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Jeu, Nov
samedi, 08 mars 2014 00:00

Journée Internationale - Droits des femmes au Sénégal: Conquêtes et résistances

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Présentes dans les bureaux, champs, usines, marchés, entreprises, etc., la proportion des femmes dans les instances politiques et de décision au Sénégal, comme du reste dans beaucoup de pays dans le monde, est encore moindre. Bien qu’une loi sur la parité soit votée depuis 2010, l’égalité homme-femme reste un combat de tous les jours. Une bataille menée à tous les niveaux par les femmes sénégalaises…

ECLAIRAGE: IMPÉRATIF ÉCONOMIQUE
Le Secrétaire général de l’Onu, Ban-Ki Moon,  l’a rappelé dans son message à l’occasion de la journée internationale  de la femme. «Les pays dans lesquels les femmes sont traitées d’un pied d’égalité avec les hommes jouissent d’une meilleure croissance économique».

Autant dire que le changement de la situation des femmes n’est pas seulement un impératif éthique, elle s’impose aussi au nom du développement économique.

Autrement dit, les principes de la liberté des femmes et de l’égalité des sexes ont fortement contribué au développement économique et social des pays occidentaux. Donnons donc à la femme la place qui lui revient de droit dans la société sénégalaise auprès des hommes pour l’équité sociale. Si bien sûr nous voulons devenir ce pays émergent que nous appelons de tous nos vœux.  Pour y arriver, il faudrait définitivement se débarrasser de ses injustices, de ses discriminations, bref de ses résistances. En Espagne et en Norvège, on est arrivé, par la Loi et l’instauration des quotas, à contraindre les hommes à partager le pouvoir avec les femmes.

Au Sénégal, on ne va certainement pas en arriver là. Car déjà, dans la société  traditionnelle, il y avait des droits acquis. Le pouvoir exercé par Ndieumbeuth Mbodj ou Santé Yalla, dans le Walo et Aline Sitoe Diatta en Casamance, montrent que le leadership féminin ne date pas d’aujourd’hui.

Du Code de la famille de 1972, à la parité dans les fonctions électives adoptée en 2010, en passant par l’autorité parentale, la transmission de la nationalité , l’intégration dans l’armée et les forces de l’ordre, les femmes sénégalaises ont obtenu de nombreux droits sur le chemin de l’égalité des sexes. Seulement, du point de vue historique, on ne devrait pas considérer ces nombreux acquis, non comme des conquêtes, mais peut être un juste rétablissement des droits des femmes.

Sur le plan sociologique, si le père incarne l’autorité, ses sœurs, les tantes (badianes) ont une autorité morale et une ascendance réelles qui peuvent influer sur les décisions du chef  de famille sénégalaise. En tous les cas, le statut de la femme a beaucoup évolué au Sénégal. Dans plusieurs domaines certaines d’entre elles ont prouvé que le leadership féminin n’est pas un vain mot. Le Sénégal compte un vivier de femmes à haut potentiel. Elles ont d’ailleurs investi, en masse, les derniers bastions masculins de la vie professionnelle. Elles ont montré qu’on peut leur confier de hautes responsabilités. La police, le service militaire, la diplomatie, autrefois fois chasse gardée des hommes, leur ont largement ouvert leurs portes.

Il faut s’en convaincre définitivement, c’est toute l’histoire entre hommes et femmes qui a définitivement changé dans le monde. C’est évident, les femmes ne peuvent plus être les laissées pour compte dans la société. Les violences faites aux femmes, les mutilations génitales, les mariages forcés, le non accès à la terre, sont encore des citadelles à prendre, des bastions, de résistances à vaincre pour que la femme devienne un Homme comme tous les autres.

En définitive, défendre le rôle et la place de la femme, la moitié de l’Humanité, est un objectif pour ne pas dire un combat universel.

N’est-ce pas Ban Ki-moon ?

Par Mamadou DIOUF

Femmes 8 mars 2RESPONSABLES DE FOYERS EN BANLIEUE: QUAND LA FAMILLE SURVIT PAR LA BRAVOURE DE LA FEMME
En cette période marquée par une conjoncture économique difficile, beaucoup de femmes sont devenues maintenant responsables de foyers obligées. Quotidiennement, elles s'acquittent de la dépense et autres charges inhérentes à la famille au même titre que les hommes.

Quelques-unes ont été rencontrées dans la banlieue.

Emmitouflée dans un grand boubou aux couleurs délavées, une bassine contenant le reste de son approvisionnement en poissons sur la tête, Salimata Cissé se dirige, au pas de charge, vers la porte de sa maison conjugale qu'elle a quittée vers quatre heures du matin pour se rendre au travail. Nous sommes à Djeddah Thiaroye Kao. Cette femme est vendeuse de poissons au marché de Thiaroye où  elle se rend, chaque matin, après avoir fait un tour au marché central aux poissons de Pikine où elle se ravitaille. Agée 51 ans, elle a toujours été une femme battante, même lorsqu'elle était célibataire. Si bien que quand son mari a cessé de travailler, elle  n'a eu aucune difficulté à prendre la relève de la charge familiale. Aujourd'hui, toutes les dépenses liées familliales sont à sa charge. Ses enfants n'ont pas un bon travail. Le plus âgé est charretier, mais n'arrive même pas à se prendre en charge.

Il était environ 13h lorsque ses trois petits enfants qui venaient de l'apercevoir au loin, accourent vers elle. Pressés de revoir leur grand-mère, ils la ceinturent affectueusement dans une étreinte si forte qu'elle était obligée de s'arrêter et de défaire l'étau dans lequel ceux-ci l'ont mise avant de se diriger, avec eux, vers la maison. Là, son arrivée est d'autant plus attendue que c'est sur elle que compte toute la famille pour préparer le repas de midi. Après avoir franchi la porte de la maison, Salimata Cissé adresse une salutation commune aux occupants de la concession assis de manière dispersée dans la cour, puis se débarrasse de la bassine et s'assied  ensuite sur un banc tout en demandant à sa fille Awa Ndiaye de sortir une chaise pour votre serviteur.

SITUATION DE PRECARITE
Le décor rustique de la cour dépourvue de toute commodité encore moins de luxe renseigne sur l'état de pauvreté dans lequel cette famille vit. Assaillie par les trois enfants qui l'avaient accueillie, Salimata Cissé leur intime l'ordre de s'éloigner, le temps qu'elle s'entretienne avec le reporter. Sur ces entrefaites, surgit le vieux Ngagne Dieng qui était dans la chambre et qui nous adresse avec bienveillance des salutations auxquelles Salimata Cissé répond d'abord avant de rétorquer : « c'est mon mari ».Un bref échange et nous voilà dans le sujet qui nous préoccupe. « Comme je vous l'avez déjà dit, je vis avec mon époux qui vient de te saluer. Mais étant donné qu'il s'est toujours acquitté normalement de ses obligations vis-à-vis de sa famille pendant qu'il était en activité, j'avais pris sur moi, dès sa retraite, de continuer à me retrousser les manches en vue de le relayer dans la prise en charge des dépenses »  débute-t-elle. « Aujourd'hui, c'est moi qui assure la dépense quotidienne grâce à mon boulot de vendeuse de poissons », poursuit-elle. « Cependant, vous n'êtes pas sans savoir que je suis une femme et la femme est d'une constitution physique fragile et vous devinez aisément que si je tombe malade, tout est bloqué dans la famille », ajoute-t-elle.

Une tendance qui se généralise de jour en jour. Cependant, Salimata Cissé est consciente qu'elle n'est pas seule à vivre cette situation de précarité. D'ailleurs, elle le précise en nous faisant comprendre que de nombreuses femmes vendeuses de poissons au marché sont des responsables de famille sur qui les leurs comptent pour vivre. « C'est la vie qui est dure et contrairement à l'époque de nos grands-parents où seul le père de famille avait la charge du foyer, de nos jours, des femmes sont contraintes d'endosser la responsabilité de gérer leurs familles respectives au risque de verser dans l'indignité », explique Salimata Cissé. Pour nous en administrer la preuve, elle envoie son petit-fils chez sa voisine Diatou Mbaye qui, elle aussi, est responsable d'une famille. Celle-ci travaille dans la friperie. « Va m'appeler ta tante Diatou, dis lui de venir tout de suite ». L'enfant s'éclipse et réapparaît quelques minutes plus tard, suivi, un moment après, d'une femme d'une cinquantaine d'années, habillée en grand-boubou, une écharpe autour de la tête. Elle pénètre dans la maison au moment où le vieux Ngagne Dieng en sortait.

« Assalamaleikoum » lance tout doucement Diatou Mbaye avant de débiter avec un brin d'inquiétude : « ton enfant m'a collé la peur en me demandant de venir tout de suite », enchaîne-t-elle dans un sourire de soulagement. Salimata Cissé lui cède le banc sur lequel elle est assise, puis s'installe à même le sol avant d'introduire sa voisine dans le sujet. Diatou Mbaye commence à disserter : « Je crois que c'est un truisme que de parler de ce phénomène. Je suis divorcée depuis plusieurs années et comme je n'ai aucun soutien et que je veux garder ma dignité, j’ai préféré me retrousser les manches pour prendre en charge mes trois enfants », témoigne-t-elle. Dans un premier temps, Diatou Mbaye  a été vendeuse de beignets, puis a travaillé dans un service de vente de produits alimentaires, mais aucune de ses activités ne lui permettaient de joindre les deux bouts.  « Chaque fois qu'il m'arrivait d'être au creux de la vague, je sollicitais mes frères qui me venaient en aide », révèle-t-elle.

