vous êtes adjoint au maire de Thiès. C’est un lapsus, ou un aveu ? Parce que, Idrissa Seck, jusqu’à preuve du contraire, était maire de Thiès.
Je dis que je l’exerce, c’est Idrissa Seck le maire de Thiès. Lui-même m’appelle : «Monsieur le maire !»
Vous dites dans une de vos déclarations que «l’Etat, en complicité avec certains fils de Thiès, tente d’étouffer la Commune». Vous faites allusion à qui ?
Tout dernièrement, vous avez suivi un doyen de Thiès qui s’appelle Modou Diouf qui s’attaquait à l’Onas, du fait tout simplement de branchements sociaux d’assainissement qui avaient été sollicités pour le compte de Thiès. Et ils ont été détournés au profit de Saint-Louis. 
Par qui ? 
Mais, c’est la direction. Aujour­d’hui, l’Onas à un nouveau directeur, originaire de Saint-Louis. Il se permet de détourner certains projets destinés à d’autres villes pour le compte de Saint-Louis. Je l’avais dénoncé. Et cela a été confirmé tout dernièrement. Il m’a appelé pour me dire : «Monsieur le maire, vous avez raison. Moi, je vous avais écouté. Moi-même, l’Onas m’avait appelé pour me dire de venir retirer la caution de 20 000 francs que j’avais payée pour mon branchement social.» 
A Thiès, ils ne font qu’un kilomètre et quelques d’adduction pour le compte du directeur commercial de l’Onas qui y habite.
Ces fils de Thiès-là, est-ce que Thierno Alassane Sall en fait partie ?
Mais  les décisions importantes se prennent où, en Conseil des minis­tres avec le président de la Répu­blique, en présence de ses ministres. Vous savez aujourd’hui, on a deux ou trois ministres thiessois au gouvernement et qui prétendent aimer Thiès. Ils doivent apporter quelque chose à Thiès. Leur premier devoir devait être de dire : «Monsieur le président de la République, Thiès connaît des difficultés liées à tel, tel, ou tel contexte, qu’est-ce que l’Etat peut faire ? » Un jour, je l’interroge sur les chantiers de Thiès. Je lui dis : «Mais Thierno, c’est le président de la République, lui-même, qui avait promis entre les deux tours d’achever les chantiers de Thiès, qu’est-ce que tu en dis.» Il m’a répondu : «Oui, vous savez monsieur le maire, malheureusement au niveau des infrastructures, je n’occupe que les bâtiments.» Ce qui est quand même léger comme réponse. Vous êtes ministre de la République en charge  des Infrastructures, un des départements les plus importants du gouvernement du Sénégal. Vous êtes de Thiès, responsable politique, votre premier rôle devait être de dire : «Monsieur le Président, vous avez pris un engagement politique à Thiès, aidez-nous donc à le respecter.»
Peut-être qu’il attend d’être maire pour le faire…
Vous savez, il ne sera jamais maire de Thiès. (Rires). C’est la vérité. Thierno ne peut pas gagner. Même dans son bureau de vote. Il faut le noter, on va même le battre dans son bureau de vote. On le bat dans son bureau de votre, dans son centre, dans sa commune d’arrondissement, dans la ville. 
Ils ont les moyens…
Mais les moyens n’ont jamais fait gagner Thiès. Il faut le demander à Abdoulaye Wade. Donc, c’était cela le débat premier. Malheureusement, ils sont dans des querelles de positionnement. Or, ils ne savent pas que ce que les Thiessois attendent d’eux c’était ceci,  au-delà des clivages politiques, de dire : «Ok, notre ville a besoin de tant. Nous, on a la chance de siéger au gouvernement, on va essayer.» Avec cela, les Thièssois auront au moins…
Les gens considèrent votre parti comme celui capable de s’opposer au régime ou à la coalition au pouvoir actuel. Est-ce que vous vous préparez à cela, c’est-à-dire être la première force d’opposition au Sénégal ?
En tous cas, qu’on le dise, qu’on l’incarne ou non, nous sommes la première force -à mon avis- politique de l’opposition.
Sur quelle base ?
Sur la base des leaderships qui se dégagent. Le leadership de Idrissa Seck s’impose par rapport à tous les autres qui se dégagent sur l’échiquier politique. Au niveau du Pds, je ne pense pas qu’ils aient quelqu’un qui puisse égaler Idrissa Seck sur le plan du leadership, du charisme et de la représentativité. 
Dans d’autres partis, je ne vois pas également de leadership qui se dégage en-dehors de quelques partis. Et là, je ne pense pas que même aujourd’hui, ils aient les moyens politiques et financiers de s’imposer comme alternative par rapport à Macky Sall.
Et vous, vous en avez ?
On en a.
Quels sont-ils ?    
Les moyens sont assez divers. Ce sont des moyens humains, nous avons un parti très représentatif et structuré, les moyens logistiques on en a aussi. Financiers, je n’en parle pas, parce que je ne m’en occupe pas, c’est plutôt Idrissa.
Est-ce que vous prenez en compte que, depuis 2007, à chaque échéance électorale, le score de Idrissa Seck est en baisse ?
Le score de Rewmi baisse à cause d’un environnement et d’un contexte assez particuliers. Moi j’étais avec Idrissa Seck en 2007 et j’étais le seul responsable de sa caravane, le seul politique. Dès le début de la campagne, j’ai su mesurer le potentiel de Idrissa Seck. Je le taquine souvent en lui disant : «Tu devais être Président en 2007. En 2007, tu devais être élu.»
