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La campagne arachidière 2013-2014 avait démarré timidement sur l’ensemble du territoire, selon le constat d’une équipe du Soleil, qui a visité plusieurs localités du Sénégal. Le refrain est le même, l’implication tardive des industries de l’huilerie a eu un impact négatif sur le début de la campagne. Les huiliers estimaient, en effet, que le prix officiel de 200 FCfa était hors de leur portée. Il a fallu un accord avec l’Etat pour qu’ils acceptent de jouer leur partition. Par ailleurs, les opérateurs privés stockeurs ont été confrontés à un problème de financement.
Par Seydou Prosper SADIO, Adama MBODJ (textes) et Ndèye Seyni SAMB (photos)LA DÉSILLUSION ÉVITÉE DE JUSTESSE DANS LE NDIAMBOUR
L’inquiétude perceptible dans le monde rural au début de la campagne arachidière a cédé la place à l’espoir, après les efforts consentis par l’Etat et les huiliers. Le mouvement des graines des champs vers les points de vente appelés « seccos » est devenu une réalité, même si le manque de financement a plombé l’activité par endroit. A Louga, une immersion dans l’ambiance des opérations de collecte a permis de mesurer les difficultés que rencontrent, en ce moment, les acteurs de la filière.
A chaque campagne agricole, son lot d’incertitudes, d’espoirs fondés ou déçus, de vérités également. Celle de cette année n’a pas fini de bouleverser toutes les données des opérations de commercialisation de la principale culture de rente du Sénégal. Les difficultés que connaissent certains ruraux pour écouler leurs graines d’arachide, le retard enregistré par les huiliers à s’impliquer, au début, dans la campagne avec comme corolaire le bradage des graines dans les marchés parallèles, un phénomène appelé par les producteurs « mbapatt » (en référence aux séances de lutte traditionnelle), en wolof, avaient fini de semer le doute sur le bon déroulement de la campagne.
L’heure n’est pas certes au bilan mais force est de reconnaître que les difficultés sont encore perceptibles dans la plupart des points de collecte ouverts par l’Etat. Le financement de la campagne a souffert du manque de fonds et de crédits bancaires de la part des opérateurs privés stockeurs (Ops) agréés par l’Etat. La région de Louga n’a pas échappé à cette donne. Il s’y ajoute les lenteurs enregistrées dans l’évacuation des graines qui ont hanté le sommeil des acteurs. Dans cette partie du Sénégal, le retard des pluies et leur arrêt précoce avaient eu des répercussions dans la production durant la campagne agricole. Plusieurs localités ont été considérées comme zones de sinistre à cause de la mauvaise pluviométrie. C’est le cas des arrondissements de Mbédiene, Saakal, Coki, Léona, entre autres. Dans ces localités, les récoltes n’ont pas donné les résultats escomptés. Nombre de producteurs doutent même de la qualité variétale et de la densité de la 55, principale variété cultivée dans la zone.
Seules 2.000 tonnes collectées en fin janvier
Sur le terrain comme chez les techniciens, il a été reconnu que la présente campagne n’a pas encore connu les folles ambiances de récolte qui rythmaient, jadis, la vie dans cette région. Le démarrage a été non seulement timide comme l’a indiqué Bara Cissé, de Force paysanne, mais aussi le bradage des graines à travers le « mbapatt », a été très préjudiciable dans les zones de productions.
Et pourtant, la région dispose, cette année, de 90 points de collecte ouverts pour la circonstance. N’empêche que les opérateurs véreux continuent d’acheter les graines sur le marché parallèle, a déploré Momar Syll Yatou, un des opérateurs agréés de la région. Représentant de la confédération nationale des opérateurs privés stockeurs, Momar Syll déplore non seulement le système de répartition des quotas attribués à chaque opérateurs mais aussi les lenteurs enregistrées dans le décaissement des fonds au niveau des banques notamment à la Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal (Cncas). D’ailleurs, il estime que c’est le manque de financement qui plombe, en ce moment, le bon déroulement des opérations sur le terrain. Et face aux difficultés qu’ils rencontrent et aux réalités du quotidien, nombre de producteurs préfèrent écouler leurs récoltes sur le marché parallèle.
