SÉNÉGAL: PARITE ABSOLUE, AUTORITE PARENTALE… Le défi de l'effectivité des acquis des femmes
Écrit par SENETOILE NEWS
Les femmes sénégalaises gagnent de plus en plus du terrain dans leur combat de tous les jours pour l'effectivité de leur présence dans toutes les sphères de décision ou presque. En plus des nominations à des postes de responsabilité, la révision du Code de la famille qui consacre l'autorité parentale, l'adoption de la loi permettant à la femme de transmettre la nationalité à son mari et ses enfants et celle sur la parité constituent, entre autres, les dernières grandes conquêtes. Toutefois, pour l'effectivité de l'application de cette dernière, elles peinent encore à marquer entièrement leur territoire.
Ce samedi 8 mars, le monde entier célèbre la femme à l'occasion de la Journée internationale qui leur est dédiée. Au Sénégal, elle revêt un cachet particulier car célébrée sous forme de «quinzaine de la femme», histoire de permettre aux autorités de faire le tour des régions intérieures pour s’enquérir des situations et conditions de cette couche défavorisée de la population.
Occasion pour nous de revenir sur quelques quêtes et conquêtes de la gent féminine, les acquis dont l’application peine encore à être effective, le long chemin qu’il reste à parcourir. A l’instar des précédents régimes, notamment celui de l’ancien Président Me Abdoulaye Wade, qui a élevé pour la première fois une femme au rang de chef du gouvernement (Premier ministre), en la personne de Mme Mame Madior Boye en 2001, son successeur Macky Sall, prolonge la série des premières pour les femmes Sénégalaises dans l’administration. L’histoire retiendra que, sous son magistère Mme Anna Sémou Faye a été la première femme patronne de la police nationale.
La nouvelle Directrice générale de la Police nationale, le Commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle Mme Anna Sémou Faye est nommée à ce poste en juillet 2013 dernier suite au scandale de trafic de drogue qui a secoué la police, emportant le patron de l’institution le commissaire Abdoulaye Niang, alors cité dans l’affaire. Cette nomination était perçue par nombre d’observateurs, comme le sacre d’une «Dame de Fer» au parcours sans faute, qui a gravi courageusement et patiemment tous les échelons jusqu’à parvenir au sommet de la hiérarchie.
Egalement, au sein de l’administration territoriale, la première femme préfet sous le magistère de Wade est devenue la première femme gouverneur de région du Sénégal. Mme Viviane Laure Elisabeth Bampassy Dos Santos, précédemment préfet des départements de Guédiawaye et de Pikine, puis Secrétaire générale du ministère de la Jeunesse, de l'Emploi et de la Promotion des Valeurs Citoyennes, depuis janviers 2013, s’est vu confier les charges de gouverneur de la région de Fatick à l’issue de la réunion du Conseil des ministres du 10 octobre 2013 par Macky Sall. L’histoire retiendra aussi que, première femme préfet et première femme à accéder au poste de gouverneur, Viviane Bampassy est un symbole de la persévérance féminine.
Autre domaine où la femme est à l’honneur, l’Ofnac. Après l’Inspection générale d’Etat qu’elle a dirigé de main de maître, Nafi Ngom Keïta s’est vu bombarder par le président de la République patronne de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption en juillet 2013 dernier. Et la liste est loin d’être exhaustive en ce qui concerne les nominations.
Macky permet aux femmes de transmettre la nationalité…
Au chapitre des récentes avancées toujours, les femmes peuvent désormais transmettre la nationalité à leurs maris et enfants. Déjà le vendredi 28 juin 2013 dernier, les députés ont adopté vendredi à l'unanimité un projet de loi, modifiant la loi N°61 du 7 mars 1961, autorisant les femmes sénégalaises à octroyer la nationalité à leurs époux et à leurs enfants de nationalité étrangère. Ce projet de loi modifiant le Code de la nationalité a été adopté lors d'un vote sans débat par l’ensemble des députés présents en séance plénière.
Selon un rapport de la commission des lois, les nouvelles dispositions proposent de «reconnaître strictement les mêmes droits au père sénégalais et à la mère sénégalaise». La loi dit: «est Sénégalais tout enfant qui est né de parents sénégalais, qu’il s’agisse d’un père ou d’une mère. Dans l’ancien texte, seuls les pères pouvaient transmettre la nationalité à leurs enfants». Toutefois, le texte prévoit certains garde-fous pour couper court aux agissements de personnes malintentionnées.
