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Le procès opposant l’État du Sénégal à l’édile de Dakar, Khalifa Sall, et coaccusés dans l’affaire dite de la caisse d’avance de la mairie a repris hier, mardi 23 janvier après son renvoi en début de mois. Pour ce premier jour du procès, les différends acteurs, notamment le procureur de la République, l’agent judiciaire de l’État et ses avocats, ainsi que les conseils de la défense, sans oublier les conseils de la ville de Dakar se sont relayés à la barre pour plaider pour ou contre la constitution de partie civile des conseillers de la collectivité de Dakar.
C’est l’agent judiciaire de l’État, en la personne d’Antoine Diome, qui a en premier lieu ouvert les hostilités en plaidant pour la non-constitution de partie civile de la municipalité de Dakar. Pour lui, l’État ne conteste pas qu’une partie quelconque se constitue partie civile, mais dès lors que le préfet a demandé aux Conseillers de la ville de relire la délibération faite le 15 janvier dernier, au vue de se constituer partie civile, on ne peut pas à l’état actuel admettre la présence de la ville de Dakar à la barre. Cela, à cause de certains manquements notés dans ladite délibération, à savoir le manque d’invocation des motifs relatifs au conflit d’intérêt ainsi que le montant du préjudice subi dans cette affaire.
Convoquant ainsi l’article 243 du Code des collectivités territoriales, il a indiqué que la délibération ne peut être exécutoire dans la mesure où il y a un caractère suspensif, à cause de la demande de relecture formulée par le préfet. Qui plus est, selon lui, la délibération ne peut être exécutoire que dans un délai de 15 jours après accusé de réception de la part du préfet. Il a ainsi fait constater que la délibération dudit conseil a été faite le 15 janvier et qu’au 22, le préfet a demandé une relecture. Ce qui ne permet pas, à son avis, au Conseil municipal de se constituer partie civile car ne respectant pas les délais. L’agent judiciaire de l’État a été formel qu’il n’y a pas de place pour une interprétation et tant que la délibération n’est pas exécutoire, il est impossible d’accepter la présence d’un représentant du Conseil municipal. Et sur la constitution de Me El Hadj Diouf comme avocat de la ville de Dakar, Antoine Diome précise qu’il ne peut pas être récusé comme avocat de la défense en premier lieu, pour avoir été avocat de l’État en moins de 3 ans et vouloir après se constituer pour la ville de Dakar. Pour cela, il trouve qu’à l’État actuel, le conseil ne peut pas se constituer
Abondant dans le même sens, le procureur général de la République, Serigne Bassirou Guèye a évoqué l’article 2 du Code des procédures pénales qui dit que ne peut se constituer partie civile que les personnes qui estiment avoir subi un préjudice. Donc, pour lui, la volonté du conseil municipal de Dakar de se constituer partie civile prouverait qu’il admettrait qu’il y a une infraction. Autre argument développé par le procureur, il estime que c’est le maire qui représente la collectivité locale et non les conseillers. Pour lui, seul le maire peut représenter la ville en justice. Ou à défaut, il faut un décret du maire pour déléguer ce pouvoir à une tierce personne. Et dans ce cas d’espèce, il soutient qu’il n’y a pas une délégation du maire.
LA DEFENSE DE Khalifa Sall PLAIDE POUR LA VILLE DE DAKAR
Ces arguments ont été battus en brèche par la défense qui plaide pour la constitution de partie civile de la ville de Dakar dans cette affaire. En effet, Me Khassimou Touré a soutenu que la ville de Dakar a une personnalité morale et juridique qui lui est propre et différente de celle du maire. Réfutant l’argument selon lequel le Conseil municipal ne peut représenter la ville en justice, il a indiqué que l’article 229 du Code des collectivités locales permet aux conseillers de discuter des actions à intenter pour le compte de la collectivité. Donc, il estime que dans un débat qui concerne la ville de Dakar, on essaie d’écarter la ville elle-même. Pour ceux qui soutiennent que la ville de Dakar n’a subi aucun préjudice, l’avocat rétorquera que la ville de Dakar peut prétendre avoir subi un préjudice moral, ce qui est plus important à ses yeux que celui matériel.