A Diélérou Syll, à sept kilomètres de Louga, où il est en train de stocker les graines, Momar Syll estime que l’Etat doit non seulement veiller à la mobilisation à temps des fonds de campagne pour l’achat des graines mais aussi à la qualité des semences. Cette année, notre interlocuteur estime qu’il fait face à sa plus mauvaise campagne arachidière dans la région de Louga. Les chiffres qu’il avance peuvent également confirmer cet état de fait. En effet, sur un besoin de 1.000 tonnes à collecter en termes de semences écrémées, Momar Syll, n’a pas encore dépassé les 170 tonnes, à la date du 29 janvier.
Et pourtant cette situation est loin d’être assimilée au manque d’expérience car, l’homme évolue dans la filière de collecte des semences depuis plus de 25 ans. Il ne désespère pas pour autant car, comme il le soutient, le décaissement de la seconde vague de financement de la part du Cncas pourrait contribuer à décanter la situation.
TIMIDE DÉMARRAGE À LA SUNEOR DE LOUGA
La morosité qui sévit dans les lieux de stockage des semences écrémées sur l’étendue de la région de Louga n’a pas épargné aussi la Suneor. Le rythme d’évacuation des graines vers l’usine est loin d’être soutenu à notre passage à Louga. Les camions se font encore désirer aux alentours de l’usine.
A la Suneor de Louga, ce n’est pas encore le grand rush. L’établissement régional ouvert uniquement pour la collecte des graines tarde à renouer avec les grandes ambiances de campagne. Aux alentours de l’usine, c’est le calme plat. Les files indiennes de véhicules qui marquaient jadis le décor ont cédé la place au mouvement de calèches. Ici, on ne sent pas encore la campagne. Seul un camion déversait ses graines à notre passage. Le pont bascule, lieu de pesage des graines, attend désespérément les véhicules en provenance des zones de production. Dans l’enceinte de l’usine, seul un ouvrier s’active sur son engin pour traiter les premières quantités de graines déjà déversées. Le démarrage des opérations de collecte est encore timide à la Suneor de Louga, a souligné Moustapha Diouf, chef du personnel. L’unité a pourtant commencé à recevoir des graines, comme on a pu le constater dans un des hangars de l’usine. Plusieurs raisons ont été avancées pour justifier cette situation.
En effet, selon le préposé à la réception des graines, Ibrahima Diop, cela peut être dû au retard de la Suneor à s’impliquer dans la campagne de commercialisation. Il suffit d’interroger les statistiques pour mesurer l’ampleur du phénomène. Si l’année dernière, à la même période, la Suneor de Louga, avait déjà réussi à collecter environ 4.000 tonnes de graines, l’établissement n’a enregistré que 75 tonnes d’arachide. Ici également, on indexe le déficit de production dans les champs et surtout le fait que les opérateurs traditionnels de la Suneor ont été agréés comme opérateurs semenciers. Une mue qui n’a pas été sans conséquence pour la Suneor. Il y a également la rigueur qui prévaut à la collecte des graines pour éviter de livrer des tout-venants comme semence aux producteurs, a souligné M. Diouf. En termes de semence, l’usine de Louga n’avait enregistré que cinq tonnes de graines écrémées à notre passage.
LE SPECTRE DES BONS IMPAYÉS PLANE À NOUVEAU SUR LE BASSIN ARACHIDIER
Malgré l’implication effective des huiliers dans la commercialisation des graines, les opérations peinent encore à trouver des financements auprès des banques. Dans le Ndoukoumane, les producteurs sont obligés de recourir aux dépôts dans les différents points de collecte, laissant ainsi planer le phénomène des bons impayés.
Jusqu’en fin janvier dernier, seuls sept opérateurs sur les 29 attributaires d’agréments de l’Etat dans le département de Birkelane avaient réellement démarré les activités de collecte. Malgré l’implication des huiliers sur le terrain, le département de Birkelane éprouve encore d’énormes difficultés à écouler sa production. Ici, d’importantes quantités de graines sont toujours détenues par les producteurs, comme l’a indiqué le chef du service départemental de l’agriculture, à Birkelane, Mbagnick Sène. Sur le terrain, les transactions parallèles que les acteurs appellent « mbapatt » se poursuivent dans les marchés hebdomadaires à des prix aux producteurs inférieurs à celui fixé par le Conseil national interprofessionnel de l’arachide (Cnia).