JOINDRE LES DEUX BOUTS 
« Après avoir bien réfléchi, je me suis rendu compte que cette méthode ne tient pas la route et qu'il fallait impérativement que je trouve mieux », poursuit-elle.  « J'ai soumis un projet de vente de friperie à un parent qui m'a gracieusement offert une enveloppe de 200.000 FCfa avec laquelle j'ai commencé cette activité qui m'a permis aussi de participer à des tontines, parfois mes frères me soutiennent », révèle-t-elle. Le vieux Ngagne Dieng qui était sorti, il y a un moment, réapparaît et en passant, il a compris le sujet de la conversation par les propos de Diatou Mbaye. Il s'arrête à la véranda, s'accoude sur un mur d'une petite hauteur en écoutant la causerie. Lorsque Diatou Mbaye avance que de nos jours, la réalité des faits montre que la femme s'est émancipée dans le sens positif, le vieux Ngagne Dieng consent à réagir. « Mon fils, je partage ce que Diatou vient de dire car aujourd'hui beaucoup de pères de famille sont sauvés par la bravoure et le courage de leurs épouses ». Il évoque son propre cas en soutenant que s'il avait une femme fainéante, sa famille se serait disloquée depuis belle lurette. Un bel hommage des hommes aux femmes.

Par Abdou DIOP


Femmes 8 mars 3LA LONGUE CONQUÊTE DES LIBERTÉS
La journée de la femme tire son origine des luttes féministes menées sur les continents européen et américain. En effet, c’est le 28 février 1909, qu’une journée nationale de la femme (National Woman’s Day) a été célébrée pour la première fois aux Etats-Unis, à l’appel du Parti socialiste d’Amérique. Lors d’une conférence à Copenhgue en 1910, elle fut votée à l’unanimité pour devenir un évènement international. C’est avant tout, une journée militante, visant à rappeler le principe d’égalité entre les hommes et les femmes. Le 19 mars 1911, l’Internationale socialiste célébra la première journée internationale et revendiqua le droit de vote des femmes, le droit au travail et la fin des discriminations au travail. Quant à la date du 8 mars, elle fut retenue par le Russe Lénine. Il décréta la Journée internationale de la femme le 8 mars 1921, en honneur aux femmes qui manifestèrent les premières, le 8 mars 1917 à Pétrograde, lors du déclenchement de la révolution russe. La célébration s’étendit à l’ensemble des pays du bloc de l’Est. Chaque femme recevait des bouquets de fleurs de son époux, fils, petit-fils, collègues ou amis hommes.

Toutefois, ce n’est qu’en 1977 que la journée fut officialisée par les Nations unies, invitant chaque pays  à célébrer une journée pour les droits des femmes. La journée de la femme fait ainsi partie des 87 journées internationales reconnues ou initiées par l’Onu. C’est une journée de manifestations, une occasion de revendiquer l’égalité et de faire un bilan sur la situation des femmes dans la société, afin d’améliorer la condition féminine. Dans certains pays, cette journée est déclarée fériée.

Au Sénégal, certes des héroïnes  comme Ndatté Yalla, Aline Sitoë Diatta, les femmes de Nder…, ont posé, par leurs actions, les jalons de l’émancipation féminine, mais c’est la création de l’école des filles à Saint-Louis en 1919, qui constitue le socle de l’émancipation. En effet, elle participa à l’éveil des consciences.

Et dès les élections municipales de 1945, les Sénégalaises des 4 communes ayant la citoyenneté française revendiquèrent le même droit de vote que celui de leurs compatriotes de la Métropole. Avec la Loi Lamine Guèye du 7 mai 1946, elles devinrent des électrices. C’est ainsi que les femmes participèrent aux duels épiques entre le Bds de Senghor et la Sfio de Lamine Guèye ainsi qu’à la grève du grand mouvement syndical de l’Aof, celui des cheminots du Dakar-Niger en 1947. Cependant, c’est dans les années 70 que les grands progrès ont commencé. Aujourd’hui, si la Sénégalaise a conquis de nombreux droits (autorité parentale, transmission de la nationalité, parité dans les fonctions électives, l’intégration dans les forces de l’ordre et militaires, des postes de responsabilité, etc.), il est à noter que des défis énormes restent à surmonter. Ils ont pour noms féminisation de la pauvreté, du Sida, difficile accès aux postes de responsabilité, le manque d’éducation (analphabétisme des adultes), violences faites aux femmes…

Par Daouda MANE

Femmes 8 mars 4RELIGION: L’ISLAM RESPECTE ET HONORE LA FEMME
Message universel délivré à travers le Coran, l’Islam,  qui est à la fois un ensemble de cultes, un guide normatif pour le bien, un projet total codifiant tous les aspects de la vie sur terre, un appel à la justice sociale, un hymne à l’entente fraternelle et un projet salvateur, demeure, depuis le VIIe siècle, un incomparable instrument d’émancipation et de promotion de la femme. Certains esprits, qui ne se sont intéressés aux droits de la gent féminine que récemment, font croire que la femme musulmane est maltraitée et méprisée. En tout cas, l’Islam a, au plan spirituel et social, donné à la femme un statut des plus prestigieux et lui a confié un rôle essentiel dans la marche de la communauté, comme en attestent des sourates et hadiths.

A l’occasion de cette Journée internationale des Femmes instituée par les Nations Unies en 1977 pour se souvenir des héroïques ouvrières et militantes de l’égalité des sexes qui, au début du XXe siècle, revendiquaient de meilleures conditions de travail et le droit de vote en Angleterre et aux Etats-Unis, il est bon de rappeler que l’Islam, religion du travail et de l’assiduité dans l’effort, avait, depuis le VIIe siècle, tranché la question. Encourageant au travail quel qu’il soit, tant qu’il se situe dans le cadre licite, l’Islam, à travers plusieurs versets coraniques, permet à la femme d’exercer toutes les fonctions : « Œuvrez, car Dieu va voir votre œuvre, de même que Son messager et les croyants » (Coran, 9/105). « Celui qui a créé la mort et la vie afin de vous éprouver (et de savoir) qui de vous est le meilleur en œuvre » (Coran, 67/2).

Nulle part le Coran ne mentionne que les « hommes sont supérieurs aux femmes », à moins que le texte du Coran n’ait été mal traduit en français. Pour l’Islam, l’homme et la femme ont des devoirs et des responsabilités comparables ; et ils font face aux conséquences pour leurs décisions et leurs actions morales. Le Coran indique clairement que la seule base de supériorité est la piété et la droiture, non le genre, la race, la couleur ou la richesse. Aussi, la loi islamique ne prive pas une femme du droit de travailler dans les limites qui protègent son honneur et sa dignité. Pour rappel, à l’époque du prophète Mouhamad (Psl), la femme était active dans la société et  était présente, au niveau professionnel, dans tous les domaines : agriculture, artisanat, administration, médecine...

Le travail est un moyen pour la femme d’avoir son propre argent, que ce soit pour ses dépenses personnelles, sa famille ou les indigents. L’Islam octroie à la femme musulmane un droit à la propriété que peu de sociétés lui ont donné avant l’avènement de l’Islam ou bien seulement au cours du siècle dernier. Elle jouit de ses biens comme elle l’entend et nul ne peut en disposer à sa place. « Ne convoitez pas ce qu’Allah a attribué aux uns d’entre vous plus qu’aux autres ; aux hommes la part qu’ils ont acquise, et aux femmes la part qu’elles ont acquise. Demandez à Allah de Sa grâce. Car Allah, certes, est Omniscient », (Sourate 4, An-Nisâ (Les femmes), verset 32). Contrairement à l’idée qui fait croire que la femme musulmane est maltraitée et méprisée, il faut dire haut et fort que l’Islam a donné à la femme un statut qui la respecte et l’honore.

Collaboratrices du prophète 
Avant la venue de l’Islam, les hommes n’avaient pas de considération pour les femmes. Pendant longtemps, l’on a considéré la femme comme l’incarnation du mal. Lorsque vint l’Islam, Dieu Tout-Puissant évoqua les droits de la femme et les hommes se mirent à comprendre qu’elles avaient des droits sur eux. Ici, ce qu’il faut retenir c’est que Dieu commande l'équité : «Certes, Allah vous commande de rendre les dépôts à leurs ayants-droit, et quand vous jugez entre des gens, de juger avec équité» (Coran, 4 : 58). L’Islam, qui est plutôt la religion de l’équité, réunit les parties égales et distingue les parties différentes. Il a reconnu aux femmes des droits et une protection dûment codifiés, mettant fin à un état d’infériorité.