Et en 2012, il n’a pas été élu…
Non, en 2012, il n’a pas fait campagne. En 2012, on n’a pas été élus parce qu’on n’a pas fait campagne. Nous avons tous suivi ce qui s’est passé, parce que la bataille, à notre avis, qu’il fallait mener et qu’on a tous menée, c’était le départ de Wade. La violation de la Constitution était, à mon avis, la principale bataille et on l’a réussie en le dégageant. Une fois qu’il est hors de course on peut, maintenant, se préparer à aller.
Si vous l’avez réussie, c’est grâce à Macky Sall parce qu’il a mené campagne contre Wade.
Non, ce n’est pas grâce à Macky Sall, c’est toutes les forces vives de la politique qui se sont mobilisées pour faire partir Wade.
Mais est-ce qu’aujourd’hui, vous ne regrettez pas votre stratégie de 2012 ?
Non parce que, pour nous, on a gagné. On a gagné simplement, de la victoire des forces vives sur Abdoulaye Wade. Abdoulaye Wade a voulu faire un forfait, le Peuple sénégalais a dit non au plus fort, avec des morts, avec tout ce qu’on a vécu comme dégâts.
Vous faites de la politique ou de l’angélisme ?
Non, non, non, du tout. Il est parti et c’est le plus important. Macky Sall est là et, maintenant, rebelote ! On se prépare à nouveau pour solliciter le Peuple sénégalais et ça sera en 2017. Et on est prêts.
Alors qu’il est à l’extérieur du pays.
En dehors du pays, oui. Wade a fait plus d’un an et demi à l’étranger. Il est arrivé en 1999, pour 6 mois de préparation de campagne, et il a gagné.
Idrissa Seck était l’invité de Rfm, l’année dernière le 25 mars, il disait qu’il allait suivre, qu’il avait compris qu’il était un peu éloigné des populations. Aujourd’hui, est-ce qu’il a tiré les leçons ?
Il a tiré les leçons, je pense. Vous avez suivi ses déplacements à l’intérieur du pays, vous avez vu comment, peut-être, il a su changer d’approche. Et il n’a jamais été très distant. Seulement, il a une approche assez particulière : le silence qui est une force aussi. Il faut le reconnaître. Il parle au bon moment. Il nous dit souvent : «En politique, ce qui est le plus important, c’est de savoir le bon moment de l’action et de la parole.» 
Sauf que jusque-là, ça ne lui a pas servi à grand-chose…
Si pourtant. Pour moi, il reste encore l’homme politique le plus populaire, le plus silencieux, et sur qui…
Et qui, d’une élection à une autre, recule en termes de suffrages…
Je relativise beaucoup parce que je connais le potentiel de Idrissa Seck. Je connais également ses limites et ses contraintes par rapport à ces élections-là qui ont été à l’origine de la baisse, je peux même dire, de son score. C’est pourquoi, on dit à nos amis de Benno bokk yaakaar : «Vous ne pouvez pas vous fier au score de Idrissa Seck en 2012 pour dire que ce sont là des bases de critères de répartition.» Ça ne reflète pas son vrai potentiel. Pour quelqu’un qui n’a pas fait campagne, qui est resté à Dakar, qui n’a même pas fait campagne à Thiès. C’est moi qui dirigeais les caravanes dans le département, il a gagné huit Collectivités locales sur les quinze. 
Mais M. Diattara, vous oubliez qu’en 2009, lors des élections locales, à Thiès même, Idrissa Seck a reculé sur son score par rapport aux Locales précédentes. C’est une logique aussi bien au niveau local qu’au niveau national. Le score de Idrissa Seck a chuté au niveau national de 2007 à 2012. Aux élections locales de 2009, Idrissa Seck a eu moins de suffrages qu’il n’en a eus lors des élections de 2002.
Les contextes diffèrent. En 2002, Idrissa Seck, directeur de cabinet de Wade, Premier ministre, se présente aux élections.
Il était handicapé par cette posture ?
Naturellement !
Mais en 2009, il n’était plus dans cette posture et il a eu moins de suffrages qu’en 2002. C’est un peu ça l’incohérence de cette explication. Si vous voulez expliquer qu’en 2002, Idrissa Seck était directeur cabinet de Abdoulaye Wade et qu’il avait une posture qui ne lui permettait pas d’être perçu d’un bon œil par la population. En 2009, il était dehors, un opposant pur et dur et, malgré tout, son suffrage a chuté. A l’élection présidentielle, les scores réalisés par Idrissa Seck à Thiès étaient inférieurs à ceux réalisés à Thiès en 2009. Et donc c’est une courbe descendante. Comment expliquez-vous qu’aujourd’hui, Idrissa Seck reste le chouchou et que ça ne se traduit pas en suffrages ?
Je veux dire qu’en 2009, Idrissa Seck n’est même pas venu à Thiès. Il est venu une seule fois pour une marche orange, faire un petit tour et il est rentré sur Dakar. Malgré cela, il a quand même gagné Thiès avec un score assez important. Au niveau des collectivités locales, on a gagné les huit sur les quinze. On a gagné les communes. On a gagné d’autres communautés rurales, sans même qu’il ait fait le déplacement. En 2009, il avait perdu Ndondo. C’est Alioune Sarr, qui est le Pcr, qui l’avait gagné. En 2012, on l’a gagné. 