Ils tournent souvent entre 160 FCfa et 170 FCfa, selon les aléas du milieu. « Ce qui constitue un véritable préjudice pour les producteurs dans un département aussi stratégique que Birkelane », a déploré le chef du service départemental de l’agriculture. Dans cette partie de la région de Kaffrine, le manque de financement est aussi une réalité. Aucun point de collecte ne dispose de fonds pour poursuivre les opérations, nous renseigne-t-on. Une situation qui a fini de pousser les producteurs à acheminer leurs graines vers des dépôts provisoires dans l’espoir de tomber sur un quelconque opérateur. « A l’heure actuelle, toutes les graines emmagasinées ici ne sont que des dépôts », a souligné le responsable du « secco » de Birkelane, Sory Keita. Pour nombre de producteurs rencontrés, la situation risque de faire resurgir à nouveau le phénomène des bons impayés que le monde rural avait connu dans un passé récent, si l’on n’y prend garde. Ils attendent désespérément la seconde vague de financement de la part des banques pour lever la hantise et inverser la tendance actuelle.
Une ardoise de 414 millions de FCfa due aux producteurs
C’est aussi la même situation qui prévaut dans la collecte des semences d’arachide écrémées. En effet, dans le Birkelane, en dépit de la poursuite des opérations, le phénomène des dépôts affecte aussi la collecte des semences écrémées. Sur 8492,2 tonnes de semences collectées, 2072,2 tonnes l’ont été sur la base de dépôts, c'est-à-dire des graines collectées et non encore payées aux producteurs. Soit environ 24,4 % du tonnage collecté. Selon les informations reçues auprès du service départemental de l’agriculture, à Birkelane, déjà les opérateurs trainent une dette de 414.449.600 FCfa aux producteurs. C’est sans doute cette situation qui a poussé l’un des plus grands opérateurs du département, Maodo Sarr, à suspendre la réception des graines au centre de groupage de N’Guissame. A la date du 5 janvier dernier, la quantité de graine collectée ne dépassait guère les 4900 tonnes dans ce point de collecte.
LES ORGANISATIONS PAYSANNES LAISSÉES EN RADE DANS LE BAOL
L’Union régionale des coopératives agricoles de Diourbel (Urcad) ne s’est pas engagée, cette année, dans la campagne arachidière. Le manque de financement et l’implication tardive de la Suneor, principale partenaire de l’Urcad, seraient à l’origine de cette situation comme l’a laissé entendre un des responsables de producteurs de Diourbel.
L’implication tardive des huiliers, en particulier de la Suneor, dans la campagne arachidière et les difficultés financières seraient à l’origine de la non implication des organisations paysannes du Baol dans la présente campagne arachidière. Principale organisation faitière dans la région de Diourbel, l’Union régionale des coopératives agricoles de Diourbel (Urcad) ne s’est pas impliquée cette année dans la commercialisation de la graine.
Pour Gora Diallo, assistant du directeur régional de l’Union, l’Etat doit accorder une attention particulière aux organisations de producteurs afin de mieux prendre en compte les préoccupations des paysans. « Les opérateurs privés ne travaillent que pour leur propre compte » a-t-il souligné. M. Diallo n’y va pas avec le dos de la cuillère pour faire savoir que le système actuel ne fait qu’enrichir des privés et non les producteurs et les organisations paysannes.
Revenant sur les raisons de leur non implication dans la campagne, il estime que cela est due en partie à l’entrée tardive de la Suneor, leur principal partenaire financier dans la collecte des graines, et au manque de financement de la part des banques. « Nous n’avons pas de moyens pour accéder aux crédits bancaires », se désole-t-il. Cette année, à cause de ces facteurs, l’Union régionale des coopératives agricoles de Diourbel a été laissée en rade.
Pour inverser la tendance, ses responsables tendent la main à l’Etat pour revoir l’organisation de la campagne et le système de gestion des fonds de garantie alloués à celle-ci, comme le revendique Gora Diallo. « De 2000 à 2012, l’Urcad n’a reçu aucun programme de l’Etat », a-t-il déploré. A l’image de ses camarades réunis au sein des organisations faitières, il estime que l’Etat doit mettre en place une politique qui impliquerait davantage les organisations paysannes, dans le déroulement de la campagne agricole.
S. P. SADIO et A. MBODJ
IMPLICATION TARDIVE DES HUILIERS ET DÉFICIT DE FINANCEMENTS
Près de deux mois après son démarrage, la campagne de commercialisation arachidière a tardé à atteindre sa vitesse de croisière. Les producteurs restent partagés entre crainte et espoir. L’entrée tardive de certains huiliers n’a pas encore fait l’effet escompté.