Selon Mme Aminata Touré, alors ministre de la Justice qui a porté la loi à l’hémicycle, l'une des conditions requises «impose (aux prétendants) de rester dans les liens du mariage pendant cinq ans, avant d’obtenir automatiquement la nationalité sénégalaise.»
Auparavant, le Code de la famille avait été modifié. Les nouvelles dispositions consacrant, entre autres, l’autorité parentale à la place de la puissance paternelle, permet à la conjointe (salariée) de prendre en charge son époux et ses enfants. N’empêche, ce projet de loi modifiant la loi de juin 1972 portant Code de la famille au Sénégal, contient encore quelques incohérences et insuffisances, malgré les changements et innovations qu'il apporte, selon des experts et représentants de la société civile.
…et Macky fit moins que Wade pour l’application de la parité
Dans le même sillage, la Loi n°2010-11 du 28 mai 2010 instituant la parité absolue Homme-Femme, histoire de rendre effective (l’application) de la Constitution de 2001 favorisant «l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats et aux fonctions» électives. Mieux, la Loi votée par l’Assemblée nationale en sa séance du vendredi 14 mai 2010, le Sénat en sa séance du mercredi 19 mai 2010 et promulgué le président de la République le 28 du même mois, stipule : «Article premier. - La parité absolue homme-femme est instituée au Sénégal dans toutes les institutions totalement ou partiellement électives. Art. 2. - Les listes de candidatures sont alternativement composées de personnes des deux sexes. Lorsque le nombre de membres est impair, la parité s’applique au nombre pair immédiatement inférieur. Les listes de candidatures doivent être conformes aux dispositions ci-dessus sous peine d’irrecevabilité».
A l’époque, le ministre la Justice, El Hadji Amadou Sall, qui défendait le projet de loi et toutes les associations et structures regroupant des femmes se réjouissaient du fait que cette loi était une «grande avancée démocratique». Mais deux ans après nombre de femmes politiques et de la société civile étaient déçues quant à son application effective à l’Assemblée nationale. En effet, même si, pour la première fois, avec 64 femmes députées élues à la 12ième législature, «le Sénégal a déjà donné le ton au niveau du Continent en se plaçant deuxième derrière le Rwanda sur la représentativité des femmes dans les instances de décision», il y a eu des grincements de dents. Lors du vote du bureau du parlement en 2012 et de son renouvellement en octobre 2013, des députés comme Aïda Mbodji et Ellen Tine ont dénoncé la non-application de la parité absolue. «La loi sur la parité ne vise pas seulement l’entrée des femmes à l’Assemblée nationale, mais aussi l’ensemble des institutions des instances électives dont le bureau de l’Assemblée nationale. La parité doit s’appliquer dans toute sa rigueur».
Le député-maire de Bambey mettra au défi le président Macky Sall invité à ne pas faire moins que son prédécesseur dans ce domaine. Elles seront rejointes dans ce combat par la société civile qui a pris à témoin l’opinion. «Nous voulons prendre à témoin l’opinion nationale et internationale, pour manifester notre désapprobation pour la non-application de la loi sur la parité, lors du renouvellement du bureau de l’Asemblée nationale, le vendredi 11 octobre 2013», avait martelé Fatou Sow Sarr, présidente du Caucus des femmes leaders du Sénégal, en réaction au renouvellement du bureau de l'Assemblée nationale.
En attendant l’Acte III de la décentralisation
Même si notre pays n’est pas prêt à porter une femme à la magistrature suprême, partant des résultats de la présidentielle du 26 février 2012 qui a vu, pour la première fois dans l'histoire du Sénégal indépendant, la candidature de femmes à l'élection présidentielle (les deux seules candidates, parmi les 14, à briguer la magistrature suprême n'ont récolté que 0,31% des suffrages valablement exprimés), elles continuent de gagner du terrain pour ce qui est des postes électifs. En attendant d’occuper les fonctions de présidente de département (la région étant pour le moment supprimé par l’acte III de la décentralisation) lors des prochaines locales, elles peuvent se contenter des postes de maire, surtout de communes d’arrondissement à Dakar, de quelques villes intérieures et de présidente de conseil rural.
Histoire de montrer que le combat est loin d’être gagné, le chemin reste encore long et parsemé d’embuches.
SOURCE: http://www.sudonline.sn/le-defi-de-leffectivite-des-acquis-des-femmes_a_17855.html
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