Keur Moussa que dirige le Pcr Momar Ciss, on l’a gagné en 2012 sans que nous ne fassions campagne là-bas, alors qu’il l’avait perdu en 2009. C’est pourquoi je dis qu’il faut relativiser. En 2009, on avait 36 000 voix pour gagner la collectivité de Thiès. Aujourd’hui, rien que nos ventes de cartes nous placent à 40 000 voix sans compter ceux qui n’achètent jamais de cartes politiques et qui vont voter pour Idrissa Seck quand il se présentera en 2017.
Le Pds a placé un million de cartes, le Ps autant…
Avec notre méthode, nous avons exigé une présence physique des électeurs, c’est pourquoi, nous n’avons pas annoncé des ventes de centaines de milliers de cartes. Idrissa Seck a été exigent. Il a dit : «Je préfère connaître le nombre exact de nos militants plutôt qu’on nous raconte qu’on a vendu des centaines de milliers de cartes alors que sur le terrain, ce n’est pas le cas. Je veux les chiffres réels.»
Alors, il a conscience que son score est en train de chuter ?
Il est conscient qu’il y a à peu près 200 000 militants qui lui ont tourné le dos entre 2007 et 2012, du fait d’une certaine distance, de quelques frustrations liées à son manque d’accessibilité et tout cela. Son objectif premier c’est de corriger ces dysfonctionnements, ramener ces 200 000 pour espérer avoir ces 500 000 militants qui est son stock de départ. Il va maintenant se battre pour 500 000 autres pour espérer être au second tour en 2017. 
Mais là où le bât blesse c’est que vous parlez de distance vis-à-vis des militants. Nous constatons que Idrissa Seck est de moins en moins au Sénégal. Ce fossé ne semble pas avoir été satisfait. C’est suite à cela que des icônes du parti sont parties. On parle de Youssou Diagne, Oumar Guèye, Nafissatou Diop Cissé, Pape Diouf, entre autres, qui sont à la limite les piliers essentiels de Rewmi du temps de leurs activités politiques. Est-ce qu’aujourd’hui tous ces faits ne semblent pas vous entraîner dans une descente aux enfers ?
Non, je ne parlerai pas de descente aux enfers. Ce qui est connu et partagé, ce sont les départs mais les arrivées ne sont jamais comptabilisées. Alors que, honnêtement, ce que je reçois comme adhésions, comme appels, comme Sms, comme mails d’adhésion dans ce parti de cadres, de jeunes, de femmes de partout dans le Sénégal, je ne peux pas le comptabiliser. 
Ce sont des gens connus ?
Ce sont des inconnus mais aussi des leaders émergents, des jeunes cadres qui aujourd’hui prennent de plus en plus l’engagement moral d’accompagner Idrissa Seck. A l’intérieur du pays, on en compte des centaines, à Dakar et partout. 
Ces départs sont naturellement regrettables. Ce sont des gens qui ont eu des parcours assez exemplaires avec Idrissa Seck. J’ai été témoin de cela. 
Depuis 1998, je suis dans son entourage. Je connais le parcours des uns et des autres. Par exemple, Pape Diouf avec qui il a préparé les élections de 2000 pour le compte du Pds. Il est un grand responsable, très bien introduit dans le Bambey. Nafissa­tou, c’était toujours la grande sœur dans le parti, mais pas une responsable politique. C’est comme ça je l’ai toujours considérée dans le parti. Je lui disais tout le temps : «Vous, vous êtes une sœur à Idrissa Seck.» Idrissa Seck l’avait intégrée dans le secrétariat, du fait de leur proximité. Peut-être qu’elle lui apportait un soutien moral. Sur le plan politique, elle ne lui apporte pas grand-chose. Je suis le commissaire politique à Kaolack. Donc, je sais ce que représentent les uns et autres à Kaolack. 
Pour Youssou Diagne, du fait de son parcours, de sa sagesse, on avait pensé qu’il devait être le sage du groupe. D’ailleurs, Idrissa Seck l’avait promu au poste de vice-président. 
Pour Oumar Guèye aussi, c’est vrai que sa représentativité n’est plus à démontrer. Et tout cela, c’est regrettable. 
Talla Diouf était parti bien avant les élections de 2007. Il avait rejoint Wade. Oui, c’est des symboles qui sont partis. Et il faut le reconnaître.
Parfois, vous n’avez pas l’impression d’être seuls à la table du bureau politique de Rewmi ? Toutes ces personnes étaient dans l’instance la plus élevée… 
Non, parce qu’au même moment, nous voyons l’arrivée de jeunes leaders, cadres, qui sont assez dynamiques. 
La liste commence à être longue... 
C’est vrai qu’elle commence à être longue, mais c’est la vie des partis politiques au Sénégal. Et je pense qu’il faut faire avec. Mais le plus important, c’est de ne pas être dispersés ou détendus par ces départs. Je pense que Idrissa Seck a eu un parcours assez exemplaire auprès de  Abdoulaye Wade. Il a vécu. Il me disait : «J’étais très proche de Abdou­laye Wade. Je l’ai vu souffrir de ces départs de Ousmane Ngom, etc.» 
A la veille des élections de 2000, tout l’entourage de Abdoulaye Wade était dégarni par le Parti socialiste. Malgré cela, il est arrivé au pouvoir avec un groupe de jeunes leaders comme Idrissa Seck, Lamine Bâ et autres. Pour moi, ce sera le même parcours pour Idrissa Seck. 
