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Avec seulement cinq candidats, un processus électoral fortement controversé et une absence remarquée des dinosaures politiques ainsi que des femmes, la présidentielle de 2019 est partie pour être le scrutin des exceptions.
Sur la ligne de départ de la prochaine présidentielle, il n'y a finalement que cinq athlètes : Macky Sall, Issa Sall, Ousmane Sonko, Idrissa Seck et Madické Niang, soit deux rescapés sur les 14 candidats de l'élection de 2012. Le scrutin du 24 février 2019 est parti pour être celui des exceptions.
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Première exception : le nombre de prétendants. En effet, il faut remonter 30 ans dans l'histoire électorale du Sénégal (1988) pour avoir un nombre aussi réduit de candidats. Pourtant, ils étaient près d'une centaine à avoir manifesté leur volonté d'être dans la course. Au finish, seuls 27 dossiers ont été approuvés. Et après le rabot du Conseil constitutionnel, les partants se comptent sur le doigt d'une main, comme l'avait prédit le Premier ministre Mahammad Dionne.
La faute essentiellement au parrainage. Une loi considérée par la majorité présidentielle comme un "filtre républicain" et assimilée par l'opposition, à un "piège" du pouvoir échaffaudé pour éliminer la majorité des candidats et ainsi donner à Macky Sall le maximum de chance d'avoir un second mandat.
Deuxième exception : c'est la première fois depuis 1978 qu'une présidentielle est organisée sans la participation des dinosaures politiques tels qu'Abdoulaye Wade, Abdoulaye Bathily, Landing Savané, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng. Une situation qui traduit autant du jeunisme ambiant que de la recomposition de la classe politique.
"Ces élections sont le moment de liquidation, de sortie de la scène politique d'une ancienne aristocratie politique qui a fait la pluie et le beau temps, constate le journaliste et analyste politique, Mame Less Camara. Ces gens se sont complètement essoufflés et ont dépassé l'âge de l'aventure et de l'innovation. Mais cette ancienne aristocratie ne va pas sortir comme ça, elle va essayer de s'accrocher moyennant des services qu'elle peut rendre, notamment au pouvoir en place."
Ainsi, en lieu et place des partis historiques, ce sont donc des formations politiques nées de la dernière pluie, après 2000, qui sont en lice. Porté sur les fonds baptismaux le 3 février 1998, le Parti de l'unité et du rassemblement (PUR) est l'exception qui confirme la règle. Encore que la plupart des Sénégalais pensent que le Pur est né en 2017, année où il s'est révélé aux législatives en se classant troisième avec trois sièges dans son escarcelle.
Troisième particularité : l'absence des femmes. Et ce n'est certainement pas parce qu'elles ne voulaient pas être présidentes de la République. Si Amsatou Sow Sidibé, Aïssata Tall Sall, Aïda Mbodj et Cie ne sont pas de la course, c'est parce qu'elles ont été recalées par le Conseil constitutionnel pour n'avoir pas recueilli un nombre suffisant de parrains.
"Cela montre que la population réserve les parrainages aux hommes, décrypte Mame Less Camara. C'est injuste, mais comme disait l'autre : ‘on ne peut pas sauter par-dessus son ombre'. C'est notre niveau politique réel, c'est l'acceptation d'une supériorité politique des hommes sur les femmes."
Par ailleurs, cette élection se déroule dans un contexte politique très tendu. Depuis 1992, un consensus a toujours régné entre les acteurs au sujet du processus électoral. Cette année par contre, presque tous les points ont fait l'objet de polémiques et creusé le fossé entre le pouvoir et l'opposition.
Outre le parrainage, les deux principales revendications de l'opposition restent le départ d'Aly Ngouille Ndiaye du ministère de l'Intérieur, du moins sa mise à l'écart pour l'organisation des élections, et la mise à sa disposition du fichier électoral. Sans compter l'invalidation, pour cause de condamnation par la justice, des candidatures de Khalifa Sall et de Karim Wade.