Dans la même dynamique, les avocats de la défense ont estimé que l’article 243 du code des collectivités locales a explicitement énuméré les délibérations qui ont un caractère suspensif si toutefois le préfet demande une relecture. Sur ce point, ils trouvent que la constitution de partie civile de la ville n’en fait pas partie. Donc, pour eux, en demandant une relecture de la délibération du conseil, c’est une manière déguisée de refuser d’aller sur le fond car cela voudrait dire que le juge doit attendre que le Conseil municipal procède à une relecture de la délibération avant d’accepter sa constitution de partie civile. Encore que, selon eux, il n’est pas question que des dispositions administratives fassent injonction à la Cour. Ils estiment même que c’est à la Cour suprême de statuer sur la légalité de l’acte du conseil, si le préfet pense que la procédure n’est pas respectée. C’est pour cela d’ailleurs qu’ils soutiennent que le juge détient l’entier pouvoir de constater la légalité de la délibération, même s’ils pensent par ailleurs que le Conseil de la ville n’avait pas besoin d’une délibération pour se faire représenter par quelqu’un qui peut recruter des avocats pour le défendre. Pour ce qui est de la constitution de Me El Hadj Diouf, Me Ciré Clédor Ly a laissé entendre qu’aucune loi n’interdit à ce dernier de se constituer pour le compte de la ville de Dakar.
ME EL HADJ DIOUF SE FAIT SON PROPRE AVOCAT
Parlant au nom de la ville de Dakar, Me El Hadji Diouf a soutenu que la constitution de partie civile est recevable pour tout chef de dommage, aussi bien matériel que moral. Déplorant ainsi que l’Agent judiciaire de l’État et le procureur de la République débattent du fond du dossier alors qu’on en est qu’aux exceptions, il a indiqué que l’État est obstiné à obtenir des têtes au point de perdre la tête. Accusant le préfet de connivence avec l’État, il a dit que l’État a instruit au préfet de demander une relecture de la délibération pour faire trainer le dossier.
Concernant ladite requête du préfet, il a informé d’ailleurs que la première adjointe au maire, Mme Wardini, a notifié au préfet qu’une relecture ne se fera pas et que ce n’est pas aux Conseillers de déterminer le préjudice subi, mais à la Cour. Pour lui, l’argent judiciaire de l’État s’est limité à lire l’article 171 du code des collectivités locales au moment où l’article 175 du même code permet à Mme Wardini de représenter le maire.
Revenant sur le caractère suspensif de la demande de relecture du préfet, Me Diouf a fait appel aux articles 244 et 245 du Code des collectivités locales pour réfuter les arguments de l’Etat et du procureur. Pour lui, le premier article cité dit simplement que les actes sont exécutoires après notification du préfet et le second permet aux conseillers de la ville de ne pas soumettre leur délibération de représentation en partie civile, car l’article 245 ne fait pas état de ce cas de figure. Pour autant de faits, il a dit avoir compris que l’agent judiciaire de l’Etat qui respecte selon lui les consignes de l’Etat, veuille défendre coûte que coûte le diable. Pour conclure, la robe noire de la collectivité de Dakar a rappelé que Me Baboucar Cissé était avocat de Bibo Bourgi, dans l’affaire Karim Wade contre l’Etat et qu’il a été recruté par l’Etat sur ce dossier de la mairie de Dakar. Donc, il trouve normal que lui qui a été avocat de l’Etat dans le même procès puisse se faire recruter par la ville de Dakar.
LES AVOCATS DE L’ETAT REVIENNENT A LA CHARGE
La réplique des avocats de l’État ne s’est pas fait attendre. Pour Me Baboucar Cissé, c’est la première fois qu’un prévenu défend la constitution de partie civile d’un tiers contre sa personne. Cela, d’autant plus que, selon lui, 9 avocats de la défense ont défendu la constitution de partie civile de la ville au moment où seul Me El Hadj Diouf, qui n’est pas le seul conseil de la ville de Dakar, a plaidé seul pour sa constitution. Ce qui montre, à son avis, qu’il y a connivence entre les deux parties. Poursuivant, il a indiqué que ce n’est pas à Mme Wardini de répondre au préfet, mais c’est au Conseil de procéder à la relecture de la délibération. Qui plus est, pour lui, si la ville de Dakar avait subi un préjudice, elle se serait constituée partie civile depuis mars dernier. Dans la même mouvance, Me Bitèye a tenu à rappeler lui que devant la chambre d’accusation, la défense de Khalifa Sall avait indiqué que le Conseil dit ne pas constater de manquants dans ses comptes. Donc, pour eux, personne ne peut se constituer partie civile s’il estime n’avoir pas subi de préjudice.
