Fast backlinks and Guest-post hosting
Diverses raisons sont avancées pour expliquer la défaite des alliés de Macky Sall dans le Baol. Toutes les tendances données jusqu’ici le confirment. Benno Bokk Yaakaar, la coalition de Macky Sall, a été battue dans le département de Mbacké. Si d’aucuns parlent de défaite surprise, les observateurs avertis de la scène politique à Touba et environs s’attendaient sans doute à cette issue du scrutin de dimanche. C’est que le contexte et les circonstances n’ont pas beaucoup aidé les partisans du chef de l’Etat. Mais il y a surtout que dans le milieu maraboutique, mouride notamment, Macky Sall est sans doute le président le moins apprécié des quatre que le Sénégal a connus depuis l’indépendance.
Décryptage. L’Alliance pour la république (Apr) et ses alliés de Benno Bokk Yaakaar ont donc perdu le département de Mbacké. Historique parce que rare pour un parti au pouvoir. Pourtant, gagner dans le département de Mbacké ne semblait pas aussi compliqué pour un parti au pouvoir. D’autant plus que les voix obtenues à Touba, où une seule liste est présentée, donnent souvent une avance considérable pour le parti au pouvoir. Seulement, les alliés de Macky Sall n’ont pu profiter de cet avantage. Et dès l’annonce des résultats, les responsables du parti au pouvoir, mais aussi certains observateurs ont vite accusé Moustapha Cissé Lô d’en être le principal responsable. C’est que les turpitudes du désormais ex-coordonnateur de l’Apr dans le département de Mbacké ont porté préjudice au pouvoir de Macky Sall. Cissé Lô s’est, en effet, souvent illustré dans des conflits avec des dignitaires mourides. Et le dernier en date est cet incident avec Serigne Abdou Fatah Mbacké Falilou. Avant, il y a notamment eu la bagarre entre le député aperiste et Serigne Fallou Mbacké ibn Serigne Mbacké Sokhna Lô. C’était lors de la campagne pour la présidentielle de 2012, durant une visite de Macky Sall à Taïf. Résultat : ils sont nombreux à Touba et Mbacké à voter contre la liste du parti au pouvoir juste pour faire payer à Cissé Lô son «manque de respect». Surtout dans une zone où le respect et l’obéissance au guide constituent des valeurs sacrées. Mais il n’y a pas que les turpitudes de Cissé Lô qui expliquent cette défaite de la coalition au pouvoir. Dans de nombreux cercles religieux - dans la communauté mouride surtout, le pouvoir de Macky Sall n’est que très peu apprécié. Même si l’on se garde de le manifester publiquement. Et de nombreux malentendus ont pu conduire à cette situation.
Tout est parti en fait de cette déclaration du candidat Macky Sall qui, au cours d’une conférence de presse entre les deux tours de la présidentielle de 2012, disait des marabouts qu’ils étaient des «citoyens comme tous les autres». Il est vrai que rares sont les marabouts qui ont eu à fustiger ces propos en public, mais selon certaines confidences, ils n’ont que très peu apprécié cette sortie. Mais il y a eu aussi qu’après l’installation de Macky Sall à la tête du pays, des évènements se sont succédé tendant tous à créditer la thèse selon laquelle le nouveau régime avait une entreprise de décrédibilisation de la classe maraboutique. L’on cite notamment l’arrestation de Cheikh Béthio Thioune dans l’affaire dite du double meurtre de Médinatoul Salam, le différend entre les héritiers de Serigne Saliou Mbacké et le milliardaire nigérian Dangotte. «L’entourage de Macky n’a pas bonne presse» En outre, il y a dans l’entourage de Macky Sall, des gens qui, comme Moustapha Cissé Lô, n’ont pas bonne presse auprès de la classe maraboutique. Parmi eux, on cite Souleymane Jules Diop, conseiller en communication du chef de l’Etat.
A Touba, on n’a toujours pas pardonné à Souleymane Jules Diop ses chroniques sur Seneweb au cours desquelles il s’en prenait à des marabouts comme Serigne Modou Kara, Serigne Abdou Aziz Sy Junior, mais aussi Serigne Bara Mbacké Falilou alors Khalife général des mourides. Souleymane Jules Diop aura beau crier sa mouridité (il a fait acte d’allégeance auprès de Serigne Cheikh Khady Mbacké de Darou Mousty), sa côte de popularité est des plus faibles dans le milieu maraboutique. A côté de Souleymane Jules Diop, il y a Abdou Latif Coulibaly, ministre porte-parole du gouvernement, avec sa récente sortie dans l’affaire Dangotte. Un petit-fils de Serigne Abdou Ahad confirme et va plus loin : «Ce n’est pas la première fois. Quand Abdou Diouf a déclassifié la forêt de Khelcom pour le donner à Serigne Saliou, le même Latif avait écrit pour le dénoncer. Ces gens-là n’ont pas bonne presse». Des propos qui en disent long sur le fait que, dans le milieu maraboutique, nombreux sont ceux qui ont la conviction qu’au sein du régime de Macky Sall, il y en a qui leur en veulent. Et les écrits de Latif Coulibaly ne font que les conforter dans leur conviction. En effet, dans son livre, «Une démocratie prise en otage par ses élites», publié il y a quelques années, Latif Coulibaly donnait le ton en minimisant «le poids des chefs religieux dans le cours des scrutins électoraux» qu’il jugeait «assez marginal».
L’actuel ministre de la Bonne gouvernance était même allé plus loin en écrivant : «C’est la quête permanente de prébendes qui structure presque tous les discours des guides religieux musulmans qui offrent sans relâche leurs services. (…) Ils apparaissent comme des courtiers infatigables de l’Islam auprès des politiques, ils sont souvent des rentiers avides de biens de consommation.» Plus loin dans son essai politique, il ajoute : «Ici au Sénégal, les Cheikh ou guides organisés sous le modèle des ordres soufi vivent le plus souvent aux crochets de leurs disciples, les exploitent, plutôt que de les nourrir.» Vrai ou faux ? En tout cas, il est certain que de tels écrits et propos sonnent forcément dans les oreilles des guides religieux et surtout de leurs talibés au moment de choisir le bulletin à mettre dans l’enveloppe. Macky Sall et sa coalition en ont fait l’expérience dimanche dernier. Et le chef de l’Apr risque de payer une note encore plus salée à la prochaine présidentielle.
Moustapha DIOP
SOURCE:http://www.walf-groupe.com/actualites/politique/1556-chronique-d-une-defaite-historique