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Ven, Nov

Le barbouze et l'affaire maître Sèye l'arme de la torture

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Dans son livre « Pour l'honneur de la gendarmerie », le colonel Abdoulaye Aziz Ndaw évoque l'affaire Me Sèye. Il parle des pratiques de tortures faites sur un responsable du Pds, en l'occurrence Mody Sy et sur la petite amie de Diakhaté, du nom de Rama, l'un des cerveaux supposés de l'opération de l'assassinat de Me Babacar Sèye. Sud a repris les passages du livre

 

«Un an s’était écoulé depuis la disparation de Me Seye quand le Haut Commandant en Second, le Général Mamadou Diop fit appel à moi. Il me sollicitait pour donner suite à une plainte émise contre les enquêteurs de l’affaire pour actes de tortures contre certaines personnes gardées à vue, puis placées sous mandat de dépôt. 
Une procédure spéciale était mise en œuvre pour prendre en compte cet aspect de l’enquête et donner suite à la volonté du Procureur Général près de la Cour d’Appel de se faire une idée. 
Je désignais le Capitaine Sidya Diédhiou, un de mes anciens élèves, bon officier de police judiciaire pour me seconder. 
 
Ma fonction DDSE me permit de mieux situer le contexte de l’enquête et de fixer moi-même les limites de mon action. Je connaissais la plupart des magistrats et des avocats en charge du dossier pour avoir partagé avec eux les amphithéâtres de la Faculté de Droit. Ils me respectaient par mes résultats.  

En réalité, cette enquête devait établir en toute indépendance s’il y avait eu ou non actes de tortures sur certaines personnes qui accusaient de prétendus commanditaires. Ces accusations obligeaient le juge d’instruction à maintenir en détention certains responsables du PDS. Ces personnes étaient les liens les plus probants entre le PDS et les prétendus auteurs des faits.  
 
Le premier, le député libéral des Sénégalais de l’extérieur, Mody Sy, avait été désigné comme complice des auteurs du crime pour avoir remis la somme qui avait permis l’achat des armes.  
 
Son procès-verbal d’audition établi par les hommes du Colonel Diedhiou établissait de fait cette complicité et il reconnaissait avoir participé sur instruction du leader de son parti à la fourniture de moyens notamment par la remise de fonds qui avaient servi à l’achat des armes.  A quatre reprises et pendant plus de trois heures à chaque fois, j’ai interrogé Mody Sy en présence du Capitaine Diedhiou qui transcrivait l’audition. Je l’ai fait examiner par un ensemble d’experts.  J’affirme sans regret qu’il fut torturé et bien torturé dans les locaux de la gendarmerie de Thionck. Ces tortures ont laissé des séquelles inguérissables et humainement il n’a pas pu tenir sous ces tortures. Toutes les déclarations par lui faites au Colonel et à son équipe n’ont aucune valeur juridique. 
 
Je ne le disculpe pas, et Dieu m’est témoin. Je ne peux dire s’il a fait ou non ce qu’on lui reproche. Les conditions de son interrogatoire sont des actes de non-droit et enlèvent toute crédibilité à ses déclarations.  Il en va de même des déclarations de la petite amie de Diakhaté, un des prétendus tireurs de la bande à Clédor. Cette femme du nom de Rama, habitante de Pout, avait été arrêtée et interrogée par les enquêteurs du Colonel Diedhiou. Elle aurait mis à la disposition des prétendus assassins et des commanditaires, le verger de son père sis à Pout. Ces personnes ont pu s’y réunir et préparer l’attentat contre Maître Seye.  
 
Cette femme donna aux enquêteurs plusieurs détails et des noms, ce qui laisse supposer sa participation effective et la véracité des faits qu’elle signa sous serment.  
Devant le juge d’instruction, elle nia tous les faits et fit état des tortures et sévices qui l’auraient poussé à déclarer tout ce que voulaient entendre les gendarmes.  
 
Je l’ai interrogée en présence du Capitaine Diedhiou qui transcrivait. Je peux affirmer avec des experts requis qu’elle à été effectivement torturée. Au plus dur de ces moments, une bouteille de coca-cola dans son sexe a servi à lui faire avouer beaucoup de choses. 
 
Je ne peux ni affirmer ni infirmer la tenue de la réunion entre les commanditaires et les prétendus assassins dans le verger en question, car toutes ces informations ont été obtenues au moyen de coups et sévices interdits par la loi et les conventions internationales.  
 
J’ai entendu tous les gendarmes enquêteurs qui, entre autres chose, ont nié l’usage d’actes de tortures pour obtenir les renseignements fournis à la justice. Ils affirment qu’en leur âme et conscience avoir respecté toutes les conditions d’exercice de la police judiciaire et même accusent le pouvoir politique de vouloir s’entendre sur leur dos.  
 
Ils m’ont pour la plupart accusé de faire le jeu des politiciens et que mon nouvel état de barbouze en était la preuve la plus éclatante. Ils demeuraient convaincus  que les personnes arrêtées et déférées devant les tribunaux étaient auteurs des faits tels que décrits par les procès-verbaux.  
 
Ils disent regretter les accusations à eux faites et qui entachent leur honneur alors que depuis un an, ils avaient tout fait pour établir la matérialité des faits remis à la justice. Ils fondent leur alibi sur les fait qu’aucun des prétendus auteurs, Clédor, Assane Diop et Diakhaté ne peut prétendre avoir été torturé. Samuel Sarr non plus, accusé d’avoir financé l’opération, ne peut non plus faire état de tortures. Alors pourquoi justement les deux autres qui sont le lien le plus établi entre auteurs et commanditaires. Je fis un rapport en deux exemplaires, un au parquet général de la cour d’appel, l’autre au Haut Commandant de la Gendarmerie. Ce rapport établit sans équivoque et de façon formelle que Mody Sy et Ramata, la petite amie de Diakhaté ont été torturés par la Gendarmerie. 
 
Il y était joint une planche photographique et les avis des experts pour prouver les sévices et les coups portés qui ont laissé les lésions sur les deux personnes des fois inguérissables et des fois qui mettront du temps à disparaitre.  
Ce rapport exploité par la justice permit de faire annuler certains procès-verbaux. Ces annulations conduisirent à lâcher, à tort ou à raison, la piste du PDS. 
 
Les enquêteurs de la Gendarmerie me reprocheront toujours d’avoir, pour des raisons politiques, sauvé le PDS et d’avoir permis l’entente Diouf-Wade dans le but de faire table rase de l’affaire Maître Seye. 
Je ne doute pas du résultat de mon enquête qui a effectivement abouti à annuler des pièces essentielles du dossier. Mais j’affirme avec toute ma conscience, tout mon honneur et ma foi que la torture a été un instrument pour obtenir certaines informations. Ma conviction d’officier et de légaliste m’interdit d’accepter la torture comme preuve quels que soient les faits.  
 
Les enquêteurs ont fait des actes de torture et de barbarie que rien ne peut justifier. Ces actes ont permis peut être à des commanditaires d’échapper à la justice. Barbouze n’a rien à voir avec les décisions du Juge d’instruction ».(Pour l’honneur de la gendarmerie sénégalaise, T.1, Le sens de l’engagement, chp 8, pp95 à 98)

 

source:http://www.sudonline.sn/larme-de-la-torture_a_20039.html