Par ailleurs, le rôle éminent joué par des femmes dans la construction de la civilisation arabo-musulmane mérite d’être souligné. N’est-ce pas que la première personne à croire en la Révélation transmise par le prophète Mouhamad (Psl) fut Khadija, la première épouse de l’Envoyé d’Allah ? D’autres femmes furent de précieuses collaboratrices du prophète de l’Islam, transmettant des hadiths ou tenant une place importante dans les premières années de la religion musulmane. Et au fil des siècles, des femmes musulmanes se sont illustrées par leur foi, leurs connaissances, leurs actions au service du développement de leur société. Aujourd’hui, une meilleure compréhension de l’Islam et des sociétés musulmanes s’impose afin que l’on cesse de mêler l’Islam aux excès et déviations notés dans des pays dits « musulmans ». Plus que tout, il faut, présentement, réfuter les exagérations et rappeler les principes généraux de l’Islam pour tout ce qui concerne la femme. En d’autres termes, il faut retrouver la vérité du Message islamique et, surtout, révéler son caractère progressiste et son attachement à la justice, qui sont quelques-unes de ses finalités.

Par Cheikh Aliou AMATH


Ban Ki Moon 2MESSAGE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES NATIONS UNIES À L’OCCASION DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME DU 8 MARS
Cette année, nous célébrons la Journée internationale de la femme en rappelant à quel point il importe d’établir l’égalité des sexes, non seulement pour des raisons d’équité et de respect des droits de l’homme, mais aussi parce que c’est une condition préalable à la réalisation de bien d’autres objectifs.

Les pays dans lesquels les femmes sont traitées sur un pied d’égalité avec les hommes jouissent d’une meilleure croissance économique. Les entreprises qui comptent des femmes parmi leurs dirigeants affichent de meilleurs résultats. Les accords de paix qui font intervenir des femmes s’avèrent viables à plus long terme. Les parlements où siègent des femmes adoptent davantage de lois portant sur des questions sociales fondamentales comme la santé, l’éducation, la non-discrimination et les allocations familiales.

Il ne fait donc pas l’ombre d’un doute que l’égalité entre les femmes et les hommes est un avantage pour tous. Cette réalité doit être au cœur des efforts que nous déployons pour accélérer la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement d’ici à l’échéance de 2015 et établir un programme d’action pour la suite. Si les progrès accomplis en ce qui concerne l’accès des filles à l’enseignement primaire et la proportion de femmes dans les instances politiques sont considérables, ils restent néanmoins trop lents et trop inégaux.

D’où qu’elles viennent, les petites filles nées aujourd’hui devront encore faire face à l’inégalité des chances et à la discrimination. Tous, nous devons cependant veiller à ce qu’elles se voient épargner la violence qui touche une femme sur trois dans le monde, puissent un jour recevoir un salaire égal pour un travail égal sans être empêchées de jouer un rôle dans l’économie, soient en mesure de participer dans des conditions d’égalité aux décisions qui les concernent, et aient toute latitude pour décider si elles souhaitent avoir des enfants et, le cas échéant, à quel moment et combien elles en auront. Je tiens à dire ceci à toutes les femmes et les petites filles de la planète : le respect des droits de l’homme et l’égalité entre les sexes ne sont pas des idéaux inatteignables. Au contraire, il incombe aux gouvernements, à l’Organisation des Nations Unies et à chaque être humain de s’assurer qu’ils deviennent réalité.

Je m’adresse également aux hommes et aux garçons, à qui je demande d’assumer leurs responsabilités à cet égard. Nous avons tous à gagner à voir les femmes et les filles – qu’elles soient mères, sœurs, amies ou collègues – réaliser tout leur potentiel.

Ensemble, tandis que nous nous efforçons d’éliminer la pauvreté et de parvenir au développement durable, œuvrons donc en faveur de l’égalité des sexes, des droits des femmes et du renforcement du pouvoir d’action de celles-ci, car nous avons tous à gagner à être sur un pied d’égalité.

Ban Ki-moon

Femmes 8 mars 5Le grand bond en avant du Code de la famille
Avant l’entrée en vigueur du code la famille en janvier 1973, coexistaient au Sénégal trois régimes en matière de  statut  personnel : la coutume indigène, la loi musulmane et le droit moderne introduit par le colon. Mais on peut dire que majoritairement, les femmes sénégalaises vivaient dans une société patriarcale consacrant la toute puissance du père de famille. Dans un tel contexte, la femme n’existait qu’à travers son époux à qui elle devait entière soumission. Elle pouvait avoir autant de coépouses que le mari le désirait, être répudiée sans autre forme de procès et faire l’objet d’un « héritage » par le lévirat…

Le code la famille est donc un effort de synthèse des différents statuts personnels susmentionnés tout en s’inspirant d’exemples comme le Maroc ou la Tunisie. Toutefois, son application va rencontrer la résistance de certains foyers religieux malgré l’implication de leurs représentants dans le comité d’élaboration du code. Celui-ci a tenté de faire évoluer le statut de la femme en lui accordant des droits qui ne lui étaient pas reconnus. Ainsi dans ses articles 108 et 111, le code de la famille interdit formellement le mariage forcé. L’acte de mariage qui est délivré à la femme lui permet également de sauvegarder ses droits en cas de divorce ou d’héritage… La femme ne peut se marier sans son consentement personnel même si elle est mineure. Son âge minimum pour le mariage est fixé à 16 ans. Elle ne peut plus être répudiée comme par le passé selon le bon vouloir de son mari car le divorce ne peut être dorénavant prononcé que par le juge. Le code aménage aussi une batterie de causes qui permet à la femme de se défaire d’un lien matrimonial jugé étouffant.  La garde des enfants peut être confiée aussi à l’homme qu’à la femme selon l’intérêt des enfants et cette dernière bénéficie d’une pension alimentaire si le divorce est prononcé aux torts de l’époux. Pour la direction de la famille, le mari est considéré comme le chef de la famille, mais la femme a un pouvoir de contrôle sur les actes de ce dernier et peut à cet effet recevoir l’arbitrage du juge.

En cas d’héritage, le régime de droit commun met la femme sur un pied d’égalité avec l’homme, mais l’application  du droit musulman lui est cependant moins favorable.

Toutefois, il faut noter que le Code de la famille n’est pas le seul texte qui centralise les droits accordés aux femmes. Diverses autres dispositions avant ou après sont venues renforcer cette panoplie. Il s’agit d’abord de la constitution qui proclame l’égalité entre tous les citoyens sans distinction de sexe. La loi du 27 janvier 1999 punit sévèrement les violences faites aux femmes et réprime l’inceste, le viol, le harcèlement sexuel, l’excision, la pédophilie et les violences conjugales.

Autonomie de la femme
Le droit de propriété de la terre est désormais garanti à la femme qui peut avoir son patrimoine propre comme le mari, tout comme elle a le droit de gérer personnellement ses biens.

Le code du travail en son article 104, reprenant le principe d’égalité posé par la constitution entre l’homme et la femme, dispose qu’à conditions de travail égales, de qualifications professionnelles et de rendement, le salaire est égal pour tous les travailleurs quels que soient leur origine, leur sexe ou leur statut.

La femme sénégalaise est éligible et électrice au même titre que l’homme. Elle peut accéder au crédit et ouvrir même mariée un compte en banque sous son  nom de jeune fille sans avoir besoin d’une quelconque tutelle. Mariée la femme a le droit de travailler sans requérir le consentement de son mari.

La femme travailleuse en état de grossesse a droit à des congés avant et après l’accouchement, de bénéficier l’allocation de réversion au décès de son mari.D’autres textes comme la loi n°82-019 du 22 janvier 1982 et le décret n° 77-894 du 12 octobre 1977 permettent aux femmes d’accéder au corps des cadres des fonctionnaires de l’aviation civile, aux corps des commissaires de police, d’officiers ou d’inspecteurs de police. Le statut de la Fonction publique interdit toute discrimination fondée sur le sexe.

Des conventions internationales signées ou auxquelles le Sénégal est partie protègent également le droit des femmes. Sans être exhaustif, on peut citer la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatifs aux droits de la femme du 5 février1985, la Convention des Nations unies sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes adoptée en 1983. Cependant, malgré toutes ces importantes avancées, d’autres conquêtes restent à faire et certains droits reconnus aux femmes ne sont pas toujours respectés. Ainsi les violences faites aux femmes, les mariages forcés, les mutilations génitales témoignent encore du chemin à faire. Mais la lutte des femmes continue et depuis le Code la famille d’autres victoires ont été remportées (Voir article Habib D. Fall). Elles devront s’arracher des griffes de l’analphabétisme et avoir une meilleure éducation pour connaître et pouvoir défendre leurs droits.

Par Ibrahima MBODJ

Femmes 8 mars 6PARITE, NATIONALITE, EMPLOI, FISCALITE, AUTORITE PARENTALE… DES CONQUÊTES, VOUS DITES ? NON, PLUTÔT CONQUÉRANTES !
Belles et coquettes, ces dames ? Pas que ça ! Conquérantes, elles le sont aussi, aidées par les dispositions légales et engagements internationaux du Sénégal qui condamnent toute forme de discrimination fondée sur le sexe. Le législateur a fait, à ces dames, la fleur de la volonté politique.

