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Aussi symptomatique qu’elle parait, l’implosion qui menace la majorité présidentielle Bennoo Bokk Yaakaar n’est pas spécifique dans la vie des coalitions politiques au Sénégal. Portées sur les fonts baptismaux, pour la plupart, sur la base d’intérêts électoralistes, presque jamais programmatiques, les coalitions mises en place pour accéder au pouvoir ont toujours eu du mal à résister aux ambitions présidentielles des uns et des autres, au jeu de dupes ou autres manœuvres ourdies pour plomber les ailes de l’allié d’aujourd’hui mais ennemi d’hier. FAL 2000, CAP 21, FAL 2012, BBY… Des alliances «fourre-tout» et/ou « contre-nature» qui dominent le champ politique, de l’Alternance de 2000 à nos jours.
L’histoire des coalitions politiques, de 2000 à nos jours, démontre à suffisance que les partis politiques ne s’allient pas simplement dans un souci de préserver des appartenances idéologiques, ou même de répondre à de répondre à des accointances programmatiques. Au contraire, les alliances politiques s’opèrent dans notre pays, presque toujours, pour régler des objectifs électoralistes. L’accession d’Abdoulaye Wade au pouvoir, en 2000, en est un exemple significatif.
Le 19 mars 2000, le Sénégal avait connu en effet sa première alternance politique. Après 26 années d’opposition, le patron du Pds était élu à la magistrature suprême, à l’issue du 2e tour du scrutin présidentiel avec 58,49% des suffrages. Cette première alternance
politique a été rendue possible, grâce à une forte coalition dénommée Front pour l’Alternance (regroupant la coalition Alternance 2000 organisée autour d’Abdoulaye Wade, et la Coalition de l’espoir 2000 (Code 2000 And Defaraat Senegaal) dirigée par Moustapha Niasse). Dans le FAL 2000, on retrouvait le Pds, la Ld/Mpt, le Pit, And-Jef/Pads, voire le Msu ou autre Udf/Mbooloomi. Bref, des partis de différentes obédiences dont le seul souci était de déboulonner le Président Abdou Diouf, héritier de Léopold Sédar Senghor.
La coalition présidentielle fit toutefois long feu. Le Président Wade qui avait tiré totalement profit de l’alliance qui l’a mené au pouvoir se débarrassa en effet très vite de l’ancien Socialiste Moustapha Niasse, alors Premier ministre, pour exercer le pouvoir avec son parti seul. Idrissa Seck, numéro 2 du Pds, était élu à la Primature.
Me Wade, maître du jeu
politique, démontrait par là qu’au Sénégal, les alliances politiques sont des compagnonnages « contre-nature » mises en place pour défendre des intérêts purement politiciens et électoralistes. Qui plus est, elles ne se préoccupaient généralement pas des intérêts des populations, mais plutôt de ceux des chefs des partis qui les composent. En substitution, le patron du Pds activait, le 25 août 2001, la Convergence des actions autour du président de la République (Cap 21) qui voyait le jour avec près de 25 partis venant de tous bords, du libéralisme à la gauche, en passant par le nationalisme.
L’élection présidentielle de 2007 arrive dans un contexte de forte recomposition
politique marquée surtout par le ralliement de responsables du camp défait en 2000 (Djibo Kâ par exemple) vers la coalition victorieuse. Et vice-versa, des militants de la mouvance présidentielle arrivée au pouvoir en 2000 (Idrissa Seck, Moustapha Niasse et Abdoulaye Bathily) se retrouvent dans l’opposition. Ils affrontent le président sortant Abdoulaye Wade à la présidentielle de février 2007. La Cap 21 allait permettre au Président Wade de remporter les élections.
BENNOO : L’AUBERGE ESPAGNOLE
L’opposition en tire toutes les conséquences et met sur pied Bennoo Siggil Senegaal (regroupement de formations de divers horizons également et de mouvements opposés à Wade) pour prendre sa revanche aux Locales de 2009. Mais l’euphorie de 2009 explose à la veille de la présidentielle de 2012. Sous le jeu de leurs ambitions présidentielles personnelles, les principaux leaders de Bss récusent la candidature unique.
C’est la scission avec cette crise de leadership: Moustapha Niasse récupère Bss avec ses alliés, Ousmane Tanor Dieng met en place Bennoo ak Tanor, Idrissa Seck densifie Rewmi d’une panoplie de partis miniatures et de mouvements de soutien.
En face, Me Wade qui brigue un troisième mandat contesté s’adosse aux Forces alliées 2012 (Fal 2012), une coalition patchwork d’environ 80 partis politiques et mouvements de soutien. Au second tour de la présidentielle devant opposer Me Wade à son ancien Pm Macky Sall, une autre coalition tout aussi hétérogène est portée sur les fonts baptismaux. Bennoo Bokk Yaakaar unifiait la coalition Macky 2012 qui portait la candidature du challenger de Me Wade, au premier tour, à l’ensemble des adversaires du Pape du Sopi, à cette échéance électorale. Le Pds et alliés perdront le pouvoir, après douze années de règne au profit de Macky Sall et de la coalition Bennoo Bokk Yaakaar.
Véritable auberge espagnole bâtie autour de la défaite électorale de Wade, la nouvelle majorité présidentielle est aujourd’hui au bord de la rupture, comme ses devancières. Le choc des ambitions ayant fini de s’afficher ouvertement dans l’arène politique, à quelques encablures de 2017, les déclarations de candidature sonnant un peu partout, une nouvelle reconfiguration
politique se profile de plus en plus, préfigurant l’éclatement de la coalition bâtie sut tout, sauf sur des bases programmatiques.
Suffisant pour que certains acteurs politiques, à l’image de l’ancien ministre libéral Thierno Lô, nouveau reconverti apériste, ne déclame que «les coalitions politiques hétéroclites sont un vrai drame pour le Sénégal», voire qu’elles doivent « se faire autour de programmes à appliquer, une fois au pouvoir, afin d’éviter les cacophonies ».
source:http://www.sudonline.sn/le-jeu-des-alliances-impossibles_a_22381.html