Aujourd’hui, il y a l’arrivée de jeunes cadres dans nos instances. Et je pense que c’est assez encourageant pour l’avenir. 


A suivre

SOURCE: 

Yancoba Diatarra, premier adjoint au maire de Thiès : «Thierno Alassane Sall ne sera jamais maire de Thiès !»

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Macky Sall au pouvoir, sa méthode pour conquérir Thiès qui s’apparente à celle de Wade et qui «va le perdre», l’absence du Sénégal de son leader Idrissa Seck, les départs «naturellement regrettables» de Rewmi des minis­tres Oumar Guèye et Pape Diouf, du vice-président Youssou Diagne, de la notaire Me Nafissatou Diouf, etc. Yancoba Diattara évoque toutes ces questions dans la première partie de cette interview. Le jeune maire de fait de Thiès demeure convaincu que la capitale du Rail reste une forteresse imprenable pour son parti, Rewmi. En gravissant Les Marches du Quotidien, Diattara a lâché ses certitudes et ne s’est pas embarrassé de convenances… politiques pour cracher ses vérités à ses adversaires du parti présidentiel et leur leader, le Président Macky Sall. Entretien…    

Idrissa Seck se porte-t-il bien ?
Idrissa Seck se porte très bien ! Il se porte à merveille.
On se disait qu’il était malade…
Touchons du bois, il se porte bien. Il n’est pas alité, il n’est ni malade, ni souffrant, ni hospitalisé. Pour moi, les gens racontent des histoires. J’ai eu l’occasion de le rencontrer à Paris. On a longuement discuté, pendant deux heures. On est en communication permanente. En aucun moment, je n’ai senti une petite maladie à son niveau. Honnêtement, ça nous a tous étonnés d’entendre qu’il est malade. On échange beaucoup. Je l’ai  eu pour la dernière fois hier (L’entretien a eu lieu le 20 mars 2013). On a échangé par mail.
Est-il encore dans une logique de se représenter à la mairie de Thiès ?
Naturellement, le Rewmi se présentera à la mairie de Thiès. En tous cas, Idrissa Seck dirigera l’équipe pour la mairie. Pour le reste, on verra après la victoire. 
Est-ce que Yankhoba Diattara va prendre ses responsabilités pour diriger la mairie de Thiès à son propre nom ?
Non, on a toujours agi dans le cadre de groupe, de notre parti. Je n’ai jamais essayé de briguer quoi que ce soit à titre personnel. Je fais partie d’un parti politique, d’une coalition et même d’une génération. On a toujours essayé d’évoluer en groupe et ça nous a toujours servi. Ceci a beaucoup aidé Idrissa Seck dans son parcours. Donc, nous allons aller ensemble avec le parti et avec toutes les forces politiques qui se sont signalées à Thiès et au niveau national.
 Ce qui est constant c’est que Idrissa Seck a dit qu’il ne va plus se représenter à la mairie de Thiès. Est-ce que vous êtes la personne la mieux indiquée au sein de votre parti, pour briguer les suffrages aux prochaines Locales ?
Peut-être en termes d’expérience et de parcours ! Mais le parti est le plus important. Essayons d’avoir une liste assez représentative des forces politiques et des forces vives de Thiès. On doit gagner d’abord et après on verra en fonction des profils qui se dégageront, celui qui est le plus apte à diriger. Mon bilan et mon parcours à la municipalité me placent à la tête du peloton, aussi bien au niveau de mon parti qu’au niveau de la ville. Je n’ai pas de fixation par rapport à la municipalité. 
A Thiès, nous avons cinq postes en compétition : la ville et les communes et le poste de Conseil départemental. On ne peut diriger qu’une Collectivité locale. Donc, il y a de la place pour beaucoup de personnes.
Rewmi ira-t-il aux élections sous sa propre bannière ou en coalition à Thiès ?
J’ai l’habitude de dire qu’aucun parti politique ne peut prétendre nous battre à Thiès. Rewmi y reste le parti le plus représentatif du fait d’une adhésion affective à Idrissa Seck. Les liens entre Idrissa Seck et les Thiessois dépassent le cadre de la politique
Depuis 2000, Idrissa a su s’imposer comme le fils du terroir qui a su profiter de sa position pour redonner aux Thiessois leur dignité qui était bafouée par les différents régimes qui se sont succédé, notamment sous Abdou Diouf. Avec lui, les Thiessois se sont sentis revalorisés dans leur chair et dans leur être. Idrissa Seck a apporté une contribution significative au quotidien des Thiessois. La redéfinition de la carte  de la ville et les aménagements urbains qui ont été réalisés, concourent à faire de Idrissa Seck le fils du terroir adoré, apprécié et admiré par ses concitoyens. 
Nous avons tous souvenance des brimades du régime de Abdou Diouf, qui nous qualifiait de jeunesse malsaine du fait d’une combativité et d’un engagement des jeunes de Thiès à l’endroit de Abdoulaye Wade et de lutte contre les injustices. Tout cela nous a mis dans une posture de victimes et Idrissa Seck a su donner aux Thiessois leur dignité.
Rewmi se prépare à aller seul aux élections au cas où on n’aurait pas d’entente. Toutes les coalitions sont, aujourd’hui, en discussion.
Même à Thiès ?
Même à Thiès, nous nous préparons. Comme l’a dit Idrissa, nous, nous sommes sur des principes. Idrissa avait dit, avant même qu’on ne sorte de la coalition Benno Bokk Yakaar, que Rewmi se prépare à aller seul aux élections, mais au cas où on ne s’entendrait pas avec, notamment, les gens de Benno bokk yaakaar. 