En un peu plus de quatre décennies, la marche des femmes pour une reconnaissance de leurs droits a les caractéristiques d’un parcours d’épreuves. Reines, chantées sur tous les tons comme les grâces de l’Humanité, les femmes portent quelquefois une couronne d’épines à cause des pesanteurs sociales et du peu d’enthousiasme du législateur à franchir le cap des réformes audacieuses. Ces dernières années, le Sénégal leur a fait deux fleurs. Ces dernières années encore, elles se sont rendues, à deux reprises, au Palais de la République. Me Abdoulaye Wade et Macky Sall, deux locataires de cet auguste symbole de la Républiques les ont reçues, près de deux décennies après le fameux « Goorou mbootay » (un homme au service des dames) de leur prédécesseur, Abdou Diouf. Le fait est rappelé par Katy Cissé, dans une étude publiée par le Codesria sous le titre « La revendication politique et citoyenne comme réponse à la marginalisation des femmes dans le développement : le cas du Sénégal ». Deux présidents de la République pour le même mot de gratitude : « Merci ! » Ces cinq lettres sont l’expression d’un bonheur trouvé dans l’adoption de la loi portant « Parité absolue homme-femme dans les institutions » et celle permettant à une femme de donner la nationalité à son conjoint non Sénégalais et à leurs enfants. A son application aux Législatives de 2012, la Loi sur la Parité a assuré à 63 sièges à des femmes. L’une d’elles, Awa Guèye de Benno Bokk Yakaar, est élu première vice-présidente de l’Assemblée nationale.

L’EQUITE, HORIZON POUR AMAZONES
Acte II : la nationalité. L’article 5 dispose : « est Sénégalais tout enfant né d’un ascendant au premier degré qui est Sénégalais. » L’article 7 complète : « l’étranger qui épouse une Sénégalaise ou l’étrangère qui épouse un Sénégalais acquiert à sa demande la nationalité sénégalaise après 5 ans de vie commune… » Enfin, l’article 9 lève l’obstacle de la nationalité dans le processus d’adoption : « l’enfant qui fait l’objet d’une adoption plénière acquiert la nationalité sénégalaise… » Il y a sept ans, le décret n° 2006-1310 du 23 novembre 2006 changeait les articles premier et 8 du décret n° 75-895 du 14 août 1975 portant « organisation des institutions de prévoyance maladie d’entreprise ou interentreprises et rendant obligatoire la création des dites institutions ». Le nouveau décret intègre, dans la prise en charge sanitaire, le conjoint et les enfants de la femme travailleuse : Sont considérés comme membres de la famille du travailleur, au sens de l’alinéa précédent : « … le ou les conjoints (s) du travailleur ; les enfants issus d’un mariage légalement constaté du travailleur ; les enfants du travailleur dont la filiation naturelle est établie par reconnaissance volontaire ou par jugement conformément à la loi ; les enfants ayant fait l’objet d’une adoption par le travailleur conformément à la loi ».

La famille sénégalaise s’ouvre de nouvelles frontières vers l’équité dans la loi du sang. Pour cette journée de 2013, elles repartent même avec un bonus. Le Président Sall annonce un fonds de 13 milliards Cfa de la BID (Banque islamique de développement) destiné au financement des femmes et des jeunes, avec la possibilité de décrocher 13 milliards supplémentaires auprès de la BOAD (Banque ouest-africaine de Développement).

LA MAJORITE ET SES DROITS
Cette fleur est méritée pour 52% de la population du Sénégal. La Situation Economique et Sociale du Sénégal de 2011, publiée par l’Agence nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), révèle qu’elles représentent 51,7% de la tranche d’âge 15-49 ans contre 48,3% pour les hommes. Elles constituent encore 50,5% de la population en âge de voter (18 ans et plus). Aménager une place aux femmes dans l’ascenseur social, c’est une simple mise en cohérence des actes de gouvernance et de la configuration de la structure sociale et économique. Mère, sœur ou fille, la femme sénégalaise est aussi douceur et engagement. Elle franchit, débarrassée des préjugés de sexe, le seuil des entités professionnelles qu’une certaine barrière psychologique réservait aux hommes. L’audace des gouvernants est un laissez-passer pour la promotion sociale sur tous les terrains de l’engagement citoyen. Les dames sont appelées à montrer une égale ferveur au foyer, sous la chaleur des fours ou au carrefour, sous les rayons ardents du soleil, dans l’uniforme de la Police ou de la Gendarmerie. Pourquoi pas, pour une catégorie de la population qui a, à son actif, un Taux brut de scolarisation de 98,6% contre 89,5% pour les garçons, un accroissement de la fréquentation du Secondaire de 18,2% contre 14,5 pour les garçons, selon la Situation économique et sociale du Sénégal 2011 ?

Les femmes ont eu droit à l’équité fiscale dans le nouveau code des Impôts, Le mode d’imposition favorisant l’homme chef de famille n’existe plus. C’est un pas vers la lutte contre la « féminisation de la pauvreté ». L’horizon des femmes, désormais, est l’autorité parentale. L’homme est encore le chef de famille, sauf dans des conditions exceptionnelles prévues par la loi : déchéance, décès, adultère ou de séparation. L’article 277 du Code de la famille nous dit que dans un ménage, la puissance paternelle est exercée par le père. Il faut d’abord vaincre le poids de l’héritage social.

Par Habib Demba FALL

Femmes 8 mars 7LES FEMMES, UN POTENTIEL ÉCONOMIQUE SOUS-EXPLOITÉ
Si elles représentent plus de la moitié de l’humanité, les femmes devraient forcément constituer un potentiel économique non négligeable. Mais la réalité montre qu’elles ont des difficultés pour accéder aux moyens de production. Leur productivité a baissé au cours des trente dernières années du fait de plusieurs facteurs.

Un récent rapport de la Banque mondiale sur le travail des femmes pourrait pousser au découragement sur le sort réservé à plus de la moitié de l’humanité. L’étude intitulée « Gender at work » (le genre au travail) révèle que la participation des femmes à la production active à stagné dans le monde, passant de 57 à 55%, ces trente dernières années. Leur traitement salarial laisse à désirer, celles qui travaillent se retrouvent avec des revenus inférieurs de 10 à 30% en moyenne à ceux des hommes. Ceux-ci ont deux fois plus de chance que les femmes lorsqu’il s’agit de « compétir » pour un emploi salarié à plein temps auprès d’un employeur. Pendant que le monde chante sur tous les toits ses vertus, seulement 144 pays ont atteint ou dépassé la parité homme-femme au parlement ou à des postes de direction dans l’administration ou dans le secteur privé. Et ce ne sont pas les pays développés, comme on pourrait le croire. Il s’agit plutôt de modestes pays pour ne pas dire pauvres : Colombie, Fidji, Jamaïque, Lesotho et les Philippines. Selon toujours le rapport de la Banque mondiale, dans 128 pays, il existe au moins une loi discriminatoire en matière d’égalité hommes-femmes, signifiant que les deux sexes ne peuvent pas évoluer dans les mêmes conditions au sein du monde du travail. Dans 54 pays, cinq lois discriminatoires ou plus handicapent les femmes.

Et pourtant, les femmes ont un potentiel économique immense, mais sous-exploité à cause de l’inégalité du traitement des deux sexes, du fait des pesanteurs sociales en Afrique surtout. Les nombreuses embûches dressées sur le chemin des femmes entravent sérieusement le développement du continent. La pauvreté est plus marquée chez les femmes dans le continent, elles sont aussi les plus lésées en matière de santé aussi. La femme africaine a 25 fois plus de malchance de décéder lors de l’accouchement que l’Européenne.

L’Africaine est une force de production certaine pour l’agriculture, surtout pour les cultures vivrières, mais dans beaucoup de sociétés, paradoxalement, elle éprouve des difficultés à accéder aux moyens de production, surtout à la propriété foncière. Selon madame Obiageli Ezekwesili, ex-vice-présidente de la Banque mondiale pour la région Afrique, « dans le domaine de l’agriculture par exemple, si les femmes avaient accès aux intrants agricoles au même titre que les hommes, leur productivité pourrait augmenter de 10 à 30% ». « Pour y parvenir, ajoute-t-elle, il est nécessaire de concevoir des programmes innovants visant à mettre ces intrants agricoles à la disposition des femmes. Il faudra aussi agir de manière concertée pour préserver leurs droits à la propriété terrienne. Il n’en faut pas moins pour changer la trajectoire de la productivité agricole aussi bien des femmes que du continent dans son ensemble ».

L’accès au crédit est aussi un écueil qui confine davantage les femmes dans le secteur informel. La micro-finance est souvent leur seule source de crédit. Et pourtant, des études ont démontré qu’elles sont meilleures clientes que les hommes au moment de payer une dette. Selon Mme Ezekwesili, « il s’agit d’aller au-delà de la microfinance, pour mettre à la disposition des femmes des montants beaucoup plus élevés à très faible taux d’intérêt remboursables sur une longue échéance. A cela devra s’ajouter une assistance technique au moment opportun afin de mieux outiller les femmes entrepreneurs ». Bref, laisser les femmes en rade dans l’économie, c’est comme si l’humanité se tirait une balle dans le pied.