"Voilà cinquante ans que je participe au combat politique au Sénégal, et c'est la première fois que l'on fait écarter par la justice des candidats à la présidentielle", regrettait sur Seneweb Pr Abdoulaye Bathily, supposé allié du Président Sall, qui semble avoir pris ses distances avec le Palais.
Tous ces facteurs constituent un cocktail détonant. Ils font planer de gros nuages sur la campagne électorale, sur le scrutin et même sur la période post-électorale. "Nous allons vers une échéance très tendue, prédit Khalifa Mbodj, secrétaire permanent du Pur. Le pouvoir ne cesse de poser les germes d'une vive tension. Le contexte électoral et postélectoral sera très chargé. Les résultats ne seront pas acceptés si Aly Ngouille Ndiaye organise les élections."
Du côté du pouvoir, on considère que tout est fait selon les règles de l'art. Et que, par conséquent, "force restera à la loi". Comprendre : la présidentielle se tiendra à date échue, n'en déplaise à l'opposition. "Il y aura des élections, le 24 février 2019, malgré les menaces d'une certaine frange de l'opposition qui joue à se faire peur", martèle le ministre de l'Intérieur.
Au vu des positions des deux camps (pouvoir et opposition), on ne peut manquer de s'interroger sur les vraies motivations des uns et des autres. Mame Less Camara croit détenir la réponse : "Ça aurait pu être une élection normale, mais la découverte du pétrole, du gaz et du zircon surdétermine, c'est-à-dire apporte une détermination supplémentaire, à l'enjeu ordinaire des élections en 2019 (présidentielle et locales)."
Selon l'analyste politique, le Sénégal a une sorte de bourgeoisie en gestation qui n'a pas encore les moyens financiers de ses ambitions et qui comptent beaucoup sur les nouvelles richesses du pays pour se positionner. "Ces élections là, relève-t-il, sont le point d'articulation d'un passage d'une bourgeoisie nominale à une bourgeoisie agissante."
En même temps, souligne le formateur au Cesti, c'est l'élection où il sera beaucoup question d'éthique et de morale, la "marque d'entrée" de Sonko et du Pur sur la scène politique : "Le discours de Sonko est fondé pour l'essentiel sur la morale et l'honnêteté. C'est pourquoi le Président Sall a besoin d'une sorte de caution qu'il va chercher auprès des chefs religieux, en inaugurant des mosquées. Mais l'obstacle majeur reste Touba où il n'a pas su remplacer Abdoulaye Wade dans l'implantation politique et le développement des relations personnelles."
QUI EST QUI?
Macky Sall. S'il a l'avantage du "Président sortant" et peu s'appuyer sur ses réalisations et sa grande coalition (Benno), il devra tout de même faire face à ses promesses non tenues et la conjoncture économique jugée difficile.
Idrissa Seck. Il a maintenant l'expérience de la présidentielle. Cependant, il ne cesse de perdre son électorat depuis 2007.
Ousmane Sonko. Le leader de Pastef a su profiter d'un vide dans l'opposition et d'une adversité du pouvoir pour se positionner en principal challenger de Macky Sall. Il lui reste, cependant, à prouver qu'il dispose d'un appareil bien implanté dans le pays pour lui servir de levier.
Issa Sall. Sa formation politique, le Pur, a impressionné par son sens de l'organisation lors des Législatives de 2017. Toutefois, il lui est reproché d'être peu connu et pas très charismatique, sans compter la perception de parti-dahira qu'en ont certains Sénégalais.
Madické Niang. Il pourra sans doute compter sur son électorat de Touba et une partie du PDS. Mais il est loin d'être parmi les candidats les plus attendus.
Auteur: Babacar WILLANE - Seneweb.com
source: http://www.seneweb.com/news/Politique/presidentielle-2019-j-27-le-scrutin-des-_n_271914.html