Aujourd’hui, nous sommes sortis et depuis lors, aussi, il y a beaucoup de partis qui ont pris contact avec nous, aussi bien au niveau local que national. Les discussions sont très avancées et nous espérons, si les élections sont maintenues naturellement, pouvoir dévoiler peut-être un programme.
C’est le cas déjà à Dagana où Rewmi compte y aller avec Oumar Sarr et le Pds.
Oui, à Dagana, je peux dire que c’est conclu. J’ai moi-même l’honneur d’avoir été associé à ces discussions-là au niveau départemental et Rewmi ira aux élections avec le Pds. Il y a également d’autres partis qui ont rejoint cette coalition-là. 
Au niveau d’autres départements, les responsables sont en train de discuter et ont reçu carte blanche de la direction du parti pour continuer avec les réalités locales. Nous n’avons d’orientation précise pour leur demander de s’allier avec tel ou tel parti. Mais, en tous cas, ce qui est commun, c’est que nous allons nous préparer au cas où. Par exemple, il n’y aurait pas d’entente ou de concordance, au niveau de certains départements, à aller seul. C’est pourquoi nous travaillons aussi à avoir une coalition nationale que Rewmi va plus ou moins piloter.
Est-il envisageable, pour certaines localités, de vous présenter avec l’Apr ou avec Benno bokk yaakaar ?
Peut-être avec Benno bokk yaakaar parce que cette coalition ne se limite pas seulement à l’Apr, même si c’est ce parti qui est aujourd’hui au pouvoir. Il y a des localités naturellement où l’Apr risque d’être mise en minorité, du fait d’une boulimie qui se développe et de l’oubli de la coalition à la veille du deuxième tour. Vous avez suivi ce qui s’est passé aujourd’hui à Guéoul, dans le département de Kébémer, où des jeunes disent : «Oui, tout sauf le Parti socialiste qui étouffe !» Ce sont des comportements qui se déroulent de plus en plus avec l’Apr et les autres alliés ne l’accepteront pas. C’est pourquoi c’est un risque.
A Thiès, n’avez-vous pas de crainte par rapport à l’environnement politique ? Parce qu’on voit que Thiès est très convoitée par les forces politiques locales et nationales.
Thiès a toujours été convoitée par les forces politiques, en particulier celles au pouvoir. Malheureusement, elles s’y prennent mal parce qu’elles pensent que, pour des villes comme Thiès, où les leaders -comme tous les leaders locaux sont les fils du terroir- à la différence de Idrissa Seck ou de Macky Sall, qui a eu un parcours politique particulier du fait d’un incident politique jusqu’à être adopté ou recueilli, ou être adopté à nouveau, par les fils du terroir, il faut une autre approche. Pas seulement sur le plan politique, non : Wade a testé et il a échoué. Il a échoué à Thiès, il a échoué à Fatick. 
Tu le fais dans d’autres localités avec des leaders comme Oumar Sarr, tu échoues, parce que la réalité locale est tout autre. Il faut l’aborder sous un autre angle. 
Macky Sall, à Thiès, il commet les mêmes erreurs que Wade. Or, les Thiessois auront souvenance de tout le bien que Idrissa a pu produire quand il était là. Au lieu de venir le concurrencer sur ce terrain-là, essayez de montrer l’apport, l’espérance ou l’espoir que vous pouvez apporter, vous l’attaquez sur un terrain où il a déjà la dame et le pion. L’approche n’est pas bonne.
Idrissa Seck, c’est un épouvantail sur l’échiquier politique à Thiès. Une fois que Idrissa ne sera pas candidat à sa succession à la mairie de Thiès, est-ce que, aujourd’hui, vous n’êtes pas fragilisé par cette position ? Est-ce que vous avez potentiellement un leader capable de représenter l’électorat de Idrissa Seck à Thiès ?
L’électorat de Idrissa Seck est principalement porté par le parti. Comme je l’ai dit tantôt, ce n’est pas être candidat, il ne faut pas individualiser les choses. Mais régler les choses de manière structurelle. Nous, on est en train d’organiser les choses pour que notre parti de Rewmi qui est le parti majoritaire à Thiès, le demeure et le reste. 
Que Idrissa soit candidat ou non, qu’il soit investi ou non, qu’il soit Président ou non, qu’on puisse rester et demeurer le parti le plus fort et le parti majoritaire. Et, avec ça, naturellement, on est sûrs de gagner les Locales. Maintenant, dire qui est celui qui aura la mairie, ça sera une question qui sera réglée au niveau interne. Nous n’avons pas encore de leadership, de leader qui se dégage naturellement, en-dehors peut-être de quelques responsables aujourd’hui.
Dont vous ?
Dont moi ? Mais du fait de mon jeune âge, c’est un handicap. Mais l’expérience que j’ai acquise, avec Idrissa, pendant 5 ans à la mairie, 10 ans de conseiller municipal et, un peu, un parcours politique, permettent d’espérer.
Vous vous voyez maire ?
Non, je l’exerce depuis 5 ans !
Non, vous êtes adjoint au maire de Thiès. C’est un lapsus, ou un aveu ? Parce que, Idrissa Seck, jusqu’à preuve du contraire, était maire de Thiès.
Je dis que je l’exerce, c’est Idrissa Seck le maire de Thiès. Lui-même m’appelle : «Monsieur le maire !»