Par Malick CISS

FEMME ET POUVOIR: LONGUE MARCHE VERS L’IDÉAL DE LA PARITÉ
En début de septembre 2013, Aminata Touré devenait la deuxième femme à prendre les rênes d’un gouvernement au Sénégal. Longtemps confinée aux seconds rôles, la femme sénégalaise venait de gagner une autre victoire dans sa bataille pour accéder aux instances de décision au même titre que les hommes. De plus en plus, dans la vie politique comme au sein des institutions nationales et locales, les femmes sénégalaises occupent des postes stratégiques.

Après la magistrate Mame Madior Boye, entre 2001 et 2003, Aminata Touré est devenue, en septembre 2013, la seconde femme à être nommée au poste de Premier ministre d’un gouvernement sénégalais. Ancienne directrice du département Genre, culture et droit humain au Fnuap, Aminata Touré, après son passage à la tête du ministère sénégalais de la Justice, entre 2012 et 2013, est aujourd’hui chef d’un attelage gouvernemental qui compte trente deux ministres, dont cinq femmes.

Exceptées les deux nouvelles venues, Dr Anta Sarr nommée ministre de la Femme, de la Famille et de l’Entreprenariat féminin, et Maïmouna Ndoye Seck au poste stratégique de l’Energie, les trois autres femmes ministres ont vu le président Macky Sall leur renouveler sa confiance. Il s’agit du Professeur Eva Marie Coll Seck, qui avait déjà occupé le poste de ministre de la Santé et de l’Action sociale dans l’ancien régime libéral de Me Wade, de la responsable et maire socialiste de Louga, Aminata Mbengue Ndiaye au poste de l’Elevage et des Productions animales, ancien ministre sous le régime du président Diouf, et de sa camarade « jallarbiste » Khoudia Mbaye, ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat.  

PARITE ABSOLUE HOMME-FEMME 
Dans les institutions, il est noté également, depuis l’année dernière, la nomination d’une dame, en l’occurrence Aminata Tall, au poste prestigieux de présidente du Conseil économique, social et environnemental du Sénégal. C’est en 2010 que le Sénégal a adopté la loi instituant la parité absolue homme-femme dans les institutions totalement ou partiellement électives. Une « révolution » avait crié plusieurs organisations de femmes qui ont porté en triomphe cette loi soutenue par l’ancien président Abdoulaye Wade.

Même si, à la nouvelle Assemblée nationale, dont la législature a commencé en 2012, on ne compte « que » 64 femmes députés sur une liste de 150 élus parlementaires.

Ainsi, pour parachever cette parité et la rendre effective dans les instances de décision, les associations féminines continuent de mener ce combat à tous les niveaux. Elles demeurent des sentinelles de cette loi sur la parité, en la rappelant sans cesse à l’actuel président de la République, Macky Sall.

Mais, il est juste de constater que les femmes sénégalaises n’ont pas attendu le vote de cette loi sur la parité pour occuper des postes souvent considérés jusqu’à récemment comme réservés aux hommes. Il y a les exemples d’Oulimata Thiaw, première femme sénégalaise à occuper, à la fin des années 90, le poste de présidente de Conseil rural à Ndiass, dans la région de Thiès. Une localité justement qui a vu la socialiste Khoudia Kholle Ndiaye prendre les rênes du Conseil régional. Un haut fait politique que va réussir plus tard Mata Sy Diallo surnommée « la lionne du Ndoucoumane », en devenant présidente du Conseil régional de Kaffrine. Ministre déléguée sous le régime socialiste des années 90, puis député et vice présidente à l’Assemblée nationale, Mata Sy Diallo a toujours figuré parmi l’élite du Ps avant de le quitter et participer à la formation de l’Afp aux côtés de Moustapha Niasse.

FEMMES MAIRES DE COMMUNE
Même si jusque là, seules deux femmes sénégalaises, Mariam Wane Ly du Parena et Zahra Iyane Thiam ont pris les rênes d’une formation politiques, les dames ont souvent rivalisé avec les hommes à la tête de grandes municipalités, comme c’est le cas de la socialiste Aminata Mbengue Ndiaye, élue deux fois maire de la ville de Louga.

Sa camarade du Parti socialiste, l’avocate Aïssata Tall Sall, actuelle maire de la ville de Podor, a également occupé le poste prestigieux de ministre de la Communication porte-parole du gouvernement avant l’alternance politique survenue en 2000. Dans le camp libéral, c’est surtout Aminata Tall que la loi sur la parité doit montrer en exemple. En effet, l’actuelle présidente du Conseil économique social et environnemental, fut première femme nommée ministre d’Etat dans un gouvernement au Sénégal, puis maire de Diourbel. A moindre échelle, la vie politique nationale aura été marquée également, par l’élection de femmes au poste de maire de commune d’arrondissement. C’est le cas d’Aïda Ndiongue aux Hlm de Dakar, Léna Fall Diagne et Seynabou Wade à Fass-Colobane Gueule Tapée, Gnagna Touré à la Sicap Sacré-cœur, de Ngoné Ndoye à Rufisque, de Woré Sarr et d’Aïssatou Sow Diawara dans la banlieue dakaroise.

Dans un autre registre, Anna Sémou Faye, l’actuelle directrice générale de la Police nationale, a gravi tous les échelons de ce corps, en occupant divers poste aux Commissariats de Dieuppeul, de Bel Air, au Port, à l’Aéroport de Dakar, à la Direction des passeports, à la Direction des investigations criminelles, etc.

De même, dans le commandement de l’Administration territoriale, Viviane Bampassy a gravi les échelons pour devenir en 2013, première femme gouverneur de région au Sénégal. Un bel exemple de « prise » et de l’exercice du pouvoir par des femmes.

Par Omar DIOUF

Amy MbackeThiamFEMMES ET SPORT AU SENEGAL: D’AUTRES BASTILLES À PRENDRE
Amy Mbacké (400m, athlétisme) et Yaye Ami Seck (karaté) championnes du monde et les Lionnes du basket « reines » de l’Afrique, les femmes sont les ambassadrices les plus brillantes du sport Sénégalais. Seulement, elles sont sous-représentées dans les instances. Un autre bastion à prendre.

Au-delà de toute considération subjective, qui est le sportif sénégalais le plus titré dans une discipline majeure depuis toujours ? Une question à mille balles qui peut faire bouillir les neurones des lecteurs sportifs, tant la réponse ne paraît pas de toute évidence. Pour rafler la mise, il fallait répondre  Ami Mbacké Thiam,  couverte d’or dans la  discipline olympique reine, l’athlétisme  avec  un titre  décroché après un tour de piste (400 m) au championnat du monde,  le 7 août 2001 à Edmonton au Canada. Cette première levée est suivie par une autre médaille de bronze, cette fois, au championnat du monde 2003 à Paris.

Amy Mbacké Thiam  pourrait partager le podium avec El Hadj Amadou Dia Ba, le seul médaillé sénégalais à des Jeux olympiques (argent aux 400 m haies à Séoul en Corée du Sud en 1988), élu d’ailleurs sportif sénégalais du siècle.

Qui sont les sportifs sénégalais les plus couverts d’or ? Sans nul doute, les athlètes (hommes et femmes), les karatéka Mamadou Aly Ndiaye et Abdoulaye Diop, champions du monde et surtout l’équipe nationale féminine, celle des « Lionnes » du basket. Celles qu’on appelle les « Lionnes d’or », eu égard à leurs 11 titres de championne d’Afrique en 23 éditions d’« Afrobasket ».

Ambassadrices du sport Sénégalais
La seule équipe sénégalaise, qui en 1997, au soir d’un 9è sacre continental a vu chacune de ses membres  recevoir comme cadeau royal, un appartement d’une valeur de onze millions de francs Cfa, offert par l’Etat ? Bis répétita en 2009 au soir d’un onzième succès. Sur la liste des glorieuses athlètes sénégalaises couvertes d’or,  on peut coucher le nom de Yaye Amy Seck championne du monde junior de karaté en 1996 à Johannesburg. Il est vrai qu’après elle, Mamadou Aly Ndiaye et Abdoulaye Diop ont été sacrés champions du monde. L’évidence saute aux yeux, le triomphe du sport sénégalais se conjugue au féminin. Du moins, au rayon  de  ceux qui ont fait honneur à leur pays, les dames figurent en bonne place. Le « sexe faible » a écrit l’une des plus belles pages du sport sénégalais.  Il représente la fierté du  Sénégal. De son peuple.  Bref le « sexe faible » est…la force de son sport. Bien avant les retentissants  exploits  des « Lions » du football,  de la cuvée de 2002  sur les rives du Djoliba, au « Pays du matin calme » et au « Pays du Soleil Levant », il y avait celle des basketteuses, de Yaye Ami Seck et d’Ami Mbacké Thiam.