Partout, la complainte est la même. La campagne va mal. Démarrée depuis le 09 décembre, l’opération ne connaît pas encore d’intensité. Les premiers fonds reçus de la Caisse nationale de crédit agricole (Cnca) sont épuisés et les décaissements complémentaires tardent à se faire afin de permettre à certains opérateurs de poursuivre la collecte. De Louga à Diourbel, en passant par Kaffrine et Kaolack, la zone arachidière par excellence, le constat est le même. Des magasins de stockage à moitié vides traduisent la morosité de la campagne. Bara Diouf, un producteur de Louga et membre de Force paysanne, analyse amèrement la situation. « Pour moi, il n’y a pas de campagne cette année. Jusqu’au 15 janvier dernier, les opérateurs n’ont pas reçu de l’argent et ceux qui en ont, s’orientent vers les marchés parallèles pour acheter les graines à vil prix », se désole-t-il.
Dans le département de Louga, zone déclarée sinistrée à cause des mauvaises récoltes, la situation semble plus désolante. « Nous avons cultivé, mais malheureusement nous n’avons pas récolté. Nous sommes obligés d’aller chercher des graines ailleurs, dans les autres régions comme Kaolack ou Kaffrine sinon nous risquons de ne pas avoir de semences pour la prochaine saison agricole », indique Momar Syll dit Yatou. Cet opérateur semencier affirme avoir déjà épuisé le financement de 40 millions de FCfa qu’il avait reçu de la Cnca. «J’avais demandé un financement pour un quota de 1000 tonnes, mais je n’ai reçu que 40 millions. Avec cette somme, je ne peux même pas avoir plus de 200 tonnes. Nous attendons toujours les deuxièmes décaissements », indique Yatou. Au moment de notre passage, le 29 janvier passé, il n’avait réussi à collecter, dans la région de Louga, que 170 tonnes de graines. A Coki, le seul magasin de stockage de la localité ne fait pas non plus exception. Aucune activité sur les lieux. Et pourtant, la localité connaissait, jadis, une bonne ambiance à pareil moment, témoigne Amadou Makhtar Mboup, conseiller agricole. « D’habitude, le magasin était rempli et nous étions obligés même de stocker dehors, mais cette année il n’y a pas eu de bonnes récoltes », regrette M. Mboup.
Du côté de la Suneor de Louga, le grand écart noté sur les statistiques illustre, sans doute, l’important déficit en graines dans la région. «D’habitude, on devait être à plus de 8000 tonnes car si la campagne marche bien, on réceptionne jusqu’à 150 voire 200 tonnes par jour. Mais cette année, nous avons même connu des journées mortes durant lesquelles aucun camion n’a été enregistré », soutien Ibrahima Diop, responsable de réception des graines à l’usine. A la date du 29 janvier 2014, les quantités de graines réceptionnées tournaient autour de 75 tonnes.
Dispositif de suivi des points de collecte
Nonobstant ces difficultés, le directeur régional du développement rural (Drdr) de Louga, Oumar Mbengue, se veut optimiste. Selon lui, à la suite du protocole signé entre l’Etat et les huiliers pour permettre à ces derniers de bénéficier de financements afin de relever le niveau des achats, un comité régional de développement a été organisé avec l’ensemble des acteurs. Ce qui a permis de renforcer le dispositif de suivi dans les points de collecte. Cela, poursuit-il, a permis d’avancer sur la campagne et de porter le niveau de collecte dans la région à 2000 tonnes, à la date du 29 janvier 2014. «Le service régional fait régulièrement le suivi de la situation, relève les difficultés et fait des recommandations à la direction centrale pour que les corrections nécessaires soient apportées », nous apprend également M. Mbengue. A en croire ce dernier, il y avait, au départ, quelques problèmes entre la Suneor et les opérateurs. Mais certains opérateurs qui se trouvaient dans l’impossibilité de collecter et d’évacuer les graines ont été financièrement renforcés. Il reconnait toutefois que ce n’est pas tous les points de collecte qui sont fonctionnels dans la région.
Les décaissements effectués à la Cnca sont également bien suivis pour vérifier si les opérateurs bénéficiaires achètent effectivement dans les points de collecte.
De manière générale, indique M. Mbengue, les choses commencent à évoluer et un dispositif de veille est mis en place contre les fraudeurs afin de sécuriser les stocks.
