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Attaqué souvent dans les médias, le Doyen des juges, Samba Sall, a apporté la réplique à ses détracteurs, hier. C’était lors des journées scientifiques de l’Union des magistrats sénégalais. Le magistrat instructeur dit ‘’être quitte avec sa conscience’’, puisqu’il ne fait qu’appliquer la loi. Il a également jeté une pierre dans le jardin des avocats. Sauf qu’il a été un peu seul contre tous.
Il est très souvent sous les feux de la rampe, lorsqu’un dossier politico-judiciaire et médiatique atterrit à son cabinet. Presque tout l’ensemble de ses actes sont souvent décriés dans les médias. Seulement, soumis à l’obligation de réserve, le Doyen des juges s’est toujours emmuré dans un silence. Un silence qu’il a brisé hier, lors des journées scientifiques de l’Union des magistrats sénégalais (Ums) portant sur le thème ‘’Détention préventive et peines alternatives à l’incarcération’’. Animant le sous-thème ‘’Les pouvoirs de l’avocat dans la phase d’instruction’’, Samba Sall a répondu aux critiques dont il fait l’objet.
Lors de l’instruction, il explique que la loi n’a prévu aucun pouvoir pour l’avocat, si ce n’est d’être présent et d’assister son client. Or, fulmine-t-il, ‘’pour certains dossiers mettant en cause des célébrités politiques, artistiques, religieuses ou autres, la tendance, pour certains avocats, pour montrer que leur présence n’est pas inutile, c’est de demander la parole pour plaider, lorsque le réquisitoire introductif a requis le mandat de dépôt et qu’ils sentent que le juge d’instruction va dans ce sens’’.
En revanche, selon lui, ‘’lorsqu’il s’agit d’une personne lambda, certains avocats sont pressés d’en finir avec la première comparution’’.
Il donne l’exemple de l’affaire de la caisse d’avance, avec les multiples recours formulés par les avocats du maire de Dakar. Justement, par rapport à ce dossier, le juge Samba Sall explique les raisons de la célérité. Selon son argumentaire, l’affaire Khalifa Ababacar Sall n’a pas mis trop de temps à l’instruction, car ‘’il n’y avait aucun élément extérieur du dossier, comme le recours à une expertise’’. A l’en croire, il a transmis le dossier au parquet, après l’avoir reçu trois jours plus tôt. Selon Samba Sall, seul le recours à une expertise externe au tribunal peut expliquer une lenteur dans un dossier.
Relativement à l’application du règlement n°5 de l’Uemoa qu’on l’accuse de violer souvent, pour n’avoir pas autorisé aux avocats de plaider au moment de l’inculpation, le magistrat instructeur dit n’avoir rien à se reprocher. ‘’Je m’en tiens à ce que dit la loi. Il ne faut pas me taxer de conservateur (…) Tant que la loi n’est pas changée, je suis quitte avec ma conscience’’, martèle-t-il. Précisant que ‘’le règlement communautaire n’a pas dit comment l’avocat doit défendre son client’’. Le Dji d’ajouter : ‘’Je n’ai pas envie de placer quelqu’un en détention, car j’ai des contraintes de délai. Je suis plus à l’aise avec les dossiers sans détention. Ce n’est pas de gaieté de cœur que je place les gens sous mandat de dépôt.’’
Ainsi, le Doyen des juges est d’avis que le règlement ne peut pas s’appliquer devant le juge d’instruction. ‘’En l’état actuel de la législation, le règlement 5 de l’Uemoa ne peut pas s’appliquer devant le juge d’instruction. Il faut des textes complémentaires insérés dans le Code de procédure pénale. La revendication des avocats ne doit pas être portée devant le juge, mais plutôt au législateur’’, soutient-il, tout en arguant que ‘’le texte ne dit pas comment l’avocat défend son client’’.
Le Doyen des juges, seul contre tous
Seulement, son argumentaire selon lequel l’avocat à un rôle passif, a été battu en brèche par la majorité des intervenants, y compris ses collègues magistrats. ‘’Je crois que les magistrats ne sont pas parvenus à mesurer la portée du règlement de l’Uemoa. Les avocats assistent et défendent leurs clients dans la phase de l’instruction. On n’a pas besoin de normes intermédiaires pour adopter un texte communautaire. Le magistrat a l’obligation à motiver les raisons de la mise sous mandat de dépôt d’un inculpé’’, a rétorqué Me Ahmed Sall. Le directeur adjoint des Affaires criminelles et des Grâces de renchérir que l’avocat doit pouvoir prendre la parole, surtout lorsque nous sommes en face d’infraction financière comme le détournement de deniers publics. Car, selon Mor Ndiaye, en l’espèce, si le juge peut accorder la liberté provisoire à un inculpé sur la base de contestations sérieuses, l’avocat doit pouvoir faire valoir ses arguments. ‘’On devrait faire plus de place à l’avocat’’, ajoute-t-il.
Embouchant la même trompette, le juge Mamady Diané estime que l’avocat ne saurait se limiter à un rôle passif, au moment de l’inculpation. ‘’Les avocats plaident devant la chambre d’accusation, devant la Cour suprême ; pourquoi ne doivent-ils pas le faire devant le juge d’instruction ?’’, s’est-il interrogé.
FATOU SY