Les distinctions comme le « Lion d’or » du quotidien national « Le Soleil »  et le « Meilleur sportif de l’année de l’Association nationale de la presse sportive (Anps) qui, tous les deux, célèbrent le culte de l’excellence, ont primé aussi bien des hommes que des dames.  Mais celles-ci surtout. C’est sans doute pourquoi l’ancien président de la République du Sénégal, Abdou Diouf,  avait fait,  le 19 mai 1995,  lors de la 5è édition du gala du « Lion d’or » du quotidien national  « Le Soleil »,  un clin d’œil aux « Lionnes du basket  primées cette année-là ». le Sénégal qui gagne, c’est d’abord le Sénégal des femmes ». A juste titre,  car celles-ci  ont toujours été les «ambassadrices les plus brillantes du Sénégal post indépendance ».

Dix neuf ans après, la belle formule de l’actuel secrétaire général de l’organisation internationale de la Francophonie(Oif) n’a pris aucune ride, le sacre d’Amy Mbacké Thiam en 2001, venant conforter les convictions d’Abdou Diouf. Convictions partagées par le directeur administratif et ancien directeur technique national(Dtn) de la fédération sénégalaise d’athlétisme Jean Gomis, pour qui les « athlètes femmes sont plus performantes ». Du moins « elles réalisent des performances très élevées ».

Pionnières à haut potentiel
De Tacko Diouf (400 m haies) à Fatou Binetou Fall (400 m) en passant par Kène Ndoye (triple saut et longueur) à Amy Mbacké Thiam,  la crème de l’athlétisme sénégalais qui a  réalisé des chronos de niveau mondial, le sport sénégalais a été bien porté par les femmes.

Entretemps, les athlètes Kène Ndoye, médaillée de bronze au triple saut  au championnat du monde de Birmingham en 2003, les championnes d’Afrique de judo Hortense Diédhiou, Isabelle Sambou (lutte) et autre Bineta Diedhiou (taekwondo) ont rejoint la galerie  du « Sénégal qui gagne, le  Sénégal des femmes ».

Des pionnières  parmi lesquelles les élèves des écoles (William Ponty, normale de jeunes filles, de médecine, de sages femmes  de Médina, de Champs de courses), les basketteuses dirigées par Bonaventure Carvalho et médaillées d’argent des 3è Jeux de l’Amitié en 1963 à Dakar (France Lima, Christiane Lopez, Marguerite Lopy,Christiane Boulal, Sokhna Diagne, Marème Mbaye, Hélène Mendy, Marie Guèye, Diaga Faty, Danielle Capudoro, Catherine Diagne et Aïda Diagne), la lanceuse de poids et actuelle ministre de l’Elevage Aminata Mbengue Ndiaye,les premières athlètes de 1963 :Ndèye Khar Ndiaye, Awa Ndaw Diop, Marième Dème, Jacqueline Blain , Fatou Sow, Dié Sow, Anta Mbaye, Katy Diagne, la basketteuse et actuelle ministre de la Santé Eva Marie Coll Seck et la « sportive accomplie » hand balleuse, basketteuse et athlète devenue sociologue Marie Angélique Savané à l’actuelle génération de championnes, les femmes ont réussi à prendre des bastions de conservatisme. » On ne pouvait pas se mettre en short «  révèle Marie Angélique Savané, lauréate du « grand prix du sports » du lycée Van Vo en 1967 ». Même dans les vestiaires, nous étions obligées de mettre des pagnes. Sur les terrains, les gens nous traitaient de garçons manqués et nous lançaient des pierres. L’autre difficulté, c’est que les dirigeants étaient obligés de demander la permission à nos parents pour qu’ils nous libèrent. Car ces derniers ne comprenaient pas qu’on puisse sortir et voyager avec des hommes », se rappelle Marie Angélique Savané.

Des avancées notables  ont été réalisées. Le football féminin qui passait pour une incongruité, élargit de plus en plus ses quartiers avec des compétitions régulières et une première qualification en coupe d’Afrique des nations en 2012. Depuis 2001, le « trophée Mousso »,  cette course auto réservée aux femmes et tout comme les participations de Syndiély,  la fille de l’ancien  président de la République Abdoulaye Wade,  au « Rallye des sables «  et au « Dakar » sont entrés dans les mœurs. Le terrain de jeu des femmes n’a plus de limites. Du coup, un autre regard est jeté sur le sport féminin. Mais dans les coulisses, l’administration du sport est rétive  à la présence des femmes. La parité obtenue dans les résultats ne se reflète pas à la représentation dans les instances. Malgré quelques frémissements, les femmes sont toujours tenues à l’écart de la direction des affaires de sport.

N’empêche, sur les parquets, les pistes, les tatamis, les circuits, les Sénégalaises continuent d’écrire leurs noms en lettres d’or au panthéon du sport de notre pays.

Par Mamadou DIOUF

Albertine GonzalvesREPRESENTATION DANS LES INSTANCES: FRÉMISSEMENT DANS CERTAINES DISCIPLINES
Le monopole traditionnel des hommes sur tous les pouvoirs se prolonge au Sénégal dans le domaine du sport. Les chiffres sont implacables. Sur la cinquantaine de fédérations ou groupements sportifs répertoriés par le ministère des Sports, seul un, la fédération sénégalaise de gymnastique est dirigée par une femme Mme Albertine Gonçalves qui est aussi membre de la fédération internationale. Mais dans certaines disciplines comme le basket, le  hand ball, l’escrime et l’athlétisme, on note un certain frémissement. Au basket, certaines anciennes comme Rokhaya Pouye Ndiaye (Ancienne vice-présidente de la fédération et présidente de la Zone 2 de Fiba Afrique), Mame Maty Mbengue (actuelle vice présidente du Comité de normalisation du basket) Marie Hélène Ndiaye, et Fatou Kiné Ndiaye, Mborika Fall, ont occupé ou occupent toujours des responsabilités. Fatou Kiné Ndiaye est la première  femme entraîneur adjointe d’une équipe nationale de basket au Sénégal avant que Mborika Fall ne suive ses pas. Au hand ball, la défunte Aminata Diack Ndiaye fut vice présidente de la fédération  et Safiétou Diatta Ndoye fut la première femme  directrice technique nationale (Dtn). Elles ont certainement tracé la voie à Aïda Sy qui occupe présentement le poste de secrétaire générale. En escrime, Cécile Faye est la secrétaire générale de la fédération et de la confédération africaine. En athlétisme, on trouve  des femmes parmi les huiles.  Fatou Cissokho occupe le poste de directrice des compétitions de la confédération africaine d’athlétisme. Une autre ancienne athlète Khady Diop Fall fait partie du bureau de la fédération sénégalaise d’athlétisme et du comité national olympique et sportif sénégalais (Cnoss).

Le mouvement sportif international prône, depuis plusieurs années, la parité hommes-femmes dans le sport. L’ancien ministre d’Etat, ministre des Sports et ancien membre du Comité international olympique(Cio) Youssoupha Ndiaye a fait de la double stratégie du Cio  qui tend à augmenter « le taux de participation des femmes dans les disciplines sportives et placer davantage de femmes dans les fonctions administratives du sport » un cheval de bataille.

Mais dans un pays où le sport reflète les inégalités entre les deux sexes et certains comportements comme la soumission de la femme  à l’homme pour des raisons culturelles et économiques, le combat pour une représentation féminine  est loin d’être gagné.  Sur les terrains, les derniers bastions réservés aux hommes sont plus que  menacés. Malheureusement, tel n’est pas le cas dans le domaine de l’administration du sport.

M. DIOUF

COSEF, FAS, SIGGIL JEGGEN, AFARD, CAUSUS… CES STRUCTURES ENGAGÉES DANS L’AMÉLIORATION DE LA CONDITION DE LA FEMME
La condition de la femme sénégalaise s’est améliorée au fil des années, avec notamment la parité dans les instances électives, l’accès massif de la gent féminine aux instances de décision, mais aussi aux financements.

La promotion de la femme a franchi de grands pas au Sénégal. Ces avancées sont matérialisées par la présence massive des femmes dans les instances de décision, l’accès au financement, mais aussi la parité dans les listes élections et semi-électives. Au de-là de la volonté politique des autorités du pays, ce succès a été possible grâce au rôle des organisations féminines. Celles-ci ont, depuis des années, mené le combat pour la parité et l’amélioration des conditions de la femme. On peut, entre autres, citer le Conseil sénégalais des femmes (Cosef), le Comité de lutte contre les violences faites aux femmes (Clvf), l’Association des femmes de l’Afrique de l’Ouest (Afao), l’Association des femmes africaines pour la recherche et le développement (Afard)...

Le combat de ces associations est la promotion de la femme sénégalaise par le développement et le renforcement du leadership, la lutte contre toute forme de discrimination basée sur le genre. Pendant des années, ces organisations n’ont cessé d’appeler les leaders de partis, les coalitions de partis politiques et les syndicats à accorder plus de places aux femmes.

Arguments à l’appui, les femmes leaders ont défendu la condition de la femme. « Il s’agit, sur le plan de la justice économique, de lever les obstacles juridiques, politiques et sociaux à l’accès des femmes à la terre, aux intrants, aux services techniques et financiers et aux marchés», souligne Mme Odile Ndoumbé Faye, la secrétaire exécutive de l’Afard. « Dès que j’ai compris que la condition féminine est une condition sociale, je me suis dit qu’il y avait aucune raison pour que je sois opprimée et qu’il y avait nécessité de changer la condition des femmes », affirme Marie Angélique Savané, une des pionnières de la lutte pour la promotion de la femme.