Vous dites dans une de vos déclarations que «l’Etat, en complicité avec certains fils de Thiès, tente d’étouffer la Commune». Vous faites allusion à qui ?
Tout dernièrement, vous avez suivi un doyen de Thiès qui s’appelle Modou Diouf qui s’attaquait à l’Onas, du fait tout simplement de branchements sociaux d’assainissement qui avaient été sollicités pour le compte de Thiès. Et ils ont été détournés au profit de Saint-Louis. 
Par qui ? 
Mais, c’est la direction. Aujour­d’hui, l’Onas à un nouveau directeur, originaire de Saint-Louis. Il se permet de détourner certains projets destinés à d’autres villes pour le compte de Saint-Louis. Je l’avais dénoncé. Et cela a été confirmé tout dernièrement. Il m’a appelé pour me dire : «Monsieur le maire, vous avez raison. Moi, je vous avais écouté. Moi-même, l’Onas m’avait appelé pour me dire de venir retirer la caution de 20 000 francs que j’avais payée pour mon branchement social.» 
A Thiès, ils ne font qu’un kilomètre et quelques d’adduction pour le compte du directeur commercial de l’Onas qui y habite.
Ces fils de Thiès-là, est-ce que Thierno Alassane Sall en fait partie ?
Mais  les décisions importantes se prennent où, en Conseil des minis­tres avec le président de la Répu­blique, en présence de ses ministres. Vous savez aujourd’hui, on a deux ou trois ministres thiessois au gouvernement et qui prétendent aimer Thiès. Ils doivent apporter quelque chose à Thiès. Leur premier devoir devait être de dire : «Monsieur le président de la République, Thiès connaît des difficultés liées à tel, tel, ou tel contexte, qu’est-ce que l’Etat peut faire ? » Un jour, je l’interroge sur les chantiers de Thiès. Je lui dis : «Mais Thierno, c’est le président de la République, lui-même, qui avait promis entre les deux tours d’achever les chantiers de Thiès, qu’est-ce que tu en dis.» Il m’a répondu : «Oui, vous savez monsieur le maire, malheureusement au niveau des infrastructures, je n’occupe que les bâtiments.» Ce qui est quand même léger comme réponse. Vous êtes ministre de la République en charge  des Infrastructures, un des départements les plus importants du gouvernement du Sénégal. Vous êtes de Thiès, responsable politique, votre premier rôle devait être de dire : «Monsieur le Président, vous avez pris un engagement politique à Thiès, aidez-nous donc à le respecter.»
Peut-être qu’il attend d’être maire pour le faire…
Vous savez, il ne sera jamais maire de Thiès. (Rires). C’est la vérité. Thierno ne peut pas gagner. Même dans son bureau de vote. Il faut le noter, on va même le battre dans son bureau de vote. On le bat dans son bureau de votre, dans son centre, dans sa commune d’arrondissement, dans la ville. 
Ils ont les moyens…
Mais les moyens n’ont jamais fait gagner Thiès. Il faut le demander à Abdoulaye Wade. Donc, c’était cela le débat premier. Malheureusement, ils sont dans des querelles de positionnement. Or, ils ne savent pas que ce que les Thiessois attendent d’eux c’était ceci,  au-delà des clivages politiques, de dire : «Ok, notre ville a besoin de tant. Nous, on a la chance de siéger au gouvernement, on va essayer.» Avec cela, les Thièssois auront au moins…
Les gens considèrent votre parti comme celui capable de s’opposer au régime ou à la coalition au pouvoir actuel. Est-ce que vous vous préparez à cela, c’est-à-dire être la première force d’opposition au Sénégal ?
En tous cas, qu’on le dise, qu’on l’incarne ou non, nous sommes la première force -à mon avis- politique de l’opposition.
Sur quelle base ?
Sur la base des leaderships qui se dégagent. Le leadership de Idrissa Seck s’impose par rapport à tous les autres qui se dégagent sur l’échiquier politique. Au niveau du Pds, je ne pense pas qu’ils aient quelqu’un qui puisse égaler Idrissa Seck sur le plan du leadership, du charisme et de la représentativité. 
Dans d’autres partis, je ne vois pas également de leadership qui se dégage en-dehors de quelques partis. Et là, je ne pense pas que même aujourd’hui, ils aient les moyens politiques et financiers de s’imposer comme alternative par rapport à Macky Sall.
Et vous, vous en avez ?
On en a.
Quels sont-ils ?    
Les moyens sont assez divers. Ce sont des moyens humains, nous avons un parti très représentatif et structuré, les moyens logistiques on en a aussi. Financiers, je n’en parle pas, parce que je ne m’en occupe pas, c’est plutôt Idrissa.
Est-ce que vous prenez en compte que, depuis 2007, à chaque échéance électorale, le score de Idrissa Seck est en baisse ?
Le score de Rewmi baisse à cause d’un environnement et d’un contexte assez particuliers. Moi j’étais avec Idrissa Seck en 2007 et j’étais le seul responsable de sa caravane, le seul politique. Dès le début de la campagne, j’ai su mesurer le potentiel de Idrissa Seck. Je le taquine souvent en lui disant : «Tu devais être Président en 2007. En 2007, tu devais être élu.»