S. P. SADIO et A. MBODJ
LES PREMIERS DÉCAISSEMENTS DÉJÀ ÉPUISÉS DANS LE BASSIN ARACHIDIER
Du Ndiambour au bassin arachidier, en passant par le Ndoucoumane, les acteurs de la filière arachide ont été unanimes à reconnaître que le problème du financement reste la principale équation dans cette campagne. Dans la région de Kaolack, par exemple, ils estiment que l’épuisement des premiers décaissements a été à l’origine du bradage des graines dans les « loumas » (marchés hebdomadaires).
Dans le Saloum, même si l’organisation de la campagne a été allégée avec l’arrêt du système carreau-usine de la Suneor, l’évacuation des graines vers les points de collecte n’a pas encore atteint sa vitesse de croisière. En effet, seuls 30 % des points de collecte ouverts par l’Etat ont fonctionné sur les 170 que compte la région pour environ 15.370 tonnes de graines collectées. Ce tonnage concerne aussi bien la collecte des semences écrémées et certifiées mais aussi celle des graines destinées aux huiliers, a indiqué le directeur régional du développement rural de Kaolack, Falilou Faye.
La morosité qui affecte le déroulement de la campagne est due, selon lui, à la rupture d’argent notée dans les différents points de collecte ouverts pour la circonstance. A l’image de ce qui prévaut en ce moment dans toutes les zones de production, les premiers décaissements de fonds ont été épuisés dans tout le Saloum. Une situation qui, selon nombre d’acteurs, est à l’origine du bradage des récoltes dans les marchés hebdomadaires. « Le gros problème de la campagne demeure celui du financement », a souligné M. Faye. Chez les huiliers, la situation est encore loin de prendre l’allure qu’il faut. A Lyndiane par exemple, ce n’est pas encore la grande affluence.
A l’instar de Louga et de Diourbel, les camionneurs se font encore désirer devant les établissements industriels de la Suneor comme à Novasen. L’usine de Lyndiane n’a reçu que 67 camions à la date du 27 janvier dernier. A la Novasen où les choses semblent aller mieux, le service achat graines a déjà enregistré l’arrivée de 221 camions remplis de graines à notre passage. Les acteurs estiment que l’Etat doit redoubler d’efforts en rapport avec les banques afin de d’inverser la tendance.
S. P. SADIO et A. MBODJTHIEMBAYE NDIAYE, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU SYNDICAT NATIONAL DES TRAVAILLEURS DES INDUSTRIES DES CORPS GRAS: « SI LES FINANCEMENTS ATTENDUS ARRIVENT, LE RYTHME DE COLLECTE VA S’ACCENTUER »
Malgré le retard enregistré, les huiliers restent optimistes pour la suite de la campagne. Même si les quantités souhaitées seront difficilement atteintes, il y aura suffisamment de graines pour faire fonctionner les usines, a laissé entendre le secrétaire général du Syndicat des corps gras.
En dépit du retard enregistré par les huiliers pour leur implication dans la campagne, certains estiment qu’il n’y a pas péril en la demeure. «L’espoir est permis parce que nous avons fait des sondages et des tournées. Il faut souligner que la Suneor a toujours établi des liens très forts avec les agriculteurs de telle sorte que si ces derniers vont ailleurs, c’est parce qu’ils n’ont pas de solutions », relève le secrétaire général du Syndicat des corps gras, Thiembaye Ndiaye.
Actuellement, poursuit notre interlocuteur, malgré le retard, dans certaines usines comme à Ziguinchor, on a plus de 10.000 tonnes collectées sur l’ensemble des établissements. A Kaolack également, plus de cent camions attendent d’être déchargés. « Si les financements attendus arrivent, le rythme de collecte va s’accentuer et l’on espère qu’en fin de semaine ou en début de semaine prochaine (l’entretien s’est déroulé le 30 janvier dernier), si nous disposons des fonds, nous allons entrer de plein pied dans la campagne », affirme le syndicaliste. Même si l’objectif de 200.000 voire 300.000 tonnes souhaité ne sera pas atteint, le responsable syndical des corps gras pense que les quantités nécessaires pour faire fonctionner correctement les usines seront réunies.