Ces combats ont permis d’avoir la parité dans les instances électives et semi-électives et une présence des femmes dans les instances de décision. Mais les femmes veulent plus. D’où la poursuite des activités visant à améliorer leurs conditions. « La parité absolue homme/femme est un outil de cohésion sociale, un pas vers un nouveau destin du Sénégal »,  déclare Fatou Sow Sarr. La  responsable du Laboratoire Genre de l’’Ifan-Ucad ajoute : « La bataille de la parité est à moitié gagnée. Elle n’est pas encore définitive. Elle sera effective le jour où les Sénégalais diront que nous n’avons pas eu tort d’envoyer un nombre aussi important de femmes à l’Assemblée nationale ».

Par Babacar DIONE

PROFILS
MARIE ANGELIQUE SAVANE, SOCIOLOGUE: UNE DES PIONNIÈRES DU FÉMINISME SUR LE CONTINENT
Première présidente du panel du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (Maep du Nepad), Marie Angélique Savané est l’une des pionnières du féminisme sur le continent. Durant toute sa carrière, elle s’est engagée en tant que féministe pour la cause des femmes tant au niveau  national qu’africain et international.

La création de l’association « Yeewu Yewwi » pour la libération des femmes, première organisation féministe en Afrique de l’Ouest, traduit la bataille sans faille de la sociologue consultante internationale  aux Nations unies, pour la promotion des femmes.

«Tout mon engagement à la fois politique et féministe vient de mon expérience de Mai 1968 à Paris parce que j’ai pu entendre et voir des choses qui m’ont éduquée. Et dès que j’ai compris que la condition féminine est une condition sociale, je me suis dit qu’il  y avait aucune raison pour que je sois opprimée et qu’il y avait nécessité de changer la condition des femmes », confie Marie Angélique Savané.

A l’en croire, quand  elle a  commencé à militer en tant que femme, elle  s’est rendu compte que même dans les partis politiques, la place des femmes n’était pas reconnue. Et c’est partant de ce constat qu’elles ont créé une association « Yeewu Yewwi » qui regroupait les partis politiques de tout bord.  « C’est avec cette association pour la libération des femmes que nous avons demandé que le 08 mars soit reconnu. A l’époque, le président de la République Abdou Diouf nous avait reçues et avait trouvé notre revendication juste, d’autant plus que la communauté internationale était arrivée à cette conclusion », se rappelle la rédactrice en chef du journal « Famille et Développement ».

Toutefois, Marie Angélique Savané précise que cette journée est importante non pas pour des festivités, mais parce que c’est une occasion dans l’année pour alerter, faire prendre conscience, communiquer afin que les gens réalisent qu’il y a encore des efforts à faire.

« La libération de la femme est  un processus qui va durer car les mentalités ne changent pas du jour au lendemain. Elles demandent des efforts et une prise de conscience individuelle, sociétale », argue Mme Savané, membre fondateur et première présidente de l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le développement (Afard).

Par Maguette Guèye DIEDHIOU

Marie Delphine ndiayeMARIE DELPHINE NDIAYE, JURISTE: AU FRONT DU COMBAT POUR L’AMÉLIORATION DU STATUT DE LA FEMME
Juriste, Marie Delphine Ndiaye est engagée dans le combat pour l’intégration du genre dans toutes les politiques économiques. Cela, pour  que  les femmes deviennent des actrices de développement de leurs localités.

Présidente honoraire de l’Association des juristes sénégalais, par ailleurs membre de l’Observatoire national de la parité et membre du conseil consultatif national des droits de la femme, Marie Delphine Ndiaye est une combattante infatigable pour les bonnes causes et particulièrement pour celles de la femme. «J’ai eu la chance de m’épanouir aussi bien que les hommes dans mon métier, de ma profession. Nous nous sommes affirmés par notre travail et nous avons eu la chance de faire  des études d’un certain niveau », confie elle, drapée d’un boubou de couleur bleue estampillée de signes rouge bordeaux.

« Mais il n’y a pas que des genres de femmes comme nous. La population féminine sénégalaise est encore analphabète et vit dans la pauvreté surtout en milieu rural », précise Mme Ndiaye. A l’en croire, 70% de la main d’œuvre rurale est féminine. «Les femmes n’ont pas souvent l’opportunité d’accéder aux données économiques,  aux intrants, à la terre. Le combat que nous portons actuellement, c’est l’intégration du genre dans toutes les politiques économiques et que les femmes deviennent des actrices de développement à travers leurs localités, la valorisation des ressources etc. », précise-t-elle. De même, poursuit Mme Ndiaye « puisqu’il est reproché aux femmes de n’avoir pas un certain niveau pour accéder aux postes de décisions, nous sommes en train de mener une lutte pour l’accès des femmes aux instances de décision. Mais il faut, au préalable, relever également le niveau de formation et d’éducation des filles et des femmes à travers l’alphabétisation ».

M. G. DIEDHIOU

KHAR NIANG, VENDEUSE: BONHEUR ET FIERTÉ DANS LE POISSON
Assise devant son étal, Khar Niang   s’active, avec fierté,  dans son commerce de poissons au marché Castors. Elle exerce ce métier depuis 6 ans. Et c’est avec ses revenus  qu’elle assure  la dépense familiale aussi bien à Dakar qu’à Touba».

Habitante de la cité Dossou (zone de captage), Khar Niang rallie, chaque matin, avec son enfant au dos, sa localité au marché centrale  pour chercher des poissons  puis,  destination, le marché Castors où  elle  les écoule. « Je me lève toujours à 4 heures du matin pour chercher du poisson à revendre au marché Castors. C’est avec joie que je le fais d’autant plus que je sais que c’est l’unique moyen de gagner mon pain quotidien et de subvenir aux besoins de mes enfants », dit-elle. A l’en croire,   à Dakar, c’est elle qui paie le loyer. Aussi,  à Touba où résident certains de ces enfants qui apprennent  des métiers, elle assure la dépense et leurs besoins quotidiens.

Ce  sacrifice,  Khar en appelle à toutes les femmes. « Je  veux que toutes les femmes fassent comme moi. Le temps où l’homme seul s’acquittait  de ses devoirs  est révolu. La vie est devenue tellement chère  que les femmes doivent aider  les hommes si elles veulent vivre  dans de bonnes conditions avec leurs enfants», conseille-t-elle.

M. G. DIEDHIOU

ODILE NDOUMBE FAYE, SOCIOLOGUE: LE DÉFI PERMANENT D’UNE MILITANTE DES DROITS DE LA FEMME
Porte-parole du réseau francophone pour l’égalité femme-homme et  Secrétaire exécutive de l’Association des femmes africaines pour la Recherche et le Développement (Afard), Odile Ndoumbé Faye est une femme leader qui milite pour la défense des droits de la femme.

Son combat de tous  les jours est l’amélioration des conditions de vies  et  du statut des femmes.  Odile Ndoumbé Faye en a fait un sacerdoce. C’est pour cela  d’ailleurs qu’elle pense que la célébration de la journée internationale des Femmes est l’occasion de revisiter aussi les obstacles économiques, politiques, socioculturels et juridiques qui empêchent l’amélioration des conditions de vies des femmes et l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. « Il s’agit, sur le plan de la justice économique, de lever les obstacles juridiques, politiques et sociaux à l’accès des femmes à la terre, aux intrants, aux services techniques et financiers et aux marchés», dit-elle.  A l’en croire, il faut aussi  mettre en place des politiques plus entreprenantes et efficaces pour une parité intégrale. En tant que femme intellectuelle et travailleuse, Odile Ndoumbé Faye dit pouvoir allier ses activités professionnelles et familiales. « Il faut juste trouver des passerelles, le défi est permanent mais c’est avec le soutien de la famille, de la société, de l’entreprise et de l’Etat que les femmes parviendront à réconcilier ces deux vies », argue-t-elle.

M. G. DIEDHIOU

ACCES A LA TERRE: LES FEMMES ENCORE MAGINALISÉES, MALGRÉ UNE PETITE ÉVOLUTION
Les coutumes, les croyances religieuses ont encore tout leur poids  sur  les textes juridiques, du moins pour ce qui concerne l’accès des femmes à la terre. La persistance de leur marginalisation dans l’accès au foncier est un grand paradoxe, au regard de leur contribution à la lutte contre la pauvreté dans le monde rural.   

« Toutes les femmes réclament leur part de la terre, le contrôle de leur terre. Debout, les femmes du Ghana, du Togo, du Mali, du Mali, ceignons nos reins, unissons nos efforts avec celles du Burkina Faso et du Sénégal ». Ces vers  de l’animatrice de la Fédération agro-pasteurs de Diender, Mame Coumba Guèye sonnent comme un cri du cœur contre la marginalisation des femmes dans l’attribution des terres.