Et en 2012, il n’a pas été élu…
Non, en 2012, il n’a pas fait campagne. En 2012, on n’a pas été élus parce qu’on n’a pas fait campagne. Nous avons tous suivi ce qui s’est passé, parce que la bataille, à notre avis, qu’il fallait mener et qu’on a tous menée, c’était le départ de Wade. La violation de la Constitution était, à mon avis, la principale bataille et on l’a réussie en le dégageant. Une fois qu’il est hors de course on peut, maintenant, se préparer à aller.
Si vous l’avez réussie, c’est grâce à Macky Sall parce qu’il a mené campagne contre Wade.
Non, ce n’est pas grâce à Macky Sall, c’est toutes les forces vives de la politique qui se sont mobilisées pour faire partir Wade.
Mais est-ce qu’aujourd’hui, vous ne regrettez pas votre stratégie de 2012 ?
Non parce que, pour nous, on a gagné. On a gagné simplement, de la victoire des forces vives sur Abdoulaye Wade. Abdoulaye Wade a voulu faire un forfait, le Peuple sénégalais a dit non au plus fort, avec des morts, avec tout ce qu’on a vécu comme dégâts.
Vous faites de la politique ou de l’angélisme ?
Non, non, non, du tout. Il est parti et c’est le plus important. Macky Sall est là et, maintenant, rebelote ! On se prépare à nouveau pour solliciter le Peuple sénégalais et ça sera en 2017. Et on est prêts.
Alors qu’il est à l’extérieur du pays.
En dehors du pays, oui. Wade a fait plus d’un an et demi à l’étranger. Il est arrivé en 1999, pour 6 mois de préparation de campagne, et il a gagné.
Idrissa Seck était l’invité de Rfm, l’année dernière le 25 mars, il disait qu’il allait suivre, qu’il avait compris qu’il était un peu éloigné des populations. Aujourd’hui, est-ce qu’il a tiré les leçons ?
Il a tiré les leçons, je pense. Vous avez suivi ses déplacements à l’intérieur du pays, vous avez vu comment, peut-être, il a su changer d’approche. Et il n’a jamais été très distant. Seulement, il a une approche assez particulière : le silence qui est une force aussi. Il faut le reconnaître. Il parle au bon moment. Il nous dit souvent : «En politique, ce qui est le plus important, c’est de savoir le bon moment de l’action et de la parole.» 
Sauf que jusque-là, ça ne lui a pas servi à grand-chose…
Si pourtant. Pour moi, il reste encore l’homme politique le plus populaire, le plus silencieux, et sur qui…
Et qui, d’une élection à une autre, recule en termes de suffrages…
Je relativise beaucoup parce que je connais le potentiel de Idrissa Seck. Je connais également ses limites et ses contraintes par rapport à ces élections-là qui ont été à l’origine de la baisse, je peux même dire, de son score. C’est pourquoi, on dit à nos amis de Benno bokk yaakaar : «Vous ne pouvez pas vous fier au score de Idrissa Seck en 2012 pour dire que ce sont là des bases de critères de répartition.» Ça ne reflète pas son vrai potentiel. Pour quelqu’un qui n’a pas fait campagne, qui est resté à Dakar, qui n’a même pas fait campagne à Thiès. C’est moi qui dirigeais les caravanes dans le département, il a gagné huit Collectivités locales sur les quinze. 
Mais M. Diattara, vous oubliez qu’en 2009, lors des élections locales, à Thiès même, Idrissa Seck a reculé sur son score par rapport aux Locales précédentes. C’est une logique aussi bien au niveau local qu’au niveau national. Le score de Idrissa Seck a chuté au niveau national de 2007 à 2012. Aux élections locales de 2009, Idrissa Seck a eu moins de suffrages qu’il n’en a eus lors des élections de 2002.
Les contextes diffèrent. En 2002, Idrissa Seck, directeur de cabinet de Wade, Premier ministre, se présente aux élections.
Il était handicapé par cette posture ?
Naturellement !
Mais en 2009, il n’était plus dans cette posture et il a eu moins de suffrages qu’en 2002. C’est un peu ça l’incohérence de cette explication. Si vous voulez expliquer qu’en 2002, Idrissa Seck était directeur cabinet de Abdoulaye Wade et qu’il avait une posture qui ne lui permettait pas d’être perçu d’un bon œil par la population. En 2009, il était dehors, un opposant pur et dur et, malgré tout, son suffrage a chuté. A l’élection présidentielle, les scores réalisés par Idrissa Seck à Thiès étaient inférieurs à ceux réalisés à Thiès en 2009. Et donc c’est une courbe descendante. Comment expliquez-vous qu’aujourd’hui, Idrissa Seck reste le chouchou et que ça ne se traduit pas en suffrages ?
Je veux dire qu’en 2009, Idrissa Seck n’est même pas venu à Thiès. Il est venu une seule fois pour une marche orange, faire un petit tour et il est rentré sur Dakar. Malgré cela, il a quand même gagné Thiès avec un score assez important. Au niveau des collectivités locales, on a gagné les huit sur les quinze. On a gagné les communes. On a gagné d’autres communautés rurales, sans même qu’il ait fait le déplacement. En 2009, il avait perdu Ndondo. C’est Alioune Sarr, qui est le Pcr, qui l’avait gagné. En 2012, on l’a gagné. 
Keur Moussa que dirige le Pcr Momar Ciss, on l’a gagné en 2012 sans que nous ne fassions campagne là-bas, alors qu’il l’avait perdu en 2009. C’est pourquoi je dis qu’il faut relativiser. En 2009, on avait 36 000 voix pour gagner la collectivité de Thiès. Aujourd’hui, rien que nos ventes de cartes nous placent à 40 000 voix sans compter ceux qui n’achètent jamais de cartes politiques et qui vont voter pour Idrissa Seck quand il se présentera en 2017.