ECHOS
LAMOTTE RAPPELLE A L’ORDRE ME DIOUF
En voulant dénoncer la double plaidoirie de l’Agent judiciaire de l’Etat, Antoine Diome et les avocats de l’Etat, dans les exceptions soulevées, Me El Hadj Diouf, avocat de la ville de Dakar, qui a vociféré de toutes ses forces, s’est vu recadrer par le président du tribunal. En effet, Malick Lamotte qui l’a laissé faire à sa guise, lui a tout juste demandé après s’il était nécessaire de faire autant de bruit pour se faire entendre. Il a ainsi estimé que le «spectacle est désolant et humiliant» et que la Cour ne méritait pas cela. Non sans lui rappeler que «la police de l’audience revient à la Cour».
ME KHOUREÏCHI BA A HORREUR DES GENDARMES ENCAGOULES
Décidément, la présence des forces de l’ordre indispose certaines des robes noires. En effet, lors de l’audience d’hier, un des conseils de la défense s’est offusqué de la présence d’un agent de la sécurité encagoulé tout près du prétoire. Pour lui, «on ne peut pas préjuger de la réaction de ces gens qui sont des militaires», tout en précisant qu’il n’avait peur de rien. Mais, il a préféré que les gendarmes, chargés de veiller à la sécurité des prévenus, se limitent à surveiller ces derniers. Une requête qui semble ne pas tomber dans l’oreille d’un sourd, dès lors qu’après la pause, le préposé à la sécurité qui était devant le prétoire a été déplacé.
LES PARTISANS DE Khalifa Sall ENVAHISSENT LA SALLE 4
Le tribunal de Dakar a refusé du monde hier, avec es partisans du maire venus en grand nombre. Pour entrer dans le tribunal et également à la salle 4 où se tenait le procès, il fallait non seulement suivre une longue queue, mais aussi montrer carte blanche pour les reporters. Avant la reprise de la pause, vers 15h, les partisans du maire ont entonné des chansons à l’arrivée de leur leader. Comme si cela ne suffisait pas, Me El Hadj Diouf s’est emparé du micro pour leur dire que tout sera tiré au clair. Ce qui a à nouveau ravivé les cris et chansons, obligeant les préposés à la sécurité à ordonner le silence de la salle.
RECEVABILITE DE SA CONSTITUTION EN PARTIE CIVILE : La défense récuse l’Etat
A l’image de l’agent judiciaire de l’Etat qui demande l’irrecevabilité de la ville de Dakar en tant que partie civile, les avocats de la défense ont apporté eux aussi la réplique en demandant à leur tour que la constitution de l’Etat soit déclarée irrecevable. Pour Me Ciré Clédor Ly de la défense, l’Etat veut mettre en avant le délit de détournement de deniers publics pour entrer en infraction dans le procès. Estimant que la ville de Dakar a un patrimoine distinct de celui de l’Etat, il a soutenu mordicus que les fonds en question ne proviennent pas de l’Etat. Venant prêter main forte à Me Ly, Me Demba Ciré Bathily a fait remarquer que l’Acte III de la décentralisation confère aux collectivités locales la libre administration et que pour rien l’Etat ne doit intervenir dans les affaires concernant les collectivités. Mieux, il est d’avis que l’article 2 du Code des procédures pénales dit qu’il faut que la personne qui prétend se constituer partie civile subisse un impact direct. Donc, à son avis, s’il doit y avoir préjudice subi, le Conseil de Dakar est la seule instance à même d’en juger. Pour sa part, Me Doudou Ndoye dira que la loi qui crée l’agence judiciaire de l’Etat limite les interventions de cette dernière. Pour lui, les intérêts de l’Etat sont défendus par l’agent judiciaire de l’Etat sauf en matière démoniale, en matière d’impôt et de douane, mais aussi dans les matières où des lois disent autre chose. Ce qui est le cas, à son avis, pour le Code des collectivités locales.
source:http://www.sudonline.sn/la-constitution-de-partie-civile-de-la-mairie-tient-en-haleine-la-cour_a_38030.html