Revenant sur le boycott de la Suneor au début de la campagne, Thiembaye Ndiaye, explique que tout le problème était dû au prix de 200 FCfa fixé par la Conseil national interprofessionnel de l’arachide (Cnia) et sur lequel il n’y a pas eu d’accord au départ. «Ce prix ne tenait pas compte des informations que nous avions donné à la Cnia et qui définissaient bien que les graines ne pouvaient pas coûter plus de 130 FCfa et encore moins des cours actuels sur le marché. Il y a donc eu un ensemble de problèmes qui ont fait qu’il fallait que le gouvernement s’implique. Ce qui a été fait par un accord qui couvre les huiliers», a soutenu M. Ndiaye.
L’Etat, poursuit-il, a fait une lettre d’accréditation auprès des banques en guise de garantie afin de permettre aux huiliers de s’impliquer. Cet accord intervenu presque plus d’un mois après le démarrage de la campagne, fait que les choses ont tardé à prendre l’allure que cela devait avoir. «Pour le moment, le rythme est encore lent, certes, mais je pense que dès la semaine prochaine, nous allons atteindre la vitesse de croisière », espère Thiembaye Ndiaye.
S. P. SADIO et A. MBODJ
LA SÉCURISATION DES ACHATS ET LA TRAÇABILITÉ DES GRAINES ASSURÉES
Le schéma de commercialisation mis en place, cette année, est perçu comme un bon moyen de sécuriser la production. Les acteurs impliqués estiment qu’il assure en même temps la traçabilité des graines.
L’ambition de la Suneor, selon Ibrahima Dieng, chef de service achat graines de la Suneor de Kaolack, est de couvrir le maximum de points de collecte officiels pour donner une chance aux producteurs de vendre leur production aux points de vente à 200 FCfa. L’objectif est de sécuriser les achats à travers un système d’approvisionnement qui assure en même temps la traçabilité des graines. «Nous imposons à l’opérateur d’aller s’installer aux points de collecte réguliers en leur remettant à l’avance des documents de collecte, à savoir la lettre de voiture pour le chargement et le transport, mais également le reçu d’achat qui prouve que l’opérateur a payé les graines aux points de collecte et a remis un volet au paysan. Il est obligatoire aussi que les deux volets accompagnent la lettre de voiture à l’usine pour qu’à notre niveau, nous soyons rassurés que l’opérateur s’est conformé aux directives mises en place », explique M. Dieng.
Selon lui, dans chaque point de collecte, la Cnia a confectionné des cachets qui ont été remis aux chefs de villages des différents points de collecte. « Quand le camion arrive au village, une fois son chargement terminé, l’opérateur présente la lettre de voiture au chef de village qui appose le cachet afin de prouver que les graines proviennent effectivement d’un point de collecte officiel. Un reçu d’achat est également remis chaque fois au producteur. « Il faut dire que le gouvernement a fait ce qu’on a toujours attendu c’est-à-dire être ferme et regardant sur le déplacement des graines. Il y a un système de traçabilité qui est initié et qui permet de connaître l’origine et la destination des graines », a fait remarquer le secrétaire général du Syndicat national des corps gras, Thiembaye Ndiaye. Il estime qu’avec ce système, les graines ne peuvent pas aller ailleurs car les producteurs attendent que les opérateurs viennent aux points de collecte pour les vendre.
Ce qui, indique-t-il, est tout le contraire de ce que l’on voyait l’année dernière. L’ouverture du marché à des étrangers, regrette M. Mbaye, avait occasionné la fuite de beaucoup de graines qui avaient pris des chemins parallèles. « Cette année, avec le décret interdisant les exportations avant qu’on ait atteint le million de tonnes de collectes alors que la production est évaluée à 710 000 tonnes, forcément, les graines ne vont pas sortir », a souligné Thiembaye Ndiaye.
S. P. SADIO et A. MBODJ
LE SYSTÈME CARREAU USINE N’EST PAS DE RIGUEUR CETTE ANNÉE, SELON LA SUNEOR
Il n’y a pas de système carreau usine cette année, mais une entente entre opérateurs et la Suneor afin d’acheter des graines sur fonds propres et établir des factures ensuite. Une alternative arrêtée pour le moment avec les opérateurs, en attendant la disponibilité des fonds.