Le Pds a placé un million de cartes, le Ps autant…
Avec notre méthode, nous avons exigé une présence physique des électeurs, c’est pourquoi, nous n’avons pas annoncé des ventes de centaines de milliers de cartes. Idrissa Seck a été exigent. Il a dit : «Je préfère connaître le nombre exact de nos militants plutôt qu’on nous raconte qu’on a vendu des centaines de milliers de cartes alors que sur le terrain, ce n’est pas le cas. Je veux les chiffres réels.»
Alors, il a conscience que son score est en train de chuter ?
Il est conscient qu’il y a à peu près 200 000 militants qui lui ont tourné le dos entre 2007 et 2012, du fait d’une certaine distance, de quelques frustrations liées à son manque d’accessibilité et tout cela. Son objectif premier c’est de corriger ces dysfonctionnements, ramener ces 200 000 pour espérer avoir ces 500 000 militants qui est son stock de départ. Il va maintenant se battre pour 500 000 autres pour espérer être au second tour en 2017. 
Mais là où le bât blesse c’est que vous parlez de distance vis-à-vis des militants. Nous constatons que Idrissa Seck est de moins en moins au Sénégal. Ce fossé ne semble pas avoir été satisfait. C’est suite à cela que des icônes du parti sont parties. On parle de Youssou Diagne, Oumar Guèye, Nafissatou Diop Cissé, Pape Diouf, entre autres, qui sont à la limite les piliers essentiels de Rewmi du temps de leurs activités politiques. Est-ce qu’aujourd’hui tous ces faits ne semblent pas vous entraîner dans une descente aux enfers ?
Non, je ne parlerai pas de descente aux enfers. Ce qui est connu et partagé, ce sont les départs mais les arrivées ne sont jamais comptabilisées. Alors que, honnêtement, ce que je reçois comme adhésions, comme appels, comme Sms, comme mails d’adhésion dans ce parti de cadres, de jeunes, de femmes de partout dans le Sénégal, je ne peux pas le comptabiliser. 
Ce sont des gens connus ?
Ce sont des inconnus mais aussi des leaders émergents, des jeunes cadres qui aujourd’hui prennent de plus en plus l’engagement moral d’accompagner Idrissa Seck. A l’intérieur du pays, on en compte des centaines, à Dakar et partout. 
Ces départs sont naturellement regrettables. Ce sont des gens qui ont eu des parcours assez exemplaires avec Idrissa Seck. J’ai été témoin de cela. 
Depuis 1998, je suis dans son entourage. Je connais le parcours des uns et des autres. Par exemple, Pape Diouf avec qui il a préparé les élections de 2000 pour le compte du Pds. Il est un grand responsable, très bien introduit dans le Bambey. Nafissa­tou, c’était toujours la grande sœur dans le parti, mais pas une responsable politique. C’est comme ça je l’ai toujours considérée dans le parti. Je lui disais tout le temps : «Vous, vous êtes une sœur à Idrissa Seck.» Idrissa Seck l’avait intégrée dans le secrétariat, du fait de leur proximité. Peut-être qu’elle lui apportait un soutien moral. Sur le plan politique, elle ne lui apporte pas grand-chose. Je suis le commissaire politique à Kaolack. Donc, je sais ce que représentent les uns et autres à Kaolack. 
Pour Youssou Diagne, du fait de son parcours, de sa sagesse, on avait pensé qu’il devait être le sage du groupe. D’ailleurs, Idrissa Seck l’avait promu au poste de vice-président. 
Pour Oumar Guèye aussi, c’est vrai que sa représentativité n’est plus à démontrer. Et tout cela, c’est regrettable. 
Talla Diouf était parti bien avant les élections de 2007. Il avait rejoint Wade. Oui, c’est des symboles qui sont partis. Et il faut le reconnaître.
Parfois, vous n’avez pas l’impression d’être seuls à la table du bureau politique de Rewmi ? Toutes ces personnes étaient dans l’instance la plus élevée… 
Non, parce qu’au même moment, nous voyons l’arrivée de jeunes leaders, cadres, qui sont assez dynamiques. 
La liste commence à être longue... 
C’est vrai qu’elle commence à être longue, mais c’est la vie des partis politiques au Sénégal. Et je pense qu’il faut faire avec. Mais le plus important, c’est de ne pas être dispersés ou détendus par ces départs. Je pense que Idrissa Seck a eu un parcours assez exemplaire auprès de  Abdoulaye Wade. Il a vécu. Il me disait : «J’étais très proche de Abdou­laye Wade. Je l’ai vu souffrir de ces départs de Ousmane Ngom, etc.» 
A la veille des élections de 2000, tout l’entourage de Abdoulaye Wade était dégarni par le Parti socialiste. Malgré cela, il est arrivé au pouvoir avec un groupe de jeunes leaders comme Idrissa Seck, Lamine Bâ et autres. Pour moi, ce sera le même parcours pour Idrissa Seck. 
Aujourd’hui, il y a l’arrivée de jeunes cadres dans nos instances. Et je pense que c’est assez encourageant pour l’avenir. 


A suivre:http://www.lequotidien.sn/index.php/la-une2/6685-yancoba-diatarra-premier-adjoint-au-maire-de-thies--thierno-alassane-sall-ne-sera-jamais-maire-de-thies-