Dans les textes, la femme sénégalaise a droit à une propriété foncière. A vrai dire, l’article 15 de la Constitution adoptée en 2001 garantit aussi bien à  l’homme et qu’à la femme  l’accès à la terre. Mais, dans les faits, la femme continue de souffrir des pesanteurs coutumières, religieuses en dépit de leur contribution importante dans la lutte contre la pauvreté. « La réalité sur le terrain montre que les terres traditionnelles sont actuellement gérées, le plus souvent, suivant le droit coutumier, qui reconnaît rarement les droits des femmes sur le foncier », mentionne le rapport sur l’accès des femmes à la terre en Afrique de l’Ouest : le cas du Sénégal et du Burkina Faso. Ces dernières gèrent 26 % des parcelles mais elles ne sont pas propriétaires des terres exploitables durant la saison des pluies. Selon une étude réalisée par Enda-Pronat, trois femmes sur 4 ne sont pas propriétaires de terre. L’étude a aussi révélé que les rares qui en bénéficient l’ont obtenu par héritage. Cet état de fait est un paradoxe avec la place centrale assumée au sein de ménages. Elles s’adonnent aux activités génératrices de revenus qui leur permettent de couvrir les besoins de leur famille. « Au Sénégal, les femmes représentent 52% de la population totale et 39% de la population active. Elles supportent 90% des charges domestiques et effectuent 80% des travaux agricoles, surtout dans les cultures vivrières », souligne Mariétou Dia d’Action Aid, dans le site www.altermondes.org.

Selon la coordonnatrice du Groupe d’études et de recherche genres et sociétés (Gestes), Fatou Diop Sall de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, les rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes expliquent l’exclusion de la gente féminine. « La logique qui sous-tend la gestion familiale de la production voudrait que le rapport des femmes au foncier se limite à une possibilité d’exploitation et non à une appropriation du fait des rapports de pouvoirs », relève Fatou Diop Sall.

L’homme, poursuit-elle, est le chef de famille, en conséquence, il détient les pouvoirs de décision, de production et de distribution de la terre.

Par Idrissa SANE

Marie A SavaneMARIE ANGELIQUE SAVANE, SOCIOLOGUE ET MILITANTE FEMINISTE: « LA SOCIÉTÉ N’EST PAS ENCORE PRÊTE POUR ACCEPTER LA PARITÉ »
Marie Angélique Savané est l’une des figures emblématiques du mouvement féministe sénégalais. Pour avoir été rédactrice en chef du journal « Famille et Développement » dans les années 1970, elle fait œuvre de pionnière pour l’amélioration du statut de la femme sénégalaise. Dans cette interview réalisée dans le cadre de la célébration du 8 mars, elle nous livre son regard de sociologue sur le statut de la femme sénégalaise. D’un œil critique, elle exprime ses convictions sur la loi de la parité et sur le mouvement féministe. Pour elle, culturellement, la société sénégalaise vit encore au Moyen Age.

Le vote d’une loi sur la parité en mai 2010 a été qualifié d’opportunité historique. Près de quatre ans après, quel bilan en tirez-vous ?
Je crois que cette loi est le bon exemple de la démarche qu’il ne faut pas suivre. A l’époque, personnellement, je ne pensais pas que c’est de cette manière qu’il fallait poser le problème : un président qui décide de proclamer une loi sur la parité par rapport à des problèmes électoralistes. L’objet était déjà faussé et c’est pour cela qu’il y a aujourd’hui des difficultés. Cette loi a été imposée et acceptée par des femmes qui luttaient pour cela depuis des années, mais sans être comprise. Dès le départ, je m’attendais à une réaction très pessimiste des hommes, et c’est ce qui est arrivé. Et puis, le président Wade n’était pas conséquent avec lui-même car, avant cette loi, il avait annoncé la création d’un poste de vice-président qu’il allait donner à une femme. Ce qu’il n’a pas fait. Donc, j’étais contre la démarche même si j’adhère au principe, parce que certains d’entre nous ont commencé à parler de parité depuis les années 1985 après la troisième conférence mondiale des femmes à Nairobi.

Maintenant que la loi est là, je dis que ce n’est pas une mauvaise chose. Il faut se battre pour son application. Et c’est là qu’on voit qu’il n’existe plus de mouvement féministe. Même à l’Assemblée nationale où cette loi a été votée, on ne la respecte pas. C’est évident que la société n’est pas encore prête à accepter ces changements. On est dans une société où, culturellement, on est encore au Moyen Age. Plus de 60% de la population vivent dans un contexte où la place de la femme est de rester au foyer. Toutefois, toute chose a une évolution. Les pays occidentaux ne sont pas arrivés là où ils sont aujourd’hui tout d’un coup. C’est à nous femmes de discuter avec les gens pour leur faire comprendre que plus il y a de femmes dans les secteurs de la production, plus on ira vers le développement. En Afrique, 44% de la production vivrière est assurée par les femmes. C’est pourquoi on ne peut pas parler d’innovation sans y associer les femmes. Mon message, c’est qu’il faut qu’il y ait plus de femmes qui s’engagent en politique. Mais des femmes qui se battent pour la parité et qu’une fois élues se taisent, ce n’est pas sérieux. Il y a des femmes à l’Assemblée nationale qui, s’il n’y avait pas cette loi, n’auraient jamais été là-bas. Mais depuis qu’elles y sont qu’est-ce qu’elles ont pu obtenir ? Est-ce qu’il y a des lois spécifiques renforçant le statut de la femme sénégalaise ? Le nombre de viols, de cas d’inceste ou de violence conjugale a augmenté. Pourtant, on n’a pas légiféré sur ces questions.

A vous entendre parler, cette loi n’a pas changé grand-chose sur la condition de la femme sénégalaise ?
Du tout. Je crois qu’elle a permis à certaines femmes d’avoir des postes mais, concrètement, elle n’a rien changé. C’est un processus sociétal qui va prendre du temps. La loi est là, mais les mentalités n’ont pas changé. J’ai l’habitude de citer l’exemple de Thomas Sankara qui, à chaque fois qu’il nommait un homme, son second était une femme et vice versa. Cette pratique est restée de sorte qu’on a beaucoup plus de femmes dans les hautes fonctions au Burkina Faso qu’au Sénégal alors que nos ressources humaines sont nettement plus qualifiées. Donc, il faut d’abord une prise de conscience des décideurs. Ce qui va prendre du temps d’autant plus qu’il y a un essoufflement du mouvement féminin. De sorte que cette loi est restée comme une lubie d’un président qui cherchait quelque chose.

L’un des reproches qu’on fait généralement au mouvement féminin, c’est de dire que c’est une affaire  de femmes intellectuelles qui ne représentent pas les aspirations de la femme sénégalaise, notamment celle au foyer. Que répondez-vous ?
Ça, c’est normal parce que tout mouvement social est parti des intellectuels exactement comme cela a été le cas lors de la décolonisation. Le mouvement, dans sa théorisation, dans sa conceptualisation, sera toujours porté par l’élite. Maintenant, il faut après un travail de sensibilisation et de conscientisation. Et c’est cela la grande faiblesse du mouvement féministe aujourd’hui. Avant, il y avait des centaines de coordinations de mouvements féminins. Ce qui n’existe plus. Actuellement, on ne fait plus que du féminisme alimentaire. Si aujourd’hui le 8 mars a été accepté au Sénégal c’est grâce au mouvement « Yeewu Yeewi » qu’on avait créé dans les années 1980.

Certains pensent que la parité menace l’unité de la famille…
Je ne le crois pas. Je suis mère de famille et militante féminine et je parviens à concilier parfaitement les deux. Les gens pensaient la même chose quand les Nations Unies ont décrété 1975 année internationale de la femme. Il faut éviter de voir le mouvement pour l’égalité comme un antagonisme entre homme et femme. La libération de la femme ne signifie pas éclatement de la famille. Au contraire, investir sur la femme, c’est investir sur la famille, c’est aller vers l’émergence (...).

Considérant votre longue expérience de militantisme féminin, le Sénégal a-t-il avancé en matière d’égalité homme-femme ?
Je crois qu’on a eu des avancées majeures. D’abord, on a été l’un des premiers pays d’Afrique à avoir un Code de la famille. Et ça c’est une avancée extraordinaire parce que tant que les pratiques ne sont pas codifiées on n’est pas protégé ; et le code a été amélioré. Ensuite, il y a par exemple des avancées en matière de contraception grâce au mouvement féministe. Les conditions de santé et d’hygiène des femmes ont aussi été améliorées. Maintenant ce qui reste, c’est dans les mentalités.

Dans les années 1980-1990 et même au début des années 2000 on avait l’impression que cela avançait. Il y a aussi un problème générationnel dans le mouvement féministe. Il faut que la nouvelle génération s’organise et pose des revendications qui lui sont spécifiques. Ce qui manque aujourd’hui, c’est un mouvement féministe porteur des préoccupations de la génération actuelle parce qu’une société ne change que quand elle est interpellée.

Propos recueillis par Seydou K
source:http://www.lesoleil.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=37047:journee-internationale-droits-des-femmes-au-senegal-conquetes-et-resistances&catid=78:a-la-une&Itemid=255
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