«Actuellement, tous ceux qui ont amené des graines dans les usines le font sur fonds propres parce qu’ils ont confiance à la Suneor. Nous travaillons avec eux depuis longtemps. C’est pourquoi ils ont commencé à livrer des graines, en attendant la mise en place des fonds pour qu’ils soient payés», explique Thiembaye Ndiaye. A entendre ce dernier, ce qui est décrié comme un «système carreau usine » n’est, en fait, qu’une confiance entre la Suneor et ses opérateurs traditionnels. « Nous ne sommes pas implantés aux points de collecte, mais ce sont nos opérateurs agréés qui vont directement y acheter les graines. Nous leur facilitons la tâche en leur remettant un agrément. Parfois, ils demandent des domiciliations bancaires, mais c’est à eux d’aller vers les institutions financières pour essayer de lever les crédits de campagnes qui leurs permettent de s’approvisionner dans les différents points de collecte aux prix officiels », explique le chef de service achat graines à la Suneor de Kaolack, Ibrahima Dieng.
Après la livraison des graines, les opérateurs font une facturation pour être remboursés. « C’est comme cela que les choses doivent se passer. Malheureusement, souvent, on constate que nos opérateurs voient certains paysans qui acceptent de leur donner leurs graines pour se faire rembourser après. Mais à notre niveau, le système de carreau-usine n’est pas de rigueur cette année », a soutenu M. Dieng. Avec le système carreau-usine, le producteur était obligé d’acheminer les graines jusqu’à la Suneor.
A en croire Ibrahima Dieng, la Suneor ne doit pas aux producteurs, mais aux opérateurs qui, précise-t-il, doivent lever leurs propres fonds pour aller payer les graines auprès des producteurs. «J’aurais compris que les opérateurs disent que la Suneor n’a pas encore payé, mais ce n’est pas aux producteurs de le dire. Parce que nous n’avons pas de relation financière directe avec les producteurs », précise M. Dieng. La Suneor, indique le chef de service achat graines de Kaolack, se conforme à la note circulaire de l’Etat qui met en exergue l’ouverture des points de collecte officielle à l’intérieur du pays où les paysans doivent écouler leurs graines au prix officiel de 200 FCfa. « Nous organisons notre campagne, conformément à cette note en s’approvisionnant aux points de collecte.
S. P. SADIO et A. MBODJ
259.000 TONNES D’ARACHIDE COLLECTÉES
Faisant le point de la campagne de commercialisation de l’arachide, hier, en Conseil des ministres, le ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural, Papa Abdoulaye Seck, a révélé que 259.000 tonnes de graines ont été collectées. Le Sénégal espère réaliser une production de 700.000 tonnes pour cette présente campagne. Le communiqué ne fait pas état de la date à laquelle cette quantité annoncée par le ministre à été collectée. La campagne de commercialisation de l’arachide a été lancée le 9 décembre 2013 et a, très tôt, fait face à des difficultés dont l’absence, sur le terrain, des industries de l’huilerie. Elles estimaient très élevé le prix officiel au producteur de 200 FCfa le kilogramme fixé par le Comité national interprofessionnel de l’arachide (Cnia), dans un contexte de baisse de 30 % des cours mondiaux de l’huile d’arachide et de taux de change du dollar défavorable. Un protocole d’accord avait été finalement trouvé entre l’Etat et les huiliers (Suneor, Copeol/Novasen et Cait), en janvier 2013, dont le point essentiel est le maintien du prix officiel.
Le protocole mentionne aussi la détermination d’un bilan de campagne de commercialisation de l’arachide 2013-2014 en cours sur la base de divers paramètres. Il s’agit de la cotation, de décembre 2013 à octobre 2014, de l’huile brute par la revue Oil world, de même que celle du tourteau en référence au soja argentin, avec un coefficient de 0,71837. L’accord inclut également le taux de change du dollar par la Bceao sur la même période, idem pour les frais de collecte primaire (collecteurs, transporteurs, frais financiers, charges de commercialisation, autres frais, etc.) pour 37.700 FCfa la tonne et les frais de trituration pour 50.000 FCfa par tonne. En janvier dernier, au cours d’un conseil des ministres, Papa Abdoulaye Seck avait reconnu un déficit de financement de la campagne et des « dysfonctionnements » dans son déroulement. Pour parer au plus pressé, le président de la République, Macky Sall, avait ordonné la mise sur pied d’un Comité de réflexion et de soutien, qui sera dirigé par le Premier ministre, dans le but de corriger les dysfonctionnements notés.
M. CISSLa suite du dossier dans l’édition de demain
SOURCE: http://www.lesoleil.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=36888:ces-entraves-a-une-bonne-campagne-arachidiere&catid=78:a-la-une&Itemid=255